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mardi 24 février 2015

Les Anges Violés de Koji Wakamatsu (1967)





Un an après Quand l'Embryon Part Braconner, Koji Wakamatsu développe à nouveau avec Les Anges Violés une part de ses obsessions envers la gente féminines. Après avoir fait preuve d'une saisissante animosité envers l'adultère et la séparation, il montre cette fois-ci une véritable amertume envers certaines pratiques sexuelles déviantes (pour l'époque) comme le lesbianisme et le voyeurisme. Invité par un quintette d'infirmières dirigé par une sixième dans un foyer, un intrus qui passait par là est attiré par le groupe de jeunes femmes et poussé à jeter un œil par delà un trou pratiqué dans un mur. Celui-ci donnant sur une chambre à l'intérieur de laquelle s'offrent l'une à l'autre deux des infirmières, plutôt que de profiter du spectacle, le jeune homme bondit à l'intérieur de la pièce et abat l'une des deux femmes. 

Commence alors un drôle de spectacle dans lequel l'homme joue le rôle d'un bourreau et les cinq infirmières encore en vie celui de ses proies.

Piégées entre les quatre murs de leur propre demeure, les infirmières attendent avec fébrilité le sort que leur a destiné le jeune homme qu'elles-mêmes ont invité. L'homme est donc armé d'une arme à feu dont il use sur une seconde, une troisième, un quatrième infirmière. Elles tombent les unes après les autres et ce qui rend plus dur encore pour les suivantes l'idée même de mourir est de disparaître sans en connaître les raisons.

"Il y a un serpent enroulé sur lui-même qui te pousse à tuer des gens"

L'une d'elles pourtant, la plus âgée et donc la plus mûre, tente de mettre un terme aux agissements du tueur. Elle dialogue avec lui. Ou plutôt, elle monologue puisque lui est encore sans doute ailleurs et pas encore prêt à entendre ce que lui confie l'ange qui dresse son portrait. La jeune femme affirme tout et son contraire mais devant l’impassibilité du jeune homme se révise et fuit devant ce dernier, allant même jusqu'à se réfugier derrière la protection de chair et de sang que représente la dernière des infirmières encore vivante.

Les Anges Violés est le prolongement du précédent film de Koji Wakamatsu. Au delà de ses obsessions, il y développe également son amour pour l'érotisme, démultipliant les corps féminins dénudés et les exposant parfois à outrance devant l’œil pervers de l'objectif. Au départ on assiste à la lente dégradation mentale d'un être qui assume avec la plus grande des difficultés de se retrouver devant la "Femme". Ensuite, les plans répétés de cadavre filmés jusqu'à la démesure reflètent plus l'esprit tourmenté du cinéaste qui abuse de vas et viens dans un mouvement qui se rapproche du tangage d'un bateau prêt à sombrer dans des eaux troubles. On remarquera d'ailleurs que Koji Wakamatsu insiste surtout sur le corps de la troisième victime, allongée sur le dos et baignant dans un mare de sang après avoir reçu une balle dans le bas ventre. Tout un symbole, une manière définitive de refuser à la féminité de s'exprimer. Plus de rapports sexuels possibles et aucune fécondité envisageable non plus. A moins qu'il ne s'agisse de la représentation maladive du cinéaste pour les règles, signe de fécondité chez la femme et début du chaos qui mène forcément à quelque chose de beaucoup trop pernicieux pour que ce jeune homme accepte de la laisser vivre.

Avant d'abandonner ses spectateurs à une poésie étrange dont le sujet est difficilement perceptible, Koji Wakamatsu offre une scène hallucinante durant laquelle il libère l'une de ses victimes en la transformant en l'un de ces fameux Anges Violés. Si le sacrifice reste filmé en noir et blanc, le résultat exhibé devant le regard de l'une des deux seules rescapées est lui proposé tout en couleurs maladives. Celles-ci expriment toute l'atrocité de l'acte et donnent davantage à l'ensemble les atours d'une antichambre de l'Enfer plutôt qu'à ceux d'un chemin pavé de lumière menant au paradis.

Les Anges Violés reste de nos jours bien sobre. Brutal et dénudé (au sens propre comme au figuré), il se regarde lui-même comme une curiosité, un délice japonais déviant qui ravira avant tout les amoureux du septième art avides de découverte.

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