C'est la seconde fois que
le cinéaste français Julien Duvivier adapte une œuvre de
l'écrivain britannique James Hadley Chase après L'Homme à
l'Imperméable
pour lequel il offrit le rôle principal à Fernandel. Six ans après,
donc, en 1963, le voilà qui revient avec son genre de prédilection :
le polar. Noir, quasi désespéré. Où règne un sentiment de
trahison permanent. C'est d'ailleurs ici tout l'enjeu du long-métrage
Chair de Poule,
adapté du roman Tirez
la Chevillette par
le cinéaste lui-même, mais également une fois encore, par
l'écrivain René Barjavel. L’œuvre toute entière semble dictée
par l'un des dix commandements gravés sur la pierre par Dieu
lui-même. Après 'Tu
ne commettras pas d'adultère' dans L'Homme à
l'Imperméable,
voici que le cinéaste s'attaque non pas à un, mais à trois
commandements. 'Tu
ne commettras pas de meurtre',
'Tu ne commettras
pas de vol',
et 'tu ne
convoiteras pas la femme de ton prochain'
semblent en effet dicter l’œuvre dans son ensemble. Trahison, trio
d'amants, duplicité et meurtres sont donc au programme d'un
excellent polar porté par de talentueux interprètes.
Tout
d'abord Robert Hossein, acteur, réalisateur, metteur en scène de
théâtre et scénariste, qui s'apprêtait l'année suivante à
tourner dans l'un de ses plus grand succès d'interprète, Angélique
Marquise des Anges,
et deux ans plus tard dans l'une des ses propres réalisations pour
le cinéma, le troublant Vampire de Düsseldorf.
A ses côtés, l'acteur Jean Sorel, que les amateurs de Gialli
reconnaîtront aisément puisqu'il joua notamment pour les cinéastes
italiens Sergio Corbucci (L'Uomo che Ride),
Lucio Fulci ( les excellents Perversion Story
et
Una
lucertola con la pelle di donna),
ou encore Umberto Lenzi (Paranoia).
Entre les deux hommes (et même les trois puisqu'il ne faut surtout
pas oublier de citer le grand Georges Wilson (père de Lambert)), la
superbe Catherine Rouvel dans le rôle de Maria, épouse du
vieillissant garagiste Thomas avec lequel elle vit depuis trois ans
déjà.
Une
jeune femme séduisante qui n'en veut en réalité qu'au magot de son
mari, enfermé dans un coffre bien à l'abri des convoitises. Plus
tôt, à Paris, Daniel Boisset et Paul Genest cambriolent un
appartement lorsqu'ils sont pris sur le vif par le propriétaire des
lieux qui les prend alors en chasse dans les escaliers. Gravement
blessé, Daniel est capturé par la police tandis que Paul parvient à
prendre la fuite après avoir tué le propriétaire qui tentait de
stopper la fuite de son ami. Condamné à vingt ans de travaux
forcés, c'est par négligence de la part d'un policier que Daniel
réussit à se sauver et à se rendre dans un trou perdu des
Alpes-Maritimes, là où vivent justement Maria et Thomas. Et c'est
dans un cadre quasiment désertique au milieu duquel est implantée
une station-service que va se dérouler le plus gros de l'intrigue...
Thomas
se lie d'amitié avec Daniel, lui offre le gîte, le couvert, ainsi
qu'un petit boulot. Mais lorsque Maria découvre le passé du fugitif
dans la presse locale, elle le menace de le dénoncer s'il refuse
d'ouvrir le coffre-fort rempli de billets de banque de son époux.
Et
c'est là que les emmerdes commencent véritablement et que les
conséquences pour ne pas avoir respecter les trois commandements
cités plus haut vont surprendre, et les personnages, et les
spectateurs. La mise en scène de Julien Duvivier est au cordeau.
L'écriture précise et la musique d'accompagnement du célèbre
compositeur français Georges Delerue font le reste. Julien Duvivier
livre une œuvre sans concession, sombre à souhait, chacun tirant la
couverture sur lui pour un motif des plus crapuleux : l'argent.
Même le sexe y est remisé au second plan puisque malgré les atouts
évidents de la superbe Maria, ce sont les billets verts qui
intéressent d'abord celui que l'on aurait pourtant soupçonné en
dernier.
Après
une première collaboration entre Julien Duvivier, René Barjavel et
l'écrivain britannique James Hadley Chase piètrement accueillie en
son temps, la formule fonctionne enfin à plein régime et Chair
de Poule demeure
comme l'un des meilleurs polars des années soixante, et parmi ses
meilleurs films. Les retardataires se doivent de le découvrir
absolument...
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