Après avoir tourné son
premier long-métrage dans son pays d'origine, le cinéaste grec
Dennis Iliadis s'est exporté jusqu'aux États-Unis où il a d'abord
réalisé le très efficace remake du classique de Wes Craven, La
Dernière Maison sur la Gauche.
Après trois thriller, il s'est ensuite attaqué à la
science-fiction avec +1 et
son scénario très original, puis est revenu l'année passée avec
son dernier long-métrage en date, le thriller
horrifique Delirium.
Et dans le genre, le cinéaste a mis le paquet sur l'ambiance. Sujet
maintes fois traité, on aurait pu craindre une certaine redondance
et pourtant, le film est une réussite totale dans les domaines qu'il
explore. Tout d'abord, la psyché de son principal personnage,
incarné à l'écran par l'excellent acteur américain Topher Grace,
habitué des séries, mais que l'on a pu notamment voir dans le
brillant Interstellar de
Christopher Nolan en 2014 mais également dans le décevant Predators
de
Nimrod Antal en 2010. Un individu malade qui après avoir passé un
long séjour en hôpital psychiatrique se voit offrir l'opportunité
de démontrer durant trente jours, qu'il est capable de résister à
ses mauvais démons et ainsi retrouver sa liberté. Surveillé de
près par l'agent de probation Brody (l'actrice Patricia Clarkson,
vue notamment dans la trilogie Le Labyrinthe),
certaines contraintes lui sont imposées. Comme de n'accepter aucune
visite lors de son séjour dans la demeure parentale désormais
déserte depuis le suicide très récent de son père, de porter un
bracelet électronique à la cheville, ou encore de répondre chaque
fois que les autorités désirent vérifier sa présence dans la
maison, toute sortie à l'extérieur étant proscrite.
L'univers
dans lequel est plongé le héros est loin de posséder le charme des
demeures familiales où sentent bon les souvenirs d'antan. Le climat
est très vite oppressant. Les murs deviennent le sujet d'angoisses
diurnes et nocturne pour Tom dont le passé ressurgit dès son
arrivée. Un passé trouble qui a construit sa personnalité
défaillante. Contraint de suivre un traitement médical, il est en
proie à des visions auditives et visuelles qu'il met sur le compte
de la maladie. Une grande partie de l'intérêt de Delirium
repose
sur l’ambiguïté qui règne entre le réel et ce qui ne l'est pas.
D'ailleurs, rien ne vient jamais véritablement étayer l'hypothèse
selon laquelle des fantômes pourraient hanter les lieux. C'est l'un
des tours de force de Dennis Iliadis que d'avoir réussit à faire
se méfier le spectateur qui très vite, se met à douter de l'existence
du frère de Tom, Alex, interprété par l'excellent Callan Mulvey,
que l'on a pu notamment voir dans Zero Dark
Thirty de
Kathryn Bigelow en 2012, ou très récemment dans Shaft
de Tim Story.
Le
comportement sournois de ce dernier, et celui presque aussi
dérangeant de l'agent de probation Brody confèrent au film une
partie de son angoisse, l'autre provenant évidemment de l'immense
demeure dont chaque pièce est anxiogène. N'oublions pas le
personnage interprété par l'actrice Genesis Rodriguez, charmant
petit bout de femme qui parmi une majorité de partenaires tous plus
ambigus les uns que les autres, est un souffle d'air frais dans cette
demeure qui décidément, sent le renfermé. A part en deux ou trois
occasions, l'effroi ne repose fort heureusement pas sur des 'jump
scares'
mais sur le talent réel du cinéaste à créer des situations
terrifiantes. L'un des atouts du film demeure dans la seule présence
du héros à l'écran. Car c'est bien lorsqu'il est seul, isolé du
monde, que le film prend toute son ampleur et que le spectateur (de
préférence seul derrière son écran, le soir lorsque la nuit est
tombée) tremble à chaque angle d'une demeure dont la déco la fait
tantôt ressembler à l'antre d'un adepte du sado-masochisme (les
murs rouges), tantôt au repaire d'un esprit malade.
Là
où le film est réussi, c'est également au niveau du portrait de
cette famille totalement détruite par divers événements ayant
émaillé l'existence de Tom et de son frère, expliquant l'état
mental du héros. Le cinéaste ne se résout pas qu'à produire des
scènes d'effroi, il pénètre encore plus profond dans cette
histoire de famille intime et cauchemardesque qui n'en finit pas de
nous en apprendre sur ses principaux 'acteurs'.
Delirium
est parfaitement maîtrisé. Interprètes, mise en scène et
photographie alimentent une œuvre qui de plus, se permet de livrer
un climax aussi bouleversant que terrifiant. Ou quand l'amour peut
pousser à des actes innommables. A découvrir de toute urgence.
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