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vendredi 16 février 2018

O Estranho mundo de Zé do Caixão de José Mojica Marins (1968)



Après deux films dont le personnage central fut le maléfique Zé do Caixäo, José Mojica Marins supervise deux spectacles produits pour la télévision brésilienne, Alem, muto alem do Alem et O Estranho mundo de Zé do Caixão. Le producteur brésilien d'origine égyptienne George Michel Serkeis, et ami personnel du cinéaste, propose à ce dernier d'adapter le principe au cinéma après le succès phénoménal rencontré par ces deux shows, alors comparables à La Quatrième Dimension. José Mojica Marins accepte et son futur projet reprend le titre même de l'une des deux anthologies. Le projet voit le jour en 1968. Regroupant trois courts métrages réalisés par le cinéaste brésilien lui-même, on y retrouve toutes les obsessions de Mojica Marins. L'amour, la mort, la religion.

Le titre de l’œuvre est trompeur puisque en dehors du générique et du personnage principal du troisième court-métrage qui rappelle sensiblement le fameux Zé do Caixão, ce dernier n’apparaît jamais. O Fabricante de Bonecas conte les méfaits d'un père et de ses quatre filles dont l'existence tourne autour de la fabrication de poupées très spéciales. Le succès que rencontrent ces dernières est dû à l'exceptionnel réalisme de leur regard. Lorsque quatre voyous apprennent que le père des quatre jeunes femmes cache chez lui le produit des ventes de poupées, leur sang ne fait qu'un tour. Le soir-même, ils pénètrent chez lui et le menacent d'un couteau afin qu'il leur dise où est l'argent. Mais tout va mal, et le vieil homme meurt d'une crise cardiaque. Découvrant ses quatre filles dans leur chambre à coucher, les voyous s'en prennent à elles et les violent.

Tara tourne quand à lui autour d'un bossu, celui-là même qui servait d'assistant à Zé do Caixäo dans le second long-métrage du cinéaste Cette Nuit, Je M'incarnerai dans ton Cadavre. Devenu depuis vendeur de ballons, il suit à la trace une jeune femme sur le point d'être mariée. Alors que la cérémonie se déroule normalement, une femme, jalouse, s'approche d'elle et lui plante un couteau en plein cœur. La mariée décède. Plus tard, on assiste à son enterrement. Le bossu, toujours dans l'ombre de la jeune femme, s'approprie alors son cadavre.

Ideologia, le troisième et dernier court-métrage met en scène un écrivain invité lors d'une émission de radio. Alors même qu'il nie l'existence de l'amour, affirmant que tout n'est régit que par l'instinct, l'un de ses détracteurs lui demande de prouver ses dires. C'est ainsi que ce dernier se retrouve invité le soir-même en compagnie de son épouse dans la demeure de l'écrivain. Le couple va alors se retrouver prisonnier de leur hôte qui va leur démontrer la véracité de ses propos.

L'ombre du marquis de Sade plane sur ces trois courts-métrages de José Mojica Marins. Entre un fabricant de poupées dont les yeux sont ceux de victimes tombées entre les griffes de ses filles, un bossu nécrophile et fétichiste amoureux du cadavre d'une jeune femme récemment décédée, et un écrivain persuadé que l'amour n'est qu'une chimère, le cinéaste laisse libre court à ses obsessions. Torture physique et mentale, viols, meurtres, avec toujours en toile de fond cette religion qu'il dénigre. Mais cette fois-ci, le livre de la Genèse sert de toile de fond au récit. En effet, la création du monde par Dieu sert les desseins de cet écrivain fou qui sacrifie sur l'autel de sa foi deux innocents. Le premier court-métrage est sans doute celui qui se rapproche le plus de ce que l'on pourrait considérer comme une anthologie fantastique, bien que ce type d'élément soit absent de ce O Estranho mundo de Zé do Caixão. Le second demeure, lui, le plus étrange. Muet et simplement accompagné d'une bande-son barrée, Tara est comme un mauvais rêve dont on ne pourrait fuir. Relativement morbide du fait de son approche, il est à l'opposé de Ideologia puisqu'il pousse à l'extrême le sujet de l'amour ressenti bien au delà de la mort. O Estranho mundo de Zé do Caixão est une œuvre intéressante à bien des égards. Le fait qu'il s'agisse à nouveau d'une incursion dans l'esprit torturé du cinéaste n'est à ce sujet, pas des moindres...

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