De Franck Zito on ne sait, et on n'apprendra, pas grand chose. Il se dit artiste mais l'est-il vraiment, lui qui traîne la nuit dans les rues crasseuses de New-York à la recherche de ses futures proies? Derrière le masque de cet homme se cache l'un des plus effroyables serial killer de toute l'histoire du cinéma. Il ne ressemble en rien à ces super-héros de l'homicide qui se planquent derrière les visages sereins d'acteurs mondialement connus. Joe Spinell campe cet homme malade. Cet enfant dont la mère décédée hante malgré tout encore son existence. Castratrice, elle a façonné à sa manière l'homme qu'est devenu plus tard le jeune Franck au travers de pratiques abominables.
Le torse brûlé à l'aide de mégots de cigarettes, l'enfant est devenu aujourd'hui un tueur impitoyable qui s'en prend essentiellement aux femmes. Mais ces être fragiles dont le scalpe finit cloué au sommet d'un mannequin de cire ne sont-elles pas la déviante représentation qu'en fait l'esprit tourmenté de Franck? Il n'a jamais réussi à se soustraire de l'autorité de sa mère, même bien après la mort de celle-ci, et l'emprise qu'elle avait sur lui existe toujours. Mais cette aversion profonde qui pousse le tueur à éliminer toutes celles qui ont le malheur de croiser sa route se mêle à une certaine forme d'amour œdipien. Et même jusqu'à la déification de la mère qui prend forme lors des extraordinaires mais très inquiétants monologues durant lesquels on ne sait plus vraiment qui s'exprime devant la caméra. Certains détails ajoutent à cet aspect comme la photo de la mère, véritable icône, entourée de cierges allumés.
Chaque meurtre est d'un point de vue graphique, d'une épouvantable noirceur. Comme s'il on assistait en direct à des meurtres réels filmés avec distance et sans recul, le premier degré est de mise et rien ne permet d'échapper à l'étouffante impression d'être les spectateurs volontaires de faits divers sordides bientôt révélés dans la presse.
Si le film de William Lustig reste encore plus de trente ans après sa sortie comme l'une des plus terrifiantes expériences cinématographiques, ce n'est pas seulement grâce aux fantastiques effets-spéciaux signés Tom Savini qui laisse ici s'exprimer en totale liberté son immense talent mais bien parce que le cinéaste insuffle au long métrage une ambiance malsaine, glauque et même parfois terrifiante. Ce qui, en toute objectivité, et pour avoir vu de très nombreux films d'épouvante, est tout de même très rare au cinéma.
Pour s'en convaincre, il suffit de jeter un œil sur la scène qui voit notre serial killer suivre jusque dans le métro une jeune infirmière qui rentre chez elle tard le soir. Accompagné par un piano désaccordé, Franck Zito prend tout son temps et traque sa proie comme un chat le ferait avec la sienne. La victime se sait suivie. Elle prend peur, accélère le pas, se retourne et court se réfugier dans les toilettes publiques d'une station de métro. Le souffle coupé et parvenue jusqu'au piège dans lequel elle vient elle-même de s'enfermer, on assiste épouvantés au drame qui se joue et l'on attend avec appréhension la conclusion que l'on sait jouée d'avance pour elle.
La tension atteint ici son point culminant mais n'est encore rien en comparaison du long et "glauquissime" monologue qui va suivre. Le visage bouffi et marqué. L’œil rond et le regard éteint. Joe Spinell n'a besoin d'aucun artifice pour faire naître l'angoisse chez le spectateur.
Il est intéressant de noter que la version française parvient à égaler la version originale. Ce qui ravira les anglophobes. La bande-son signée Jay Chattaway colle parfaitement à ce monument de l'épouvante qu'est "Maniac". William Lustig dégage du scénario toute idée d'inclure la moindre enquête afin d' hypnotiser son public et ainsi lui permettre de pénétrer au mieux l'esprit du tueur comme le fit à la même époque Gerald Kargl avec son très curieux "Schizophrenia".
EXTRAIT:
Le tueur est incapable de mener une vie sexuelle normale et ne trouve son exutoire que dans la collection de scalpes qu'il cloue sur des mannequins de cire et dont les visages lisses et impersonnels tranchent avec la forte personnalité de sa mère.
Chaque fois que Franck tue, il ne se débarrasse pas de sa victime de manière aléatoire mais bien dans le but de croiser le fer avec le fantôme de sa génitrice et ainsi prouver son détachement et sa supériorité sur elle.
A l'instar du Henry, "Portrait Of A Serial Killer" de John McNaughton, William Lustig choisi de montrer le visage de son tueur et d'en faire ainsi un homme presque anodin, que l'on pourrait aisément croiser dans la rue ou bien avoir comme voisin. A tel point même qu'il n'est pas rare d'éprouver de la pitié pour cet homme au physique repoussant et à la morale parfois douteuse. On est loin du boogeyman défiguré par d'atroces marques de brûlures ( Freddy Krueger dans "Nightmares On Elm Street") ou de celui qui porte sur le visage le masque de chair de ses victimes (Leatherface dans "Texas Chainsaw Massacre"). Si contrairement à ce dernier ce n'est pas le soleil qui a tapé un peu trop fort sur la tête de Franck, c'est au contraire l'obscurité qui fait resurgir les mauvais démons. On peut ou pas fantasmer sur des événements aussi sordides que ceux auxquels on assiste et trouver là, matière à étudier l'esprit tourmenté d'un serial killer, toujours est-il que d'après un certains nombre de témoignages et de critiques, le film semble toucher une majorité de spectateurs quand d'autres ne semblent pas s’émouvoir du portrait de Franck Zito.
La sensibilité de chacun étant ce qu'elle est, on ne pourra reprocher ni aux uns, ni aux autres l'engouement ou le rejet que provoque "Maniac", tout juste serait-il judicieux pour ceux qui aujourd'hui encore ne connaissent pas ce grand classique de l'épouvante, de faire abstraction des avis lus dans la presse écrite, sur le net ou à travers le bouche à oreille, et de se faire une opinion toute personnelle.
Ma note : ★★★★★★★★☆ ☆
Suppléments:
Joe Spinell (28/10/36 – 13/01/89) : Mort d'un Maniac - Légende ou réalité?
Les hypothèses quand au décès de Joe Spinell sont multiples et par conséquent, il devient évident que la majeure partie d'entre elles sont fantaisistes. L'une d'elle tout particulièrement, peut-être la moins réaliste mais qui aux yeux des cinéphiles paraîtrait la mieux "adaptée", veut que Joe Spinell, atteint d'hémophilie, se soit mis aux drogues dures et à l'alcool après sa trop grande implication dans le rôle du tueur. Il aurait été retrouvé mort vidé de son sang après s'être cogné et s'être endormi sur le canapé du salon. Cette version est bien sûr la plus "sensationnelle" mais pas nécessairement la plus juste.
L'acteur avait prévu de jouer dans une suite sobrement intitulée "Maniac 2: Mr. Robbie" mais sa disparition semble avoir mis un terme définitif au projet mis en chantier à l'époque par Buddy Giovinazzo, auteur d'un craspec et pessimiste "Combat Shock" (une variante glauque du "Taxi Driver" de Martin Scorsese ).
Les victimes face à leur bourreau :
Si cet article fait volontairement l'impasse sur Caroline Munroe, c'est parce que j'estime que sa participation au film est anecdotique et que son interprétation n'a rien d'inoubliable. C'est peut-être le seul point négatif du film si l'on juge par dessus tout que le grain de la bobine, la minceur du scénario ainsi que la redondance de certaines actions n'entachent pas l’intérêt du film. Concernant le premier point, il est indéniable que l'utilisation du 16 mm, qu'il soit volontaire ou découlant de moyens ridicules, est un détail qui a son importance sur l'ambiance générale du film. Certaines rues de New-York y sont plus sales que dans la réalité. Si les meurtres semblent au premier abord s’enchaîner sans véritable cohérence, il suffit de se pencher sur l'activité des victimes pour trouver chaque fois le rapport qui les unie et les condamne forcément aux yeux de leur bourreau. S'il paraît normal et même presque romantique de croiser la route d'un couple d'amoureux qui s'éveille tout juste de la nuit qu’il vient de passer sur une plage déserte, qu'en est-il de ce que peut ressentir un homme qui s'érige en justicier pourfendeur de femmes libertines? Quand à celles qui vendent leurs corps pour quelques billets verts (dans l'une des chambres crasseuses d'un hôtel de passe pour la première et devant l'objectif d'un photographe pour la seconde), ne méritent-elles pas finalement d'être châtiées? Si l'infirmière est la seule victime dont on reste incertains des dispositions, nul doute que le tueur, lui, sait pourquoi elle doit mourir. Et pourquoi Caroline Munroe? Peut-être parce qu'elle participe elle-même au grand sabbat. Certains détails ne viennent-ils pas conforter cette curieuse impression?
superbe article ! merci coin-coin ! j'ai hâte d'enlire d'autres !
RépondreSupprimerNe pas oublier le rôle déterminant de Joe Spinell dans la conception du film. En dehors de sa composition hallucinante, il fut aussi l'auteur de l'idée de base et s'est beaucoup démené pour que le projet prenne corps. MANIAC est son enfant, autant que celui de Bill Lustig.
RépondreSupprimerBonne continuation, et surtout bon courage, car la rédaction d'un blog n'est pas de tout repos...
Très intéressant. Cela ma donner envie de revoir le film.
RépondreSupprimerah ben je pex enfin mettre un com ici monlolodelabastoutenbas!!! j'ai bien pris 6 cheveux blancs supplementaires a chercher comment parer a ces refus categoriques de blogspot!
RépondreSupprimercontente de te relire , quentin essaye de me convertir a saw, cela dit c'est vraiment pas gagné !ahahha
je pars une tite semaine dans ta cité sudesque , bonnes vacances a toi si tu rejoins ta dulcinée
kissouilles dicitoutenhaut
"Joe Spinell"u type formidable qui a mal survécu au décé de sa maman avec laquelle il fume un joint a la fin "des frénétiques";)
RépondreSupprimerDe "Forbiden Zone" à "Cruising" que de roles honnorés haut la main même au second plan.
La légente dit aussi qu'il avait gardé la reproduction de de sa tête provenant du film sur sa TV est lorque la police est arrivé ils ont pas tout compris?????
Sinon bien vu les références à "Henry" et si la chance vous permez de le voir sur grand écran ne passez pas à coté.......si vous aimez vous foutre une trouille bleu bien sur.
Un rejeton tout aussi sombre et névrosé que je conseille:
Troublantes aussi les similitudes avec "don't go to the house" aka "pyromaniac" sorti la même annnée et aussi réjouissant (dispo dans la cavernes des introuvables)