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jeudi 25 novembre 2021

La Mansión de la Locura de Juan López Moctezuma (1973) - ★★★★★★★☆☆☆

 


 

David Hotyat et Alberto Stranieri auraient pu en faire leur film de chevet. Ces criminels qui se rêvaient dans la peau d'un autre, quitte à débarrasser la Terre de sa présence et ainsi prendre ''tout naturellement'' sa place. L'auteur de Alucarda en 1977 débutait sa carrière de cinéaste quatre ans auparavant avec l'improbable La Mansión de la Locura (The Mansion of Madness à l'internationale et Le manoir de la folie dans notre pays). Le genre de long-métrage qui ne rentre pas dans les cases habituelles et qu'il est donc de bon ton de ranger dans la catégorie des OFNIs. Au vu du titre et de l'affiche (qui elle demeure tout à fait dans l'esprit de ce qui deviendra en 1977 le troisième long-métrage du mexicain), on pouvait s'attendre à un film d'horreur ou d'épouvante. Pourtant, il n'en est rien. Ici, pas de créatures provenant d'un quelconque bestiaire fantastique, ni de suppôts de Satan (le sujet évoque en arrière-plan le phénomène de secte). Le récit relate l'histoire de Gaston Leblanc, un médecin désirant visiter l'asile tenu par son confrère le Docteur Maillard. À son arrivée, il est accueilli par celui-ci, lequel lui fait visiter ses installations, lui parle des méthodes employées auprès de ses patients et lui présente accessoirement Eugénie, sa nièce. Nous retiendrons ce choix étrange qui devrait mettre la puce à l'oreille du visiteur concernant l'étrange relation qui noue et la jeune femme, et le docteur Maillard. Une aberration que semble pourtant assumer le réalisateur mexicain Juan López Moctezuma qui nous offre ici avec La Mansión de la Locura, une œuvre très originale. Un théâtre de l''absurde, décadent, jusqu’au-boutiste, sans doute moins trash que certains de ses aînés ou de ses contemporains, mais au demeurant, stupéfiant !


Une spectaculaire usurpation d'identité, voilà donc le sujet. Une ambition démesurée. Un autoritarisme et un despotisme comme l'Histoire en aura connu bon nombre à travers le temps. Original, donc, est La Mansión de la Locura. Surtout si l'on fait fi de tout ce qui a été avant, et sera réalisé ensuite puisque chez Juan López Moctezuma, on retrouve l'humour absurde des Monty Pyton. L'imagination foisonnante et l'outrance d'Alejandro Jodorowsky. La mise en place de décors dantesques à la manière d'un Peter Greenaway ou naturalistes d'un Wojciech Has. La poésie fangeuse de Dušan Makavejev, ou encore la décadence selon Tinto Brass. Inspiré mais aussi et surtout, inspirant puisqu'une partie de ces références viendront plus ou moins empiéter les mêmes territoires fertiles de leur imagination seulement quelques années plut tard. En effet, si l'on omet le chilien ou le yougoslave qui étaient là les premiers, combien d'autres eurent peut-être un révélation le jour où ils découvrirent ce premier essai fort convaincant du réalisateur mexicain ? La Mansión de la Locura est découpé au moins en deux parties. La première expose l'univers dans lequel baignent les personnages. Un asile on ne peut plus inattendu, perdu aux abords d'une forêt touffue et dans lequel les patients qu'il abrite sont libres de vaquer à des occupations que le Jodorowsky de El Topo ou La montagne sacrée n'aurait sans doute pas renié. Et à sa direction, le docteur Maillard. Un être étrange qui semble aussi fou que ceux qu'il est chargé de soigner de leur affection. À dire vrai, tout ce petit monde semble être atteint d'un même mal. Une contagion qui se répercute bien au-delà des simples patients. Bref, une balade dans la tête d'un aliéné...


Puis c'est au tour de la seconde partie de venir enfin donner une raison d'être à ce récit qui pour l'instant ne tient debout que grâce à sa mise en scène et son interprétation débordantes de générosité. Demeuré en l'état, le film de Juan López Moctezuma n'aurait été qu'un long délire sous acide. Une mise en forme somptueusement avilissante de notre humanité quand le fond, lui, semblait encore se chercher. Usurpation, disais-je ? Car le propos est là. Comme les visions de grandeurs d'un individu au dessus des lois prenant l'identité du véritable directeur de l'institution psychiatrique au grand dam des employés et du vrai Docteur Maillard qui tous seront enfermés et laissés affamés (regardez donc Hysteria de Brad Anderson, réalisé quatre décennies plus tard pour vous convaincre que le réalisateur américain ne fut pas simplement inspiré par la nouvelle d'Edgar Allan Poe, The System of Doctor Tarr and Professor Fether). La Mansión de la Locura est réellement stupéfiant. Visuellement, le spectacle est parfois aussi magnifiquement sordide que certains décors ''festifs'' du Sweet Movie de Dušan Makavejev (sans les séquences pipi, caca, vomi, soit dit en passant). Si dans son ensemble, le film exploite le côté décrépit, voire malade, des environnements, l’œuvre de Juan López Moctezuma trouve sans doute son aboutissement lors du dernier acte qui voit une parodie de procès se transformer en un banquet sabbatique pas tout à fait digne (et encore moins luxuriant) de ceux du Caligula de Tinto Brass et situé dans une porcherie transformée à cette occasion en cours des miracles. Pourtant, rien de vraiment choquant ici. Le mexicain y va avec le dos de la cuillère et l'aspect subversif du propos est finalement traité sous une allure beaucoup moins ''marécageuse'' que l'on aurait pu craindre (toutes proportions gardées, bien entendu). Reste une œuvre incroyable, ode à la souillure, la folie et la tyrannie. Une œuvre définitivement culte...

 

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