L'un des points communs
qui réunissent bon nombre de la vingtaine de longs-métrages
réalisés par le cinéaste américain Stuart Gordon demeure la
faiblesse de leur mise en scène. Si Re-Animator
reste encore aujourd'hui comme l'un des monuments du gore, l'auteur
de From Beyond,
de Fortress
et de Dagon
signait en 1995 l'un de ses projets les plus faibles. Certains fans
peu objectifs vous diront pourtant le contraire mais Castle
Freak
est une œuvre plutôt laide, à l'esthétique un peu trop surannée
et à la direction d'acteurs inacceptable de la part d'un auteur qui
réemployait là, le couple fétiche de ses deux premiers
longs-métrages. Alors que Stuart Gordon est dans le bureau du
producteur, scénariste et réalisateur américain Charles Band, il
aperçoit une affiche intitulée Castle
Freak
sur laquelle est imprimée une créature proche du Quasimodo
de Notre-Dame de
Paris de
Victor Hugo. Charles Band lui offre l'occasion de s'emparer du sujet
tournant autour d'un château et d'un monstre qui y rôde. C'est
ainsi donc que naît le huitième long-métrage de Stuart Gordon, un
projet financé à hauteur de 500 000 dollars. Et l'on sent bien que
le budget est étriqué.
Stuart
Gordon étant en partie célèbre pour avoir adapté plusieurs récits
écrits par le romancier fantastique américain H. P. Lovecraft,
malgré les origines du script de Castle Freak,
ce dernier semble avoir été également inspiré par un ouvrage du
célèbre écrivain intitulé The Outisder.
L’œuvre originale que son auteur considérait comme la plus proche
de son idole Edgar Allan Poe exploite l'histoire d'un personnage
vivant seule et désirant faire la connaissance de ses semblables. Un
individu comparable au monstre croisé dans les galeries souterraines
du château des Reilly que forme le mythique couple cinématographique
Jeffrey Combs et Barbara Crampton dans la peau respective de John et
de Susan. Lesquels sont accompagnés pour l'occasion de l'actrice
Jessica Dollarhide dont la carrière d'actrice ne se présenta que
sous la forme d'une poignée de longs-métrages.
Dès
le début, Castle Freak sent
le film fauché. Une vieille demeure de style italien (le cadre de
l'intrigue est censé se dérouler en Italie) sert de décor à une
œuvre qui au final et au regard de la filmographie de son auteur
demeure l'un de ses plus faibles projets. Stuart Gordon exploite
assez mal ses personnages. Bien qu'il tente à plusieurs occasions
d'exploiter sa créature à la manière du Fantôme
de l'Opéra
ou d'une créature proche de celle créée par un certain Docteur
Frankenstein,
Giorgio, le monstre en question passe le plus clair de son temps
recouvert d'un drap cachant son horrible silhouette. Il manque au
film de Stuart Gordon une certaine dimension. Difficile en effet
d'éprouver la moindre émotion devant cette créature cachée aux
yeux de tous à cause de sa grande laideur. Outre l'aspect
horrifique, Stuart Gordon convoque le fantastique en évoquant avec
aussi peu de style et de talent que certains cinéastes italiens de l'époque,
l'hypothèse selon laquelle il y aurait une relation entre la mort
d'un enfant de cinq ans enterré dans les sous-sols du château et
celle du propre fils des Reilly décédé dans de tragiques
circonstances. Là encore, Stuart Gordon loup le coche lorsqu'il
entreprend de créer une sous-intrigue tournant autour de la tragédie
vécue par le couple qui, non content d'avoir perdu un enfant, ont eu
le malheur de voir leur fille perdre la vue après un accident de
voiture provoqué par John alors qu'il était ivre au volant.
Le
film tente désespérément de concilier l'épouvante, le fantastique
et le drame mais sans jamais vraiment y parvenir. L'humour y est
généralement absent et l'exploitation de la cécité du personnage
incarné par Jessica Dollarhide y est peu probante. A dire vrai,
nous n'aurions pas été étonnés d'apprendre que Castle
Freak
aurait été réalisé par l'italien Lamberto Bava. C'est dire si le
film est mauvais. Fort heureusement, Stuart Gordon allait se
ressaisir à l'aube des années 2000 avec une autre adaptation de H.
P. Lovecraft plutôt réussie, Dagon,
suivie de près par une excellente trilogie évoquée très récemment
en ces pages...
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