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mardi 31 mars 2020

Demonia de Lucio Fulci (1990) - ★★★★☆☆☆☆☆☆



Si les derniers longs-métrages réalisés par le cinéaste italien Lucio Fulci jouissent d'une piètre réputation, ça n'est certes pas sans raisons. En effet, l'auteur des remarquables westerns Le Temps du Massacre et Les 4 de l'Apocalypse, celui du Venin de la Peur, de Liens d'Amour et de sang et de La Longue Nuit de l'Exorcisme mais aussi et surtout de toute une série de films gores cultissimes dont L'Enfer des Zombies, Frayeurs, L'Au-Delà ou encore La Maison près du Cimetière n'a pas connu une fin de carrière des plus reluisante. Parmi ses derniers longs-métrages, on trouve notamment Demonia. Réalisé en 1990, il s'agit de son antépénultième film cinéma (si l'on ne tient pas compte du téléfilm Hansel e Gretel pour lequel il n'a de toute manière pas été crédité). Mais il faut bien le reconnaître, celui-ci ne fait pas partie du haut du panier et ressemble davantage à un sous-produit horrifique très légèrement plus digne que l’œuvre presque toute entière de Lamberto Bava qu'au meilleur de ce qu'a pu produire dans les années soixante-dix et quatre-vingt le cinéaste transalpin. Cependant, comme on le verra un peu plus loin, Demonia n'est pas dénué de tout intérêt. Et malgré ses nombreuses tares, le film est la promesse de quelques séquences particulièrement gratinées qui renvoient directement au meilleur de l'auteur de L’Éventreur de New York.

L'intrigue, tout d'abord. Elle met en scène l'actrice Meg Register qui dans la peau de Liza Harris et en compagnie du Professeur Paul Evans (l'acteur américain Brett Halsey) part pour la Sicile à la rencontre d'archéologues ayant par accident, libéré l'esprit de cinq nonnes crucifiées cinq cent ans auparavant pour avoir participé à plusieurs reprises à des orgies dans l'intimité de leur chambre. Coupables d'avoir tué leur amant respectif et d'avoir donné naissance à des enfants illégitimes, leur fantôme sème aujourd'hui la mort, les habitants étant persuadés que l'enquête que mène Liza à leur sujet est directement liée à la disparition de plusieurs hommes retrouvés horriblement mutilés. S'il est généralement difficile de contraindre le spectateur qui au delà de L’Éventreur de New York éprouve des difficultés à supporter ce qu'a produit postérieurement Lucio Fulci, il serait dommage de s'acharner à ne vouloir rien entendre au sujet de Demonia. Car plus que la comparaison entre le travail assez navrant d'un Lamberto Bava jamais vraiment digne des travaux de son paternel et celui de Lucio Fulci, Demonia n'est pas aussi raté qu'il en a l'air. Il faudra cependant s'armer d'une défense immunitaire à toutes épreuves. En effet, le film pique souvent les yeux et il n'est pas rare que l'on éprouve quelques difficultés à supporter la post-synchronisation effectuée en anglais. De quoi rendre malade, donner la nausée et des maux de tête terribles.

Mais j'exagère. Demonia est tout à fait ''comestible'' si l'on accepte son aspect visuellement désuet, proche de l'esthétique d'un téléfilm bon marché. La direction artistique de Massimo Bolongaro est effectivement inexistante. À croire que le bonhomme, également créateur des costumes et déjà responsable de la direction artistique de Rivelazioni di un Maniaco Sessuale al capo della Squadra Mobile de Roberto Bianchi Montero en 1972 fut dans le cas présent, aux abonnés absents. Tourné à Rome, Demonia bénéficie cependant de quelques décors fort sympathiques. Telles les rues étroites de certains quartiers de la ville où les quelques ruines où sont situées certaines séquences dont un amphithéâtre en plein air et surtout un impressionnant couvent à flanc de falaise. Autre qualité non négligeable : les effets-spéciaux gore du maquilleur Franco Giannini. Si Lucio Fulci fait à plusieurs reprises référence à certains de ses classiques (la crucifixion, la séance de spiritisme, l'attaque des chats), quelques scènes bien sanglantes viennent agrémenter un récit anémique et léthargique. Énucléation, tête coupée plantée dans le bec d'une ancre marine et pire encore, bébé brûlé vif et corps écartelé jusqu'au point de rupture. Demonia s'avère en matière de gore particulièrement gratiné. Notons la présence aux côtés de Brett Halsey, Meg Register, Lino Salemme, Christina Engelhardt ou de Pascal Druant de celle du cinéaste lui-même qui plus qu'un simple caméo interprète le rôle de l'inspecteur Carter. Bilan de Demonia : réalisation mollassonne, visuel horrible, score ringard, interprétation juste mais pas exceptionnelle, post-synchronisation atroce, mais... effets gore en général plutôt convaincants. Une œuvre en demi-teinte...

lundi 30 mars 2020

La Montagne Sacrée d'Alejandro Jodorowsky (1973) - ★★★★★★★★★★



Fondateur de ''l'anti-mouvement'' Panique aux côtés de Fernando Arrabal, Olivier O. Olivier, Jacques Sternberg, Christian Zeimert, Abel Ogier et Roland Topor, réalisateur, scénariste, acteur de cinéma et comédien de théâtre, romancier, poète, mime, scénariste de bandes-dessinées aux côtés des dessinateurs Moro, Mœbius, Juan Giménez, Zoran Janjetov ou encore José Ladrönn, pratiquant le tarot divinatoire, le chilien Alejandro Jodorowsky est aussi et surtout l'auteur d'une poignée de longs-métrages cultissimes. Une carrière de cinéaste débutée en 1957 avec le court-métrage La Cravate (dans lequel apparaît notamment l'humoriste Raymond Devos) et poursuivie dès 1968 avec son premier long-métrage Fando y Lis (Alejandro Jodorowsky réalisa entre les deux Teatro sin Fin, un assemblage de documents relatifs à l'anti-mouvement Panique). En 1970, le chilien réalise ce qui demeure encore à ce jour ce que considèrent certains comme l'unique représentant du sous-genre ''Western ésotérique'', El Topo. Une œuvre tellement mystique, délirante, inventive et dense qu'elle su notamment marquer l'esprit de John Lennon et Yoko Ono au point que ces deux là participèrent au financement de son troisième long-métrage, le tout aussi cultissime La Montagne Sacrée. Si le réalisateur chilien y quitte les terres poussiéreuses du western, il choisit cependant de continuer à défricher celles du mysticisme tout en y apportant un message politique et social sous-jacent...

D'une richesse absolument enivrante, La Montagne Sacrée évoque de très nombreux thèmes parmi lesquels Alejandro Jodorowsky réécrit une partie de l'histoire de l'humanité sous les atours du psychédélisme. C'est ainsi que son héros, un voleur incarné par l'acteur Horacio Salinas, dont La Montagne sacrée semble être sa dernière participation au monde du septième art après Veinticuatro Horas de Vida d'Arturo Martínez et Con Licencia para Matar de Rafael Baledón réalisés tout deux en 1969), se voit immédiatement assimilé au Christ. Crucifié, lapidé par des enfants (le sexe et le pubis peints en vert !!!) et revenant d'entre les morts, c'est accompagné d'un homme-tronc (Après El Topo, Alejandro Jodorowsky continue à évoquer sa passion pour la difformité) qu'il arrive en ville et participe à un simulacre de guerre (le réalisateur rencontrera des problèmes avec le gouvernement mexicain, le contraignant ainsi à quitter le pays pour les États-Unis) avant d'être proprement utilisé à des fins commerciales (là encore, en amalgamant le merchandising et l’Église, le chilien s'attire la foudre des autorités cléricales). Prostitution, état policier, et plus tard, critique contre les politiques et les industriels, Alejandro Jodorowsky n'y va pas avec le dos de la cuillère.

Pour autant ne faut-il voir en La Montagne Sacrée qu'une critique acerbe de la société chilienne d'alors ? Certainement pas, non. Car bien au delà du réquisitoire qu'imposent certains des thèmes abordés, le troisième long-métrage d'Alejandro Jodorowsky est d'abord une œuvre mêlant ésotérisme (le réalisateur y incarne le rôle d'un alchimiste ayant découvert la formule permettant de transformer les excréments en or !!!), quête de l'immortalité (une recherche qui mènera le héros et ses compagnons jusqu'au sommet de la montagne sacrée du titre), tout ceci dans un contexte surréaliste et psychédélique visuellement remarquable. Entre la barbarie de certaines séquences finissant dans le sang et durant lesquelles le réalisateur oppose notamment des crapauds (signifiant l'occupant nazi) à des caméléons ou la description des compagnons du héros eux-mêmes des voleurs, mais d'un rang supérieur (tous des politiques et des industriels), La Montagne Sacrée propose surtout une succession de somptueux tableaux, tous, là encore, fruits du travail inspiré et titanesque du réalisateur.

Évidemment, si le chilien s'y moque de l'armée, de sa Police, de l'usage commercial de l’Église et des différents courants religieux, il évoque aussi et surtout sa passion pour le tarot divinatoire et notamment à celui des planètes, affublant chacun des compagnons du voleur d'un nom relatif à celles de notre système solaire. Davantage que n'importe quelle réflexion pouvant concourir à donner une définition juste du spectacle auquel le spectateur est convié, La Montagne Sacrée est avant tout une œuvre de ''sensations''. Et même si elle n'éveille que l’ouïe et la vue, l’œuvre d'Alejandro Jodorowsky semble parfois nous ouvrir à des perspectives autrement plus singulières que le toucher, le goût ou l'odorat. Cru et poétique, ésotérique et coloré, zen ou parfois très violent, La Montagne Sacrée est de ces longs-métrages qui n'ont pas volé leur titre de film culte. Un voyage initiatique, fantasmagorique et transcendantal au pays de l'Ayahuasca...

Why don't You just Die ! de Kirill Sokolov (2018) - ★★★★★★★★☆☆



En ces temps troubles où il est devenu impossible de se retrouver entre cinéphiles(phages) dans les salles obscures, il n'existe pas mille alternatives. Le VOD semble LA solution pour ceux qui n'ont pas peur de toucher à leur porte-monnaie. Les moins frileux, eux, auront opté pour le téléchargement sauvage. Et puis, il reste les plates-formes légales du type ''Netflix'', ''Amazon Prime'' et consorts. Parmi les films à ne surtout pas manquer actuellement, le premier long-métrage du réalisateur russe Kirill Sokolov, Why don't You just Die ! s'impose très clairement. On notera le point d'exclamation marquant l’entêtement de son jeune ''héros'' à ne pas vouloir mourir malgré le traitement dont il va être victime. Partant d'un postulat anémique (un homme accepte de venger sa petite amie du viol dont elle a été la victime plusieurs années en arrière de la part de son propre père), le réalisateur fait preuve d'une imagination absolument remarquable afin de faire tenir son édifice durant les quatre-vingt dix huit minutes que dure son œuvre. Présenté au PIFFF (Paris International Fantastic Film Festival) en 2019, Why don't You just Die ! a remporté ''L’œil d'or'' attribué par un public réellement conquis par ce premier long-métrage de Kirill Sokolov qui non content d'en avoir assuré sa réalisation s'est également chargé de l'écriture et du montage...

Comédie noire, trash, gore, et gentiment glauque, Why don't You just Die ! exploite à fond l'unique environnement du long-métrage. L'appartement d'Andrey et Tasha Gennadievitch (Vitaliy Khaev et Elena Shevchenko), les parents d'Olya (Evgeniya Kregzhde), petite amie de Matvey (Aleksandr Kuznetsov). Ce dernier est bien décidé à en découdre avec le père d'Olya depuis qu'elle lui a demandé de la venger du viol dont elle a été victime à l'âge de douze ans. Débarquant un marteau à la main, Matvey accepte de tuer le père de la jeune femme. Mais rien ne va se dérouler comme prévu. Andrey va se débattre comme un diable et prendre le dessus sur le garçon qui va rapidement se retrouver attaché à l'une des canalisations de la salle de bain des Gennadievitch avant d'être torturé. L'intrigue tourne donc presque exclusivement autour de l'affrontement entre les deux hommes. Presque car Kirill Sokolov ponctue son œuvre de plusieurs séquences additionnelles sous forme de flash-back qui intégrées au récit délivrent un scénario plus malin qu'il n'en a l'air. Au centre du conflit familial, un gros paquet d'argent. Peut-être plus encore que le rythme, les changements de ton passant de l'humour au thriller, les scènes gore ou le montage nerveux, ce qui saute tout d'abord aux yeux, c'est l'esthétique du film.

En la matière, Why don't You just Die ! n'a rien à envier au travail remarquable de l'esthète hongkongais Wong Kar-Wai. Jouant sur des mêmes teintes répétées à l'envi, le long-métrage de Kirill Sokolov est une œuvre d'art permanente. Jouant avec le cadre et une colorimétrie rappelant parfois la décrépitude d'un Delicatessen ou d'une Cité des Enfants Perdus signés du génial duo Jean-Pierre Jeunet et Marc Caro formé autour des années 80/90, le long-métrage du russe est d'un constant raffinement qui confine très souvent à l'art pictural. Évidemment, l'endurance des personnages ôte au film toute notion de réalisme, rapprochant ainsi Why don't You just Die ! de certaines œuvres hallucinées (et hallucinantes) du cinéma japonais cyberpunk. Où le vert se pare peu à peu d'un rouge carmin giclant des orifices et où les corps se relèvent pour un bref ''rappel'' avant de choir définitivement. L’œuvre de Kirill Sokolov est une représentation grand-guignolesque où l'humour prélève sa part dans un contexte pourtant extrêmement violent. Plus drôle que sinistre, le russe nous offre cependant quelques séquences proches du torture-porn où les interprètes s'en donnent à cœur joie (''la scène de meurtre'', Matvey torturé à coup de perceuse dans la jambe, la mort de Yevegenich (l'acteur Michael Gor), le collègue policier d'Andrey) mais toujours avec ce soin inné apporté à l'esthétique. Oubliez Quentin Tarantino et ruez vous sur ce très bel et très sanglant hommage au western de Sergio Leone, à l'esthétisme de Wong Kar Wai, au gore de Sam Raimi, aux délires de Takashi Miike et au montage nerveux de Jan Kounen période Gizèle Kérozène/Vibroboy...

dimanche 29 mars 2020

Alucarda de Juan López Moctezuma (1978) - ★★★★★☆☆☆☆☆



À sa naissance, Alucarda est confiée à un orphelinat tenu par des nonnes. Un couvent qui abrite des jeunes filles qui n'ont pas connu leurs parents ou les ont perdu très jeunes. Bien des années après y être entrée, Alucarda est devenu une belle jeune femme et lorsqu'arrive au couvent Justine, une orpheline de son âge, Alucarda la considère très rapidement comme son amie et lui confie beaucoup l'aimer. Possessive, Alucarda semble manifester d’étranges pouvoirs. Sauvage et plus proche de la nature que des nonnes, elle convie Justine à des jeux dans la forêt. Un jours qu'elles s'amusent toutes les deux, Alucarda et Justine tombent sur un bossu qui leur propose de lui acheter une amulette et les invite à faire connaissance avec une diseuse de bonne aventure. Mais cette dernière voyant dans les lignes de la main de Justine le sort funeste qui l'attend, elle préfère ne rien lui dire. Plus tard, Justine s'évanouit sans raison et Alucarda commence une étrange incantation et énumère les différents nom du Diable. Le lendemain, les deux jeunes femmes avouent leur amour pour Satan devant des nonne effarées. Le père Lazaro décide alors de punir Alucarda et Justine. Malheureusement, cette dernière meure de ses blessures. Prise d'une irrépressible soif de vengeance, Alucarda invoque les démons et met alors à feu et à sang le couvent et tous ses membres...

Alucarda, le troisième des six longs-métrages réalisés par le mexicain Juan López Moctezuma entre 1973 et 1994 fut tout d'abord diffusé en France au Festival international du film fantastique de Paris en mars 1977 avant de connaître une sortie officielle dans son pays d'origine l'année suivante. Souvent considéré comme une œuvre culte, c'est pourtant avec d'infinies précautions qu'il faut appréhender ce petit film d'horreur exotique qui n'a en réalité de ''culte'' que le nom et la réputation. Diffusé au Festival international du film fantastique de Paris dans le cadre d'un cycle consacré au à la sorcellerie aux côtés de Suspiria de Dario Argento (hors-compétition), de La Pluie du Diable de Robert Fuest et d’Émilie, l'Enfant des Ténèbres de Massimo Dallamano, il demeure le moins bon d'entre tous. Ce qui explique sans doute la raison pour laquelle rares sont ceux dont son évocation rappelle de glorieux souvenirs. L'une des tares qui affaiblissent Alucarda est cet empressement avec lequel Juan López Moctezuma passe de la découverte des deux jeunes femmes interprétées par Tina Romero et Susana Kamini à l'aveu même des sentiments qu'éprouve Alucarda pour Justine. Bien que dans un second temps le mexicain saura faire davantage preuve de patience, l'incessant ballet d’ellipses qui couvrent un bon tiers du long-métrage rend invraisemblable la passion qu'éprouve les deux orphelines l'une pour l'autre...

En contrepartie, le travail effectué sur les décors s'avère relativement saisissant. Le directeur artistique Kleomenes Stamatiades apporte un réel cachet au film. Une touche graphique qui ne pouvait amener que le sanglant final et des scènes de sabbat dignes des remarquables environnements. Outre la confrontation entre le clergé et l'obédience dont font preuve les deux jeunes femmes envers Satan mêlée d'un profond désir charnel l'une envers l'autre, Juan López Moctezuma instaure un climat parfaitement délirant finissant dans un bain de sang orchestré par le maquilleur A. Ramírez del Río qui livre une succession de séquences horrifiques plutôt convaincantes si l'on tient compte des origines et de l'année du long-métrage. Flagellation, décapitation d'une nonne, brûlures à l'eau bénite, corps qui s'enflamment sous l'exercice du satanisme. Du sang, mais également quelques corps qui se dénudent dont ceux de nos deux héroïnes qui n'ont pas peur de baigner dans l'hémoglobine. La démence semble prendre possession de la majorité des interprètes et le réalisateur mexicain filme tout cela avec une apparente délectation. Malheureusement, bien que de telles descriptions fussent la promesse d'une œuvre puissamment évocatrice, Alucarda est en grande partie décevant. L'interprétation y est souvent désastreuse et la mise en scène pas toujours à la hauteur. Dans le genre, mieux vaut se rabattre sur le chef-d’œuvre de Ken Russell, The Devils. À Noter qu'il est arrivé au film de sortir sous le titre Mark of the Devil 3 alors qu'il n'entretient aucun rapport avec l’œuvre de Michael Armstrong sortie sept ans plus tôt...

samedi 28 mars 2020

Christ(off) de Pierre Dudan (2017) - ★★★★☆☆☆☆☆☆


 
Dix mois après Coexister de Fabrice Eboué sortait sur les écrans de cinéma Christ(off) de Pierre Dudan. De là à dire que le réalisateur et scénariste a pompé l'excellente comédie de l'humoriste français auteur de trois one man show dont un premier Faites entrer Fabrice Éboué agréablement irrévérencieux, il n'y a qu'un pas. Il ne suffit pas toujours de changer quelques notes à une composition pour tromper le mélomane comme il ne suffit pas davantage de modifier quelques lignes de dialogue ou une partie d'un scénario pour éviter d'être taxé de plagiaire. Le long-métrage de Fabrice Éboué nous contait l'histoire d'un producteur de musique créant un groupe constitué d'un prêtre, d'un rabbin et d'un faux imam. Celui de Pierre Dudan tourne autour du père Marc, lequel forme un groupe de musique chrétienne composé du Père Bernard, du Père Luc, du Frère Julien et du Frère Christophe, ce dernier n'appartenant en réalité, pas du tout au clergé. L'objectif des héros de Coexister était de monter à Paris pour donner un concert à l'Olympia. Celui de Christ(off) est quant à lui pour ses personnages de remporter un concours afin de récolter des fonds suffisants afin de faire construire un hôpital pour enfants à Haïti...

Au générique, Michael Youn (Le Morning Live, Fatal, Carbone), Lucien Jean-Baptiste (Caméra Café, Turf, Fonzy, La Deuxième Étoile), l'humoriste Jarry (Entre fous émois), le demi-frère d'Alexandre Astier, Simon (Kaamelott, Denis, L'Embarras du choix) et Bernard Le Coq qui demeurera muet une grande partie du film. Autour de ce quintet, l'actrice Victoria Bedos, fille du célèbre humoriste Guy Bedos, incarne Jeanne, la régisseuse du groupe. Le réalisateur offre en outre un petit rôle à l'acteur/rappeur Joey Starr. Entre répétitions, concerts dans les chapelles de petits villages, et conflits entre membres, Christ(off) propose un schéma relativement classique qui fait très peu de vagues en comparaison des nombreuses tentatives du réalisateur et de ses interprètes de nous arracher des rires. Et pourtant, force est de reconnaître qu'entre Christ(off) et Coexister, la comparaison s'arrête à la frontière des faits évoqués au dessus puisque le premier ne parvient jamais à reproduire ce qui faisait le charme du second.

Pierre Dudan a beau tenter d'inclure quelques références sexuelles et autant d'obscénités, le résultat est d'une telle vacuité qu'il ne parvient même pas à entacher la robe de bure de ses interprètes (aurait-il osé s'attaquer à l'Islam comme il s'amuse des stéréotypes entourant l’Église? Pas certain...). Et lorsqu'il tente un clin d’œil facile vers l'Intouchables d'Éric Toledano et Olivier Nakache, l'effet passe sur le spectateur comme un voile d'indifférence. De quoi demeurer circonspect devant l'inefficience crasse de gags éculés que le vulgaire ne parvient jamais à rehausser. C'est donc sans effets probants que le réalisateur et scénariste réalise une comédie qui se laisse contempler sans pour autant dérider le spectateur. Les gags à deux balles déroulent leur séquence sans avoir jamais aucune conséquence sur son humeur (la Cène, le chemin de croix). Tout juste pourra-t-on accorder à défaut d'autre chose, le soin apporté aux quelques chansons écrites et interprétées par le groupe Les Apôtre, plutôt entraînantes. Pour le reste, Christ(off) ressemble à ce qu'aurait pu être Coexister s'il sa réalisation avait été mise entre les mains d'un réalisateur peu inspiré...

Les Gorilles de Tristan Aurouet (2014) - ★★★☆☆☆☆☆☆☆



Le buddy movie est un concept cinématographique opposant deux individus qui n'ont généralement rien en commun. Aux États-Unis, le genre est célébré sur grand écran depuis presque un siècle (on ne compte pas les œuvres qui mettent notamment en scène Laurel et Hardy ou Abbott et Costello depuis les années trente), le genre ayant connu un succès phénoménal à partir des années quatre-vingt et la sortie de 48 Heures de Walter Hill en 1982, Un fauteuil pour deux de John Landis en 1983 ou encore L'Arme fatale de Richard Donner en 1987. A vrai dire, quelques rares exemples prélevés dans une liste longue comme le bras contenant d'innombrables classiques de la comédie et de l'action. La France n'aura pas attendu longtemps avant de proposer elle aussi quelques savoureux spécimens du genre avec, notamment dans les années soixante, le duo formé par Louis de Funès et André Bourvil dans Le Corniaud et La Grande Vadrouille tout deux réalisés par Gérard Oury en 1965 et 1966. Suivi notamment en 1973, par le chef-d’œuvre de Édouard Molinaro L'Emmerdeur qui opposait le dépressif Jacques Brel au tueur à gages Lino Ventura. Puis se furent les années quatre-vingt, avec l'excellente trilogie réalisée par Francis Veber et interprétée par Gérard Depardieu et Pierre Richard : La Chèvre en 1981, Les Compères en 1983 et Les Fugitifs trois ans plus tard. Là encore, quelques exemples parmi une foultitude de longs-métrages qu'il serait évidemment trop longs à énumérer. Parmi eux, quelques-uns ont malheureusement raté le coche.

Les Gorilles fait partie de ces quelques erreurs au départ pourtant prometteuses mais qui au final sentirent le rance dès leur sortie sur grand écran. Tristan Aurouet, auteur en 2003 de Narco avec Guillaume Canet qui n'était pas si mauvais malgré l'avis de certains ''spécialistes'', et en 2018 de Selfie, signait en 2014 l'une de ces comédies dans l'air du temps qui réunissent quelques stars autour desquelles le Cinéma offre une chance à des jeunes de banlieue. D'où des seconds rôles à la silhouette fort impressionnante et dont le jeu d'acteur ne doit pas être très éloigné du comportement qu'ils ont dans leur quotidien. Stéréotype ? Peut-être, mais cela n'a pas empêché le réalisateur de les employer dans des rôles de petites frappes des banlieues. Ce détail étant précisé, concernant les vedettes de ce ''french buddy movie'', Tristan Aurouet convoque les deux ''gorilles'' Joey Starr et Manu Payet. D'un côté, Joey Starr, l'une des stars du rap français aux côté de Kool Shen et leur groupe NTM qui depuis le début des années 2000 tourne pour le cinéma. De l'autre, Manu Payet, humoriste, réalisateur et scénariste (Situation Amoureuse : c'est Compliqué en 2014) et acteur qui est notamment apparu à la télévision dans les séries Kaamelott en 2009 et Péplum en 2015. D'un côté, Alfonso. la grosse brute, agent de surveillance du service de protection des hautes personnalités. De l'autre, l'immature Walter, qui a échoué à l'examen d'entrée dans le service mais qui par un concours de circonstance s'est vu offerte l'opportunité de l'intégrer. Confiée à Alfonso, la formation de Walter ne va pas être de tout repos. Alors que les deux hommes sont chargés d'assurer la protection de la chanteuse Ja-Y (Alice Belaïdi), son ancien compagnon récemment échappé de prison va tout faire pour la retrouver et la récupérer...

Joey Starr, dans la peau d'Alfonso a bien du mérite de contenir sa colère face à un Manu Payet/Walter d'une extrême lourdeur. Plus agaçant que réellement amusant, ce dernier cabotine à outrance face à un Joey Starr très professionnel. Entre les deux hommes, une Alice Belaïdi toujours aussi charmante quoique un brin vulgaire dans certains de ses propos. Une trivialité qui s'étend au delà de son seul personnage pour gangrener le reste du casting. Si l'on peut se satisfaire dans un premier temps de l'antinomique caractère de nos deux gorilles (l'un en mode brute épaisse et le second en mode pré-pubère), Les Gorilles, le film, finit par se mordre la queue en tournant en rond et ne rien proposer de réellement appétissant. Même la présence en arrière plan de l'acteur Gilles Lellouche dans le rôle du flic Petrovitch ne parvient pas à relancer une machine grippée au scénario convenu. Écrit à dix mains (!!!) par le réalisateur et les scénaristes Matt Alexander, Romain Lévy, Matthieu Le Naour et Mathieu Oullion. Les Gorilles reste finalement digne de sa proposition : d'une lourdeur incommensurable...

Coursier de Hervé Renoh (2010) - ★★★★★★☆☆☆☆



Dans la catégorie ''comédies ultra-légères'', Coursier de Hervé Renoh s'impose en référence absolue. Vous avez physiquement cinquante ans mais en avez intellectuellement douze et êtes doté d'une fonction ''off'' vous permettant de mettre en berne toute capacité de réflexion, alors ce film est fait pour vous. On ne s'étonnera pas d'y voir apparaître dans le rôle principal l'ancien ''bouffon'' de service Michael Youn même s'il faut reconnaître que depuis, il s'est assagi en modelant un personnage beaucoup moins exubérant que par le passé. Le long-métrage de Hervé Renoh nous conte les aventures de Sam Skjqurilngskwicz, coursier à Paris, fiancé à Nadia (l'actrice Géralidne Nacache) et dont l'ambition est de proposer le premier service de livraison écologique. Mais pour cela, il lui faut de l'argent, beaucoup d'argent. Son patron refuse de lui octroyer une augmentation de cent euros et ses rapports avec sa compagne se délitent. Alors qu'ils doivent se rendre en fin de journée au mariage de la sœur de Nadia, Sam accepte le matin-même une course très spéciale. Une course qui va bousculer son quotidien et bouleverser sa vie, remettant sans cesse en question ses rapports avec Nadia et mettant la vie de son entourage en péril. En effet, le paquet qu'il doit confier à un certain Loki (Jimmy Jean-Louis) semble intéresser beaucoup de monde dont une certaine Iris ainsi que Sharas et Anton, deux motards. Poursuivi dans les rues de Paris, cette très longue journée sera l'occasion pour Sam de remettre un peu d'ordre dans sa vie et notamment dans ses rapports avec son père Maurice (Didier Flamand)...

Tout neurone éteint, Coursier se révèle être une excellente surprise si l'on est en mesure d'accepter le concept d'une journée entièrement consacrée autour de Michael Youn. Pourtant réticent, le spectateur qui boit généralement assez mal à la source de ce comédien adepte de la bouffonnerie risque d'être surpris de le découvrir plus posé qu'à son habitude. Faisant même parfois de Sam un type agaçant au regard des ''baffes'' qu'il se prend sans réagir de la part de son boss (Jean-Marie Lamour) ou de son collègue Ice incarné par l'acteur franco-italien Gianni Giardinelli totalement transformé en cette occasion en coursier plus bête que méchant. Accompagné de la charmante Géraldine Nacache en compagne tantôt hystérique, tantôt ivre et de la sublime actrice franco-colombienne Catalina Denis dans le rôle de Louise, Michael Youn et Hervé Renoh nous offrent une sympathique balade dans les rues de Paris. Une promenade de santé souvent dangereuse et contrecarrée par tout un tas de bandits parmi lesquels on retrouve la bulgare Natalia Dontcheva dans le rôle d'Iris ainsi que Patrick Médioni et Carlos Bonelli dans ceux des tueurs de la compagnie ''Sphère''.

Autour de Michael Youn, une galerie de personnages hauts en couleurs. Tels Frédéric Chau, surtout connu au cinéma pour avoir interprété le rôle de Chao Ling dans Qu'est-ce qu'on a fait au Bon Dieu ? de Philippe de Chauveron en 2014 et sa suite en 2019, l'acteur et kickboxer Jo Prestia (Irréversible de Gaspar Noé en 2002, Les Rivières pourpres 2 d'Olivier Dahan en 2004...) et surtout Éric Naggar qui excelle dans le rôle du réceptionniste de l'hôtel dépité par les hurlements qu’émettent de la suite impériale, Sam et Louise. On notera également les courtes mais sympathiques apparitions de Claire Maurier (Un air de famille de Cédric Klapisch en 1996) et de Claude Gensac (qui sera l'épouse fictive de Louis de Funès à sept occasions dont Oscar d’Édouard Molinaro) dans les rôles respectifs de l'Experte et de la Hollandaise. Si au départ Coursier peut se concevoir comme une version ''deux roues'' encore plus indigente que l'infâme série de longs-métrage Taxi eux aussi produits par la société de Luc Besson EuropaCorps, on en ressort au final soulagés d'avoir pris du bon temps sans avoir eu à réfléchir à une quelconque occasion. De quoi se détendre en cette période trouble...

vendredi 27 mars 2020

Lucky d'Olivier Van Hoofstadt (2020) - ★★★★★★★☆☆☆



Inutile de jeter un œil sur la fiche technique de Lucky pour se douter que le réalisateur et scénariste belge Olivier Van Hoofstadt se cache derrière. À dire vrai, avec son dernier long-métrage, le cinéaste propose une sorte de mixture entre son insurpassable comédie culte Dikkenek de 2006 et le film d'action Go Fast qu'il réalisa deux ans plus tard. En réalité, Olivier Van Hoofstadt n'emprunte à ce dernier que quelques rares éléments mais balance à la gueule des spectateurs une comédie absurde et délirante mais malheureusement pas tout aussi convaincante que son premier long-métrage. Ce qui n'empêche pas Lucky d'être relativement ambitieux en se penchant sur le cas de Willy et de son pote Tony. Le premier a perdu son chien et vient d'être licencié. Effet boule de neige : il risque de surcroît de perdre son logement. Tony est père d'un jeune adolescent mais divorcé de son ex, il lui doit plusieurs mois de pension alimentaire. Étant comme son meilleur ami sans le sou, les deux hommes sont dans la galère. Un jour, une idée lumineuse brille dans l'esprit de Willy. Lors d'une exhibition canine lui vient celle de voler un chien de détection appartenant à la brigade des stupéfiants. Persuadé de pouvoir grâce à son aide détecter des planques de drogue dans leur quartier, Willy appelle son nouveau compagnon Lucky. Mais alors que les deux amis s'attendaient à tomber sur de petites marchandises de cannabis, il mettent à jour plus d'une tonne de résine enfermée dans un garage. C'est là qu'intervient Caroline Jamar, flic ripoux et ambitieuse qui espère prendre prochainement la place du commissaire Daran qui a prévu de bientôt prendre sa retraite. Mais afin de l'appuyer pour qu'elle puisse passer commissaire, Daran exige la somme de trois-cent mille euros...

Ambitieux, le dernier long-métrage d'Olivier Van Hoofstadt l'est, puisque constitué d'un casting aussi hétéroclite qu'impressionnant dans le nombre de vedettes. C'est ainsi que l'on retrouve au générique de Lucky l'acteur Michael Youn qui depuis le début de l'année a tourné dans deux films dont Divorce Club qu'il a lui-même réalisé. Un rôle à la hauteur du personnage qui l'a rendu célèbre entre la fin du vingtième siècle et le début du suivant. Abandonnant pour un temps les rôles plus sérieux qu'on lui a vu interpréter ces dernières années il incarne dans le cas présent le rôle de Tony, un pauvre benêt travaillant dans un garage pour le compte de Monsieur Roger (l'irrésistible et éternel Daniel Prévost) qui a bien du mal à ''intégrer'' tout ce qu'on lui dit. Alban Ivanov, qui depuis le milieu de la décennie précédente fait décidément partie du paysage français (pas moins de dix longs-métrages en quatre ans dont Le Grand Bain de Gilles Lellouche en 2018, Hors Normes de Olivier Nakache et Éric Toledano en 2019 ou encore Une Belle Équipe de Mohamed Hamidi cette année) incarne quant à lui le rôle un peu plus modeste de Willy. L'actrice et humoriste Florence Foresti interprète le personnage de Caroline Jamar tandis que Sarah Suco (Les Invisibles de Louis-Julien Petit), qui au même titre qu'Alban Ivanov s'avère très présente sur grand écran depuis quelques années.

Si les gags de Lucky ne décollent pas toujours et s'avèrent amusants sans être véritablement drôles, Olivier Van Hoofstadt peut tout de même également compter sur quelques secondes rôles et incarnations relativement réjouissantes. On pense bien évidemment à Daniel Prévost dont le visage, idée fort amusante, s'étale sur le côté de sa camionnette, à François Berléand qui campe le personnage de Daran, ce commissaire aussi corrompu que Caroline Jamar, à l'acteur franco-suisse Yoann Blanc qui excelle dans le rôle de l'inspecteur de l'IGS obsédé par la gente féminine (les photos que renferme son portable en sont une preuve flagrante) et notamment par Jamar qu'il tente de faire ''tomber'', à l'excellente Corinne Masiero (que Sarah Suco croisa d'ailleurs sur le tournage des Invisibles) dans son rôle de bisexuelle sadomasochiste, ou encore le toujours impayable Estéban que l'on retrouve dans la peau de Narcos, le nom de son personnage ne laissant alors pas la place à la moindre ambiguïté. Lucky est surtout parcouru d'une foule de petits détails amusants (le patron du bar proxénète) qui viennent ponctuer une comédie ayant malheureusement parfois du mal à convaincre. L'humour belge y transpire cependant à chaque réplique et c'est aux amateurs de comédies (légèrement) trash que le film semble dédié. Ne boudons pas notre plaisir et notre bonheur...

jeudi 26 mars 2020

Escape from Pretoria de Francis Annan (2020) - ★★★★★★★☆☆☆



Escape from Pretoria est le troisième long-métrage du réalisateur britannique Francis Annan après la comédie musicale Get Away en 2009 et le drame Woyzeck en 2010. Dix ans après, il revient sur grand écran avec un biopic consacré aux militants anti-Apartheid (terme afrikaans relatif à la politique ségrégationniste sud africaine ayant eu lieu entre 1948 et 1991, année de son abolition) Tim Jenkin et Stephen Lee qui après avoir été enfermés dans la prison locale de Pretoria (ville d'Afrique australe et capitale administrative de l'Afrique du Sud) durant quatre-cent quatre jours parvinrent en compagnie d'un autre détenu, Alex Moumbaris (dont le nom est ici remplacé par celui de Leonard Fontaine qu'incarne à l'écran l'acteur Mark Leonard Winter), à s'en évader et à prendre la fuite pour Johannesburg. Francis Annan ne s'attache pas tant à décrire l'activisme de ses protagonistes que lors du prologue qui montre ces humanistes user de bombes à tracts inoffensifs avant d'être arrêtés le 3 mars 1978 aux environs de trois heures du matin. Le britannique s'intéresse en fait davantage à leur incarcération ainsi qu'à l'opération qui a consisté pour ces deux hommes à fabriquer des clés de chaque serrure de la prison afin de s'en évader.

Aidés par plusieurs autres détenus parmi lesquels plusieurs refuseront de prendre la fuite à leurs côtés, Tim et Stephen sont d'abord témoins de la cruauté de certains gardiens (dont Mongo qu'interprète l'australien Nathan Page). Immédiatement protégés par des activistes de même nature dont le légendaire Denis Goldberg (interprété par le britannique Ian Hart) qui fut très tôt l'un des plus actifs contre l'Apartheid mais se retrouva par la suite enfermé durant vingt-deux ans, les deux hommes n'ont au final, pas de réels soucis à se faire vis à vis des autres prisonniers (pour certains, des meurtriers), des gardiens et de leur directeur. Escape from Pretoria n'en est pas moins prenant et reste très loin d'une promenade de santé pour le britannique Daniel Radcliffe et l'australien Daniel Webber qui campent respectivement Tim Jenkin et Stephen Lee. Entre la cours où peuvent se dégourdir les jambes les prisonniers, la cantine, l'atelier de fabnrication et les cellules, le film est entièrement consacré à la tentative d'évasion des deux hommes et de leur compagnon d'infortune. Le long-métrage ne repose finalement que sur un mince scénario mais son auteur et l'implication de ses interprètes font de Escape from Pretoria un thriller carcéral plutôt efficace.

Daniel Radcliffe se démarque une fois encore en incarnant un Tim Jenkin loin des gros bras qui pullulent généralement dans ce genre de contexte et révèle la fragilité de son personnage qui dans certaines circonstances a bien du mal à cacher son stress. Quelques séquences d'apparence anodine (les clés tombées au sol, le gardien ventripotent inspectant couloirs et cellules) cultivent l'ambiance pesante d'un film plus rude psychologiquement (Leonard, contraint d'écourter le parloir, l'inspection de la chambre de Tim) que physiquement (l'humiliation du prisonnier noir dans les cuisines du réfectoire). Et c'est sans surprise que c'est le sourire jusqu'aux oreilles que l'on assiste à la fuite de nos trois hommes à bord d'un taxi conduit par un homme de couleur, évasion accompagnée par le score du compositeur australien David Hirschfelder. Une séquence qui symbolise à elle seule le propos de Escape from Pretoria... Une œuvre humaniste qui reste une très belle surprise...

mercredi 25 mars 2020

Guns Akimbo de Jason Lei Howden (2018) - ★★★★★★★☆☆☆



Miles n'a pas vraiment la vie dont il rêvait. La grande carrière de concepteur de jeux vidéos qu’il espérait mener est derrière lui. Il travaille dans une entreprise dont le boss le tyrannise et passe ses soirées à boire de la bière tout en chassant les trolls sur internet. C'est lors de l'une de ces habituelles soirées de beuveries qu'il se retrouve confronté à Riktor, le créateur d'une émission à succès diffusée sur le dark web et dont le principe est simple. Des individus s'y affrontent et s'y entre-tuent. Mile provoque Riktor qui presque instantanément pirate son ordinateur et parvient à récupérer son adresse IP. Débarque alors chez le jeune homme le patron de l'émission Skizm et deux de ses ''employés''. Mis K.O par l'un d'eux, Miles se réveille tout seul dans son appartement, un flingue greffé à chaque main. Désormais, le voici candidat de l'émission et contraint de tuer la célèbre Nix qui depuis des semaines reste invaincue. Miles a vingt-quatre heures pour y parvenir. Mais retissant devant la perspective de tuer quiconque, Riktor fait enlever son ancienne petite amie Nova et le menace de la tuer s'il n'accepte pas de participer à Skizm.. Devant des millions de cyber-spectateurs et armé de ses nouveaux attributs, Miles va malgré lui se muer en tueur afin de remonter la piste du repaire de Riktor, de mettre un terme à ses agissements et de libérer Nova...

Second long-métrage du cinéaste néo-zélandais Jason Lei Howden après l'original Deathgasm en 2015, Guns Akimbo est typiquement le genre de film à l'attention du geek qui se cache au plus profond de nous. Celui qui passe des heures devant son ordinateur ou sa console de jeux, à parcourir avec une avide curiosité des sites obscures ou à tuer des légions d'ennemis virtuels confortablement installé dans son canapé. Si le principe se révèle relativement simple, Guns Akimbo propose un divertissement étonnamment réjouissant, même pour le spectateur qui n'a pas encore pris le train d'Internet et des réseaux sociaux en marche. L'acteur britannique Daniel Radcliffe (qui doit sans doute en avoir marre que certains l'évoquent d'abord sous le nom de Harry Potter) n'a pas chômé depuis qu'a pris fin la saga qui le rendit célèbre durant une décennie entre 2001 et 2011. Acteur au capital sympathie se renouvelant sans cesse, il a surtout su s'extraire de l'étouffant carcan dans lequel il aurait pu tomber. Œuvrant dans une carrière riche de longs-métrages originaux (Horns de Alexandre Aja en 2013, Swiss Army Man de Dan Kwan et Daniel Scheinert en 2016 ou Jungle de Greg McLean l'année suivante), Daniel Radicliffe revenait donc en 2018 avec le déjanté Guns Akimbo.

Dystopique mais néanmoins coloré, explosif et souvent drôle (le split-screen coke/ventoline), le long-métrage de Jason Lei Howden est agrémenté d'une galerie de personnages hauts en couleurs. Celui de Miles paraît d'ailleurs dans un premier temps plutôt fade en comparaison avant de se ''réveiller'' et de devenir bientôt le héros des marginaux du pays qui l'abrite. Aux côtés de Daniel Radcliffe, on retrouve notamment l'australienne Samara Weaving (Mayhem : Légitime Vengeance de Joe Lynch en 2017) dans le rôle de l'implacable tueuse Nix, Ned Dennehy (Mandy de Panos Cosmatos en 2018) dans la peau de Riktor ou Natasha Liu Bordizzo (The Naked Wanderer de Alan Lindsay en 2019) dans celle de Nova. Si le concept de Guns Akimbo pourra paraître tout à fait original, il faut cependant remonter jusqu'aux années quatre-vingt pour retrouver les premières représentations dystopiques reposant sur le même principe. Il y eut en effet en 1987 le Running Man de Paul Michael Glaser adapté du roman éponyme de Richard Bachman (en réalité, Stephen King sous pseudo) et surtout l'excellent Le Prix du Danger que le français Yves Boisset réalisa quatre ans auparavant et basé, lui, sur la nouvelle de Robert Sheckley. Deux films qui mettaient déjà en scène leur protagoniste respectif dans un contexte de futur proche et dystopique mettant en lumière des jeux télévisés dans lesquels les héros devaient tenter de survivre face à des assaillants dont l'objectif était de les tuer. Jason Lei Howden parvient sans mal à renouveler le concept et propose un spectacle fort divertissant qui réjouira les plus jeunes mais aussi les plus anciens d'entre nous. Un excellent défouloir...

mardi 24 mars 2020

The Assent de Pearry Reginald Teo (2020) - ★★★★☆☆☆☆☆☆



Entre L'Exorciste de William Friedkin en 1973 et The Assent en 2020, le septième art s'est emparé à de nombreuses reprises du thème de la possession. Souvent de manière anecdotique et plus rarement de façon réellement concluante. Presque cinquante ans après le chef-d’œuvre de William Friedkin, le réalisateur Pearry Reginald Teo réalise un ersatz qui à force de vouloir se démarquer de son illustre modèle ne ressemble à rien d'autre qu'à une bouillie mal ''cuisinée'' qu'une partie des spectateurs risque de vomir à la sortie de la projection. Avec le look de gothique qu'il arbore parfois, on aurait pu s'attendre à ce que l'univers de Pearry Reginald Teo soit plus dark qu'il n'en a réellement l'air. Quelques détails dans les décors et les éclairages témoignent de la volonté du réalisateur d'offrir aux spectateurs un divertissement plus sombre que la moyenne, mais c'est à se demander si The Assent n'a pas d'abord été conçu pour l'unique plaisir de son auteur et des fans que l'on pourrait lui prêter. Car son dernier long-métrage possède la prétention de ces œuvres parées d'effets-visuels repoussants dont l'esthétique nous renvoie à l'époque bénie où l’œil humain était encore capable de distinguer le vrai du faux. Je vous laisse juger sur pièce du spectacle car malgré tout, force est de reconnaître que si l'on peut parfois critiquer une certaine surenchère numérique (ces satanés CGI qui bouffent tout!), celle-ci vaudra toujours mieux que les épouvantables ''effets-spéciaux'' disponibles à l'époque des premiers caméscopes ! En bref, The Assent est moche, et n'allez surtout pas croire que c'est par provocation ou par contradiction que je l'affirme (ben ouais, allez lire certaines critiques qui encensent curieusement l'objet)...

Après, on reconnaîtra au long-métrage sa pleine conscience de vouloir se démarquer de son ultime référence en évoquant dans un contexte ou exorcisme et possession sont au cœur de l'intrigue, le père Lambert (l'acteur Peter Jason) et le frère Michael (Douglas Spain), le choix d'y inclure un cas de schizophrénie, malheureusement accessoire. D'autant plus que le britannique Robert Kazinsky, sans doute en raison d'une piteuse direction d'acteurs, s'avère relativement navrant. Peu aidé, encore une fois, par une approche esthétique de ''supermarché'', l'interprète principal déroule une incarnation redondante qui n'élude malheureusement pas le soucis qui entoure l'écriture. Évitant cependant de trop embrouiller l'esprit des spectateurs (quoique!), Pearry Reginald Teo se lance dans une séance explicative puérile que n'aide pas non plus l'interprétation absolument pathétique de l'actrice franco-thaïlandaise Florence Faivre. Ajoutant à son personnage quelques détails qui feront d'abord sourire avant de nous faire frémir. Je pense évidemment à... la cataracte (?!?) qu'elle arbore au bout des deux tiers du long-métrage. Effet minimaliste ne laissant plus aucun doute quant à sa filiation avec le phénomène de possession en présence.

À vrai dire, en piochant une partie des références en la matière (le fils du héros vomi de grandes gerbes comme le fit avec infiniment plus d'impact la jeune Linda Blair dans l’œuvre de William Friedkin), il est pratiquement impossible d'ignorer L'Exorciste alors même qu'il s'avère nécessaire d'y faire abstraction pour ne pas être sans cesse renvoyé au mythe de Pazuzu. Pearry Reginald Teo propose un film au rabais et accumule les propositions de manière hasardeuses et chaotique. Le réalisateur choisit une approche de l'exorcisme plutôt discrète mais d'une manière générale, en totale inadéquation avec la volonté de marquer les esprits. À trop vouloir ''donner'' à son public le spectacle horrifique pour lequel celui-ci a fait le déplacement, The Assent finit par une plus ressembler qu'à un fan-film indigeste. Il en oublierait presque d'y apporter cette touche essentielle de psychologie qui fait des grands films d' épouvante, d'authentiques moments d'effroi. J'exagère ! Disons que cette touche y est bien présente, mais asphyxiée par une accumulation de propositions pas toutes judicieuses. Que l'on partage cet avis ou non, faut-il lui préférer The Hole in the Ground de Lee Cronin même si, il est vrai, les sujets se distinguent par une approche relativement différente ? Oui, mille fois, oui ...!
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