Hélène et Antoine ont
prévu de se retrouver dans un café puis de partir chercher leurs deux
enfants restés en colonie de vacances. Il est dix-sept heure. Puis
dix-sept et quart. Hélène n'est toujours pas arrivée. Antoine lui
téléphone, s’énerve et boit un verre, puis deux, puis trois.
Lorsque son épouse arrive, il est un peu agacé.
Sur l'autoroute, il fait
chaud et un embouteillage encombre la voie. Antoine s'arrête sur une
aire d'autoroute et passe boire un verre dans un bar pendant
qu'Hélène l'attend dans la voiture. Le effets de l'alcool
commençant à se faire sentir, le couple s'engueule. Antoine sent
dans la voix de sa femme, des reproches. Excédé, il roule un peu
plus vite, trop même. Dangereusement. Il décide même de quitter
l'autoroute et ses bouchons mais Hélène lui reproche son choix.
Alors qu'il fait nuit, une fois encore, Antoine a soif. Prétextant d'aller aux toilettes, il s'arrête à nouveau dans un bar.
Hélène le menace de prendre la voiture et de partir sans lui.
Antoine prend avec lui les clés puis se dirige vers un bar et
commande un whisky. Puis deux. Vingt minutes plus tard, lorsqu'il
quitte les lieux, il constate que la voiture est vide. Il trouve posé
sur son siège un mot laissé par Hélène : elle prendre le
train. Antoine a beau crier le nom de son épouse sur le parking, il n'obtient pas
la moindre réponse. Il reprend alors le volant et par à sa
recherche...
Sur une durée qui
n'excède pas les vingt-quatre heures, le personnage d'Antoine
(inspiré du roman éponyme de l'écrivain Georges Simenon adapté au
cinéma par le réalisateur Cédric Khan, auteur d'une dizaine de
long-métrages) va vivre et NOUS faire vivre un calvaire
admirablement mis en scène. Feux Rouges n'est rien
moins qu'un petit chef-d’œuvre. Principalement interprété par
l'excellent acteur français Jean-Pierre Darroussin autour duquel
s'articule l'intrigue, le film décortique avec précision les
conséquences d'une banale dispute entre mari et femme. Un retard de
quelques dizaines de minutes. La consommation d'alcool, la chaleur de
l'été et un immense embouteillage, il n'en fallait pas davantage
pour que le couple formé par Darroussin et Carole Bouquet en arrive
à la rupture.
Mais le récit ne
s'arrête pas là. Cédric Khan jette de l'huile sur le feu en
incluant des événements qui vont tout faire pour pourrir
l'existence d'Antoine. Comme l'auto-radio le prétend à diverses
reprises, un malfrat s'est échappé de prison. On se doute bien que
ce détail va jouer sur l'avenir de nos héros même s'il aurait pu
n'être qu'une information sans conséquences pour eux. Et
puis, il y a ces barrages qui retardent Antoine, et ce train qui
s'éloigne et qui amenuise ses chances de retrouver Hélène. Feux
Rouges explore des genres aussi divers que le drame (ce
couple qui s'engueule, Antoine qui boit, Hélène qui fuit), le
thriller (le voyage vers Bordeaux avec à bord de la voiture cet effrayant
personnage (l'acteur Vincent Deniard) pris en stop par Antoine), et
va même au delà puisque la nuit dessine autour de l'intrigue un
sillon fantastique que l'on retrouve habituellement dans les rêves,
ici, transformés en cauchemar !
La force du film est de
maintenir une tension palpable à travers la dérive alcoolique de
son principal personnage et ses rencontres avec ceux qu'il est amené
à croiser. On soupçonne tout le monde et la nuit crée
d'inquiétants fantasmes faisant du moindre inconnu un danger
potentiel. Jean-Pierre Darroussin emporte littéralement le sujet
avec lui. Entre alcoolisme, dérive comportementale et inquiétude au
sujet de la disparition de son épouse, on appréciera le film dans
son ensemble et notamment quelques scènes emblématiques comme celle
durant presque dix minutes lors de laquelle il va s'acharner sur le
téléphone d'un petit bar de province à appeler postes de police,
gares SNCF et hôpitaux afin d'obtenir des informations sur la
disparition d'Hélène. Cédric Khan réalise un petit bijou,
angoissant, haletant et extraordinairement interprété. Il y a
d'ailleurs dans Feux Rouges, des points de ressemblance
avec une œuvre elle aussi remarquable, L'homme Qui Voulait
Savoir de George Sluizer avec l'épatant Bernard-Pierre
Donnadieu...
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