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vendredi 26 juillet 2019

Eva de Benoît Jacquot (2018) - ★★★★★★★★☆☆



Pour son avant-dernier long-métrage, l'auteur des Enfants du Placard en 1977, du Septième Ciel en 1987 ou de Trois Cœurs en 2014, le cinéaste français Benoît Jacquot, réalise une œuvre trouble, troublante... et troublée par des personnages ambigus à l'existence personnelle plus ou moins complexe. Le cinéaste français aborde son œuvre sous différents aspects. En adaptant le roman éponyme de l'écrivain britannique James Hadley Chase en compagnie du scénariste Gilles Taurand, le réalisateur décompose en divers actes la relation étrange que cultivent ses deux principaux protagonistes. D'un côté, Bertrand Valade, qu'incarne à merveille l'acteur Gaspard Ulliel, et de l'autre, l'actrice Isabelle Huppert, qui interprète le rôle-titre, celui d'Eva, cette femme mystérieuse et froide dont le spectateur se fera forcément très vite une opinion avant de découvrir les véritables motifs qui la poussent à mener une vie de prostituée de luxe.

Alors que je chroniquais récemment le film d'épouvante Greta du cinéaste irlandais Neil Jordan qu'interprétait déjà Isabelle Huppert, le réalisateur français choisit d'aborder son film sous un angle finalement beaucoup plus dérangeant. Coutumière des ambiances pesantes et nauséeuses (La Pianiste de Michael Haneke), Isabelle Huppert est ici formidable. Au même titre que son partenaire, elle porte le film de Benoît Jacquot aux nues. Aussi parfaitement caractérisés que campés, Bertrand et Eva forment un couple fragile et curieusement romantique qui repose sur des bases fragiles et fantasmagoriques.

D'un côté, Gaspard Ulliel incarne un Bertrand dont la vie ne semble être qu'un subterfuge. Après s'être emparé du manuscrit de l'un de ses patients qui venait de mourir dans sa baignoire alors que le jeune homme était à ses côtés, cet aide à domicile change de vie et rencontre le succès au théâtre après s'être fait passé pour l'auteur du texte intitulé ''Mot de Passes''. De l'autre, il y a Eva. Femme d'âge mûr sensuelle qui pour vivre, se prostitue. Mariée à un homme en voyage d'affaire permanent, Eva fait la connaissance de Bertrand le jour où, réfugié dans le chalet de ses futurs beaux-parents, ce dernier découvre deux intrus, dont Eva. Bertrand tombe immédiatement sous le charme de l'envoûtante call-girl dont il va tenter de retrouver la trace. Mais alors que sa relation avec sa fiancée Caroline se délite peu à peu et qu'il se désintéresse de plus en plus de la tournée hexagonale de sa pièce, Bertrand va nouer une relation étrange avec la prostituée...

Eva est pour le réalisateur de cette seconde adaptation (après celle de Joseph Losey cinquante-six ans auparavant en 1962), une histoire dont les origines remontent très loin puisque dès son adolescence, le futur réalisateur découvre l'ouvrage de James Hadley Chase et se découvre une passion pour le cinéma. Le désir d'y œuvrer serait donc lié au roman et son adaptation presque soixante ans après l'avoir lu apparaît donc comme un aboutissement dans la carrière du réalisateur qui signe alors une œuvre cinématographique qui marque d'une empreinte indélébile la conscience des spectateurs. D'abord parce que la réalisation y est en tout point d'une maîtrise, d'une sophistication et d'une pureté exemplaires, mais aussi et surtout parce que Gaspard Ulliel et Isabelle Huppert sont les incarnation idéales de ces amants de passage particulièrement marquants. Afin de conforter l'aspect dérangeant de cette thématique qui réserve d'authentiques surprises, Benoît Jacquot fait appel au compositeur français Bruno Coulais, auteur d'un grand nombre de partitions musicales pour le cinéma et auteur fidèle pour le compte du cinéaste français. Il œuvre ici sur un ton désenchanté et angoissant qui parcourt le film de son intense froideur, générant ainsi une certaine inquiétude, le spectateur entrant dans un univers codé posant de nombreuses questions et obtenant des réponses tantôt rassurantes, tantôt embarrassantes. Bien que Benoît Jacquot œuvre ici dans le drame psychologique intense, il offre une version horrifique et parfois étouffante des relations humaines et intimes. Bien que les critiques furent généralement mitigées de la part des critiques presse, Eva est selon moi un très grand film. Pudique, bouleversant et intellectuellement dévastateur. Une nouvelle date dans la prolifique carrière de la sublime Isabelle Huppert...

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