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vendredi 27 mai 2016

Der Todesking de Jörg Buttgereit (1990)



Un film sur le suicide, ça vous tente ? Pour son troisième volet de la tétralogie de la Mort (après les deux premiers Nekromantik et juste avant Schramm), Jörg Buttgereit s’attelle donc à nous faire vivre les derniers instants de quelques individus pris au hasard. Enfin, lorsque l'on parle de hasard, un doute subsiste puisque dans l'un des sketchs on apprend qu'une curieuse société propose aux gens de se suicider. Le cinéaste s'emploie donc à nous narrer à sa façon, le cheminement qui pousse ces êtres communs à en finir avec leur existence, il est vrai, plutôt sinistre.

Lundi.
A commencer par cet homme célibataire qui, semble-t-il, est amoureux des poissons. Il en possède un dans un bocal, l'un des murs de sa chambre arbore fièrement un tableau recensant un certain nombre de spécimens, et l'homme va même jusqu'à en manger (ici des sardines en boit). Maniaque de la propreté, il semble avoir envie de quitter notre monde en laissant derrière lui un appartement nickel. Comment un homme peut-il en arriver à ce point d'envie de mourir et penser en même temps à passer l'aspirateur dans son salon, laver la vaisselle et faire propre l'évier ? Une mort clean, c'est ce qu'il a choisi. Il se rase, se lave les dents et fait couler un bain. Il se déshabille, enfonce ses chaussettes roulées en boule à l'intérieur de ses chaussures puis ôte son tee-shirt, son pantalon et son slip qu'il pose soigneusement sur une chaise. Puis il s'allonge doucement au fond de l'eau et avale tout une série de pilule préalablement posées sur le bord de la baignoire. Fin.

Mardi.
Un homme ouvre sa boite aux lettres, file droit jusqu'au vidéoclub de son quartier (tenu par Jörg Buttgereit lui-même) et hésite entre plusieurs cassettes vidéos avant de jeter son dévolu sur Vera-L'ange Fatal De La Gestapo. Une fois à la maison, il glisse la cassette dans le magnétophone et visionne le contenu du film. Des scènes de torture sur fond d'Allemagne nazie. De quoi faire perdre la tête au type qui bute sa femme illico-presto avant de se pendre. Fin.

Mercredi.
Une jeune femme marche sous la pluie et vient s'asseoir sur un banc. A ses côtés, un inconnu se met alors à lui expliquer que sa femme perdait du sang durant leurs rapports. Des propos incohérents qui viennent justifier la manière dont il a donné un terme à leur mariage. La jeune femme assie à ses côtés se saisit du revolver qu'elle cache dans son sac à main. Mais lorsqu'elle tire, le coup de part pas. L'homme en profite pour se saisir de l'arme et se placer le canon de l'arme dans la bouche après l'avoir armée. Le coup part. Fin.

Jeudi.
Des ponts. Que des ponts. Rien que des ponts. Que viennent légender des noms d'hommes et de femmes. Leur profession aussi. Des inconnus que l'on comprend être des personnes qui se sont suicidées en se jetant de ces édifices. Fin.

Vendredi.
Une femme d'un certain âge aperçoit en regardant par la fenêtre un jeune couple qui s'embrasse un peu plus bas dans l'immeuble. Elle tente par tous les moyens d'entrer en contact avec eux (en descendant frapper à leur porte et en leur téléphonant) mais ils ont disparu. La femme se remémore son enfance lorsqu'elle surprit ses parents faisant l'amour. C'est alors que l'on découvre les corps des deux jeunes adultes qui s'embrassaient tout à l'heure, gisant dans leur lit et couverts de sang. Fin.

Samedi.
Une jeune femme s'affuble d'une caméra et part assassiner des gens au hasard des rencontres. Fin.

Dimanche.
Un jeune homme semble en proie à des démons. Agité, nu et allongé dans son lit, il se tient la tête avant de chuter au sol. Ni pouvant plus, il se traîne jusqu'au mur où là, il se cogne le front plusieurs fois jusqu'à ce qu'il trouve la mort. Fin.

Si l'idée de réaliser une œuvre sur un sujet aussi sensible que le suicide pouvait sembler bonne, l'amateurisme cher à Jörg Buttgereit donne à l'ensemble de ce Der Todesking un arrière goût d'inachevé. Et c'est peu de le dire puisque l'interprétation et ce rythme toujours amorphe qu'insuffle le cinéaste gâche les possibilités infinies qu'offre un tel sujet. Pas de gore (ou si peu), des situations pas toujours crédibles (la lettre envoyée à ces individus et qui les pousse au suicide), se mêlent à quelques idées très intéressantes. Comme de faire parler le béton de ces immenses structures que sont les ponts sans nous montrer la moindre image choc et juste en énumérant le noms de victimes. Ou bien encore cette bobine qui s'affole durant le discours perturbé de l'homme assis sur la banc. Cette dernière scène est sans doute d'ailleurs la plus saisissante du film. Chaque acte est lié au suivant par la vision d'un cadavre qui se décompose à vitesse accélérée.

Der Todesking n'est pas un mauvais film mais n'est pas non plus indispensable. Beaucoup moins lent que son précédent Nekromantik 2, il demeure cependant encore beaucoup trop mou pour être divertissant. Dans la courte filmographie du cinéaste, il y a comme une évolution certaine dont l'aboutissement sera son excellent Schramm...

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