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dimanche 11 octobre 2015

Dheepan de Jacques Audiard (2015)



Dheepan, Yalini et Illayaal ne se connaissent pas. Ni de près, ni de loin. Et pourtant, tous les trois vont débarquer en France avec le statut de réfugiés politiques. Il n'ont aucun lien de parenté et pourtant, dans ce pays qui leur est étranger, il vont former une famille. Ils vont devoir apprendre à se faire accepter, apprendre à parler français, à s'intégrer. Pourtant, dans cette cité dortoir qui vient de les accueillir, rien n'est simple. La barrière de la langue est un frein dans leur désir d'être invisible. La petite Illayaal intègre une classe spécialisée afin d'apprendre le français, Yalini accepte un emploi d'aide ménagère dans l'appartement d'un vieil homme sénile, et quand à Dheepan, c'est le nouveau gardien d'un bloc d'immeubles, propriété d'un gang de dealers...

Lorsque l'on entre dans une salle pour assister à la projection d'une œuvre signée Jacques Audiard, il y a peu de chance que l'on en ressorte déçu. Lorsque l'on quitte celle de Dheepan, on a tout de suite envie de partager ses sentiments. Et dire que ces derniers s'entrechoquent dans notre esprit n'est pas qu'une formule de politesse pour le travail accompli par le cinéaste. Pour parler à la première personne, je dirai que ma première hantise est de tomber sur un groupe d'adolescents très bavards et dont la place est ailleurs que dans l'obscurité d'une salle de cinéma. De ce coté, j'ai cru pendant un instant que nous aurions la paix. C'était sans compter sur la présence d'un club d'un troisième âge dont l'un des membres n'a pu s'empêcher, durant les deux qu'à duré le film, de commenter chaque scène.

Pourtant, et ce malgré l'insupportable présence de ce parasite septuagénaire, ma compagne et moi avons passé un extraordinaire moment de cinéma. Un cinéma jouant sur la corde raide. Un cinéma-vérité qui n'use d'aucun artifice pour montrer le vrai visage des cités telles qu'elles nous sont parfois décrites dans les différents médias. Sauf que chez Audiard, elle revêtent un visage VRAIMENT effrayant. A tel point que je n'oserai plus dorénavant rappeler à mon entourage que je suis né dans l'une d'entre elles. Les seules armes que nous avions à l'époque étaient des arcs et des flèches de notre fabrication. Des jouets d'enfants qui aimaient jouer aux indiens et aux cow-boys en somme. Chez Audiard, c'est le chaos. Et pourtant, lorsque l'on compare la nouvelle situation de nos trois réfugiés à celle de ces petits français qui brandissent fièrement le drapeau de leur statut d'enfants d'immigrés, on trouve celle de ces derniers d'une incroyable puérilité. Comme le dit si bien le personnage de Dheepan, la violence de ces jeunes n'est rien en comparaison de celle qu'il a connu dans son pays. Des français incapable de saisir la chance qu'ils ont de vivre dans un pays comme le nôtre.

Le destin de l'acteur Antonythasan Jesuthasan est extraordinaire. Si Jacques Audiard lui a vraiment offert ici un rôle en or, le sri-lankais sait de quoi il parle dans ce film puisque lui-même fut enrôlé afin de combattre aux côtés des Tigres de Libération de l'Ilam Tamoul au Sri-Lanka alors qu'il n'avait que seize ans. L'actrice de théâtre Kalieaswari Srinivasan obtient ici son premier rôle au cinéma. Quand à la toute jeune Claudine Vinasithamby, elle est élève dans une école de la région parisienne lorsqu'elle est choisie pour le rôle de Illayaal.

Dheepan est dur. Dur déjà parce qu'il dépeint une France que l'on aimerait chasser de notre mémoire et qui est aux portes de nos villes. Dur parce qu'il nous met face à nos a priori concernant les réfugiés politiques que l'on prend cependant un malin plaisir à réduire au seul statut d'immigrés. Dur aussi parce que Jacques Audiard, après avoir tenté de nous attendrir (et il y parvient) devant ces trois êtres à l'immense fragilité, assène aux spectateurs un climax final d'une très grande violence et filmé comme seul lui sait le faire.
Quand au choix de prendre des individus venus du Sri-lanka plutôt que de Syrie ou du Maghreb, il permet aux plus réfractaires et aux anti-immigrés d'intégrer plus facilement ces trois personnages. D'autant plus que les Sri-lankais (et d'une manière générale les habitants de l'Inde toute entière) sont relativement peu représentés dans les médias français, et surtout, sensiblement mieux acceptés chez nous puisque ne faisant jamais parler d'eux.

Jacques Audiard signe une œuvre qui mérite amplement sa palme d'Or à Cannes. Voir une œuvre comme Dheepan fait du bien à l'âme. Surtout, il nous la nettoie de toute cette purge cinématographique que l'on s'inflige parfois. Rien que pour cela, je dis : Merci Monsieur Audiard...

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