Merde... ça coince.
C'est rare, mais ça arrive. Souvent parce que les mots ont du mal à
transmettre les émotions. Precious dégage une telle
intensité dramatique, que l'on n'a certainement pas envie de manquer
le coche lorsque l'occasion d'en parler se présente. De manière
tout à fait inattendue, le second long-métrage du cinéaste 'black'
Lee Daniels s'est révélé à moi comme un uppercut trop bien placé
pour que l'occasion de le parer se présente. Devant l'immense
interprétation de l'actrice américaine originaire de Brooklyn
Gabourey Sidibe, on ne peut que demeurer fasciné, meurtri, anéanti,
chaviré par l'émotion. Par ce portrait saisissant qui ne louvoie
jamais en empruntant des chemins de travers par trop divertissants.
Cru, violent, évoquant ces faits-divers dont toutes ces émissions
télévisées racoleuses se font l'écho, Precious
opte pour un cinéma-vérité qui ne réconforte le spectateur que
dans le message d'espoir livré par une héroïne qui malgré les
blessures quotidiennes, fait face à l'adversité en allant toujours
de l'avant. La liste des abus dont la jeune femme est telle que l'on
pourrait la penser un brin exagérée. Et pourtant, tout à commencé
par l'écriture d'une nouvelle intitulée Push.
Pas une fiction, mais une histoire bien réelle, que Lee Daniels,
avec toute la sensibilité qui semble le caractériser, a choisi en
2009 d'adapter au cinéma.
Claireece
Precious Jones vit dans le quartier de Harlem, à New York, en
compagnie de sa mère Mary Lee Johnson (exceptionnelle Monique Angela
Hicks). Son père a quitté le domicile et la gamine de seize ans à
peine vit au jours le jour sous les brimades et les coups d'une mère
qui la hait. Accusée par celle-ci d'être responsable de la 'fuite'
de son époux, Mary passe ses journées devant la télé tandis que
Claireece tente difficilement de suivre les cours au collège.
Enceinte pour la deuxième fois et mère d'une petite fille
trisomique, l'adolescente est analphabète et finit par être
renvoyée de l'école. C'est sur les conseils de la conseillère
d'éducation qu'elle se rend à une adresse où une certaine
Mademoiselle Rain donne des cours pour enfants en difficulté. Là,
Precious fait connaissance avec celle qui l'éduquera désormais
ainsi qu'avec ses nouvelles camarades. Ensemble, et aidées par leur
nouveau professeur, elles vont apprendre à lire et à écrire, et
ce, dans l'espoir d'obtenir un jour un diplôme...
On
pourrait réduire l'intrigue de Precious à
ces quelques phrases, mais le film est bien plus que cela. En deux
heures, on apprend à aimer une gamine dont le parcours a toujours
été jusqu'ici difficile. Issue d'un milieu social particulièrement
rude, l'adolescente va devoir se battre contre des murs apparemment
infranchissables. Et même si elle échouera parfois, ce ne sera que
pour se relever, plus forte et plus mûre que jamais. Precious
dresse un état des lieux des services sociaux tout en leur donnant
une image beaucoup plus humaine qu'il n'y paraît au premier abord. A
ce titre, on pourra féliciter la chanteuse Mariah Carey qui contre
toute attente, incarne une Madame Weiss tout à fait convaincante.
Autre grande star américaine de la chanson, le chanteur Lenny
Kravitz dans le rôle de l'aide-soignant John McFadden. Un personnage
qui de prime abord peut sembler anecdotique, mais qui, au fond,
participe au message profondément humain véhiculé par le récit.
Car c'est bien là que le film de Lee Daniel trouve tout son sens.
Livrer une ode à la vie. Extraire tous les bienfaits que peut tirer
son héroïne du bourbier infâme dans lequel elle végète depuis sa
venue au monde. Lee Daniels n'oublie jamais d'injecter quelques
passages humoristiques afin que le spectateur n'oublie jamais
qu'après la tempête, il arrive au Soleil de pointer ses rayons vers
nous. Il arrive parfois que le film dévie de sa route pour inaugurer des scènes fantasmées aux atours excessivement kitschs, mais dont la teneur se justifie part le simple fait que l'héroïne ne soit encore qu'une adolescente. Difficile alors de critiquer ces quelques passages esthétiquement surannés qui dans un contexte différent auraient pu nuire à l'ensemble du projet...
Precious est
délicat à aborder. C'est avec le plus grand respect qu'il faut s'y
plonger. Car le témoignage est bouleversant. Le casting dans son
intégralité fait preuve d'un talent exceptionnel. Lee Daniels aime
ses personnages et ses interprètes, et cela se ressent. Le film a
été couvert par un nombre de récompenses invraisemblables (à
prendre au sens extraordinaire),
et totalement justifiées. On notera également la bande originale de
Mario Grigorov, accompagnée de titres 'soul'
et
'funky' magnifiques.
Un très grand film...
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