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dimanche 12 juin 2022

Frankenstein Created Woman de Terence Fisher (1967) - ★★★★★★★☆☆☆

 

 


 

Après avoir été contraint de s'éloigner du mythe de Frankenstein à la suite d'un accident de voiture au profit de son ancien assistant Freddie Francis, le réalisateur britannique Terence Fisher a durant la dizaine d'années qui a suivi la sortie de The Revenge of Frankenstein eut le temps de réaliser une quinzaine de longs-métrages pratiquement tous dévolus aux genres fantastique, horreur et épouvante. En 1967, il reprend les rennes du cycle consacré à l'une des plus célèbres créatures du bestiaire fantastique et met une nouvelle fois en scène l'acteur Peter Cushing dans le rôle du docteur Victor Frankenstein dans Frankenstein Created Woman. Si les trois précédents longs-métrages avaient fait la preuve par l'image qu'il n'est pas toujours aisé d'être créatif en terme d'écriture et de renouveler ainsi une thématique aussi vieille que le cinéma puisse l'être, ce quatrième film d'une série qui en comptera sept au final est sans doute l'une des propositions les plus intéressantes et originales d'entre toutes. L'usage du nom de Frankenstein reposant logiquement sur le personnage du fameux docteur et non pas sur celui de la créature comme nombre de personnes semblent continuer de faire l'erreur, c'est avec plus ou moins de complaisance que son nom est rattaché à telle ou telle œuvre n'ayant plus autant d’accointances avec le matériau d'origine, soit le roman Frankenstein ou le Prométhée moderne écrit au dix-neuvième siècle par la britannique Mary Shelley. Écrit par le fidèle scénariste de Terence Fisher, Anthony Hinds, le scénario de Frankenstein Created Woman apporte un certain renouveau puisque la présence de la fameuse créature accompagnant généralement le docteur Victor Frankenstein est désormais plus ou moins évoquée à travers le personnage de Christina Kleve, fille d'aubergiste défigurée et handicapée par une paralysie du bras droit et par un pied bot. De quoi alimenter les discussions de trois jeunes nantis qui viennent régulièrement se saouler à l'auberge et harceler la jeune femme. Incarnés par Peter Blythe, Barry Warren et Derek Fowlds, Anton, Karl et Johann vont bientôt être au centre d'une vengeance orchestrée par une créature d'un nouveau type...


Non plus dotée d'un monstrueux faciès et d'une démarche de momie (Comme cela était notamment d'usage dans le précédent long-métrage The Evil of Frankenstein), mais d'une beauté remarquable due à la magnifique actrice allemande Susan Denberg. Laquelle fera une carrière au cinéma étonnamment courte puisqu'en dehors du film de Terence Fisher et du thriller de Robert Gist An American Dream l'année précédente, la jeune femme ne tournera que dans une minuscule poignée de séries télévisées dont un épisode de la série originale Star Trek en 1966 ! Exit donc l'horrible créature de Frankenstein. Ce qui ne manque par contre pas dans ce nouveau récit est la présence d'individus particulièrement veules et immoraux. Victor Frankenstein est désormais assisté du docteur Hertz (l'acteur Thorley Walters) avec lequel il vient de mettre au point une expérience dans laquelle il a mis sa propre existence en jeu. Également assisté par le jeune Hans (interprété par Robert Morris), lequel n'a rien à voir avec le Hans des deux précédents longs-métrages, ce dernier va se retrouver accusé du meurtre de l'aubergiste Kleve. Le père de Christina dont il est amoureux et qu'il avait menacé de mort lors d'un conflit entre lui, Anton et ses deux amis. Bien entendu innocent (l'aubergiste sera en réalité battu à mort part les trois jeunes gens), Hans sera exécuté par décapitation (comme son père), engendrant ainsi des commentaires selon lesquels l'hérédité criminelle du père et du fils serait entrée en jeu. Par désespoir amoureux, Christina se jettera ensuite dans une rivière tumultueuse pour y mourir noyée. C'est alors qu'interviennent les docteurs Frankenstein et Hertz. Après avoir récupéré la tête tranchée de Hans et le corps encore trempé de Christina, les deux hommes peuvent enfin se lancer dans le projet qu'ils ont mis au point quelques temps auparavant...


C'est donc ainsi que l'on découvre dans ce nouvel opus que Frankenstein est moins intéressé par l'ambition de donner vie à un être reconstitué à partir des membres de différents individus que par l'idée de transférer l'esprit d'un mort dans le corps d'un second. Sans le vouloir (à moins que...), Terence Fisher et son scénariste mettent au point en 1967, ce qui demeure sans doute le tout premier cas de transsexualité, ou plutôt de transidentité sur grand écran. En effet, car si la créature revêt la beauté de Susan Denberg, son crâne, lui, semble être le foyer d'une double personnalité. La sienne, mais également celle de Hans qui à la suite de l'opération effectuée par les deux docteurs va commander à la jeune femme le triple meurtre de ceux qui ont causé la mort de l'aubergiste et la condamnation du jeune assistant à l’échafaud. Frankenstein Created Woman est une excellente surprise. Le cadre est pratiquement identique à ce que l'on a l'habitude de voir, entre auberge (ou le monde se bouscule par contre beaucoup moins que dans les épisodes précédents) et laboratoire où ont lieu les différentes expériences du docteur Frankenstein. Le film se montre parfois très cruel et à ce titre, deux séquences retiendront l'attention. Celle qui ouvre les hostilités et qui montre Hans, alors tout jeune, assistant à la décapitation de son père. Ou plus tard, lorsque dans et autour de l'auberge, Terence Fisher multiplie les séquences d'humiliation envers la jeune Christina qui, il est vrai, est affublée de tares multiples. Mais c'est avant que la jeune ne s'éveille de la mort pour arborer une beauté qui attirera dans ses griffes, les trois vrais monstres de ce récit. Bien que changeant radicalement d'approche, Frankenstein Created Woman reste une très bonne surprise. Et même s'il fait des infidélités au roman d'origine, on appréciera cette incartade plus ''cérébrale'' que ''viandarde'' qui renouvelle la thématique du mythe. Après La Nuit de la grande chaleur en 1967 et Les vierges de Satan l'année suivante, Terence Fisher reviendra en 1969 avec le cinquième opus de la saga, Frankenstein Must Be Destroyed...

 

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