Le 6 décembre 1989, un
jeune étudiant à l'école polytechnique de Montréal a décidé
d'en finir avec la vie. Après avoir écrit une longue lettre dans
laquelle il revendique et explique les raisons de l'acte qu'il va
bientôt accomplir dans l'établissement scolaire, il prépare un
fusil et emporte plusieurs chargeurs avec lui. A l'école
polytechnique, les étudiants vaquent à leurs occupations. Valérie
s'apprête à passer un entretien afin d'être admise à un stage de
mécanique tandis que Jean-François, lui, étudie.
La jeune femme rejoint sa
classe en compagnie de sa meilleure amie Stéphanie, bientôt
suivies de Jean-François. Alors que leur professeur donne son cours,
le jeune étudiant armé de son fusil fait irruption dans la salle.
Après avoir tiré un coup en l'air, il ordonne à tous les hommes
présents d'évacuer la salle. Les femmes étant cantonnées au fond
de la pièce, le jeune homme les exécute sommairement. Dehors, la
foule commence à prendre conscience du drame qui se joue dans
l'établissement. Toutes les femmes qui passent à proximité du
tueur risquent leur vie, le jeune homme ayant concentré ses tirs sur
elles, épargnant ainsi les hommes...
En adaptant un fait
divers authentique ayant ensanglanté l'école polytechnique de
Montréal au Québec en 1989, le cinéaste Denis Villeneuve s'empare
d'un sujet grave pour en faire une œuvre magnifique. Sobrement
intitulé Polytechnique, son film est un témoignage
terrible et bouleversant d'une tragédie mais aussi des conséquences
qu'elle va avoir sur l'état mental de celles et ceux qui l'ont vécu.
En respectant scrupuleusement certains aspects de l'affaire décrite
à travers le regard et les paroles de plusieurs victimes (ici les
personnages de Valérie (Karine Vanasse) et Jean-François (Sébastien
Huberdeau)), Denis Villeneuve crée une œuvre à la fois réelle et
imaginaire.
Pour n'en point faire un
héros, du moins pas le principal de cette intrigue, le tueur de
Villeneuve n'aura pas de nom à proprement parler. Simplement décrit
comme étant « le tueur », le film s'ouvre cependant sur
une lettre explicative écrite par la main-même du tueur. Un jeune
homme qui explique, intelligemment d'ailleurs, les raisons qui vont
le pousser des actes aussi horrifiant que l'élimination pure et
simple des jeunes femmes qui hantent les couloirs de l'établissement
scolaire dans lequel il étudie tout en sachant qu'il n'ira jamais
jusqu'au bout de ses études. Avec modestie, il reconnaît être
brillant, et le message qu'il tente de faire passer à travers cette
lettre qui explique également qu'il mettra un terme à ses jours ne
demeure pas en tout points totalement délirant.
Fou, le tueur de Denis
Villeneuve ne l'est sûrement pas. Plutôt la victime d'une certaine
lassitude et probablement dans un état dépressif insurmontable. Le
cinéaste aurait pu se résoudre à ne montrer que la tuerie de
manière froide et clinique mais il tient à donner la parole aux
victimes même lorsqu'elles connaissent une fin tragique.
Polytechnique est
aussi une œuvre sur l'après-tuerie. Sur ceux qui tentent de
survivre émotionnellement à l'horreur sans pour autant toujours y
parvenir. Denis Villeneuve décrit deux approches d'une réalité qui
hante encore longtemps celles et ceux qui l'ont vécue de plein
fouet. Entre Jean-François qui ne résiste pas à la « tentation »
de suivre le même chemin que ceux qui sont morts là-bas, et une
Valérie combattante mais à l'intérieur, toujours marquée par ce
fameux 6 décembre 1989.
La
particularité de Polytechnique est
de n'être presque exclusivement interprété que par de jeunes
acteurs. Martin Watier, Maxim Gaudette, Karine Vanasse, Sébastien
Huberdeau et les autres assurent une interprétation sans faille et
la mise en scène toute en finesse et magnifiée par un superbe noir
et blanc font de cette œuvre une très belle réussite, que
certaines scènes filmées en plans-séquences auraient pourtant
peut-être rendu encore plus flamboyante...
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