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mardi 27 mars 2012

Zulawski en 2 films: Possession (1981), Chamanka (1996)



Lorsque Mark rentre de son voyage professionnel, il est loin de se douter de l'incroyable aventure qu'il va vivre en compagnie de sa femme Anna. Il apprend tout d'abord que cette dernière le trompe depuis un an avec un certain Heinrich, gourou mystique à la "zen-attitude", et qui a tendance à énerver Mark lorsqu'ils font connaissance. Une première rencontre qui va s'avérer brutale pour un Mark déboussolé qui vient de vivre, après le départ de sa femme, de longues semaines de dépression.

En réalité Anna n'a pas vraiment quitté Mark. Elle vit en même temps chez eux afin de s'occuper de leur enfant Bob mais aussi chez son amant Heinrich. Les rapports du couple se dégradent à mesure que Mark cherche à savoir pourquoi sa femme se détache ainsi de lui et de ses responsabilités pour retrouver son amant alors qu'elle-même semble être de plus en plus sous l'emprise de ce dernier. Un amant qui va se révéler être bien diffèrent de celui que l'on pense car Mark découvre qu'Heinrich n'a plus de nouvelles d'Anna depuis des semaines.


Mark engage un détective privé pour savoir où elle se rend lorsqu'elle quitte le cocon familial dans lequel règne désormais un désordre indescriptible. Un lieu de vie qui se désagrège à l'image du profond traumatisme qui engendre haine et violence au sein du couple.

Mark fait ensuite la connaissance de l'institutrice de son fils Bob, Helen, et qui ressemble étrangement à Anna, sorte de pendant angélique et lumineux d'une femme qui ne cesse de s'enlaidir. Car Anna, autrefois mère de famille tout à fait singulière n'est désormais plus que l'ombre d'elle-même, allant jusqu'à s'infliger des mutilations, imitée d'ailleurs très vite par un Mark loin de se douter que le responsable du désastre émotionnel qu'ils sont en train de vivre est dû à un être qui n'a finalement rien d'humain...

Andrzej Zulawski réalise "Possession" en 1981 soit six ans après ce que l'on peut considérer comme son plus grand film "L'important c'est d'aimer". Tout comme dans ce dernier ainsi que dans beaucoup d'autres qui suivront, il analyse à sa façon les travers de personnages qui s'aiment puis se déchirent dans une valse toujours morbide et codée parfois difficile à déchiffrer. On estime souvent que les personnages en font trop, qu'ils sont caricaturaux et c'est peut-être vrai. Mais cette approche particulière du cinéaste renforce finalement le sentiment de malaise face à ceux qui se détruisent et devant lesquels nous restons de simples téléspectateurs allant même jusqu'à agir comme de véritables voyeurs sans jamais pouvoir interagir avec le triste quotidien des héros.


Du drame Zulawski nous transporte peu à peu dans un univers morbide au climat effroyable. L'horreur est omniprésente dans l'existence des personnages et dès lors que l'on découvre le vrai visage de celui qui est à l'origine du traumatisme engendré par la séparation et surtout lorsque l'on pénètre pour la toute première fois dans son repère, on s'attend à chaque plan à ce que le cauchemar prenne le dessus de manière définitive et c'est ce qui arrive très souvent.
Le cinéaste saupoudre son film de scènes hallucinantes telle celle du métro dans laquelle Isabelle Adjani qui incarne les personnages Anna et Helen semble en transe, se tord de douleur comme possédée par on ne sait quelle entité et se voue entièrement à la cause d'un Andrzej Zulawski qui n'en n'a jamais autant demandé à une actrice. On comprends alors pourquoi elle a été couverte de récompenses pour ce rôle.

Si Andrzej Zulawski, à travers une quinzaine de longs métrages livre sa vision toute personnelle de l'Amour, chez lui il est bien souvent destructeur et mène ses personnage dans un tourbillon de folie duquel jamais ils ne parviennent à s'extraire. En 1975 il réalise "l'important c'est d'aimer" que l'on peut considérer comme son meilleur film. Interprété par Romy Schneider, il dégage une force émotionnelle incomparable avec ses autres œuvres. L'actrice y est pour beaucoup et se livre sans concession dans un rôle que très peu d'actrices auraient été capables d'assumer. D'autres "subiront" l'interprétation offerte par ce cinéaste particulier (et très peu considéré par la critique) dans des rôles difficiles, jouant de leur corps mais aussi de leur âme. La très rare Valerie Kaprisky formidable dans "La femme Publique" mais aussi et surtout Sophie Marceau qui tourna plusieurs fois avec Zulawski notamment dans le déjanté "L'amour braque", le troublant "Mes nuits sont plus belles que vos jours" ainsi que dans l'adaptation libre de la vie de Chopin, "La note bleue" dans lequel elle interprète le rôle de Solange, la fille de Georges Sand. 


Le point commun entre tout ces films est la folie permanente qui se dégage de chaque situation donnée, de chacun des personnages à la diction épileptique et parfois schizophrénique face à la gestion de leurs sentiments. On doit parfois tendre l'oreille pour saisir le sens de certaines répliques (L'amour braque) ou encore remplir le vide de celles laissées à l'abandon par la maladie.(Mes nuits sont plus belles que vos jours).Le rythme est un paramètre important dans la mise en image d'histoires qui, si dans un premier temps paraissent quelconques, glissent inexorablement dans un abîme sans fond. Les héros de Zulawski s'aiment puis se repoussent pour enfin se retrouver et se détruire..

Et c'est d'autant plus flagrant dans "Chamanka", film jusqu'au-boutiste, qui plonge littéralement le spectateur dans l'univers torturé de deux êtres qui vont vivre une histoire d'Amour tout aussi bouleversante qu'effroyable. L'actrice Iwona Petry qui interprète le rôle de Wloszka est totalement habitée par son personnage à tel point que l'on se demande très souvent si elle joue ou si elle est naturelle. Le malaise permanent ressentit à la vision de ce jeu de l'amour et de la mort est dû en partie à la froide partition d'Andrzej Korzynski notamment dans la scène finale, très impressionnante. 


Chamanka est l'histoire simple d'un homme et d'une femme qui se cherchent et se repoussent dans une sorte de tourbillon psychologique éprouvant qui va les mener à leur perte. Rien ne nous est épargné dans leurs douloureux rapports. L'amour y est parfois théâtral, souvent bestial mais toujours emprunt d'un mysticisme pas toujours justifié.

Chamanka fait partie de ces films monstres qu'on n'oublie pas et qui marquent les rétines pour longtemps.

1 commentaire:

  1. Encore une Anna... !
    Pas le genre de film que j'aurais envie de voir en ce moment mais une super analyse en tout cas :-)

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