Mort à l'âge de cinquante-trois ans seulement, le cinéaste
français Patrick Schulmann n'aura eu le temps que
de réaliser neuf longs-métrages, souvent atypiques. Du plus connu
d'entre eux (Et la tendresse ? Bordel
! et sa suite Zig
Zag Story) au dernier, réalisé en
1998, Comme une Bête, en passant par l'excellent P.RO.F.S
et Les Oreilles entre les Dents.
Ce dernier, Patrick Schulmann le tourne en 1987. Il y mélange
comédie et policier et retrouve certains interprètes de ses œuvres
passées, offrant à certains d'étranges pseudonymes. Jean-Luc
Bideau y est Jean-Paul Blido, un criminologue enquêtant sur une
série de crimes dont les victimes sont toutes retrouvée mortes les
oreilles entre les dents. Fabrice Luchini est sourd (mais pas muet)
et se nomme Luc Fabri. A leurs côtés, on retrouve Philippe Khorsand
en mythomane épris de reconnaissance commettant un crime en tout
point similaire aux autres afin d'être arrêté et rendu célèbre
dans les médias. Laurent Gamelon (le professeur de sport dans
P.RO.F.S)
est un journaliste qui auprès de la jolie Léa Stagnari (Jeanne
Marine) mène sa propre enquête afin de confondre le coupable du
premier meurtre. Du premier seulement puisque on le découvre très
vite, les meurtres suivant vont être commis par des tueurs
différents. L'une des victimes, un inspecteur des impôts est tué
par un couple dont il avait la charge de vérifier les comptes. Une
autre meurt accidentellement alors qu'elle fuit deux agents
d'entretien de la municipalité qui pour ne pas être inquiétés,
transforment l'accident en meurtre perpétré par celui dont tout le
monde parle en ville. D'autres crimes sont commis en ville sans que
personne ne parvienne à mettre un nom sur le coupable.
Ou
plutôt DES noms puisque l'originalité de ces
Oreilles entre les Dents demeure
dans le fait qu'il n'existe non pas un meurtrier mais plusieurs. Le
coupable que recherchent Max le journaliste et Léa n'est en fait
l'auteur que d'un seul meurtre, les autres étant l’ouvre
d'opportunistes se servant du prétexte selon lequel il y aurait un
tueur en série qui sévit pour se débarrasser d'individus gênants.
D'où de nombreux quiproquos et d'innombrables situations ubuesques
dont seul Patrick Schulmann avait le secret. Le film concentre alors
sont intérêt autour du personnage interprété par Jean-Luc Bideau.
Si le métier de profiler semble officiellement exister depuis les
années quarante, à l'époque de la sortie de Les
Oreilles entre les Dents
le terme n'avait jamais été évoqué dans le cinéma français
alors même que dès la décennie précédente, le métier de ces
enquêteurs s'enfonçant dans la psyché des grands tueurs en série
avait été admirablement évoqué dans le glacial Manhunter
de Michael Mann. Mais ici, rien de bien sérieux. Aidé de deux
enquêteurs criminologues, Jean-Paul Blido tente de dresser un
portrait (à géométrie variable) de celui qui terrorise la
population et fait parler de lui dans les différents médias. Et
comme chaque meurtre est perpétré par un individu différent,
forcément, le portrait change également. Ce qui nous vaut des
scènes totalement burlesques et une identification du tueur parfois
surréaliste.
Les
Oreilles entre les Dents est
une excellente parodie de film noir que l'on rapprochera sensiblement
du Téléphone sonne
toujours deux Fois avec
Les Inconnus. Un long-métrage sortant des sentiers battus, à
l'humour parfois très noir et aux dialogues incisifs. Une œuvre qui
ne dépareille absolument pas dans la filmographie d'un cinéaste qui
a su créer un univers qui lui était personnel. Un auteur à part
entière, grand cinéphile de son vivant, et dont on ne cesse de
regretter la disparition...
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