J'en parlais déjà dans
le précédent article consacré au film de science-fiction The
Endless de
Justin Benson et Aaron Moorhead... De ce principe qui je l'espère ne
deviendra jamais immuable et qui consiste à proposer directement sur
des plate-formes de streaming des long-métrages sans passer au
préalable par la case cinéma. J'évoquais également le
génialissime Prédestination de
Michael et Peter Spierig, lequel partage avec The
Endless
et Durante la Tormenta
de Oriol Paulo, dont il s'agit ici de faire la critique, ce même
engouement pour le voyage dans le temps et les paradoxes temporels. A
croire que le sujet risque moins d'intéresser les amateurs de
blockbusters que ceux pour lesquels cinéma rime avec télé et
canapé ! Pourtant, ces trois exemples de science-fiction
brillante et intelligente semblent avoir perdu toute chance de voir
le jour sur d'immenses écrans de cinéma. A moins qu'un jour on leur
reconnaisse enfin suffisamment de qualités pour leur offrir une sortie digne d'eux...
Après
l'Australie, après les États-Unis, direction l'Espagne avec le tout
nouveau long-métrage d'Oriol Paulo. Déjà auteur de deux thrillers
(dont Contratiempo),
le cinéaste espagnol nous convie à une histoire folle tournant
autour de Vera Duran (l'actrice Adriana Ugarte), laquelle découvre
un jour dans la nouvelle demeure familiale, un vieux poste de
télévision ainsi qu'une caméra et de vieux enregistrements. Elle
propose à son mari David (l'acteur Alvaro Morte) ainsi qu'à leur
fille de regarder les cassettes. On y aperçoit un gamin répétant
un air de guitare. Plus tard, alors qu'un orage gronde à
l'extérieur, Vera est réveillé par un bruit semblant provenir du
petit poste de télévision. Là, elle assiste à la redifusion
d'informations datant de la toute fin des années quatre-vingt lors de
la chute du mur de Berlin. D'abord effrayée, la jeune femme découvre
alors Nico Lasarte, un gamin mort plus de vingt ans auparavant après
avoir tenté d'échapper à son voisin qu'il avait surpris un couteau
à la main. L'homme commis le crime parfait en tuant sa femme avant
d'aller l'enterrer dans l'une des sections de l'abattoir où il était
employé. Par un fait incroyable, Vera et Nico semblent capables de
communiquer à travers le poste de télévision. Plus fort encore, il
communiquent entre eux à travers deux époques différentes. Vera
comprend que le Nico auquel elle fait face est celui qui dans
quelques minutes va être renversé par une voiture et mourir en
tentant d'échapper à son voisin meurtrier. En tentant de l'avertir du
danger, Vera va voir sa vie totalement bouleversée. Après avoir
fait un malaise, elle se réveille dans une chambre d’hôpital.
Mais alors qu'elle a conservé son identité, certains détails
semblent démontrer qu'elle est plongée dans l'existence d'une autre
Vera qui elle, n'a jamais été mariée à David et n'a jamais eu de
petite fille avec lui. Décidée à retrouver sa vie d'avant, Vera se
lance alors dans une incroyable aventure...
Une
mère à la recherche de sa petite fille disparue ? Non,
rassurez-vous, il ne s'agit pas ici d'un mélodrame mais bien d'une
œuvre de science-fiction matinée de thriller, genre de prédilection
du cinéaste espagnol qui signe à cette occasion un long-métrage en
tout point remarquable. Interprétation magistrale, scénario d'une
précision chirurgicale, multiples twists, ambiance prenante (la
totalité de l'intrigue se déroule lors d'un orage), excellence de
la mise en scène et scénario parfaitement abouti de la part du
cinéaste lui-même, assisté de Lara Sendim, et partition musicale
en parfait accord avec le sujet. Ici, rien de tordu et d'improbable.
Rien de véritablement complexe non plus. Bien que le scénario mêle
les intrigues pour n'en faire qu'un tout indissociable, Durante
la Tormenta
est une œuvre qui au cours de son histoire se révèle de plus en
plus passionnante. Loin de la rigueur d'une thématique que certains
préfèrent parfois aborder de manière froide, Oriol Paulo se permet
en outre de nous offrir un long-métrage incroyablement divertissant.
Encore plus réjouissant que le pourtant déjà fort réussi Los
Cronocrimenes (Timecrimes)
de l'autre espagnol Nacho Vigalondo, Durante la
Tormenta
est sans aucun doute l'une des meilleures proposition en matière de
voyage dans le temps et de paradoxe temporel. Intriguant et parfois
émouvant, le film d'Oriol Paulo est un petit chef-d’œuvre de
construction soutenu par un casting remarquable (auquel on peut
notamment ajouter les excellents Chino Darin, Javier Gutiérrez, Nora
Navas et Clara Segura...).
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