N'étant pas coutumier du cinéma de Philippe Garrel, il est fort probable que le message que j'ai perçu dans cette première tentative ne soit pas forcément la bonne. Tout juste ai-je tenté d'inscrire dans cet article ma sensibilité. J'aurais bien mis une étoile supplémentaire mais encore faudrait-il que je puisse comparer cette œuvre à celles que réalisa avant et après Philippe Garrel. Une certitude: je n'en resterai pas à cette seule expérience. Si jamais je fais fausse route concernant le contenu de cet excellent moyen-métrage, je m'en excuse par avance et je remercie Mike sans qui, je n'aurais probablement jamais découvert La Cicatrice Intérieure...
J'avoue avoir d'abord eu
envie de sourire. Non, pour être plus précis, de rire devant cette
Cicatrice Intérieure, mon premier Philippe Garrel.
Mais c'était sans doute sans compter sur le pouvoir hypnotique de
ces images notamment tournées en Islande, au Nouveau Mexique et en
Égypte. Un pouvoir accru par le jeu parfois outrancier, à fleur de
peau et déchirant de Nico, la chanteuse du Velvet Underground qui à
l'époque était la compagne de l'acteur et réalisateur Philippe
Garrel qui ici, incarne l'un des deux principaux personnages d'un
récit tournant autour d'une femme, et d'un homme, tout d'abord,
avant d'y accueillir un second, puis un enfant, interprété quant à
lui par Ari Boulogne qui n'est autre que le fils de la chanteuse.
Difficile de décrire l'étrange sensation qui émane de ce
moyen-métrage d'un peu moins d'une heure qui amuse (!?!) autant qu'il
interroge sur son propos.
Du cinéma underground et
expéri-mental, linéaire, en plans-séquence, entre un désert, une
grotte, et une vaste plaine gelée situés sur une planète
lointaine. Philippe Garrel, auprès de son égérie, semble d'abord y
réécrire les origines d'un monde stérile, aride, rocailleux.
L'expérience est aussi convaincante que mystérieuse, la femme
(Nico) hurlant, pleurant, invoquant. Puis apparaissent les premiers
champs verdoyants, des moutons, et l'océan. Une séquence montre un
homme (Pierre Clémenti) nu, sur un cheval, avec en arrière-plan,
une Nico incantatrice. La Cicatrice Intérieure
s'ouvre sur un théâtre à ciel ouvert. L'homme commande aux
éléments. L'eau, les nuages, le vents ne semblent avoir aucun
secret pour lui. Philippe Garrel filme son œuvre sous forme de
tableaux pris d'une existence propre. Étrange comme le charme opère
alors que le cinéaste semble avoir laissé choir son scénario pour
ne privilégier que la contemplation. Il se dégage de La
Cicatrice intérieure la
magie d'un Jodorowsky et la complexité d'un Arrabal qui se seraient
muées en un voyage intemporel situant son intrigue sur une planète
beaucoup plus jeune que la notre.
Comme
si Philippe Garrel avait choisi pour cadre des terres restées
vierges jusqu'à ce que la présence et l'impulsion d'un colon venu
de notre lointaine planète bleue, celui incarné par Pierre
Clémenti, aient suffit pour qu'y éclore une vie organique à l'état
liquide, végétale, et en fusion. La Cicatrice
intérieure est
un hymne ésotérique à la vie, à l'amour, et aux éléments. Tout
aussi excentrique qu'intriguant, merveilleux qu'inquiétant, Philippe
Garrel repousse plus loin encore que le Werner Herzog de
Herz aus Glas,
Aguirre ou
Fitzcarraldo,
son rapport à la nature demeurée intacte. Poussé par un lyrisme
enivrant, le film de Philippe Garrel compose une succession de
séquences entrelacées d'intermèdes superbement mis en musique par
Nico elle-même. Il ne faut pas se fier à l'hermétisme de cette
œuvre qui s'avère aujourd'hui miraculeuse au regard des
innombrables longs-métrages qui ont désormais les faveurs du grand
public. Il faut se laisser porter par ce voyage sensoriel unique et
bouleversant... Au sortir de La Cicatrice Intérieure, je n'avais plus envie de rire. Tout juste envie de sourire devant ce spectacle SENSATIONnel, et peut-être même pleurer, troublé devant l'inaccessibilité de cet univers généreusement offert par Philippe Garrel...
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