Un moment d'égarement,
de folie, un dimanche après-midi, sous un soleil du mois de
septembre, le pharmacien d'une petite ville, Grégoire Duval, s'offre
une promenade digestive, laissant derrière lui son épouse et leur
deux enfants, partis faire du bateau autour du lac. C'est à quelques
centaines de mètres qu'il croise la route de Catherine que son
compagnon a abandonné pour aller chercher de l'essence. Elle est
jeune, jolie, et surtout légèrement dévêtue. Duval se penche vers
elle, tente de l'embrasser, mais devant la résistance et les cris de
la jeune femme, il l'étrangle. Sylvain Sautral, l'amant de Catherine
est immédiatement soupçonné. Mis aux arrêts par le commissaire de
police, il est jugé quelques temps plus tard pour le meurtre de sa
fiancée. Parmi les jurés se trouve Duval, celui-là même qui a tué
Catherine. L'idée de voir un innocent reconnu coupable de son méfait
lui étant insupportable, le pharmacien décide de tout tenter afin
de faire acquitter Sautral. Mais même innocenté, le retour à la
liberté du jeune homme ne sera pas de tout repos car pour les
habitants de Pontarlier, il reste le seul et unique coupable...
Réalisé en 1961, Le
Septième Juré demeure un furieux réquisitoire contre la
présomption de culpabilité. Ici, le visage du mal n'est incarné ni par
la justice, ni par cet homme innocent que l'on tente de condamner
faute de coupable véritable, ni par le véritable assassin qui tua
sans le vouloir une jeune femme, mais bien par la population d'une
petite commune française qui d'une seule voix s'est levée pour
accuser un homme bien avant qu'il soit assis dans le box des accusés.
Sylvain Sautral contre le monde entier. Ou presque puisque l'un des
rares à vouloir le soutenir avec le docteur Hess (excellent Maurice
Biraud), c'est le coupable lui-même, merveilleusement incarné par
Bernard Blier. Face à lui, le monde entier. Ou tout simplement les
habitants de Pontarlier. Ses amis, ses voisins, ses clients, et même
son épouse Geneviève (Danièle Delorme) qui voit en la
participation de Grégoire au procès en tant que juré, l'occasion d'asseoir davantage la
situation de son mari qui a pignon sur rue.
Le génial cinéaste
Georges Lautner, auteur d'une foule d'excellents longs-métrages,
signe avec Le Septième Juré
une œuvre étudiant avec méthode le comportement de citoyens
prompts à juger un homme sur de simples soupçons, l'important
n'étant alors plus de condamner LE coupable mais du moins UN
coupable, qu'il le soit réellement ou non. Découpé en plusieurs
phases, le film de Georges Lautner s'ouvre sur le drame, puis se
poursuit avec l'exemplaire procès durant lequel le personnage incarné
par Bernard Blier sauve les meubles en faisant acquitter Sylvain
Sautral, interprété à l'écran par Jacques Riberolles. Bien que
cette partie du long-métrage soit déjà en soit, une sacrée
réussite, la suite est à l'avenant puisque au sortir du tribunal,
l'homme qui a été officiellement reconnu innocent, n'en a pour
autant pas terminé avec les plus virulents des juges dont les
visages prennent ceux de ses concitoyens. Sans doute l'un des aspects
les plus glaçants renvoyant à ces faits-divers se produisant
couramment et hors de la fiction. Avec une certaine ironie, Georges
Lautner démonte cette institution qui consiste à protéger les
notaires même lorsqu'ils avouent leur péchés. En cela, Le
Septième Juré
est une œuvre faisant une fois de plus écho avec des faits-divers
dont continue de parler la presse même aujourd'hui. L'arrivisme et
la froideur dont fait l'objet le personnage incarné par Danièle
Delorme est en cela assez saisissant. Le film de Georges Lautner
démonte certaines institutions (la police en prend quelque peu pour
son grade) tout en en préservant certaines autres (le tribunal et
ses juges sauront rendre justice comme il se doit). Le cinéaste clôt
son œuvre sur une note particulièrement sombre, laissant à une
justice bien différente l'opportunité de résoudre enfin cette
affaire. Un chef-d’œuvre...
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