Dans la petite ville de Concarneau une série de meurtres secoue la population. En effet, plusieurs femmes ont été retrouvées mortes étranglées sans que la police ne soit parvenue à mettre un nom sur l'auteur de ces meurtres. Le chapelier du village, Léon Labbé, vit seul au dessus de la boutique de chapeaux qu'il tient aidé du jeune Valentin et de Louise la domestique. Cet homme cynique donne l'illusion à son entourage que sa femme vit toujours avec lui alors que dans leur chambre à coucher trône en réalité dans un fauteuil roulant, un mannequin de cire affublé d'une perruque brune et des vêtements de son épouse. Son voisin le plus proche, Kachoudas, vit juste en face de la devanture de sa boutique. Vieil homme malade et malingre, ce tailleur arménien semble s'intéresser de très près à la vie du chapelier. A tel point qu'il le suit chaque soir jusqu'au bar ou se jouent des parties de cartes entre amis. Les langues se délient et ce lieu devient l'endroit idéal dans lequel on suppute tout et n'importe quoi sur l'étrangleur.
Lorsque le soir Louis rentre chez lui diner et qu'il monte ensuite rejoindre le mannequin censé donner l'impression que sa femme vit toujours, le chapelier parle souvent avec cette représentation muette qu'il a crée de toutes pièces. Elle même lui parle souvent. En réalité, Louis entend parler celle qui n'est plus. Une voix qui le rappelle à son bon souvenir et qui revient inlassablement sur les quelques mois qui ont précédés sa disparition.
Comme si celle-ci était présente dans la pièce, elle s'inquiète d'abord de ce que fera son mari à sa mort puis lui fait promettre qu'il ne se remariera jamais. Petit à petit elle développe un mal qui la pousse à la sénilité. Plus le temps passe et plus les voix qui résonnent dans la pièce sont celle d'une femme devenue folle et dont les crises deviennent à mesure qu'elles se rapprochent, des épreuves davantage insurmontables pour son mari.
Cet homme respecté et respectable, qui sacrifiait il y a encore deux mois son temps libre pour s'occuper de son épouse n'est pas celui que son entourage croit être. Il est en réalité ce tueur qui terrorise la gente féminine. Une série d'assassinats qui a pris forme à la suite du meurtre de sa femme qu'il a étranglée un soir alors qu'une nouvelle fois sa maladie la invariablement poussée à être odieuse envers lui, l'accusant d'être infidèle.
Devenu meurtrier en désespoir de cause, il s'est transformé en tueur impitoyable pour des raisons "pratiques". Le tailleur s'intéresserait-il à son voisin parce qu'il sait quelque chose? Toujours est-il que les meurtres continuent à alimenter la presse locale, que les fantasmes continuent à hanter les habitant de la ville et que le tueur provoque la police en lui envoyant des lettres anonymes...
L'intriguant dans ce film de Chabrol est de se demander ce qui peut pousser un homme bien sous tous rapports à devenir un monstre qui tue des femmes. Pour le plaisir ou par nécessité, cela on le découvre à mesure que le scénario déroule le fil de l'intrigue et que le lourd secret que tente de préserver l'assassin se dévoile peu à peu. Et ce qui va le pousser vers cet engrenage meurtrier, c'est la maladie de celle qui partage sa vie. Plus le temps passe et plus on comprend ce qui a mené cet homme à tuer sa femme. Sans l'excuser on comprends son acte mais surtout, on sait ce qui va par la suite le pousser à trucider sept femmes. Sept amies de son épouse qui depuis dix ans viennent chaque années lui fêter son anniversaire. Alors évidemment, on comprends le dilemme de son mari. Car après s'être occupé de sa femme dont tout le monde croit voir la silhouette à travers la fenêtre de sa chambre quand vient la nuit, il n' a d'autre choix que de tuer l'une après l'autre celles qui découvriront par la force des choses que leur amie a disparue.
Et cela, le chapelier ne le veut pas. Même si l'on comprends son premier geste, il est déjà difficile de l'excuser. Les meurtres qui vont suivre alors le transforment en un personnage déjà beaucoup moins attachant. Un monstre qui en plus d'ôter la vie à plusieurs femmes envoie des lettres anonymes à la police avec laquelle il joue. Une police incompétente qui ne parviendra à mettre la main sur le meurtrier que grâce à une très grossière erreur de sa part. Le commissaire chargé de l'enquête semble incapable de faire le lien entre chaque meurtre. Disons que si chacun sait qu'ils sont liés, personne ne semble voir le lien qui unit chacune des victimes. Lorsque disparait Louise, la bonne des Labbé, la police la considère enfuie au bras de son amant. Son père lui-même, venu chercher ses affaires dans la chambre qui lui sert de logement au dessus de l'appartement des Labbé pense à une fuite de sa fille malgré certains éléments troublants comme la présence dans la penderie de son imperméable.
Et quand au tailleur d'en face, qui vit avec sa femme et ses enfants. Est-il si fasciné par le tueur qu'il préfère garder le silence quand à son identité au risque de mettre en danger les siens?
Peut-être faut-il voir là les faiblesses d'un scénario qui préfère se concentrer sur le personnage du chapelier ou bien la volonté première de ne pas transformer ce drame en un banal film policier.
Même si l'ombre de Simenon hante les quartiers sombres de la ville, à aucun moment celle de Maigret ne vient surprendre le tueur dans ses méfaits.
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