Réalisé par Lynne
Ramsay et adapté du livre du même nom publié en 2013 par Jonathan
Ames, You Were Never Really Here
offre à l'acteur Joaquin Phoenix l'occasion de
composer un personnage hanté par de très anciens et très
traumatisants souvenirs liés à son enfance. Dans le rôle d'un
ancien vétéran de la Marine américaine, il incarne Joe, un homme
profondément marqué par son enfance ainsi que par les guerres
auxquelles il a participé durant sa carrière de militaire. Depuis
son retour à la vie civile, il travaille pour le compte de Votto, se
spécialisant dans les enlèvements d'enfants et de leur utilisation
dans le monde de la prostitution. L'affaire en cours concerne une
certaine Nina, fille du sénateur Albert Votto, disparue et selon des
sources bien informée, séquestrée dans un bordel de luxe pour
clients fortunés. Après avoir accepté de travailler pour le
sénateur c'est là-bas que Joe retrouve effectivement la jeune
fille, prostituée de force, mais sauvée de justesse par l'ancien
marine. Alors qu'il a plus tôt dans la journée donné rendez-vous
au père de la gamine dans un motel, c'est en l'attendant aux côtés
de Nina que les informations télévisées apprennent à Joe que
Votto se serait donné la mort. C'est le moment que choisissent deux
agents de police pour pénétrer dans la chambre et ravir Nina. Joe
réussit à échapper à la mort en tuant l'un des deux flics et se
lance à la poursuite de ceux qui ont commandité le meurtre du
sénateur et le nouvel enlèvement de Nina. Joe découvre alors la
vérité sur ce qui se cache derrière toute cette histoire et décide
d'en faire en affaire personnelle...
Le dernier long-métrage
de la réalisatrice Lynne Ramsay est un véritable uppercut en plein
visage. Joaquin Phoenix y incarne un individu au bord de la rupture,
vivant avec sa très vieille mère dans un quartier plutôt calme. Un
homme au bord du suicide également. Par flash-back, la cinéaste
décrit un passé violent. Celui d'un enfant battu, d'une mère
également battue, et d'un père qui finira par payer son dû. Tourné
dans les rues nocturnes d'un New York lumineux, bruyant, et surtout
très inquiétant, You Were Never Really Here
est une sacrée leçon de cinéma. Désespéré, aussi sombre qu'un
Série Noire
(Alain Corneau) tourné Outre-Atlantique qui en reprendrait quelques
idées, le film de Lynne Ramsay est l'incarnation du bien et du mal.
Entre un Joaquin Phoenix sauvant des griffes des pédophiles, une
jeune fille à peine âgée de quinze ans, et des politiques se
regroupant dans un bordel pour s'adonner à l'une des pires
perversions sexuelles.
You Were Never
Really Here est
avant tout une œuvre qui fait appel aux sens. Visuellement, la
photographie signée Thomas Townend renvoie à une certaine moiteur
mixée à une certaine idée de la violence urbaine. Quant au
Compositeur Jonny Greenwood, membre actif du groupe de rock
radiohead,
il compse à l'occasion du film, une partition terriblement anxiogène
qui participe totalement à l’imprégnation du public. Avant que le
numérique ne remplace les bonnes vieilles bobines, on aurait pu
comparer le film à un 'cauchemar
sur pellicule',
mais désormais, c'est sur un format beaucoup moins chaleureux que la
cinéaste parvient malgré tout à imprimer ses idées. La
fascination qu'exerce le film vient de cette interpénétration
parfaite entre Joaquin Phoenix et Lynne Ramsay. Comme avant lui
Harvey Keitel (Bad Lieutenant),
bien plus que le Robert de Niro de Taxi Driver
invoqué par l'affiche française, l'acteur se livre littéralement à
la caméra et offre au public l'une de ses plus magistrales
compositions. Un long-métrage étonnamment couillu pour une œuvre
signée par une femme, mais dont la sensibilité toute 'féminine'
poindra tout de même le bout de son nez lors d'une très jolie et
poétique séquence d'immersion dans un lac... A découvrir de toute
urgence...
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire