La nuée de
Just Philippot, c'est un peu comme une erreur de prévision
météorologique. On nous annonce des pluies torrentielles et au
final, on a droit à une simple ondée... Alors que le réalisateur
français semble être en plein tournage de son second long-métrage
Acide
(version rallongée de son court éponyme sorti voilà cinq ans), La
nuée
s'impose comme une relecture pseudo-horrifique de thématiques
particulièrement en vogue ces dernières années. Petit
paysan de
Hubert Charuel en 2017, Au nom de la terre
d'Edouard Bergeon en 2019, La Terre des hommes de
Naël Marandin en 2021, quelques exemples parmi tant d'autres et dont
le film de Just Philippot semble en théorie s'imposer comme le
porte-drapeau d'une forme jusqu’au-boutiste. Il y a tout d'abord
derrière cette histoire d'exploitation familiale proche de la
faillite, un message clair visant l'emploi d'organismes génétiquement
modifiés. Mais comment faire lorsque la concurrence est rude, que
l'on se lance dans un projet hors-norme ou que les acheteurs
potentiels s'avèrent d'indélicats négociateurs ? Compter sur
l'aide de Dieu ou sur un heureux hasard ? Les chances de
rencontrer ce bonhomme doté d'une longue barbe blanche étant
quasiment nulles, mieux vaut compter sur des circonstances quelque
peu troubles. Comme celle qui va heurter de plein fouet Virginie et
ses deux enfants Laura et Gaston. Reposant sur un scénario écrit à
quatre mains par Jérôme Genevray et Franck Victor, La
nuée
propose un sujet sinon avant-gardiste, du moins dans l'air du temps.
Là où comme l'évoque l'héroïne, l'élevage et la consommation
des insectes aura un jour pour but de pallier à d'éventuelles
famines. Un sujet qui en préoccupe certains, en laisse d'autres
perplexes, tout en répugnant les derniers...
Bizarrement,
et si les deux sujets n'ont pas vraiment d'accointances, il m'est
venue la drôle d'idée que le film de Just Philippot allait
s'inscrire dans un même registre que celui de Grave
de Julia Ducournau. Et quelque part, au fond, oui, l'un et l'autre
font partie tous les deux d'une même génération de films de genre
français très contemporains. Doté d'une séduisante photographie,
ce que l'on retiendra avant toute chose de La
nuée,
c'est l'impeccable incarnation de l'actrice Suliane Brahim dans le
rôle de la mère Virginie. Femme seule à élever ses deux enfants,
elle doit gérer une crise concernant son exploitation
d'entomoculture (la jeune femme élève en effet des criquets qu'elle
''transforme'' ensuite en farine animale). Les potentiels acheteurs
proposent de lui racheter le fruit de ses efforts à bas prix. Ce qui
à moyen terme ne lui permettra pas de faire vivre sa petite famille.
Un jour, totalement désemparée et en pleine crise d'hystérie,
Virginie saccage la serre qui enferme son précieux ''trésor'' et se
blesse profondément au bras. Perdant connaissance, elle se réveille
quelques heures plus tard et constate que les criquets se nourrissent
du sang qui s'épanche de sa blessure. Ceux-ci semblent prendre de la
vigueur, grossissent et se multiplient de manière inespérée. C'est
alors qu'une idée germe dans l'esprit de Virginie : nourrir les
criquets avec du sang... qui demeurera malheureusement animal jusqu'à
son terme. Ô, la jeune femme tente bien de sacrifier un peu de sa
personne mais La nuée
reste tout de même très présentable et se montre disposé à être
regardé par des parents accompagnés de leurs petits chérubins. Le
long-métrage de Just Philippot ne heurtera pas grand monde. Au
pire, il indisposera l'estomac de ceux que l'idée de manger des
insectes dérange.
Ce
qui manque essentiellement au long-métrage du réalisateur français,
c'est davantage de vigueur et d'entreprise. La
nuée
s'impose comme un drame social relativement lent, sans réelle prise
de risques et non pas comme le film d'horreur qu'il promettrait
d'être. Trop timide et ne s'astreignant à aucune vision
frontalement horrifique, les quelques bêtes qui serviront de
nourriture aux criquets ne remplaceront malheureusement jamais l'idée
de nourrir ces créatures à l'aide de spécimens humains ! Tuer
des animaux pour en nourrir d'autres et transformer ces derniers pour
en alimenter une troisième catégorie ne fait pas de La
nuée
l'authentique film d'épouvante que l'on était en droit d'espérer.
Nous retiendrons donc en priorité l'interprétation de Suliane
Brahim, de Marie Narbonne, de Raphael Romand ou encore de Sofian
Khammes (dans le rôle de Karim), ainsi qu'un sujet (pas tout à
fait) inédit qui ouvre quelques portes et laisse entrevoir des
conséquences ''catastrophiques'' à l'échelle de toute une
planète...
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