Pour une fois que la
traduction française est plus proche que le titre original,
Enlèvement
méritait bien que l'on s'y attarde quelques instants. Bien que
bénéficiant d'une aura peu enjouée de la part d'une certaine
presse qui voit dans l'arrivée des plates-formes proposant des films
et des séries en flux continu, la mort des cinémas (!!!), Netflix
propose
ce mois-ci le long-métrage canadien Devil's Gate
(dont le titre original, à bien y réfléchir, n'est finalement pas
si stupide que cela) de Clay Staub. Et Clay Staub, il faut tout de
même le noter, est l'auteur de... ben en fait pas grand chose
d'autre. Enfin, ce serait mentir d'affirmer qu'il n'a réalisé que le film qui
nous intéresse ici car en réalité, il fut le réalisateur de
seconde équipe sur The Thing de
l'imprononçable Matthijs van Heijningen Jr. En 2011, 300
de Zack Snyder en 2006, et un peu plus loin encore, sur L'Armée
des Morts
de... Zack Snyder, oui, encore lui.
Devil's Gate
débute
d'abord sous les meilleurs augures. Une image délavée, presque en
noir et blanc, un climat et une ambiance particuliers, un rêve, un
cauchemar éveillé. Et puis, une vision de l'Amérique profonde (le
trou du cul du monde comme le dirait n'importe quel français un peu
moins élégant que ses concitoyens) plutôt bien fichue. Des
rednecks étendant presque leur zone de pouvoir jusqu'aux autorités.
Une baraque gigantesque plantée au beau milieu de champs qui ne
donnent malheureusement plus guère de résultats. Un bon point pour
le film du canadien ? Les décors. Parce qu'on le veuille ou
non, que Devil's Gate
tourne
au vinaigre ou pas, le travail effectué sur les intérieurs n'a rien
à envier au Texas Chainsaw Massacre
de Tobe Hooper. On s'attendrait presque à voir surgir « Tronche
de Cuir »
armé de sa célèbre tronçonneuse. Mais non, le fada de l'histoire,
lui, se nomme Jackson Pritchard, et l'enquêtrice du FBI Daria
Francis le soupçonne d'avoir enlevé son épouse et leur fille. D'où
le titre français. Aidée de Conrad Salter, un gars du cru un peu
mou de la gâchette, Daria va découvrir les véritables enjeux d'un
long-métrage qui cessera de tenir en haleine dès qu'il se muera en
un film hybride entre thriller glauque et film de science-fiction
versant dans l'abduction.
Oups !
Je crois bien avoir révélé un détail d'une importance
considérable... Pas grave, vu que le résultat à l'écran est
désastreux. Et là, encore, je pèse mes mots. Ceux qui regrettent
l'avalanche de films s'inspirant de l’œuvre de Tobe Hooper évoquée
plus haut ou de The Hills have Eyes
de Wes Craven pourraient bien changer d'avis en découvrant le film
de Clay Staub. Car à partir du moment où Devil's Gate berce davantage dans la
science-fiction que dans le thriller, ça devient vraiment du grand
n'importe quoi. Mêler le thriller redneck à la S-F partait sans
doute d'un bon sentiment, mais traiter celle-ci à la manière d'un
épisode de série même pas digne de X-Files
vouait
le film à tomber dans l'oubli. On aurait presque préféré que le
mystère qui se trame dans la cave le demeure. Marre de ces êtres
venus d'ailleurs à l'apparence cauchemardesque. Sorte de pudding
gluant vaguement inspiré par la créature de Roswell
à laquelle le cinéaste offre une mâchoire de piranha. Vachement
crédible pour une créature beaucoup plus intelligente que nous le
sommes. Plutôt bien interprété, Devil's Gate
souffre
cependant d'une mise en scène et d'un scénario grotesques,
fourmillant d'incohérences, et surtout, d'un déroulement manquant
cruellement de finesse lorsqu'il s'agit d'aborder le passionnant
sujet des abductions. Le canadien insiste pour maintenir un visuel
déprimant lui conférant une aura très particulière. Un travail
que l'on doit au directeur de la photographie Miroslaw Baszak. Quant
aux décors, seul aspect que l'on retiendra de réellement positif,
il est l’œuvre du directeur artistique Réjean Labrie. Devil's
Gate est
principalement incarné par l'actrice Amanda Schull (dont la
ressemblance avec Nicole Kidman est frappante), ainsi que par Milo
Ventimiglia et Shawn Ashmore. Notons la présence (inutile) de
Jonathan Frakes (le commandant William T. Riker de la série télé
Star Trek : la Nouvelle Génération)
dans le rôle du Sheriff Gruenwell. Se regarde... et s'oublie très rapidement...
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