FAN-TAS-TI-QUE ! Je me suis défloré devant Les Mutants
de l'Espace. Première relation sexuelle, délirante,
zoophile, spatiale, orgasmique, politique et scientifico-fictionnelle
en compagnie du dessinateur américain Bill
Plympton. Un univers bien à lui. Bancal, grouillant de
contre-plongées, d'angles morts, de traits grossiers, d'hémoglobine.
Un langage ordurier, un univers parallèle, des couleurs pastels, un
amour passionnel et (TRES) charnel. Un papa astronaute, une fillette
qui attend son retour. Un Docteur-Dictateur-Dément. Une bande-son de
western, de film d'espionnage et d'oeuvre poétique. Bill Plympton
bossant sur sa planche à dessins, à la lumière d'une lampe,
agrippé à ses feuillets, donne vie à un univers personnel aussi
foutraque que décadent. Aussi beau que monstrueux. Ces Mutants
de l'Espace ne ressemblent à rien
si ce n'est à l'univers du dessinateur lui-même. Des monstres venus
d'ailleurs. Des nez, des pieds, des mains, des bouches ou des
langues. Comme si ces créatures venues d'un autre monde où s'est
échoué le héros Earl Jensen étaient les pièces d'un immense
puzzle constituant l'origine de l'être humain. Serions-nous donc
tous issus d'un seul et même lieu ? L'espace et ses confins
inaccessibles ? Aucuns de la Terre actuelle mais tous d'une
origine commune ?
Un
hamster, un cochon, un crocodile ou un vers de terre. Tous mutants,
tous dans des proportions gigantesques auxquels Earl a fait l'amour
lors d'un sabbat érotico-zoophile (véridique!) pour qu'en
remerciement, ils l'aident à se venger du docteur Frubar, président
des États-Unis. Un Donald Trump avant l'heure. Tyrannique, despote,
caricatural et obscène. Ce qui sépare d'ailleurs le plus ces deux
hommes est que celui qu'exhibe Bill Plympton est le genre à vouloir
toujours plus d'argent. Quitte à tuer dans l’œuf un projet de
milliards de dollars. Quitte à émouvoir la population et la motiver
à verser plus ou moins d'argent pour que l'aventure spatiale puisse
continuer.
A
travers un spectacle en perpétuel délire, Bill Plympton critique
une société américaine outrancière. Il s'amuse tout d'abord avec
ses crayons, et avec un sens de la mise en scène, à nous faire
croire à ce que notre cerveau imagine se passer à l'instant T.
Toute cette sexualité refoulée et que l'on aimerait voir s'exprimer
n'est que l’œuvre de notre matière grise tandis que l'auteur des
Mutants de l'Espace se joue de nous. Et comme pour s'excuser de nous
avoir trompés en élargissant les planches, il exécute directement
après des pirouettes érotiques fantastiquement drôle. Des rapports
solitaires de la secrétaire de direction de l'infâme Frubar,
jusqu'aux ébats amoureux de Josie Jensen (la petite fille qui depuis
la mort tragique de son père a bien grandit). Une exposition
bouillonnante forcée par des traits exprimant avec rage les
sentiments les plus sauvages. Principe que le dessinateur reprendra
au moment d'exploiter le comportement des citoyens face à l'invasion
des mutants du titre. Comme les dialogues, le trait est grossier mais
sied parfaitement au style et au découpage de l'intrigue.
Les Mutants de
l'Espace n'est
pas qu'une pure satire de la société américaine, celle avec
laquelle il entretient, semble-t-il, des rapports houleux. Elle sert
en réalité davantage de prétexte que de morale à son œuvre. Le
film est un tourbillon d'images où se télescopent une liste
insensée d'idées juteuses, scabreuses, poétiques ou encore
écologiques (et la liste est encore longue) créant ainsi avec Les
Mutants de l'Espace,
un genre à part entière qui s'éloigne très largement des
stéréotypes du dessin-animé sur lesquels Walt Disney et consorts
semblaient avoir jusque là, le monopole...
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