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jeudi 5 septembre 2019

Raoul taburin de Pierre Godeau (2019) - ★★★★☆☆☆☆☆☆



Raoul Taburin ou l'indicible ennui... Je n'ai peut-être pas la moralité assez légère pour me laisser bercer par la poésie de Sempé même si je préfère infiniment la bande-dessinée à son adaptation cinématographique mais merde, quoi. Je m'attendais à rêver comme à l'époque où Jean-Pierre Jeunet et Marc Caro nous concoctaient d'admirables petits chefs-d’œuvre (en y repensant, ceux-ci n'étaient finalement pas si nombreux). Comment oublier en effet le délirant post-apocalyptique Delicatessen ? Et même sans Marc Caro qui allait se perdre bientôt tout seul avec un Dante 01 carrément raté, Jean-Pierre Jeunet continuerait à avancer dans le bon sens avec le mignon, coloré et poétique Le Fabuleux destin d'Amélie Poulain, ratant parfois le coche (l'ennuyeux Un Long Dimanche de Fiançailles), tout en demeurant l'auteur de quelques soubresauts artistiques plus ou moins convaincants (Micmacs à Tire-Larigot)...

Trompeuse impression que donne l'aperçu de l'affiche de Raoul Taburin qui forcément évoque le cinéma hyper-inventif et coloré du duo cité ci-dessus. Trompeuse car en réalité, le film de Pierre Godeau (auteur de Juliette en 2013 et de Éperdument en 2016) pose un regard passéiste qui sied peut-être au deux premières adaptations de Sempé, que l'artiste lui-même dénigre curieusement (Le Petit Nicolas et Les Vacances du Petit Nicolas, tous deux sortis en salle respectivement en 2009 et 2014 et réalisés par le cinéaste Laurent Tirard), mais surtout pas à cette histoire tellement sucrée, plate et niaise sur grand écran qu'il faut avoir l'âme d'un tout petit enfant pour supporter le spectacle. Un spectacle qui d'ailleurs n'offre pas grand chose en terme d'intrigue car si sur papier, l'histoire de ce marchand et réparateur de bicyclette a des chances d'être attractive de part le talent de dessinateur de son auteur, sur grand écran, l'ampleur du vide scénaristique est vertigineuse.

Il faut alors se raccrocher aux quelques broutilles qu'il nous reste pour ne pas mettre rapidement un terme à ce calvaire qui se décompose en plusieurs actes dont le premier dure au delà de la demi-heure, jusqu'à ce qu'enfin le héros épouse la jolie Madeleine. On pense alors que le film va enfin pouvoir démarrer, nous offrir une histoire digne de ce nom. Pourtant, la principale préoccupation de Raoul Taburin demeurera la même jusqu'à la fin : à savoir le secret qui le lie au fait qu'il ne sache pas faire de vélo. Tu parles d'une intrigue ! Et comme l'on est bon joueur, plutôt patient et admirateur de l'acteur belge, c'est pour Benoît Poelvoorde que l'on reste encore devant l'écran même si la voix-off a tendance à se révéler trop tenace, trop présente. Ce sera par contre sans doute moins le cas pour Edward Baer qui, comme à son habitude fait du... Edward Baer et se révèle aux abonnés absents lorsque lui est demandé de mimer devant la caméra une émotion dont il est dépourvu. L'excellent Vincent Desagnat est dirigé comme un pantin indifférent au spectacle qui se déroule autour de lui mais heureusement, Suzanne Clément, son charme et ses robes estivales sont là pour nous retenir, allez, encore quelques minutes de plus. Suffisamment pour tenir jusqu'au générique de fin ? Pas sûr. Sorti sur les écrans il y a un peu plus de quatre mois, Raoul Taburin a déjà pris un très sérieux coup de vieux. Dommage pour Sempé, dommage pour Benoît Poelvoorde, et dommage pour le réalisateur...

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