Le Tatoué
de Denys de La Patellière, c'est d'abord la réunion de deux
monstres du cinéma français unis dans un même projet. Celui d'une
comédie, fond de commerce de Louis de Funès depuis des décennie
qui retrouve pour la troisième fois l'immense acteur Jean Gabin
après La Traversée de Paris en
1956, classique de la comédie française réalisé par Claude Autant
Lara dans lequel Jean Gabin incarnait un artiste-peintre bourru qui
aux côtés de Bourvil allait traverser la capitale française de
nuit afin de livrer en toute clandestinité des colis de nourriture
au marché noir. Louis de Funès y interprétait le petit rôle de
l'épicier Jambier auquel se frottait donc le personnage de Grandgil.
En 1962, c'est au tour du réalisateur Gilles Grangier de réunir les
deux acteurs dans Le Gentleman d'Epsom où
Louis de Funès n'apparaîtra malgré tout qu'en fin de récit. Les
mauvaises langues affirmant alors qu'ainsi, il ne pourrait pas voler
la vedette à Jean Gabin après son incroyable performance de Jambier
dans le film de Claude Autant Lara six ans auparavant. Les tournages
s'enchaînent pour Louis de Funès, beaucoup plus que pour Jean Gabin
d'ailleurs. Les réalisateurs se bousculent pour tourner avec ce
petit teigneux qui fait rire le public à chacune de ses apparitions.
Après de longues années à avoir arpenté des plateaux de cinéma
dans des rôles secondaires, Louis de Funès est désormais une star
du grand et du petit écran. Jean Girault et Gérard Oury sont déjà
passés par là mais continueront de collaborer avec l'acteur jusqu'à
sa mort. Parmi les cinéastes qui ont travaillé auprès de Louis de
Funès, Denys de la Patellière est une exception puisque le comique
et lui ne tourneront ensemble qu'une seule et unique fois à
l'occasion du tournage du Tatoué...
Un
tournage difficile qui ne se ressent pas forcément à l'écran même
si au delà d'une première partie savoureuse en terme de situations
comiques, le film s'avère moins drôle que la majorité des
productions dans lesquelles jouait à l'époque Louis de Funès. Lui
et Jean Gabin semblent d'ailleurs avoir entretenu des rapports
parfois conflictuels dus à certaines exigences de l'un et à la
personnalité dévorante du second. On retrouve un Jean Gabin dans le
rôle du dernier descendant de la famille de Montignac. Un comte
bourru porteur dans le dos d'un tatouage exécuté au sortir de la
première guerre mondiale par le célèbre peintre et sculpteur
italien Modigliani. Un tatouage que le marchand d'art Félicien
Mézeray qu'interprète Louis de Funès aimerait bien acquérir pour
ainsi le revendre à prix d'or à des acheteurs américains venus de
New York (incarnés tous les deux par Jo Warfield et Donald J. von
Kurtz). Seule condition pour que Montignac, qui se fait appeler
Legrain, accepte de vendre son tatouage : que Mézeray fasse
retaper de fonds en combles la ''maison'' du comte. Mais ce dont ne
se doutait pas le marchand d'art en arrivant sur les terres de
Montignac, c'est que la dite maison soit un château. De plus, en
très mauvais état...
Mais
avant que nos deux acteurs soient réunis dans la commune de Domme en
Dordogne et surtout au château médiéval de Saint-Vincent-le-Paluel
où la plupart des séquences seront tournées une fois leurs deux
personnages rendus dans la résidence secondaire du comte de
Montignac, Le Tatoué
démarre en fanfare en terme d'humour. Entre un Louis de Funès
veule, une épouse interprétée par Dominique Davray qui ne cesse de
se bidonner, communiquant ainsi son rire aux spectateurs, et un
domestique qui applique ce que lui enseigne son employeur (l'acteur
sénégalais Ibrahim Seck dont la ressemblance avec l'ivoirien Isaach
de Bankolé est stupéfiante), le premier quart-d'heure offre tout ce
que l'on peut attendre d'une bonne comédie française de la fin des
années soixante. Louis de Funès y est égal à lui-même. S'impose
ensuite un Jean Gabin aussi gueulard que le Grandgil de La
traversée de Paris.
Si Le tatoué
garde
une certaine constance dans les rapports qu'entretiennent ces deux
individus qui n'ont absolument rien en commun, la suite repose sur
une succession de séquences pas toujours très drôles mais
suffisamment divertissantes pour que l'on n'ait pas le temps de
s'ennuyer. Usant d'un running gag tellement répétitif qu'il en
devient lassant (le comte se débarrasse effectivement des
importuns en les jetant dans le cul-de-basse-fosse de son château).
Quant à la sympathique partition musicale, elle est l’œuvre de
Georges Garvarentz qui débuta sa carrière de compositeur au cinéma
avec Un Taxi pour Tobrouk
de.... Denys de la Patellière sept ans auparavant...
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