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dimanche 29 septembre 2019

Les Dix Commandements de Cecil B. DeMille (1956) - ★★★★★★★★★★



L'un des plus grands péplums de l'histoire du cinéma, et sans doute l'un des plus grands films de tout le septième art n'a pas perdu de sa superbe, même après soixante-trois ans d'existence. Réalisé par le réalisateur et producteur américain Cecil B. DeMille, trente-trois ans après le long-métrage éponyme qu'il réalisa lui-même en 1923, Les Dix Commandements demeure la plus flamboyante des adaptations cinématographiques basées sur le ''Assereth ha-Dibberoth'' ou Décalogue, l'ensemble des instructions morales et religieuses reçues par Moïse au sommet du Mont Sinaï en Égypte. Transmises par Dieu apparaissant sous la forme d'un buisson ardent, ces instructions prirent la forme de tables gravées sur lesquelles, selon la Torah, Dieu posa son doigt.
Alors que dans la version de 1923 le cinéaste abordait son œuvre en deux parties, la seconde se situant dans les années 1920, Cecil B. DeMille choisit de se concentrer dans celle de 1956 sur la vie de Moïse, de sa naissance et son sauvetage par Lilia, la fille du Pharaon Séthi 1er qui régna de -1294 à -1279, jusqu'à la seconde rencontre entre Moïse et Dieu suivant l'exode du peuple hébreux au pied du Mon Sinaï dans la péninsule égyptienne du même nom et à la suite de laquelle furent gravés les dix commandements.

C'est grâce à sa connaissance de l’Égypte Ancienne que celui qui demeurera comme l'un des plus grands acteurs américains de son époque décroche le rôle principal de Moïse. Alors que le propre fils de la star, Fraser Clarke Heston, incarne le futur prophète du judaïsme alors qu'il n'a qu'un an, son père, l'immense Charlton Heston irradie ensuite de sa présence une œuvre qui aura coûté à la production, treize millions de dollars. Une somme qui peut paraître dérisoire aujourd'hui mais qui à l'époque était exceptionnelle (je rappelle que nous sommes alors dans la seconde moité des années cinquante). Face au charisme de l'acteur qui interprétera plus tard le personnage principal d'un autre immense péplum, celui du Ben-Hur de William Wyler, affrontera les nouveaux maîtres d'une planète Terre futuriste dirigées par des primates dans La Planète des Singes ou découvrira l'effroyable vérité sur le Soleil Vert de Richard Fleischer, il fallait opposer un acteur capable d'avoir une certaine ascendance. C'est ainsi donc que le rôle de Ramsès II, fils de Séthi 1er et futur Pharaon D’Égypte est confié à l’acteur américain d'origine russe et mongole, Yul Brynner, dont la carrière débuta à la télévision en 1944 (Mr. Jones and His Neighbors) avant d'exploser au cinéma dans le film de Cecil B. DeMille, avec notamment Les Sept Mercenaires de John Sturges, Tarass Boulba de J. Lee Thompson, ou encore Mondwest de Michael Crichton dans lequel il incarnerait un robot à l'effigie d'un cow-boy, hommage au mercenaire Chris Adams qu'il incarna treize auparavant.

Énumérer la totalité des personnages, et donc de leur interprète respectif, prendrait sans doute des heures tant le casting des Dix Commandements est remarquable. On pourrait citer l'acteur Edward G. Robinson qui dans le rôle de Dathan y incarne un hébreux à la solde de l’Égypte. Pleutre, ambitieux, violent et ayant oublié ses origines. Yvonne De Carlo, qui dans celui de Sephora interprète la future épouse de Moïse rencontrée près d'un puits à Madian alors qu'il vient de vivre un long exode solitaire à travers le désert. Cedric Hardwicke qui dans la peau de Séthi 1er se pose en Pharaon honnête et droit envers son peuple mais inflexible envers les esclaves hébreux. Mais on retiendra sans doute en troisième position dans l'ordre d'importance après Charlton Heston et Yul Brynner, le personnage de Néfertari, interprétée par la sublime Anne Baxter, déchirée ici entre son indéfectible amour pour Moïse et sa crainte de devoir épouser Ramsès II. Personnage complexe (la personnalité des deux demi-frères étant facile à mettre en évidence), elle irradie elle aussi l'épopée de Cecil B. DeMille de sa grâce et sa beauté. En dehors des interprètes à proprement parler, il faudrait également citer les nombreux figurants, ces anonymes qui au nombre de dix-mille se sont fondus dans une reconstitution historique gigantesque (parmi les décors les plus vastes jamais réalisés pour un long-métrage à l'époque) et qui participent par leur seule présence à l'incroyable spectacle qui nous est offert.

D'ailleurs, il serait inconcevable de les évoquer sans parler du travail notamment effectué sur les costumes, mais plus encore les effets-spéciaux par le superviseur et directeur de la photographie américain John P. Fulton (de l'American Society of Cinematographers) qui reçut à l'occasion de sa participation à leur élaboration, l'Oscar des meilleurs effets visuels, lequel fut assisté du concepteur d'effets-spéciaux mexicain Paul Lerpae. Ce dernier employa la technique du ''Cache/contre-cache'' (ou ''travelling matte'') consistant à placer un décor peint en trompe-l’œil tandis que l'américain Farciot Edouart usa de la technique de la ''Projection Arrière'' (ou ''Process Photography'') consistant à projeter une image sur un écran depuis l'arrière de l'écran principal. Mais de tous les effets-spéciaux, celui que le spectateur retiendra sans doute davantage que n'importe quel autre (la majeure partie d'entre eux se fondant si naturellement dans le décor qu'ils deviennent spontanément invisibles) demeure la séquence durant laquelle Moïse, à l'aide de son bâton, sépare les eaux de la Mer Rouge en deux afin de permettre à son peuple d'échapper à ses assaillants. Une séquence difficile à monter mais qui depuis toutes ces années n'a pas perdu de sa force et sa beauté.

Si tant est que l'on soit peu enclin à accorder du crédit à certains événements se produisant lors de certains passages, on peut considérer l’œuvre de Cecil B. DeMille comme un formidable film fantastique plongeant ses personnages dans un univers où se mêlent Histoire, récit biblique, aventures, drame et romance. D'une durée avoisinant les trois heures et quarante minutes, Les Dix Commandements fut une véritable manne pour la société de production Paramount puisque le film rapporta en cette seule année 1956, soixante-cinq millions de dollars sur le seul territoire américain. En France, il faudra attendre plus d'une année entière et le 17 janvier 1958 pour pouvoir découvrir le film en salle où il dépassa les quatorze millions d'entrées. À noter que cette seconde version des Dix Commandements par Cecil B. Demille fut aussi son dernier long-métrage. Alors qu'il avait en tête la réalisation d'une œuvre portée autour de la Vierge Marie, l'immense cinéaste américain qu'il fut devait s'éteindre d'épuisement le 21 janvier 1959 à l'âge de soixante-dix sept ans...

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