On frise, ici, le néant... Merde, quoi ! Avec un sujet pareil,
le spectateur était en droit d'assister à une œuvre couillue,
provocante, voire choquante. Il n'en demeure qu'un long-métrage
perclus de maladresses. Comme les premiers pas d'une réalisatrice
qui pourtant, ô malheur, en est à son sixième long-métrage. On ne
lui pardonnera donc pas la faiblesse de sa mise en scène. Intimiste
diront certains. Peut-être. Ou simplement, Sylvie Verheyde est-elle
incapable d'offrir à son film suffisamment de rythme et une mise en
scène en béton pour que l'amateur de cinéma nihiliste s'y
retrouve. On est loin, et même à des années-lumière d'un Gaspar
Noé. Sex Doll est l'antithèse d'un Seul Contre
Tous jusqu’au-boutiste. Alors que le film de Noé s'imposait comme un monument de noirceur nihiliste, Sex Doll paraît minuscule, insignifiant, inutile. Comme la jeune marseillaise Hafsia
Herzi demeure inexpressive, Virginie, le personnage qu'elle incarne,
s'applique à rester dans un registre faisant l'impasse sous tout
forme d'expressivité. Comme un beau légume sur un étal de marché
qui une fois cuisiné révèle son statut d'organisme génétiquement
modifié. Encore que l'actrice possède des atouts naturels qui font
plaisir à voir. Mais si peu. Pour un long-métrage que l'on nous
promet comporter des propos ou des images pouvant heurter la
sensibilité des spectateurs, dans le genre, Sex
Doll est
plutôt frileux. Peut-être est-ce alors la raison pour laquelle
Hafsia Herzi ne montre qu'en de rares occasions (et à la vérité,
une seule et unique fois) ses jolis tétons durcis par le climat
particulièrement froid qui semble régner sur le plateau.
Non
pas que Sylvie Verheyde ait oublié de payer la note du chauffage
les trois derniers mois mais sa mise en scène impersonnelle plombe
l'ambiance. Comme s'il lui fallait à tout pris démontrer la
monotonie d'une existence faite de sexe et d'argent à travers le
prisme du non-dit. Sex
Doll est
maladroit, chiant au possible, interprété par une actrice figée
dans le rôle peu aimable d'une pute de luxe se tapant des
quinqua-sexagénaires en costards-cravates. Reconnaissons tout de
même que la cinéaste aura réussi à rendre dérangeants ces
individus libidineux. Sans pour autant les filmer à la première
personne, ces vieux gentlemen anglais officiellement irréprochables
provoquent un sentiment de dégoût : filmés en gros plans, les
visages transpirent, paraissent gras, et la respiration se fait
haletante. On imagine presque Virginie se prendre en pleine face leur
haleine chargée du stress d'une journée de travail tout entière.
La
forme n'étant assurée qu'au tarif syndical, la caméra promène son
héroïne dans les rues londoniennes, histoire de donner au film de
Sylvie Verheyde un cachet particulier. Mais la réalisatrice n'ayant
pas le talent de Michel Blanc, on n'y retrouvera jamais le climat
dépaysant de son excellent Mauvaise
Passe
principalement interprété par Daniel Auteuil et Stuart Townsend. Le
contenu du film n'étant pas entièrement à jeter aux orties, celui
qui s'en sort finalement le mieux, c'est le jeune acteur britannique
Ash Stymest qui dans le rôle du tatoué Rupert demeure un mystère
durant une bonne partie du film. Qui est donc ce type qui semble
épier Virginie ? La suit jusque dans son repère ?
S'agit-il d'un amoureux transit ? Ou bien cherche-t-il à entrer
en contact avec la prostituée pour d'autres raisons ?
C'est
là dessus que tient le film. Le reste du scénario, le spectateur
n'a plus qu'à en faire une boule de papier et jouer au foot avec. Si
les scènes démontrant l'incapacité de la cinéaste à mettre en
pratique des idées qu'elle a elle-même couchées sur le papier sont nombreuses,
l'une des plus significatives demeure au moment où l'héroïne et la
protégée que lui a confié sa maquerelle se retrouvent dans le même
lit que deux hommes d'âge mûr. La partie de va et viens tournant au
fiasco, Sylvie Verheyde tourne l'événement de manière terriblement
mièvre. Une anecdote dans un film qui déjà, à lui seul, ne vaut
pas tripette ! On l'aura compris, Sex
Doll n'est
qu'un coup de couteau dans l'eau. Sans grandes ambitions...
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