Si le final est
prévisible et inéluctable, c'est sans doute parce que la traversée
du héros ne pouvait s'achever autrement... Chaque fois que se
termine la projection d'une œuvre originaire du Maghreb, c'est
toujours la même question qui résonne en moi : Pourquoi
n'avoir jamais tenté de puiser davantage dans le vivier de ce cinéma
géographiquement proche du notre plutôt que de réserver la plupart
de mes séances au cinéma asiatique, européen ou outre-atlantique ?
Et comme d'habitude, je n'arrive jamais à obtenir la moindre
réponse. J'ai presque honte de l'avouer, mais parmi les quatre-mille
articles (et des poussières) que j'ai écrit en une petite quinzaine
d'années, j'ai fait le calcul. Et croyez-le ou non, si l'on s'en
tient à des œuvres tournées non pas seulement avec des acteurs
originaires de tel ou tel pays du Maghreb mais aussi et surtout dans
ces mêmes pays qui ont vu naître tout ou partie d'entre eux, seuls
deux longs-métrages me viennent en tête. Passons sur le récent et
désastreux Atoman d'Anouar
Moatassim, tentative moisie de film de super-héros marocain qui
coche toutes les cases du navet pour évoquer le sublime Animalia
de Sofia Alaoui, lui aussi originaire du Maroc, et qui avait réussi
à me saisir voilà un peu plus d'un an. Aujourd'hui, je découvrais
L'effacement
de Karim Moussaoui, cinéaste algérien dont je n'avais jamais
entendu parler jusque là et qui pourtant en est déjà à son
troisième film ! Attiré à l'idée saugrenue de découvrir une
énième itération du mythe de L'homme
invisible
malgré l'abominable expérience vécue avec Atoman,
quelle ne fut pas ma surprise de découvrir qu'en fait de film
fantastique, L'effacement
n'en a qu'une très vague apparence. De cette idée du héros dont le
reflet s'efface pour disparaître presque tout à fait, le cinéaste
n'en retient que la métaphore du personnage que l'on range dans un
coin. Dont le père très autoritaire vient de mourir. Dont le frère
a choisi de quitter le pays pour aller vivre dans la capitale
française. Le protagoniste principal ''reflétant'' lui-même cet
aspect du récit dévoilé sous divers prismes puisque Red Balamri
est lui-même relativement effacé...
Premier
long-métrage pour l'acteur franco-algérien Sammy Lechea après une
poignée d'apparitions dans quatre séries télévisées entre 2021
et 2024, celui qui incarne le beau et charismatique Reda Belamri est
ici confronté à une série d'événements qui vont le mener sur une
voie particulièrement dangereuse. Engagé par son père Youcef
(l'acteur Hamid Amirouche) dans une très grande entreprise
d’hydrocarbures, le dossier de Reda pose problème : en effet,
n'ayant pas effectué son service militaire, il est contraint
d'accepter de servir son pays pour les douze mois à venir. Une
expérience qui façonnera en partie le Reda que l'on découvrira
durant la seconde partie du métrage... L'effacement
n'est donc pas le film de science-fiction auquel nous pouvions nous
attendre mais la descente aux enfers d'un jeune homme qui passe à
côté de tout ce qu'il entreprend malgré ses efforts. Adaptation du
roman éponyme de l'écrivain algérien Samir Toumi, L'effacement
situe
son action en 2021, juste après le décès du Président de la
République Algérienne Démocratique et Populaire Abdelaziz
Bouteflika et au moment du soulèvement populaire correspondant à la
seconde année de règne d’Abdelmadjid Tebboune. Si Karim
Moussaoui évoque la situation politique de son pays, celle-ci n'a
pas véritablement de liens de cause à effet sur la situation de
Reda. Le cinéaste traite surtout du cercle familial et du désespoir
d'un homme qui jamais ne parvient à concrétiser de manière
définitive ses objectifs... En dehors de quelques plans extérieurs
comme lors de l'attaque des djihadistes dont le réalisateur filme la
mort hors-champ (tout comme la gifle de Reda contre sa future
épouse), L'Algérie n'est ici pas vraiment mise en valeur... Bon,
maintenant, pour être tout à fait honnête, le film n'a en réalité
pas été tourné en Algérie (All
Apologies) !
À dire vrai, vu le contexte actuel et les rapports houleux
qu'entretient la France avec le pouvoir en place, il était risqué
d'envoyer une équipe notamment constituée de techniciens allemands
et français ! Trop dangereux ! Mais si le L'effacement
a été en grande partie tourné à Marseille, le film bénéficie
malgré tout de quelques plans qui imposèrent le déplacement de
l'équipe technique jusqu'en... Tunisie ! Bref, ne passons pas à
côté de cette petite pépite...
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