La Nouvelle Vie de
Paul Sneijder de Thomas Vincent, c'est un peu comme Le
Tout Nouveau Testament de Jaco van Doarmel. Si le traitement
de l'intrigue s'éloigne très largement de ce à quoi l'on pouvait
s'attendre, la déception n'est fort heureusement pas au rendez-vous.
Jamais ! D'un côté, Thierry Lhermitte. De l'autre, Benoît
Poelvoore. Deux acteurs que l'on a plus souvent l'habitude de voir
dans des comédies mais qui ne se sont jamais refusé quelques rôles
plus graves. C'est ainsi donc que j'ai découvert le dernier
long-métrage de Thomas Vincent. Une comédie ? Oui, certes,
mais pas seulement. Un drame également, et pas simplement une
comédie dramatique. Car de ruptures de ton en changements d'humeur,
La Nouvelle Vie de Paul Sneijder
assène le même genre de sentiment que le film auquel je le compare
juste au dessus.
Majoritairement
apprécié de la presse spécialisée, je me suis tout de même
penché sur l'avis d'un certain F.F qui n'a visiblement pas éprouvé
la moindre émotion devant cette petite merveille qui renouvelle
plusieurs genres à travers un récit, certes, très académique (un
homme victime d'un curieux accident dans lequel sa fille a perdu la vie tente de remonter la pente
malgré des souvenirs diffus, une épouse carriériste et
« intéressée, et l’imminence d'un procès dont il ne sait
s'il va aller jusqu'au bout) mais réalisé d'une main de maître par
un Thomas Vincent qui aborde son sujet de manière très intelligente
parfois extraordinairement sensible.
« Comment
un bon livre est-il devenu ce film médiocre ? L'image est
constamment laide, le décor (banlieue de Montréal ?) est
insignifiant […] Thomas Vincent filme la déprime du personnage
[...] mais ne réussit guère à faire partager cet intérêt. »
Très
amusant, et surtout parfaitement incompréhensible, surtout lorsque
l'on se trouve devant l'écran, saisit par des images au contraire
judicieusement filmées. Pas du sépia mais presque en monochrome
grisâtres, accompagnés parfois d'effets visuels étonnants. Si F.F
semble s'être copieusement ennuyé, dommage pour lui, mais tel n'a
pas été mon cas. Bien au contraire, l'intérêt de cette Nouvelle
Vie de Paul Sneijder que
partage avec nous l'exceptionnel Thierry Lhermitte est d'aller
parfois là où on n'attend pas forcément son personnage. Et puis,
il y a cette manière remarquable qu'à le cinéaste de filmer
parfois son acteur principal en gros plan, légèrement de biais,
nous faisant partager avec lui tout ce qui semble le « travailler ».
Car plutôt que d'en faire un personnage s'apitoyant sur son sort,
il en fait au contraire un homme qui désire aller de l'avant, sans
même se préoccuper du « qu'en-dira-t-on »
que professent certains et non des moindres puisque sa propre femme
(la géniale mais glaçante Géraldine Pailhas) semble tout faire
pour détruire le nouvel idéal de ce Paul Sneijder attachant, vivant
sa douleur avec une très grande pudeur.
Et
que dire des acteurs québécois que le cinéaste français met en
scène avec autant de rigueur que le personnage campé par Thierry
Lhermitte. Pierre Curzi et Guillaume Cyr. Un avocat et le responsable
d'une entreprise chargée de promener les chiens. Deux individus de
milieux sociaux différents (que les dialogues respectifs n'oublient
pas de distinguer), exceptionnels de bonté et incroyablement bien
interprétés, aidés en cela par de très bons dialogues écrit par
Thomas Vincent lui-même et par Taël Cojot-Goldberg également. La
tension dramatique de certaines scènes dont quelques-unes sont
capables de faire se dresser les cheveux sur la tête (l'internement)
sont heureusement pour notre plus grand bonheur désamorcées lors de
situations parfois surréalistes. Nous ne sommes pas prêts d'oublier
le personnage de Benoît Charistéas, collectionneur de nombres
premiers ou bien encore l'acteur lui aussi québécois, Hugo Dubé,
dont les rapports avec sa chienne Charly demeureront éternellement
ambigus.
La
bande originale elle-même participe grandement à l'univers créé par Thomas Vincent et ce, grâce aux talents conjugués des
compositeurs Lionel Flairs, Benoît Rault et Philippe Deshaies
(membres du groupe electro Hit'n
Run)
et de Jeanne Trellu. Entre compositions surréalistes provenant
parfois du même moule que l'oeuvre d'un certain Quentin Dupieux et
titres blues-folk interprétés par le duo canadien Timber
Timbre.
L'une des plus belles surprises de cette fin d'année demeure donc
cette Nouvelle Vie de Paul Sneijder de
Thomas Vincent...
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