Comme
chez bon nombre de cinéphiles et de cinéphages je l'imagine, la
découverte de Duel,
le second long-métrage du réalisateur américain Steven Spielberg
après un Fireflight
signé en 1964 et un certain nombre de participations à diverses séries
télévisées, fut un véritable choc. Surtout qu'à l'époque, ça
ne se bousculait pas tant que ça dans le registre de la peur ou de
l'angoisse bien réelles. De celles qui vous donnent des sueurs froides dans
le dos et vous fait sursauter à chaque bruit suspect arrivant par
derrière. Trop jeune pour le découvrir à l'époque de sa sortie en
France en mars 1973, Duel
fut avant de sortir en salle et de devenir ainsi le premier
long-métrage cinématographique de son auteur, un téléfilm diffusé
en novembre 1971 au Canada et aux États-Unis. Ce n'est donc que
beaucoup plus tard que j’eus le plaisir de pouvoir m'y frotter,
mais pas au cinéma, non, à la télé. Sur un poste qui n'avait pas
les dimensions de ceux que l'on trouve désormais chez n'importe qui.
Un choc, donc, disais-je. Une claque. Quatre-vingt six minutes de
pure terreur. Un road movie en forme de survival extrêmement
efficace malgré l'épure du script. Et puis, peut-être un quart de
siècle plus tard, c'est Anna, ma compagne, qui m'offrit enfin
l'occasion de le redécouvrir sur grand écran, et sous une forme
inédite. Un privilège en réalité si l'on tient compte du fait que
dans notre seul pays, peu d'entre nous ont sans doute vécu
l'expérience :
Un
ciné-concert dans l'unique salle du cinéma de Sigean. Le film diffusé sur grand écran et dans la
fosse, les membres du groupe autoproclamé de ''Musique
Interterrestre'' Antiquarks remaniant la totalité de la bande-son du
film pour un résultat au delà des espérances. Une expérience
unique et très enrichissante. Si la première affiche évoque le
film à l'époque de sa sortie dans l'hexagone en 1971 et celle du
milieu l'événement qui eu donc lieu à Sigean le 13 février 2011,
je ne suis pas certain que la dernière ait une réelle relation
avec sa diffusion au Canada le 10 novembre 1971 ou aux États-Unis
trois jours plus tard. C'est pourtant de cette version là que je
parlerai dans cet article. Non pas que l'expérience vécue il y a
huit ans en arrière au bras d'Anna fut décevante, bien au
contraire, mais j'avais surtout envie de parler de l’œuvre dans sa
version séminale même si par rapport à celle qui sorti plus tard
sur les écrans, elle demeure moins longue de douze minutes...
Pas
mal de modifications ont été apportées entre la version de 1971 et
la version dite théâtrale qui fut proposée dans les salles. Tout
d'abord, l'introduction du personnage de David Mann incarné par
l'acteur Dennis Weaver à travers la séquence située dans son
garage et sur les routes de la ville qu'il parcourt ensuite jusqu'à
son arrivée sur les lieux dits du drame n'existe pas dans cette
version de 1971. Le téléfilm débute donc sur la route de campagne
et projette directement le spectateur au cœur du suspens puisque le
camionneur fou qui va se lancer à sa poursuite durant plus d'une
heure et dix minutes apparaît très rapidement. Les habitués de la version cinéma
s'étonneront sans doute de la disparition d'une scène
particulièrement forte : cette située devant l'entrée d'un
tunnel et mettant en scène un bus scolaire. Nulle trace de
l'événement dans le téléfilm. Tout comme celle située devant un
passage à niveau également absente de la version de 1971. De
longues minutes qui n'apparaissent donc pas mais qui ne retirent en
rien l'intensité d'un téléfilm tout aussi fort en terme de
découpage.
Duel
demeure dans sa version originale tout aussi précieuse, d'autant que
son intérêt réside d'abord dans la vision qu'en a voulu à l'origine le
réalisateur. Nous pourrions énumérer toutes les séquences
additionnelles plus ou moins longues ajoutées par la suite et
absentes ici, tous comme certains dialogues remaniés, mais
l'essentiel est déjà là : une tension palpable et une action
à couper au couteau lors de séquences cultes comme celle du
relais-routier (un véritable moment de paranoïa) durant laquelle le
héros examine les chaussures et le comportement des camionneurs qui
s'y sont arrêtés et parmi lesquels il soupçonne son poursuivant de
s'y être arrêté, ou encore celle de la cabine téléphonique. Et ne parlons même pas des nombreuses scènes de courses-poursuites sur une route déserte et écrasée par la chaleur du soleil. La
preuve que Steven Spielberg avait déjà tout dit en 1971, les ajouts
de la version cinéma ne faisant qu'augmenter (pas tout à fait
superficiellement) l’œuvre originale par du matériel à son petit classique de la terreur.
Dennis Weaver y est formidablement crédible et le camion fou, l'une
des entités cinématographiques les plus terrifiantes du septième
art. Une perle !
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