Discuter au sujet de
Begotten s'avère une tâche délicate. Toute tentative
apparaîtra comme prétentieuse aux yeux de ceux qui auront abhorré
cette très curieuse pellicule. Difficile également d'en résumer le
contenu scénaristique tant l'image, l'absence de dialogues et de
repères font de cette œuvre un objet filmique unique en son genre.
Tout juste pourra-t-on le comparer au Eraserhead de David
Lynch qui lui est tout de même supérieur à tous points de vue.
Dans une maison délabrée
isolée au fond des bois, Dieu est en train de mourir. S'automutilant
à l'aide d'un rasoir et agité de soubresauts obscènes, il meurt
dans un flot de sang et une purée de viscères d'où naît une femme
superbe qui caresse le sexe de son géniteur. Jaillit alors la
semence de ce dernier, et que sa progéniture s'empresse de
recueillir et d'enfouir entre ses cuisses.
Cette entrée en la
matière a de quoi mettre mal à l'aise. La bande-son et l'image
crasseuse, granuleuse et saturée y participant grandement.
Viscéralement écœurante, la naissance nécrophilique à laquelle
ils sont témoins pousse un peu plus les spectateurs à prolonger
l'éprouvante séance de torture visuelle à laquelle ils sont
conviés. La nausée s'installe, et ce ne sont pas les chants de
cigales et la douce mélodie qui arrive ensuite qui inverseront les
effets maléfiques de cette bande underground. Alors on hésite :
Doit-on se forcer à tenir l'heure supplémentaire qui va suivre ou
bien doit-on abandonner tout de suite avant de tourner de l’œil ?
C'est au moment même où la question se pose que le décor change et
que l'on est invités à l'extérieur de la maison délabrée. Un lit
de terre d'où semble naître un individu de taille adulte. Un
terrain qui ressemble davantage à un charnier autour duquel traîne
des pieds, une bande d'humanoïdes décharnés.
Ce Fils de la Terre va
alors subir toute une série de tortures physique desquelles vont
jaillir les quatre éléments fondamentaux : D'abord extrait
d'une terre fertile, il est ensuite brûlé sur un bûcher, et donne
naissance au feu. Brutalisé, il reçoit, ainsi que ses
tortionnaires, la pluie. Cette même pluie qui forme de petite mares
et sans doute plus tard, de vastes mers et océans. Et pour finir, il
se traîne entre les sillons nés de vents violents. Ainsi naissent
la terre, le feu, l'eau et l'air.
C'est à un véritable
chemin de croix liant le Fils de la Terre à des tortionnaires par un
long cordon ombilical que l'on assiste donc. Une séance éprouvante
parfois visuellement indéfinissable. Le message paraît clair. Et
même si l'on peut supposer être dans l'erreur, surtout si l'on n'a
pas lu le moindre synopsis auparavant, certains détails ne trompent
pas quand au contenu de ce Begotten
vraiment particulier.
Premier
volet d'une trilogie poursuivie quinze ans plus tard avec Din
of Celestial Bird, le second
volet, Begotten fait
référence à la naissance du monde ainsi qu'à celle de la vie. Le
générique de fin aide grandement à situer les personnages. En
effet, à part quelques effets sonores, le film reste muet du début
à la fin. Pas un seul dialogue. Tout est dans le visuel. Et même si
celui-ci est rendu difficile par des effets de surexposition et par
un grain des plus grossier, on parvient tout de même à reconstituer
ce puzzle macabre mis en scène
par E. Elias Merhige.
Begotten
est
donc une œuvre forte, originale, déconcertante et maladive qu'il
faut avoir vu au moins une fois...
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