Il y a des hommes et des
femmes pour lesquels la vie n'est pas un cadeau. Le réalisateur
américain Collin Schiffli, lui, offre au contraire aux spectateurs
l'un de ces présents inoubliables qui nous fait toucher du doigt le
génie du septième art. À travers, justement, le portrait de ses
deux héros Gensan et Ruby. Ces deux marginaux sur lesquels le sort
s'acharne depuis leur plus tendre enfance. Sans doute pour lui,
depuis l'âge de onze ans. Depuis qu'il a selon ses propres dires :
''perdu son âme''. Ils y a des films qui vous grisent, vous
chamboulent. Des personnages qui vous marquent, vous émeuvent. Et
des interprètes qui vous dévastent et vous crèvent le cœur. All
Creatures Here Below
est de ces longs-métrages dont on n'attend, à l'origine, rien de
spécifique à en tirer. Une histoire apparemment simple, sans
vagues, diffuse comme un road-movie linéaire. Une histoire d'amour
sans aspérités. Un drame comme il en existe des milliers. Et
pourtant, rien n'éloigne plus ce second effort de Collin Schiffli de
ces premières impressions faussées par des idées préconçues, que
les images elles-mêmes. All Creatures Here
Below,
c'est d'abord la simplicité d'une affiche qui expose deux êtres qui
s’enlacent mais n'expriment aucun sentiment de bonheur. D'un côté,
l'acteur américain David Dastmalchian, qui déjà avait tourné pour
Collin Schiffli dans son premier long-métrage Animals,
mais que l'on pu voir aussi dans l'excellent Prisoners
de Denis Villeneuve, The Belko Experiment
de Greg McLean, ou dans tout un tas de séries télévisées. De
l'autre, l'actrice Karen Gillan, qui débuta sa carrière en 2006
dans la série Rebus,
poursuivit notamment avec Doctor Who
et s'avère incarner le personnage de Nebula dans la saga de
science-fiction Les Gardiens de la Galaxie.
Autant
dire que ces deux là risquent d'en étonner plus d'un parmi ceux qui
auront le loisir de découvrir All Creatures Here
Below.
Beau comme une histoire d'amour. Histoire tragique, également, comme
certains cinéastes savent nous en raconter. Et Collin Schiffli est
de ceux-là. Qui nous bouleverse avec, certes, pas grand chose, mais
qui appuie avec insistance là où ça fait mal. Un road-movie, donc,
Gensan et Ruby passant en voiture (volée) d'un état à l'autre.
Pour fuir la police mais aussi leur destin. Celui qui s'acharne
constamment sur eux. Elle perd son boulot, lui également. Il tue un
bookmaker prenant des paris sur des combats de coqs clandestins, elle
kidnappe un bébé parce que selon elle : ''sa mère ne s'en
occupait pas''. Un couple dysfonctionnel et si fusionnel à la fois.
On
s'attache immédiatement à ce jeune couple que forment avec
délicatesse et tendresse David Dastmalchian et Karen Gillan alors
qu'il aurait été si simple de faire du premier un voyou bas du
front réagissant au quart de tour et de la seconde une excitée du
bulbe obsédée à l'idée d'avoir un enfant à elle. Sauf qu'en
s'appuyant sur la tendresse qu'ils partagent l'un envers l'autre,
Collin Schiffli nous offre un Gensan toujours sur la tangente, près
à dégainer, mais prenant sur lui pour ne pas détruire la seule
chose qu'il semble avoir ''réussi'' : le couple qu'il forme
avec Ruby. Cette jeune adulte qui au fond, est restée une enfant.
Mise en scène sobre, scénario quelconque préférant se reposer sur
l'incarnation des personnages mais révélations bouleversantes, et
joli score signé du compositeur islandais Ceiri Torjussen qui nous
offre ici une partition lumineuse qui enveloppe le long-métrage
Collin Schiffli d'une aura tantôt poétique, tantôt dépressive.
Beau, mais parfois terriblement sombre, All
Creatures Here Below est
peut-être le plus beau film de cette fin d'année 2019, mais
malheureusement toujours pas sorti sur nos écrans. Une pépite à
côté de laquelle il serait vraiment dommage de passer...
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