Né de l'imaginaire de
l'écrivain britannique Mary Shelley et apparaissant pour la toute
première fois en 1818 dans son roman Frankenstein
ou le Prométhée moderne,
Frankenstein est souvent source de quiproquos. Alors que bon nombre
de personnes tombent encore dans le piège en se représentant le
célèbre mythe sous l'apparence d'une créature reconstituée à
partir de différents morceaux de corps humains, il faut tout d'abord
remettre les choses dans l'ordre en précisant que Frankenstein n'est
pas la célèbre créature à laquelle donne vie ce génie un peu fou
se prenant pour dieu mais bien ce dernier, connu sous le nom de
Victor Frankenstein. Il sera plus commun alors d'appeler sa création
''le Monstre'', ou plus simplement ''la Créature''. Le cinéma ne
pouvant s'empêcher de s'emparer du phénomène, dès 1910, le
réalisateur américain J. Searle Dawley réalisait un court-métrage
muet sobrement intitulé Frankenstein
et respectant en grande partie le roman de Mary Shelley. Suivent
alors Life Without Soul de
Joseph W. Smiley en 1915, Il Mostro di
Frankenstein
d'Eugenio Testa en 1921, mais surtout Frankenstein
et La Fiancée de Frankenstein
tout deux réalisés par James Whale en 1931 et 1935 et qui demeurent
à ce jour parmi les plus brillantes adaptations du mythe. La société
de production britannique Hammer
Film Productions
s'empare elle aussi du récit de Mary Shelley et ce, dès 1957 avec
Frankenstein s'est Échappé
de Terence Fisher, lequel réalisera en un demi-siècle environs, une
soixantaine de long-métrages et d'épisodes de séries télévisées
dont plusieurs films pour la célèbre firme britannique. Il sera en
effet à l'origine d'une adaptation du Fantôme
de l'Opéra en
1962, de Dracula, Prince des Ténèbres
en 1966 ou de plusieurs autres longs-métrages mettant en scène la
créature de Frankenstein...
Pour
cette première incartade de la Hammer
Film Productions
dans l'univers du célèbre savant fou Victor Frankenstein et de sa
créature reconstituée à partir de différents éléments humains,
le réalisateur britannique s'avère plus ou moins respectueux envers
la structure même du roman Frankenstein
ou le Prométhée moderne puisque
l'on y retrouve certains éléments fondamentaux, Frankenstein
s'est Échappé éludant
par contre d'autres aspects de l’œuvre de l'écrivain britannique.
En cette année 1957, Christopher Lee n'est pas encore l'immense
acteur que le monde va bientôt connaître à travers le monde même
s'il a déjà derrière lui une dizaine d'années de carrière.
C'est sa grande taille qui attire tout d'abord Terence Fisher, plus
que ses éventuelles capacités d'interprétation. D'ailleurs, à en
juger par les capacités motrices et intellectuelles de la créature
qu'il doit interpréter, il ne sera pas demandé à l'acteur de
fournir une performance particulière. Non, simplement l'acteur
hantera-t-il les somptueux décors des studios Bray où se situent en
grande partie le récit.
Forcément
méconnaissable puisque caché sous l'épais maquillage de la
créature, Christopher Lee n'en est cependant pas moins
impressionnant de part sa taille et cet horrible visage défiguré
qu'il arbore. Frankenstein s'est Échappé se
déroule tel un long flash-back puisque l’œuvre démarre alors que
le baron Frankenstein est enfermé dans une cellule et attend son
exécution. Revenant sur la genèse de l'expérience qui l'enverra
finalement derrière les barreaux, il prend les traits de l'acteur
Peter Cushing, autre interprète fétiche de la Hammer
Film Productions pour
laquelle il tournera un certain nombre de longs-métrages retrouvant
ainsi à nouveau à ses côtés Christopher Lee et Terence Fisher. En
prenant des couleurs, Frankenstein s'est Échappé
perd
sans doute un peu de la séduisante esthétique apportée vingt-six
ans plus tôt par James Whale. Ce qui n'empêche pas l’œuvre de
Terence Fisher d'être une excellente surprise et de laisser présager
le meilleur pour la suite (six autre longs-métrages seront réalisés
pour la Hammer).
Le charisme inné et l'empathie qu'il dégage tout aussi
naturellement font de Peter Cushing un Victor Frankenstein loin
d'être détestable même si on le découvre œuvrant dans le meurtre
afin de donner vie à sa créature. Moins hystérique que le
personnage incarné en 1931 par Colin Clive dans le chef-d’œuvre
de James Whale mais tout aussi fascinant, le personnage incarné par
Peter Cushing hésite entre folie et sobriété. Quant à l'actrice
Hazel Court, elle apporte cette petite touche de féminité
essentielle au récit même si au fond, le personnage d'Elizabeth qu'elle
incarne n'a pas véritablement conséquences sur le déroulement de celui-ci. Frankenstein s'est Échappé n'est
peut-être pas la meilleure de toutes les adaptations du mythe de
Frankenstein, mais il est une réussite tout de même...
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