Lorsque le cinéaste
uruguayen Guillermo Amoedo boucle son dernier film, The Stranger,
il clôt également une trilogie hasardeuse liant trois œuvres ayant
comme point commun d'entretenir la légende du vampire sans en
emprunter un chemin romanesque mais en faisant de leurs créatures
des êtres souffrant d'une maladie comparable aux pires de celles que
l'homme n'est pas encore capable de vaincre. Presque vingt années
séparent chacun de ces films. A commencer par le héros de Martin
de George Romero dont Guillermo Amoedo reprend le prénom pour son
film. Un jeune homme obsédé par le sang et qui se prend pour un
vampire. 1976. Puis en 1995, c'est au tour d'Abel Ferrara de tourner
l'une de ses œuvres les plus réussies avec The Addiction.
Ici, l'analogie entre vampirisme et maladie sexuelle transmissible
est des plus flagrante. 2014, et donc à peu de chose près vingt ans
plus tard, c'est au tour de Guillermo Amoedo de donner sa vision
d'un phénomène traité davantage de manière réaliste que
fantastique bien que les éléments surnaturels viennent peu à peu
prendre le pas sur le concret.
Martin, donc, arrive en
ville avec la ferme intention de retrouver Ana, une ancienne petite
amie. En lieu et place de la demeure où vivait Ana se présente à
lui un gamin féru de graffitis, le jeun Peter. Ce dernier explique
alors à Martin qu'Ana est morte et enterrée dans le cimetière du
coin. Le soir même, le nouveau venu, assis sur un banc, est agressé
par trois voyous avant d'être laissé pour mort, une vilaine
blessure au ventre. Peter, qui a assisté de loin à l'agression, est
le témoin d'un curieux manège : le shérif de la ville, et
père de l'un des trois voyous, met le cadavre de Martin à l'arrière
de son véhicule de fonction dans l'intention d'aller l'enterrer dans
la forêt. Mai alors qu'avec l'aide de son fils Caleb il s'apprête à
commettre l'irréparable, il est appelé par radio sur les lieux d'un
crime. Laissant le corps de Martin sur le sol, les deux hommes
repartent dans l'intention de revenir plus tard. Mais Peter, qui a
tout vu, s'approche du corps de Martin qui respire encore. Le jeune
homme prend alors la décision de ramener l'étranger chez lui...
Voici donc comment débute
cette œuvre assez particulière puisque terriblement éloignée de
l'image que l'on se fait d'un film sur le vampirisme. Aujourd'hui, le
thème qui nous intéresse ici ne semble plus pouvoir être inscrit
autrement que dans un registre moderne, dans un univers où
l'individualisme est de rigueur et où l'amitié et l'entraide sont
automatiquement sanctionnées et marginalisées. Tourné fin 2013,
The Stranger a contrairement aux apparences été tourné dans
le sud du Chili. Le film de l'uruguayen a remporté un vif succès
auprès de la critique et à même remporté le prix du Meilleur film
ibéro-américain au festival européen de Sitges. On peut ne pas
aimer le film de Guillermo Amoedo qui s'inscrit dans une mouvance
différente des classiques du genre. Son film est noir, désespéré,
et parfois profondément inhumain. La violence y est présente à de
nombreuses occasions et l'acteur Cristobal Tapia Montt campe un
vampire pas vraiment sympathique. Du moins durant la première
partie, traitant son bienfaiteur de manière aussi abrupte que ceux
qui l'ont agressé. The Stranger est une œuvre à
l'atmosphère lourde qui conviendra aux amateurs d'ambiances
pesantes. Dans le genre, il renouvelle assez bien la légende de ces
héros aux crocs acérés et les personnages sont suffisamment bien
campés et dessinés pour que les spectateurs y accordent un réel
intérêt. Une bonne surprise...
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