Le réalisateur mexicain Guillermo DelToro rêvait
paraît-il depuis de nombreuses années d'adapter sur grand écran le
célèbre roman Frankenstein ou le Prométhée moderne
qu'écrivit Mary Shelley au début du dix-neuvième siècle et qui
fut édité pour la première fois le 1er janvier 1818. Au vu des
ambitions tournant autour d'un projet tout de même réalisé par
l'auteur du Labyrinthe de pan en
2006, de Crimson Peak
en 2015 ou de La forme de l'eau
deux ans plus tard, on peut s'étonner qu'au final le Frankenstein
ait échoué directement sur la plateforme Netflix alors
que l'on aurait pu espérer que le film sorte en salle. D'autant plus
que le prologue semble promettre une aventure extraordinaire. Du
moins d'un point de vue visuel puisque le récit débute au Pôle
Nord où le navire commandé par le capitaine danois Anderson
(l'acteur Lars Mikkelsen) se retrouve piégé au beau milieu d'une
banquise. Mais alors qu'une explosion a lieu à trois kilomètres de
l'énorme embarcation, Anderson et plusieurs de ses hommes se rendent
sur les lieux pour y découvrir un homme qui n'est autre que Victor
Frankenstein. Très gravement blessé, il est emporté puis emmené à
bord du navire lorsque surgit la silhouette d'un ''homme''
particulièrement agressif qui ordonne à Anderson et à ses hommes
de lui remettre Victor. Mais devant le refus du capitaine, l'individu
se montre très violent et s'en prend à ses hommes, faisant six
morts parmi les membres de l'équipage... Lors de ce prologue
visuellement attrayant et plutôt violent de la part d'une
''créature'' que l'on comprend d'emblée être celle que créa le
Docteur Victor Frankenstein, le spectateur peut d'emblée constater
que Guillermo Del Toro a fait le choix de changer certains traits
propres aux personnages principaux du récit et notamment au sujet de
la créature dont il fait un personnage sans doute plus crucial
encore que n'importe quel autre protagoniste. Alors même qu'elle
aura droit à son chapitre lors d'un récit à la première personne
qui consacrera sa version de l'histoire, la créature de Frankenstein
est incarnée par l'acteur australien dont la taille tutoyant presque
les deux mètres et dont la ''belle gueule'' le sacre ici comme
personnage le plus charismatique. Et ce, malgré de nombreuses
cicatrices et greffes de peau dont l'effet change radicalement avec
ce que l'on avait l'habitude de voir lors des précédentes
adaptations du roman de Mary Shelley. Frankenstein
est
divisé en trois parties. Comme on a pu le voir, le récit débute
par un prologue avant d'être prolongé par deux grandes parties de
durées presque égales. Si la troisième est donc consacrée à la
Créature, la seconde est presque entièrement dévouée au
personnage de Victor Frankenstein qu'interprète quant à lui Óscar
Isaac Hernández Estrada. Les traits durs de l'acteur américain
originaire du Guatemala collent parfaitement au rôle que lui a
confié Guillermo Del Toro...
Car
plutôt que d'incarner un Victor Frankenstein relativement
bienveillant comme on a pu notamment le découvrir dans l'excellent
téléfilm-fleuve Frankenstein:
The True Story
de Jack Smight plus de cinquante ans en arrière, celui de cette
version 2025 est on ne peut plus détestable. Véritable repoussoir
pour le spectateur et donc également pour une Élisabeth Lavenza
(l'actrice Mia Goth) qui désormais n'est plus sa fiancée mais celle
de son frère William (Felix Kammerer), Guillermo Del Toro en profite
pour créer le trouble au sein des rapports que vont entretenir la
jeune femme et la Créature même si Élisabeth confirme très
rapidement qu'il ne s'agit pour elle que de compassion. En outre, le
sujet permet au cinéaste mexicain d'aborder le thème de la
jalousie. D'inconcevables soupçons naissant dans la tête d'un
Victor Frankenstein qui peu à peu semble perdre la raison au point
de regretter d'avoir créé sa créature et cherche donc désormais à
l'éliminer ! Tandis que la créature ne semble pas avoir de
capacités intellectuelles suffisantes pour apprendre et évoluer, le
comportement de Victor Frankenstein précédant ceux d'Élisabeth et
du vieil aveugle (David Bradley) véhicule un message fort selon
lequel, douceur, patience et bienveillance font des miracles face à
la brutalité d'un Docteur Frankenstein incapable d'obtenir le
moindre résultat ! Si Frankenstein
est visuellement remarquable malgré quelques animaux en CGI
complètement ratés, on n'en dira pas autant de la partie
essentiellement consacrée à Frankenstein. À contrario, lorsque le
sujet traite majoritairement de la Créature, on sent toute la
passion et l'amour qu'a le cinéaste pour ce personnage hors norme
comme il pu en avoir autant pour l'étrange homme-poisson de La
forme de l'eau.
En dehors de ces considérations, la version de Guillermo Del Toro
pourra parfois être considérée comme la vision de trop. De celles
dont les ajouts n'apportent en réalité pas grand chose d'autre
qu'un vrai savoir-faire artistique. D'ailleurs, en cherchant bien,
lorsque l'on veut pouvoir trouver matière à une adaptation
réellement originale, il suffit de faire un bond de seulement dix
ans en arrière pour y trouver un cas à part avec le Frankenstein
de Bernard Rose. D'une durée de deux-heures trente environ,
Frankenstein
version 2025 est surtout comparable à une œuvre d'art picturale où
chaque élément visuel est là pour nous en mettre plein la vue.
Doté de quelques idées neuves mais au fond très académique sur
certains points de vue, le film de Guillermo Del Toro est peut-être
malgré tout celui qu'attendaient ses fans...

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