Pour bon nombre d'individus, le nom de Ken Foree aura sans doute
autant d'impact qu'une salade manquant d'assaisonnement. Pour
d'autres, par contre, certainement plus rares, sa force d'évocation
les renverra à l'époque où les zombies étaient traités avec
infiniment moins de mépris que dans les innombrables navets qui
sortent depuis quelques années, et surtout, depuis que le thème est
devenu une manne financière. En 1978, entouré de David Emge, Scott
H. Reiniger, de Gaylen Ross, et dirigé par l'immense George A.
Romero, Ken Foree interprétait le rôle de Peter dans le cultissime
Dawn of the Dead. Sans doute possible, l'un des deux ou
trois plus grands films de zombies de l'histoire du genre. Durant des
décennies, ce grand « black » au
regard quelque peu globuleux n'était demeuré rien d'autre que ce
personnage charismatique combattant dans l'enceinte d'un centre
commercial, une horde de morts-vivants à peine décharnés. Qui
s'était soucié, alors, de savoir dans quel autre long-métrage il
avait bien pu tourner par la suite ? Pourtant, Ken Foree n'a
jamais vraiment cessé de jouer, et en quarante ans de carrière, a
interprété plus de trente rôles au cinéma. Dont le personnage de
Buford 'Bubba' Brownlee dans ce From Beyond
qui nous intéresse ici. Il s'agit du deuxième long-métrage de
Stuart Gordon pour le grand écran, toujours produit par Brian Yuzna.
Certains liens demeurant apparemment indissociables, on notera
également le fait que le rapport entre le nom du docteur interprété
par l'actrice Carolyn
Purdy-Gordon (épouse du réalisateur depuis maintenant cinquante
ans) et l'écrivain Robert Bloch n'est pas le fruit du hasard puisque
ce dernier et l'auteur de la nouvelle ayant inspiré
From Beyond,
une fois encore, H.P. Lovecraft, étaient amis. Ce dernier ayant donc
volontairement donné le nom de l'écrivain à ce personnage féminin
lors de l'écriture de la nouvelle. D'autres corrélations ?
Robert Bloch,
encore lui, fut l'auteur du roman Psychose
ayant inspiré le chef-d’œuvre d'Alfred Hitchcock. Dont le thème
principal fut adapté par le compositeur Richard Band l'année
précédente pour le premier long-métrage de Stuart Gordon, lequel
participe également à la composition de la partition musicale de
From Beyond.
Une fois encore, l'acteur Jeffrey Combs est au centre d'un récit qui
mêle à nouveau expériences scientifiques et manipulations
génétiques. Barbara Crampton reprend du service, cette fois-ci dans
le rôle du docteur Katherine McMichaels. Un fois encore, le film
propose un portrait de méchant bien gratiné. David Gale est
désormais remplacé par un Ted Sorel dont le personnage n'est pas
moins obsédé par le sexe que le docteur Carl Hill de Re-Animator.
Tous ces menus détails apportent une certaine cohésion dans cet
ensemble de films inspirés des ouvrages de H.P. Lovecraft mis en
scène par le duo Gordon-Yuzna.
Ceci
dit, passons maintenant à l'objet de cet article : From
Beyond.
intitulé pas moins intelligemment chez nous Aux
portes de l'au-delà,
le film de Stuart Gordon souffle un véritable vent de perversion qui
n'avait pas vraiment lieu auparavant, sauf peut-être lorsque le
docteur Carl Hill enfonçait sa tête coupée entre les cuisses de
Barbara Crampton lors du final délirant de Re-Animator.
Peut-être plus lubrique encore que Hill, quoique la chose soit moins
visible dans son regard, le docteur Edward Pretorius apparaît très
vite comme un individu pervers que son statut de chercheur ne rend
pas moins dérangeant. Amateur de fessées, il se mue en une créature
multiforme que n'aurait peut-être pas renié David Cronenberg à un
certain moment de sa carrière.
Barbara
Crampton, quant à elle, qu'elle porte lunettes et tailleur ou
qu'elle se réveille les cheveux entremêlés, elle demeure toujours
aussi... désirable. A la seule condition de pouvoir faire
abstraction de l'horrible doublage français qui lui donnerait
presque les allures d'une maîtresse S.M si sa blondeur ne lui
permettait pas de conserver son angélique beauté... Le regard
toujours aussi frondeur, Jeffrey Combs interprète un personnage
cette fois-ci beaucoup plus fragile. Les effets-spéciaux conçus par
un quatuor de spécialistes permettent à Stuart Gordon de laisser
libre court à sa délirante inspiration. Quoiqu'ils aient quelque
peu vieilli, ils demeurent pourtant assez originaux dans leur
conception et leur aspect. Les éclairages parfois outranciers se
reflétant sur l'organisme torturé du personnage incarné par Ted
Sorel lui confèrent le même aspect érotico-gore que les scènes
d'ébats du Society que réalisera trois ans plus tard
Brian Yuzna.
Mais
au final, From Beyond ne
se révèle être qu'une cruelle déception. Pas
vraiment en odeur de sainteté avec votre serviteur à l'époque de
sa sortie, le long-métrage de Stuart Gordon l'est malheureusement
encore moins plus de trente ans après. Si les rares scènes gore et
une barbara Crampton sexy retiennent l'attention du spectateur, le
récit se révèle assez sommaire. Bien moins sympathique que
Re-Animator,
cette seconde incartade du cinéaste dans l'univers de H.P.Lovecraft
est donc décevante...
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