Une immense casse de
voiture sert d'abris à une bande de clochards commandée par le
dangereux Bronson, ancien combattant de la guerre du Vietnam qui a
laissé quelques plumes et est revenu avec le cerveau fêlé et la
curieuse habitude de fabriquer des couteaux à partir du fémurs de
ceux qui ont la malchance de tomber entre ses mains. Dans cette zone
crasseuse demeurent également Fred et Kevin, deux frangin qui
survivent tant bien que mal. Kevin entretient des rapports amicaux
avec la jolie Wendy, secrétaire de l'immonde propriétaire des lieux
qui aimerait en faire son quatre-heure.
Lorsque Ed, le
propriétaire d'une petite épicerie, met la main sur une caisse
renfermant de vieilles bouteilles d'alcool dans son arrière-boutique,
il décide de les mettre en vente à un dollar pour les clodos du
quartier. Mais ce qu'il ne sait pas, c'est que ces fioles renferment
une boisson corrosive dont les effets vont très vite se faire
ressentir parmi les clochards qui vont s'en procurer une...
"-
Vous êtes bien le genre de flic à profiter d'une infraction au code
de la route pour essayer de me violer.
-
Sûrement pas ma p'tite, t'es bien trop moche pour ça."
Premier et dernier film
de Jim Muro dont la carrière de cameraman l'a amené à travailler
aux cotés de Martin scorcese et de James Cameron, Street Trash
est l'un des plus célèbres et des plus réussis films gore de
l'histoire du cinéma. Réalisé il y a presque trente ans, l’œuvre
n'a pourtant pas à rougir face à tous ceux qui lui ont succédé.
Une affiche qui en dit long sur le contenu du film. Un univers
craspec, une irrévérence permanente. Ici, on pisse dans le dos des
flics violents. Ceux-là mêmes qui se font vomir pour couvrir du
contenu de leur estomac le visage d'un mafieux passé à tabac. On
joue au football américain avec le sexe du clochard qui a uriné au
mauvais endroit. On baise le cadavre d'une femme préalablement
violée la veille au soir par une bande de clodos vraiment
dégueulasses. On mélange la gnôle au contenu de sa vessie et on
partage le tout avec ses amis. Mais, surtout, oui surtout, on finit
par mourir d'étrange façon en buvant ces petites bouteilles de
"Viper" qui ont une action des plus curieuse sur ceux qui
en ingurgitent. Street Trash est ce que l'on peut appeler un
film gore multicolore. En effet, contrairement à ce que l'on avait
l'habitude de voir jusqu'à maintenant, les scènes d'horreur ne se
contentent plus de montrer des gerbes de sang mais ressemblent plus à
des feux d'artifices organiques de toutes les couleurs.
Rouge, donc, mais aussi
bleu, vert, jaune, Jim Muro choisi l'option colorée et fait de
Street Trash une œuvre, certes, très graphique, mais aussi
finalement très "grand public". Pourtant située dans un
univers particulièrement morbide que d'autres parviendront à rendre
véritablement dérangeant (Combat Shock de Buddy
Giovinazzo), le film est nanti d'un humour si présent qu'il peut se
voir également comme une comédie gore. Ce qui ne l'empêche pas
d'être très réussi en matière d'effets-spéciaux. La spécificité
de la boisson "Viper" est d'avoir une action différente en
fonction du profil de celui qui en boit. Street Trah demeure encore
aujourd'hui comme l'un des tout meilleurs films gore de l'histoire du
cinéma et se situe dans un univers qu'il est rare de voir abordé au
septième art...
Presque trente ans plus
tard, un duo explore à nouveau le phénomène en plongeant dans
l'univers crapoteux et sordide d'un ancien combattant qui n'a jamais
vraiment réussi à se débarrasser de ses démons. Totalement obsédé
par une hypothétique invasion de la Chine dont il compte les
habitants en nombre de dents (sic!), le héros de Crazy Murder
est à son retour de la guerre devenu un clochard à la logorrhée
verbale ne s'étendant pas au delà de quelques phrases du type
"Allez vous faire foutre". Il erre dans les rues
d'un New-York qui lui est étranger et qui, d'ailleurs, le lui rend
bien puisque marchant, sans but, et comme une ombre, il croise des
concitoyens qui ne le voient même plus. Il va vous falloir un
estomac bien accroché pour pouvoir ingurgiter le contenu de cette
œuvre signée Doug Gerbert et Caleb Pennypacker. Oubliez John
Waters, Pape des Détritus et Prince du Vomi. Le héros de Crazy
Murder enfonce toutes les portes du mauvais goût avec une
délectation que le public ne partagera peut-être pas forcément vu
le degré d'intensité des horreurs accomplies devant la caméra.
Plusieurs questions se
bousculent dans notre tête. S'agit-il d'une fiction, d'un
documentaire ? Kevin Kenny est-il un véritable acteur ou bien
un schizophrène dont on a autorisé la sortie le temps d'un
tournage ? Si l'histoire repose sur un principe simple,
l'intérêt demeure uniquement dans l'incroyable performance du
principal acteur. Fort heureusement puisque à part son hallucinante
interprétation, il n'y a pas grand chose à retenir. Alors, bien
évidemment, certains diront que Crazy Murder, c'est de la
merde. Ces critiques élitistes à l'avis sans nuances n'auront,
malgré leur jugement hâtif, jamais été aussi proches de la
vérité. Et cela, quel que soit le sens du mot "merde"
qu'ils aient pu entendre par là.
Le héros patauge dans la sienne. S'en sert comme d'une arme qu'il
manie avec autant de dextérité que le couteau dont il use pour
tuer, s'automutiler et se défendre. Mais contre qui ? Toujours
ses mauvais démons, ceux que sa conscience réveille le soir venu.
Blancs, noirs, jaunes, femmes, hommes et même nouveaux-nés, tout le
monde y passe.
"Maniac
+ Combat Shock + Rock N' Roll Overdose = Crazy Murder"
Kevin Kenny ose franchir une étape à laquelle beaucoup
d'autres auraient tenté d'échapper. Après quelques plans
dérangeants de laissés pour compte scrupuleusement respectés
puisque floutés au visage, son personnage débarque, expression de
folie pure dessiné sur le sien, regard halluciné, monologue haché,
incohérent, définissant ses obsessions, look de clochard encore
relativement "propre" si l'on tient compte du degré de
saletés qu'il va lui-même s'infliger. Les auteurs lui en ont
demandé beaucoup (trop?). Il y a surenchère. C'est crade, vraiment.
Repoussant, certainement. Jusqu’au-boutiste, indéniablement. Mais
contrairement à la majeure partie des films qui œuvrent dans ce
domaine, Crazy Murder possède ce petit quelque chose qui fait
que l'on ne peut l'oublier. Et cette chose, c'est une fois de plus
Kevin Kenny. Le bonhomme, excusez du peu, se chie dessus, vomit, erre
dans les rues le pantalon sur les genous et les matières fécales
dégoulinants le long de ses jambes. Pathétique mais aussi (presque)
émouvant dans sa tentative totalement ratée de séduction auprès
de cette jeune femme qui harangue les foules, l'acteur devient même
époustouflant lors des scènes qui le montrent en phase avec les
maux qui le taraudent.
On en viendrait presque à croire que tout ce à quoi
l'on assiste est vrai. Qui sait d'ailleurs, s'il ne vomit pas
réellement, s'il ne libère pas vraiment ses intestins de leur
contenu. Il y a des images qui ne trompent pas. Et dire qu'il existe
sur Terre des êtres qui vivent ainsi, en marge de cette société
puritaine qui ignore ses brebis aux abois. Crazy Murder est un
cas à part. Outrancier, mais peut-être quelque part, une pièce
essentielle qui colmate les besoins de certains cinéphiles en mal de
perversion et de vérité crue...
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