Parce qu'il a pris une
décision qui aurait pu mettre en péril l'avenir de la compagnie de
fret maritime pour laquelle il travaille depuis de nombreuses années,
l'un de ses cadres supérieurs se voit notifié son licenciement pur
et simple. Pour Franck, c'est tout un monde qui s’effondre.
Coupable d'avoir demandé au capitaine d'un navire de fret de se
débarrasser en pleine mer d'un clandestin malade qui s'est introduit
dans les cales, l'information fuit de telle manière qu'il ne
parvient même pas à obtenir un emploi de la part de la concurrence.
D'abord incapable d'avouer à ses proches qu'il n'a plus d'emploi,
Franck cache derrière le masque de l'inflexibilité le désarroi qui
le taraude...
L'acteur Olivier Gourmet
est cet homme qui, arraché au monde du travail pour avoir fait le
mauvais choix va heureusement pouvoir compter sur ses proches. Son
épouse d'abord, puis ses enfants. Le film du scénariste et
réalisateur suisse Antoine Russbach dresse le sinistre portrait du
capitalisme. Du monde du travail et de ses impératifs. Car comme on
le découvrira plus tard, Franck est victime en réalité de son
ancienneté. En coûtant donc beaucoup plus cher à ses employeurs
que n'importe quel autre employé, c'est donc pour de fausses raisons
qu'il est mis à la porte. Le cinéaste éprouve le scénario qu'il a
écrit lui-même à quatre mains en compagnie d'Emmanuel Marre. En
résulte une œuvre d'une très grande maîtrise et surtout, d'une
fascinante sobriété.
Presque une austérité,
que l'on doit bien sûr à la magistrale interprétation d'Olivier
Gourmet qui tout en retenue incarne un personnage acceptant presque
sans broncher son nouveau statut. Antoine Russbach montre qu'en
matière d'entreprises, rien ne repose jamais sur la morale mais sur
les profits qu'elles peuvent récolter. Personnage véritablement
ambigu, une très pertinente scène de questionnaire réalisée par
une psychologue du travail permet d'en apprendre davantage sur cet
homme qui parle peu, montre rarement ses émotions et qui au final,
est dans un premier temps le reflet de l'entreprise pour laquelle il
a sacrifié une partie de son existence.
À sujet délicat,
approche délicate. Sombre mais jamais véritablement austère, Ceux
qui Travaillent est
de ces œuvres indispensables qui à l'image de La
loi du Marché
et En Guerre,
tout deux réalisés par Stéphane Brizé et interprétés par
l'immense Vincent Lindon, décortiquent avec un sens aigu du réalisme
et une intelligence rare le cynisme d'un monde dans lequel nous
vivons tous. Une œuvre qui a le mérite de nous ouvrir les yeux.
Imparable !
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