Pour revoir "L'extravagant
monsieur Piccoli", cliquez sur l'affiche ci-dessus
Après la diffusion hier soir sur l'excellente chaîne culturelle
franco-allemande Arte du film de Jacques Rouffio 7 Morts sur
Ordonnance,
ceux qui fuient habituellement leur écran de télévision mais qui
pour une fois ont eu la judicieuse idée de l'allumer pour
s'instruire (et non pas s'abrutir) devant un programme intelligent
ont pu assister à un très bel hommage rendu à l'immense Michel
Piccoli. Âgé aujourd'hui de quatre-vingt onze ans, cet acteur qui
se prédestinait avant tout à une carrière de comédien de théâtre
s'est surtout fait apprécier du grand public grâce aux innombrables
personnages qu'il a incarné au cinéma. Bien que les réalisateurs
se soient succédé durant sa très longue carrière débutée en
1945 lorsqu'il interpréta un figurant dans Le
Cavalier de Riouclare
de Christian-Jaque, on apprend que c'est grâce à ce que l'on
nommait encore le petit écran que Michel Piccoli s'est ouvert au
grand public avec son interprétation du Dom Juan de Molière dans
l'éponyme Dom Juan ou le
Festin de pierre.
Pas spécialement beau, mais sans doute jamais aussi laid que
certains de ses personnages, Michel Piccoli incarnait ici le rôle
d'un séducteur. Un personnage qu'il entretiendra jusqu'à
l'explosion signée Marco Ferreri, La
Grande Bouffe.
Si
Arte a choisi de diffuser en première partie une œuvre de Jacques
Rouffio dont l'une des spécificité (en dehors d'être pétrie de
qualités) est d'avoir fait jouer deux des plus grands acteurs
français sans qu'aucun n'aie partagé la moindre ligne de dialogue,
c'est pourtant la complicité entre l'acteur et trois autres
cinéastes que le réalisateur et auteur de documentaires français
Yves Jeuland a choisi de mettre en avant. Marco Ferreri, Luis
Buñuel
, et Claude Sautet.
Un
italien, un espagnol et un français. Ç’aurait pu être le début
d'une bonne blague mais l'histoire que partageront ces trois grands
metteurs en scène et leur acteur fétiche donnera lieu à des œuvres
qui bouleverseront le paysage cinématographique français. Ferreri
mort en 1997,
Buñuel
en 1983 et Sautet en 2000. Piccoli ? Toujours vivant et se
demandant ce que retiendra la postérité de son oppulente carrière
au cinéma. L'extravagant
monsieur Piccoli s'ouvre
sur la silhouette de l'acteur nonagénaire. Filmé presque de dos,
devant un piano, comme des images volées, une intimité dévoilée,
violée par l'objectif de la caméra d'Yves Jeuland. On apprend (pour
ceux qui l'ignoraient comme moi), que l'acteur a partagé la vie de
la chanteuse Juliette Greco. Un mariage qui dura dix ans. Mais sans
doute, les mariages les plus célèbres de Michel Piccoli furent ceux
qu'il concrétisa auprès des trois cinéastes cités plus haut.
Entre 1956 et 1977, Luis
Buñuel et Michel Piccoli vont tourner à sept reprises. Le
Journal d'une Femme de Chambre,
Belle de Jour
ou Cet Obscur
Objet du Désir
pour ne citer que les plus célèbres. Pour Claude Sautet, l'acteur
français acceptera de jouer à quatre reprises (cinq si l'on tient
compte de sa participation en tant que narrateur dans César
et Rosalie en
1972). Ce sera surtout l'occasion pour Michel Piccoli de partager par
trois fois, l'affiche avec l'égérie de Claude Sautet, l'immense
actrice allemande Romy Schneider avec laquelle il joua dans Les
Choses de la Vie,
Max et les Ferrailleurs et
Mado.
Michel
Piccoli, ou plutôt ses personnages, pouvaient à l'occasion, faire
preuve d'une grande violence verbale. Au point que certains de ses
partenaires se demandaient parfois si c'était Piccoli ou le
personnage qui s'exprimait. Claude Sautet considérait l'acteur comme
son double, l'interprète de Vincent,
François, Paul... et les autres
mimant presque son auteur lorsqu'il s'habillait et fumait une
cigarette.L'un des cinéastes qui participa au changement de style de
l'acteur fut le cinéaste Marco Ferreri. Alors qu'ils tournèrent
sept fois ensemble entre Dillinger
est Mort en
1968 et Y'a
Bon les Blancs
en 1988. C'est sans doute grâce (ou à cause diront certains) de la
pantagruélique Grande
Bouffe
que Michel Piccoli a révélé un visage différent du séducteur
qu'on lui connaissait jusque là. Véritable ode au suicide, à
l'amour, à la merde et à la nourriture, tout semble avoir été
déjà dit, entre ce qu'ont pu supposer les critiques acerbes de
l'époque, les interprètes du film, et le cinéaste lui-même. Reste
une œuvre dérangeante et magnifique. Poétique et scatologique.
Sans doute l'une des plus grandes de son auteur qui l'année suivante
réengagea le quatuor de La Grande Bouffe pour son délirant Touche
pas à la femme blanche ! Piccoli
donc, mais également Marcello Mastroianni, Philippe Noiret et Ugo
Tognazzi.
L'extravagant
monsieur Piccoli ne
revient donc pas de manière exhaustive sur la carrière de l'immense
acteur français mais demeure un très bel hommage rempli d'images
d'archives inédites ou peu connues. Un très beau documentaires pour
les fans de cinéma en général et de ce grand monsieur qu'est
Michel Piccoli...
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