Après avoir visionné
un Death Spa datant de 1989 plutôt mauvais, il fallait
absolument que je me ressource. Que je choisisse une œuvre
originale. Sortir des sentiers battus et rebattus, rêver à un
cinéma différent, succomber à un récit inhabituel. Jamais je ne
me serais cru capable un jour de suivre les aventures de Cinéman.
Pas juste parce que Frank Dubosc en est le principal interprète et
qu'il représente pour moi l’Échec avec un grand E au cinéma.
Non, mais avant tout parce que son auteur porte le nom d'un homme de
télé, de cinéma et de littérature auquel je n'ai jamais su, pu,
ou voulu adhérer : Yann Moix. Et ce ne sont certainement pas
ses interventions dans l'émission du samedi soir sur France 2 qui me
feront changer d'avis sur le personnage. A moins qu'un jour, comme il
le fit par le passé, le bonhomme décide de s'asseoir à nouveau
dans le fauteuil d'invité et non plus dans celui de
chroniqueur-assassin. Yann Moix et sa morale. Yann Moix et son ton
nerveux plutôt agaçant. Yann Moix et sa verve, soyons honnêtes,
plutôt attractive mais qu'il a un peu trop l'habitude de ponctuer
par le terme intellectuel lorsqu'il s'agit de parler de ses
œuvres ou de lui-même.
Déjà responsable d'un
Podium plutôt sympathique qui a rencontré sans doute
le succès pour les mêmes raisons que Bienvenue Chez les Ch'tis
est devenu la plus grande manne cinématographique française de tous
les temps sur notre territoire, Yann Moix signe huit ans plus tard
une œuvre qui malheureusement pour lui ne rencontrera jamais son
public. Rarement un film aura fait la quasi-unanimité parmi les
spectateurs. Si Marianne et le Figaroscope ont encensé
Cinéman, si Le Parisien et Dvdrama sont
demeurés respectueux du film en évitant la mise à mort de son
auteur sur la place publique, d'autres n'ont pas eu cette délicatesse
et ont crucifié cette œuvre sur un ton certainement proche de celui
de Yann Moix du temps où il écrivait pour le torchon voici,
ce rouleau de P.Q en forme d'hebdomadaire que certain(e)s
s'arrachent!
Yann
Moix l'incompris ! Incompris lorsqu'invité pour discuter de son
ouvrage pamphlétaire La Meute
il est la victime d'une curée méthodiquement organisée chaque fin
de semaine par les gourous Zemmour et Neaulleau et dont ce soir là,
c'est l'écrivain-réalisateur qui fit les frais. Un débat
passionnant à plus d'un titre puisqu'enfin, on note une certaine
sensibilité de la part d'un personnage qui pourtant, ne se démonte
habituellement jamais. Incompris lorsqu'il sort ce Cinéman
qui fait chou blanc alors qu'en réalité, je vous le dis, le film
est un chef-d’œuvre. Yann Moix avait choisit cinq ans plus tôt de
rendre un hommage drôle et amusant à un artiste, Claude François, que
le cinéaste pourtant déteste. Cinéman rend quant à lui hommage
non pas à un à film, mais au cinéma en général.
Frank
Dubosc est le premier véritable super-héros de l'histoire du cinéma
français (contrairement à certains journaux spécialisés ayant
affirmé que le premier date de 2014 avec le film de Thomas Salvador,
Vincent n'a pas d’Écailles).
Son personnage, Régis Deloux, professeur de mathématiques, va se
retrouver plongé dans le merveilleux monde du cinéma afin de sauver
la jeune et jolie Viviane, personnage de fiction et prisonnière de
l'infâme Douglas Craps (Pierre-François Martin Laval). Si cette
courte description peut sembler peu originale, le traitement qu'en
fait Yann Moix donne au film une dimension toute particulière. Déjà,
le cinéaste possède le don de l'esthétisme. On remarquera un choix
dans les cadrages, les décors et même dans les couleurs qui donnent
à l'ensemble un aspect relativement agréable à contempler, et ce,
notamment lors des scènes situées dans l'établissement scolaire
dans lequel enseigne Régis Deloux.
On
connaît désormais les goûts de Yann Moix en matière de cinéma.
L'homme est écrivain, réalisateur, chroniqueur et apparaît
désormais comme un cinéphile dont les références
cinématographiques vont de Stanley Kubrick à Martin Scorsese en
passant par Ridley Scott, Georges Méliès, Joseph L. Mankiewicz ou
encore Sergio Leone. Grimé en homme sans nom, Frank Dubosc mime à
la perfection Clint Eastwood et rend son personnage passablement
troublant. On le découvre en Zorro, en Robin des Bois, en Travis
Bickle (Taxi Driver) et même dans un magnifique plan inspiré par Le
Voyage dans la Lune de
Georges Méliès.
On
pourra alors affirmer que le film n'est pas drôle, que Dubosc fait
du Dubosc, ou qu'un sujet aussi riche aurait mérité d'être confié
au Terry Gilliam du Baron de Munchausen,
Cinéman est en
réalité davantage un hommage au septième art et un film
d'aventures fantastiques. Aurais-je tendance à abuser en affirmant
que Cinéman
est un chef-d’œuvre ? Sans doute oui. Mais qu'importe, le
film de Yann Moix m'aura au moins apporté le privilège de me
réconcilier avec un personnage qui jusqu'à maintenant m'avait
presque laissé indifférent. Et même, malgré la pauvreté de son
jeu, Franck Dubosc m'aura fait passer un très agréable moment de
cinéma. Léger, original, et de plus renforcé par la présence du
trop rare et extraordinaire acteur Pierre Richard ainsi que du regretté Michel Galabru...
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