Bienvenue sur Cinémart. Ici, vous trouverez des articles consacrés au cinéma et rien qu'au cinéma. Il y en a pour tous les goûts. N'hésitez pas à faire des remarques positives ou non car je cherche sans cesse à améliorer le blog pour votre confort visuel. A bientôt...

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mercredi 30 octobre 2019

Tenue de Soirée de Bertrand Blier (1986) - ★★★★★★★★☆☆



Planté comme un furoncle au beau milieu du paysage français en cette année 1986, entre le Mocky de La Machine à Découdre, le Veber des Fugitifs (également interprété par Gérard Depardieu en compagnie de l'irrésistible Pierre Richard), le Jean-Marie Poiré de Twist Again à Moscou ou le Bernard Nauer de l'assez vulgaire (et beaucoup moins bon que la pièce de théâtre qui en est à l'origine) Nuit d'Ivresse, le dixième long-métrage du réalisateur, scénariste, écrivain et fils de l'immense Bernard Blier, Bertrand de son prénom, devait précéder une certaine rupture dans la continuité, sans doute entamée deux ans auparavant avec Notre Histoire. Dans une veine similaire aux quelques films cultes qui ont firent sa renommée (et que je ne ferai l'affront à personne de citer), Tenue de Soirée est l'un des longs-métrages les plus acerbes, frondeurs, libres et radicaux de leur auteur. Drôle, tendre, parfois très osé dans sa forme et dans le fond, il ne s'agit assurément pas du dernier grand film de Bertrand Blier, mais sans doute celui qui dans la course effrénée à laquelle le réalisateur semble vouloir se raccrocher, est de ceux qui demeurent indissociables de ses première et brillantes tentatives dans le domaine de la comédie.

Si évidemment les plus coutumiers du cinéaste reconnaîtront ici l'immense valeur de son écriture, Bertrand Blier a aussi une nouvelle fois su s'entourer des plus grands. Qu'ils agissent à l'écran en tant que principaux interprètes, ou qu'ils ne nous honorent de leur présence que pour un trop court instant (Jean-Pierre Marielle, Bruno Cremer, Mylène Demongeot ou bien Jean-François Stévenin), chaque apparition à l'écran est un moment de pure magie voluptueuse et incisive que l'on ne retrouve que très rarement chez d'autres cinéastes français. Du moins, rares sont ceux bénéficiant d'une écriture aussi mordante et maîtrisée.

''Pauvre type, espèce de con, t'es vraiment rien qu'une merde...''
Monique (Miou-Miou) à Antoine (Michel Blanc)

... Bertrand Blier a l'art et la manière de faire entrer ses personnages en scène. Ici, une salle de bal où dansent quelques couples sur un air d'accordéon et en arrière-plan, un autre, isolé, et au bord de la rupture. Entre une Monique qui ne supporte plus ses conditions d'existence et Antoine, son homme, qui dans l'esprit, rêve sans doute encore pour longtemps de vivre d'amour et d'eau fraîche. Puis débarque Bob. Premier contact, une gifle. Celle que se prend Monique. Les choses sont d'ors et déjà mises en place. D'un côté l'amoureux transit, de l'autre, la brute épaisse, ancien taulard, cambrioleur à ses heures. Et puis Monique, la troisième roue. Celle que veut à tout prix conserver auprès de lui Antoine mais dont Bob aimerait bien se défaire...

Car au delà des rapports complexes qui vont être bientôt mis en place dans ce trio on ne peut plus discordant, Bertrand Blier réinvente les codes du romantisme à sa sauce pour un résultat inédit et haut en couleurs. Si de prime abord, les dialogues échouent entre les lèvres des interprètes comme un assemblage (sophistiqué) de termes propre aux charretiers, il n'en demeure pas moins qu'il se dégage de Tenue de Soirée, une très grande poésie. Des dialogues sur lesquels pose surtout son incroyable timbre, un Gérard Depardieu au sommet de son art. Ses deux complices et lui participent à un étrange numéro qui, même s'il a un peu de mal à être aussi rondement mené que LE chef-d’œuvre de Bertrand Blier, Buffet Froid, demeure une expérience de cinéma rare, portée par un jeu d'acteur sublime et des dialogues au diapason. Plus encore qu'une succession de scènes à la cohérence qui pour un néophyte pourrait paraître douteuse, le découpage et le scénario de Tenue de Soirée recèlent une richesse évocatrice incroyable. Car le réalisateur ne se contente pas d'une simple accumulation de séquences portées uniquement sur les bons mots de son propre cru. Non, Bertrand Blier ose avec intelligence aborder des sujets de fond tels que la prostitution, la solitude, le désespoir, mais aussi l'amour et l'amitié. Tout ceci, bien entendu, sous un angle qui n'appartient qu'à lui. Un grand ''Putain de film'' qui aura révélé au public, un Michel Blanc formidable et surtout très largement éloigné des rôles qu'il tenait jusqu'à maintenant...

Reipu Zonbi: Lust of the Dead de Naoyuki Tomomatsu (2014) - ★★☆☆☆☆☆☆☆☆



Amateurs de petites culotte blanches immaculées, et même parfois souillées de sang NON menstruel, bienvenue à vous. Si vous aimez de surcroît le genre ''collégiennes, vierges et prudes, couinant lors de sabbats orgiaques dignes de viols collectifs subis par des chatons à peine sevrés'', Reipu Zonbi: Lust of the Dead est fait pour vous... bande de pervers ! Par contre, ne comptez pas y retrouver le moindre détail intime et croustillant dont l'image a généralement le malheur de passer à la moulinette de la pixellisation chez nos lointains voisin asiatiques. Dans le cas présent, exit la pornographie chère à la saga culte Exorcister dont les trois premiers volets furent distribués en notre beau pays sous l'égide du mythique éditeur français Haxan il y a environ un quart de siècle. Ici, tout ce que vous découvrirez de plus intime chez les interprètes féminines se situera au dessus de la ceinture, là-même où se présentent ''les pompes à lait'' dont se délectent en général les nourrissons... bande de pervers eux aussi !

Moins profond que le contenu d'un dé à coudre, le scénario ne vous donnera pas le mal de tête. Ou tout au plus à ceux chez qui l'absence d'ambition provoque céphalées, vomissements, ou plus simplement, indifférence. Le réalisateur japonais Naoyuki Tomomatsu signe avec Reipu Zonbi: Lust of the Dead une œuvre qui, quelque par, ne cache pas vraiment son jeu dès le départ (pour les anglophobes, allez donc traduire le titre sur Gogol). La luxure dont il est question ici est au centre d'une épidémie touchant en premier lieu une partie de la population masculine qui à la suite d'une catastrophe nucléaire, se transforme en zombies assoiffés de sexe. Leurs particularités ? Des maquillages ultra sommaires (un peu de fond de teint et quelques empreintes de faux sang) et surtout, le pantalon presque généralement baissé sur les chevilles. Question sexe, c'est la déception. Les jolies actrices pour la plupart vêtues dans une certaine forme de folklore qui n'appartient qu'à elles ont l'ingratitude de n'offrir au spectateur avides de stupre et de chair fraîche que la pâleur de poitrines plus ou moins voluptueuses. Pas de quoi perdre le contrôle de sa main droite (ou gauche, selon que l'on est droitier ou gaucher) pour un moment de plaisir solitaire aussi fugace qu'euphorisant...

N'est pas George Romero qui veut, ni la plupart de ses succédanés d'ailleurs puisque l’œuvre de Naoyuki Tomomatsu n'est rattrapée, ni par ses effets-spéciaux, qui se résument à peu de chose au final, ni par l'incarnation de ses interprètes. Beaucoup de mâles en rut pour peu de sang et quelques passages en mode CGI vraiment pitoyables. Ah oui ! Parce que j'oubliais d'ajouter qu'avec son infinie délicatesse, le scénario exploite une idée graveleuse qui nous est pour autant, et fort heureusement, épargnée : De la pauvre poignée des victimes de viols en réunion, celles qui ont le malheur d'avoir été inséminées par leurs bourreaux finissent par mourir, leur système sanguin se trouvant alors ravagé : en résulte des effets-spéciaux en images de synthèse d'une laideur aussi repoussante que le film lui-même. Un long-métrage qui laissera stoïque n'importe quel fan de ''films de zombies''. Rétrospectivement, lorsque l'on songe à Zombie Ass : Toilet of the Dead (pour amateurs de ''farting'' avant tout) ce film signé par Noboru Iguchi n'était finalement peut-être pas si mauvais que cela. Reipu Zonbi: Lust of the Dead mérite le vide-ordure. Pas drôle, jamais effrayant et interprété par des touristes n'ayant apparemment jamais suivi la moindre formation professionnelle d'acteur japonais comparable à notre Cours Florent National. Et dire que le film a connu quatre suites...

samedi 26 octobre 2019

Child's Play de Lars Klevberg (2019) - ★★★★★★★☆☆☆



Après avoir été l'une des icônes du cinéma fantastique et d'épouvante durant le courant des années quatre-vingt avec Jeu d'Enfant de Tom Holland en 1988 (à ne pas confondre avec le film éponyme réalisé cinq ans plus tard par Yann Samuell), la poupée Chucky fut ensuite le fond de commerce de divers cinéastes. Avant le remake signé cette année par le réalisateur Lars Klevberg (dont le second long-métrage Polaroid devrait prochainement voir le jour), elle fit en effet l'objet de six séquelles entre 1990 et 2017. Mais plutôt que de poursuivre les dernières aventures de Chucky proposées par le cinéaste Don Mancini (créateur du scénario original) avec Le Retour de Chucky, Lars Klevberg propose un retour aux sources qui avec l'évolution des médias et des différentes technologiques peut être considéré comme une mise à jour 2.0 de l’œuvre originale. Première différence majeure entre Jeu d'Enfant et Child's Play (qui reprend le titre original du film sorti en 1988), cette fois-ci, la poupée n'est plus ''habitée'' par l'esprit du tueur en série Charles Lee Ray. Ses agissements et son comportement sont les conséquences d'un traitement infligé par l'un des ouvriers de l'usine de montage où a été fabriquée Buddi (non initial du produit proposé au marchands de jouets) que son supérieur vient de renvoyer et qui décide de se venger en annihilant les systèmes de sécurité mis en place dans le processeur de la poupée.

Si beaucoup de séquences divergent de l’œuvre originale, on retrouve cependant le personnage de la mère célibataire vivant seule avec son fils. Il s'agit là des mêmes personnages, leur nom ayant été conservé. Si l'on pouvait craindre que le film ne soit qu'une énième variation opportuniste de l’œuvre originale (ce qu'elle demeure finalement du haut de son statut de remake) sans une once de spécificités lui octroyant certaines particularités, Child's Play rassurera très rapidement le fan de la première heure. En effet, le film de Lars Klevberg parvient sans mal à ''faire oublier'' le long-métrage de Tom Holland pour en proposer une version s' éloignant quelque peu de l'originale.

D'abord, le contexte actuel permet d'offrir à la poupée Chucky des capacités inenvisageables à l'époque de Jeu d'Enfant. Connectée avec son temps, elle est désormais capable de scruter les faits et gestes de son entourage grâce à la connexion qu'elle opère avec les outils technologiques actuels. Ordinateurs, téléphones portables et domotique sont les accessoires dont s'arme désormais une poupée qui n'oublie cependant pas d'user d'outils plus... ''tranchants'' afin de faire payer à celles et ceux qui osent se mettre entre elle et Andy (le jeune acteur Gabriel Bateman), le prix de leur comportement et cela, de la plus horrible des manières. Et pour ne citer que deux des crimes les plus sanglants : le meurtre à la tondeuse de l'amant de Karen Barclay (Aubrey Plaza), la mère de Andy, ou celui du voisin électricien et voyeur Gabe (l'acteur Trent Redekop) à la scie circulaire. Le sang gicle abondamment dans Child's Play et les membres volent dans les airs. Des scènes d'horreur particulièrement réjouissantes auxquelles le réalisateur et le scénariste Tyler Burton Brown n'oublient pas d'ajouter une bonne dose d'humour. Plus que le remake sans âme auquel on pouvait s'attendre, Child's Play s'affranchit aisément de Jeu d'Enfant et s'avère être l'une des meilleures séries B horrifiques sorties cette année...

Rings de F. Javier Gutiérrez (2017) - ★★★☆☆☆☆☆☆☆



J'ai hésité très longuement entre écrire un véritable article sur Rings ou plus simplement aller sur Facebook et laisser quelques lignes très critiques (dans le mauvais sens du terme) sur ce nouveau remake/suite inutile du classique de la J-Horror, Ringu de Hideo Nakata sorti maintenant il y a un peu plus de vingt ans. Et lorsque je dis que j'ai hésité longtemps, je parle d'une poignée de minutes dont la sensation de durée fut comparable à celle d'une œuvre durant cent-deux minutes tout en me laissant l'impression d'avoir duré le double. Parce que la vision du cinéaste espagnol F. Javier Gutiérrez, auteur de pas grand chose de connu chez nous et sur le territoire américain (un seul long-métrage dans son pays d'origine avant de s'exporter aux États-Unis), a réalisé l'une des pires suites que l'on pouvait craindre d'un long-métrage dont les origines sont japonaises. Si Hideo Nakata n'était plus de ce monde, parions qu'il serait sorti de sa tombe pour tourmenter l'esprit du cinéaste espagnol pour avoir osé proposer un produit pareil. Qui non seulement est mauvais, mais s'érige également le droit de pouvoir faire l'impasse sur la séquelle du long-métrage américain réalisée en 2004 par le cinéaste japonais lui-même (The Ring ayant été réalisé par le cinéaste américain Gore Verbinski).

Quel culot ! Ah, et puis engager un monstre comme Vincent d'Onofrio pour le rôle de Burke, quelle idée ! D'ailleurs, à ce propos : messieurs, prévoyez de porter une couche avant de visionner les quelques séquences mettant en scène cet immense acteur américain. Car à force de titiller votre prostate lors de passage involontairement humoristiques signifiant un personnage hautement diabolique campé par l'acteur en question, le cinéaste espagnol se rendra dans ces circonstances, coupable de crises d'énurésie chez la plupart d'entre vous. Question frissons, le constat est là encore, particulièrement affligeant. Tournant autour de Julia (l'actrice Matilda Lutz), sacrifiant sa propre existence pour que survive à la mort programmée sept jours plus tard son fiancé, lequel a eut la malencontreuse idée de visionner la fameuse vidéo autour de laquelle tourne l'enjeu principal de cette nouvelle mouture, le récit est ponctué de rarissimes éclats horrifiques tellement vus dans d'autres films et d'autres circonstances qu'elles n'agissent absolument plus sur la sensibilité du spectateur. Quelques bonnes idées (Samara sortant d'un écran plat renversé au sol) mais des visions parfois totalement ratées nous renvoyant aux origines des CGI (les cigales en images de synthèses ne sont absolument pas réalistes).

Et puis, il demeure cette enquête de l'héroïne, rythmée avec les pieds et promettant un pré-final nous renvoyant au temps des faits-divers consacrés à ces jeunes enfants séquestrés durant des années dans la cave de leur kidnappeur. C'est mou, et même lorsque l'imposant Vincent d'Onofrio fait parler la fureur, l'acteur semble être ailleurs, pas du tout convaincu par le personnage qu'il est en train d'interpréter. La toute dernière scène, plutôt sympathique mais ne rattrapant pas les trop nombreuses longueurs du script laisse par contre malheureusement supposer qu'une nouvelle suite pourrait être envisagée. Prions pour que telle chose n'arrive pas. Ou alors,attendez que nous soyons tous morts et enterrés et réservez cela aux générations futures qui se désintéresseront d'un Ringu devenu pour eux, obsolète...

The 15:17 to Paris de Clint Easwood (2018) - ★★★☆☆☆☆☆☆☆



Comment parler de The 15:17 to Paris, le trente-sixième longs-métrage de l'acteur et réalisateur Clint Eastwood qui jusque là avait fait preuve d'une prodigieuse régularité en terme de qualité de mise en scène, sans être trop dur ? Comment imaginer un seul instant que l'auteur, au hasard, de Mystic River, de L'homme des Hautes Plaines, de Sur la Route de Madison ou de Million Dollar Baby ait pu commettre un tel naufrage cinématographique lui qui sut toucher du doigt le cœur des spectateurs à de très nombreuses reprises ? Comment, surtout, les spectateurs ont-ils pu se laisser bluffer par la promesse d'un film revenant sur un fait-divers qui échappa à la tragédie grâce à l'intervention de trois touristes américains ? La réponse à cette dernière question se trouve justement dans le nom du réalisateur. Habituellement tellement propice à donner naissance à des œuvres qui impriment la rétine et touchent l'âme et le cœur qu'on ne pouvait imaginer un seul instant que The 15:17 to Paris ne serait rien d'autre qu'une arnaque sans la moindre saveur.

Lorsque l'on découvre durant les dix dernières minutes les trois véritables héros qui inspirèrent la scénariste Dorothy Blyskal à rédiger un scénario inspiré du l’autobiographie The 15:17 to Paris: The True Story of a Terrorist, a Train, and Three American Heroes écrit par Jeffrey E. Stern, Anthony Sadler, Alek Skarlatos et Spencer Stone, les héros de cette histoires incarnant chacun dans le film leur alter ego fictionnel, on se dit qu'après tout, ces images là se suffisent à elles seules. Allez ! Ajoutons-leur la dizaine ou quinzaine de minutes consacrées au fait-divers s'étant déroulé à bord du Thalys 9364 le 21 aout 2015 et disséminées au beau milieu de flash-back revenant sur l'enfance et l'évolution des trois principaux protagonistes (avec un fort penchant pour Spencer Stone (qui s'incarne donc tout naturellement).

Voilà à quoi aurait dû donc ressembler The 15:17 to Paris, soit un court-métrage d'une vingtaine de minutes environs et rien de plus. Et surtout pas ce long-métrage aux trop longues séquences durant lesquelles Clint Easwood tente une caractérisation des protagonistes pourtant maladroite. Simplement parce que l'auteur de Play Misty for Me semble ici tout bonnement incapable de générer la moindre empathie, ou du moins, le moindre intérêt pour son trio de gosses auquel le spectateur ne s'attachera sans doute pas aussi profondément que ceux que l'on trouve notamment chez Stephen King qui dans le domaine, s'y connaît tout particulièrement. Ni même pour ces mêmes enfants devenus adultes et parcourant l'Europe jusqu'à leur montée à Paris à bord du train incriminé. Clint Eastwood, du moins son œuvre, prend ici un sacré coup de vieux que pas même la séquence de la boite de nuit dont la musique oppose un curieux décalage entre la mise en scène du cinéaste et ses quatre-vingt sept ans (à l'époque du tournage). Plus sérieusement, The 15:17 to Paris est un film dont la plus grande partie des scènes demeure extraordinairement inutile. On s'y ennuie ferme, leur accumulation n'étant au final présente que pour combler l'immense vide du scénario dont le seul intérêt repose donc sur l'acte héroïque des trois américains. Et je ne parle même pas du discours pro-américain, patriotique et dangereusement et fanatiquement religieux de certains personnages. Poubelle !

vendredi 25 octobre 2019

Terminator: Dark Fate de Tim Miller (2019) - ★★★★★☆☆☆☆☆



Alors que la saga avait fini part s'enliser dans des suites absolument pas à la hauteur des deux premiers volets respectivement réalisés en 1984 et 1991 par James Cameron, Terminator réapparaissait dès le 23 octobre dernier dans les salles obscures avec un sixième opus prenant place entre Terminator 2 : Le Jugement Dernier et un Terminator 3 : Le Soulèvement des Machines qui éludait la progression narrative originelle en faisant table rase de tout ou partie de la mythologie. Pour autant, le réalisateur américain Tim Miller, malgré la présence de James Cameron à la production choisit lui aussi de remanier la franchise en détournant carrément quelques-uns de ses fondements. Un choix très particulier dont l'objectif premier est évidemment de relancer une saga sans doute parvenue à bout de souffle. Le procédé permet-il au film d'échapper à la redondance ? À vrai dire, pas vraiment. Car même si certains fans hardcore risquent de rager devant certains choix scénaristiques, Terminator: Dark Fate n'est en réalité qu'un éternel recommencement qui plaira à différentes échelles aux fans des deux premiers volets de la franchise et laissera sans doute indifférents ceux qu'elle indiffère depuis ses débuts.

John Connor, Skynet et le T-800

L'intrigue se déroule près de trois décennies après que le T-800 ait finalement eu raison de la résistance de Sarah Connor, réfugiée au Guatemala avec son fils John, puisque ce dernier fini par mourir sous les balles du robot de la série Cyberdine Systems. On commence alors à comprendre que le fils de Sarah n'est plus celui sur lequel peut compter l'humanité pour échapper à son extinction. Un fait qui remet donc en question les fondements même de la saga. C'est pourtant grâce à un subterfuge plutôt malin qui veut que l'interaction de Sarah dans le second épisode ait changé le futur que la chose s'avère possible, Skynet faisant également désormais partie du passé. Troisième événement venant bousculer l'ordre établi par Terminator et Terminator 2 : Le Jugement Dernier, le T-800, toujours incarné à l'écran par l'acteur Arnold Schwarzenegger, est cette fois-ci doté d'une certaine forme de conscience pourtant révélée absente chez ce modèle apparu pour la première fois dans le premier volet de la saga (des propos tenus par le personnage de Kyle Reese, le père de John venu du futur afin de protéger sa mère Connor des attaques du T-800). Une manière de relancer la machine tout en se préservant de l'écart trop important que pouvaient avoir les deux premiers volets avec le cinquième.

Le résultat ne se fait pas longtemps attendre puisque Terminator: Dark Fate a souvent l'air d'une mise à jour 2.0 du second épisode et en reprend une grand part des mythiques séquences de ce volet que beaucoup d'amateurs considèrent (à tort ou à raison d'ailleurs) comme le meilleur de la franchise. Si le film est d'abord tourné en Espagne ainsi qu'en Hongrie, une bonne partie figure la présence de sa poignée de principaux personnages à la frontière mexicaine, Tim Miller profitant alors de l'occasion pour attaquer le pays qui l'a vu naître à travers sa politique en matière d'immigration. Pour le reste, on assiste à quelques brillantes scènes d'action dont une séquence se déroulant en début de film sur une autoroute digne de celle qui ouvrait pratiquement les hostilités dans le second volet. Force est de reconnaître que l'action et les effets-spéciaux y sont largement décuplés, les CGI permettant désormais d'accomplir des prouesses techniques qui demeuraient encore perfectibles presque trois décennies plus tôt. On retrouve avec plaisir le duo Sarah Connor/ T-800 d'antan (Linda Hamilton/Arnold Schwarzenegger), d'abord rajeunis lors de la séquence se déroulant au Guatemala en 1998 (lors de laquelle meurt le fils de Sarah), même s'ils ont pris, depuis, pal mal de rides. Puis nous faisons la connaissance de Grace (l'actrice McKenzie Davis), une femme ''augmentée'' venue du futur afin de protéger la nouvelle cible (Dani Ramos, interprétée par Natalia Reyes). Quant à l'antagoniste de ce sixième volet, il s'agit d'un modèle Rev-9 (incarné par l'acteur Gabriel Luna), une amélioration du T-1000 dont la principale particularité est de pouvoir se diviser en deux entités distinctes. Pour le reste, certaines actions de cette machine venue elle aussi du futur sont des quasi copier/coller de celles proposées dans le second opus de la saga. C'est donc avec l'étrange sentiment de revoir vingt-huit ans plus tard le ''légendaire'' Terminator 2 : Le Jugement Dernier rehaussé par de très bons effets-spéciaux et pourtant, au final, assez peu satisfaisant puisque ne faisant absolument pas évoluer le récit. Une œuvre anecdotique sous bien des aspects, quand d'autres attiseront sans doute la curiosité d'une parie des fans de la première heure. À chacun de voir et de ressentir ce nouveau chapitre dont deux suites sont déjà prévues en cas de succès dans les salles de Terminator: Dark Fate...

jeudi 24 octobre 2019

Fenêtre Secrète de David Koepp (2004) - ★★★★★★★☆☆☆



Attention spoilers !

L'écrivain Morton Rainey vit seul dans un chalet reculé de Tashmore Lake depuis qu'il a surpris sa femme Amy au lit avec son amant Ted Milner dans un motel six mois auparavant. Un jour, il reçoit la visite d'un certain John Shooter qui affirme que Morton lui a volé le manuscrit qui aurait donné naissance à la nouvelle '' Fenêtre secrète''. Pour preuve, l'homme lui laisse le manuscrit en question intitulé '' La Saison des Semis ''. Bien qu'étant dans un premier temps désintéressé par les propos tenus par Shooter et par son texte, l'écrivain finit par lire ce dernier et constate d'étonnantes similitudes entre la nouvelle qu'il a publié et le manuscrit de Shooter. L'étranger donne trois jours à Morton pour lui prouver qu'il a écrit sa nouvelle bien avant la sienne. Ce qui n'empêche pas entre-temps ce curieux personnage de tuer Chico, le chien de Morton et de mettre le feu à la demeure que partagèrent Amy et lui au temps de leur bonheur...

Une fois encore, le héros principal de ce long-métrage, adaptation pour le cinéma du roman ''Vue Imprenable sur Jardin Secret'' de Stephen King par le réalisateur et scénariste américain David Koepp, est un écrivain. Et une fois encore, ce personnage central de l'intrigue est en proie à certaines addictions et affaibli par un drame qui le touche personnellement. Incarné par Johnny Depp et assez mal accueilli lors de sa sortie en salle,Fenêtre Secrète demeure cependant une assez bonne surprise qui sort des sentiers battus et rabattus par l'écrivain plus généralement spécialisé dans l'horreur et le fantastique mais qui a prouvé à bien des reprises qu'il était capable d’œuvrer dans des courants aussi divers que le drame et le thriller. Ces deux genres qui ici, trouvent matière à un récit dont l'évolution s'avère relativement sobre. En effet, pas d'action effrénée ni de séquences grand-guignolesques mais une histoire qui déroule le fil de son intrigue en prenant d'infinies précautions pour ne pas perturber l'éventuelle apathie des spectateurs.

Fenêtre Secrète manque de dynamisme, c'est certain. Pourtant, il s'avère bien difficile de décrocher jusqu'à la révélation finale. Un climax envisageable pourtant relativement tôt, étayé par des détails subtilement mis en scène sous forme d'objets ou à travers certains comportements ou dialogues dont ceux du héros, lequel n'est pas des moindre. Accompagné par Maria Bello dans le rôle d'Amy Rainey, Timothy Hutton dans celui de l'amant mais surtout de John Turturro dans celui de l'alter ego maléfique, Johnny Depp fait son taf sans donner dans la grandiloquence. Comme dans la mise en scène d'ailleurs, intégrant pourtant tout ou partie des ''obsessions'' et des addictions chères à Stephen King. Car tout comme le Jack Torrance de Shining, le Thad Beaumont de La Part des Ténèbres (incarné par Thimothy Hutton), le James Gardener des Tommyknochers ou encore le Mike Enslin de Chambre 1408, Morton Rainey est l'une des émanations allégoriques de Stephen King révélant certains des travers, eux, bien réels de l'écrivain...

Chambre 1408 de Mikael Håfström (2007) - ★★★★★★★☆☆☆



Inspiré d'une nouvelle écrite par Stephen King en 2002 succédant à une première parution deux ans auparavant au format audio, Chambre 1408 aborde le thème de la maison hantée, sujet peu courant chez le plus célèbre des écrivains de romans et de nouvelles d'épouvante. Mais plus que le banal produit des investigations d'un écrivain (personnage cher à Stephen King qui en fait régulièrement le héros d'un certain nombre d'ouvrages), le long-métrage est surtout pour Mike Enslin qu'incarne à merveille l'acteur américain John Cusack, l'occasion d'être confronté une bonne fois pour toute à son passé, et notamment au drame le liant à son épouse Lily et leur fille Katie. Le cadre plutôt restreint servant à l'intrigue ''condamne'' l'acteur principal et presque unique du film à déployer tout son talent. Et dans le domaine, on ne peut pas dire que John Cusack ait fait preuve de laxisme. En effet, l'acteur déjà entrevu dans une lointaine adaptation de Stephen King vingt et un ans auparavant (Stand bye Me de Rob Reiner dans lequel il incarnait le grand frère de l'un des jeunes héros) s'en donne à cœur joie. Entre cabotinage, cynisme, démence et peur réelle, son personnage passera par toutes les étapes. Autant de paliers qui, espérons-le, lui permettront enfin de mettre un nom définitif sur le mal qui l'étreint depuis des années...

À moins qu'il ne s'agisse du Mal avec une majuscule. Comme celui qu'évoque le rôle le plus important tenu après celui de John Cusack par le toujours excellent Samuel L. Jackson qui n'aura besoin que de quelques minutes lors du premier acte pour nous convaincre de l'utilité de l'affrontement entre l'écrivain/chasseur de fantômes et le directeur de l'hôtel Dolphin, Gerald Olin. Une séquence follement réjouissante opposant le sceptique et le convaincu lors d'un échange d’opinions mémorable. Puis arrive le moment tant attendu et tant redouté (comment tenir une intrigue en haleine lorsque celle-ci se contente d'être narrée entre les quatre murs d'une chambre d'hôtel?). Première étape : la visite des lieux. Le héros parcourt chaque pièce, de la chambre en passant par les commodités, certains détails participant déjà à travers leur étrange présence aux événements qui interviendront par la suite. Un tableau, un robinet, un rouleau de papier toilette, un réveil... Bref, rien que de très anodin, mais qui sous la direction du réalisateur et scénariste suédois Mikael Håfström (qui confie ici l'adaptation de la nouvelle 1408 aux scénaristes Scott Alexander, Matt Greenberg et Larry Karaszewski) prennent une envergure inattendue.

Car ça n'est pas tant dans les scènes impliquant les effets visuels les plus... ''grandiloquents'' que Chambre 1408 recèle son potentiel horrifique que dans ces petits détails apparemment insignifiants. Petits mais qui lors de leur ''éveil'' par la présente manifestation d'une entité dont le spectateur sera tout de même en droit de rétorquer qu'elle n'est que l'expression physique d'un mal-être chez le héros, élèvent chacun d'entre eux au rang de monument de l'épouvante. Au delà des quelques sursauts engendrés par de très peu convaincants Jump Scares (au bout de deux fracas sonores, l'effet ne fonctionne plus), le film renferme quelques situations pour le moins angoissantes dont l'une, peut-être consciemment (ou pas) inspirée par le chef-d’œuvre de Roman Polanski Le Locataire (Mike Enslin confronté à son double maléfique situé dans l'immeuble d'en face), reste l'une des plus efficaces. Si le cadre exigu et l'idée générale paraissent bien faibles pour pouvoir prétendre tenir le spectateur en haleine durant plus d'une heure quarante (dans sa version courte puisque le film existe dans une version d'une quinzaine de minutes supplémentaires à découvrir en priorité), en réalité, on ne s'y ennuie que très rarement. Peut-être la fin s'avère-t-elle un peu longue et surtout répétitive dans son procédé. Force est de reconnaître que l'on tient là une adaptation relativement fidèle de la nouvelle de Stephen King et surtout, une excellente interprétation de la part de John Cusack. À voir...

mardi 22 octobre 2019

Il faut Sauver le Soldat Ryan de Steven Spielberg (1998) - ★★★★★★★★★☆



S'ouvrant et se terminant sur deux des plus héroïques et spectaculaires scènes de guerre de toute l'histoire du septième art, Il faut Sauver le Soldat Ryan dresse le portrait plein d'humanité d'une section de soldats commandés par le Capitaine John H. Miller et dont la mission est de retrouver et de ramener chez lui le soldat de 2ème classe James Francis Ryan dont les trois frères sont tombés au combat. Deux séquences absolument brillantes et dévastatrices d'un point de vue visuel, sonore et émotionnel. Rares auront été les occasions d'être plongé à ce point au cœur d'un conflit avec un tel degré de réalisme. Qu'il s'agisse du sable soulevé dans les airs à l'impact des obus tirés par l'armée allemande lors du débarquement, des innombrables soldats perdant au mieux un membre, au pire la vie, l'eau rougeoyante de la Manche dans laquelle le sang des courageux militaires américains se déverse ou les quelques villes traversées et ravagées par d'incessants bombardements, le travail effectué par les différentes divisions techniques est simplement remarquable. Qu'il s'agisse également de la partition musicale de John Williams, des effets-spéciaux de John Evans, de la photographie de Janusz Kaminski ou du sound-design, le spectateur en prend plein la vue. Maintenant, il s'agit de savoir si l'intérêt d'Il faut Sauver le Soldat Ryan repose uniquement sur son aspect visuel, sonore et divertissant ou si son principal intérêt se situe au niveau de son scénario reposant sur un fait authentique auquel le réalisateur Steven Spielberg tente de rendre hommage.

D'un point de vue historique, le film semble fidèle aux faits ayant eu lieu. Si le nom de Ryan a été préféré à ceux des frères Niland, les quelques erreurs qui émaillent le récit semblent appartenir au registre ''technique''. Des invraisemblances mineures que le spectateur ''lambda'' ne relèvera heureusement pas pour se consacrer sur l'essentiel : le spectacle ! Car oui, Il faut Sauver le Soldat Ryan, avant d'être un témoignage troublant, voire parfois choquant (la séquence du débarquement dépassant allégrement la vingtaine de minutes est un véritable carnage peu avare en morts) est avant tout un divertissement absolument réjouissant. Bien que durant presque trois heures à une poignée de minutes près, l’œuvre de Steven Spielberg est non seulement un voyage au cœur de l'horreur de la guerre, mais également un formidable message d'humanité et de fraternité. On imagine aisément un Rolland Emmerich qui aux commandes du projet en aurait fait un film de propagande pro-américain. Steven Spielberg nous épargne fort heureusement ce type de message pour nous plonger dans une aventure pleine de scènes d'anthologie. Outre les deux séquences d'ouverture et de fermeture (en dehors de celles situées et tournées dans le cimetière américain de Colleville-sur-Mer), cette dernière situant son action aux abords des ponts de la rivière du Merderet, le spectateur a notamment droit à une séquence opposant le capitaine John H. Miller et ses hommes à un sniper (une scène qui évoque sensiblement celle de l'excellent Full Metal Jacket de Stanley Kubrick), ou la prise d'une antenne-radio.

Entre ces différentes séquences d'anthologie, Steven Spielberg ne se repose pas sur ses brillants lauriers et profite des quelques moments de calme pour nous présenter un peu plus en profondeur ses personnages. L'un des points forts de Il faut Sauver le Soldat Ryan reste l'impeccable casting constitué autour de Tom Hanks, Tom Sizemore, Edward Burns, Barry pepper, Adam Goldberg, Vin Diesel (oui, oui), Giovanni Ribisi et Jeremy davies, tous bientôt rejoints par Matt Damon (le soldat Ryan en question), mais aussi ses personnages. Du sniper priant auprès du Seigneur avant chaque tir, en passant par le médecin soignant comme il peut les soldats blessés lors des différents combats, jusqu'au capitaine ici tenu par un Tom Hanks magnifique d'émotion. Une émotion que partagent d'ailleurs ces soldats loin des productions qui n'en font généralement que des gros bras bas du front et incapables de s'émouvoir de la mort de l'un de leurs compagnons. Ici tout est fait pour que l'expérience soit immersive. Caméras à l'épaule, champ-contrechamp, première et troisième personne, image tremblant à chaque explosion, poussière, gravas, gerbes de sang, hurlements, balles sifflant près des oreilles du spectateur. Dire que la sensation d'y être soit-même est un euphémisme. De ce côté là, c'est presque un sans faute. Presque ? Oui, car à côté de l'ampleur du travail effectué par Steven Spielberg, son équipe technique et ses interprètes, il manque peut-être quelques longs plans-séquence qui auraient sans doute accentué encore davantage l'impression d'immersion. À part ce menu détail qui, si le film avait été réalisé ces dernières années et non pas il y a vingt et un ans, deviendrait alors impardonnable, Il faut Sauver le Soldat Ryan touche au but. Une œuvre remarquable, l'un des meilleurs films de guerre ''contemporains'' à ranger aux côtés de Requiem pour un Massacre d'Elem Klimov.

Les Âmes Grises d'Yves Angelo (2004) - ★★★★★★★☆☆☆



Comme si la mort et le désespoir avaient jeté leur dévolu sur un petit village français durant l'hiver 1917, Les Âmes Grises réserve à ses spectateurs l'une des plongées dans la torpeur de la première guerre mondiale les plus désolante. Triste à faire pleurer des cailloux. A transformer les superbes décors de Dombasle-sur-Meurthe, de Nancy, de Ville-sur-Saulx et de Vic-sur-Seille pour les faire ressembler à de sinistres peintures d'où l'artiste-peintre aurait oublié d'adjoindre la moindre couleur pour n'en laisser s'exprimer que des teintes hivernales. Là-bas, on entend tonner les coups de cannons comme autant de coups de tonnerre. Mais alors que la jeunesse française s’agglutine sous son ciel voilé par les nuages artificiels des explosifs, au village, comme un mal étrange s'étendant au delà de la frontière qui le sépare du champ de bataille, des événements tragiques vont se succéder. Comme une extension au conflit. Comme si le Créateur posait son doigt accusateur sur ceux qui eurent la faiblesse ou la chance d'échapper au combat...

Mais quel mal étrange atteint ce professeur qui après avoir sensiblement perdu la tête en classe a choisi de revêtir sa chambre de messages écrits à l'aide de ses excréments ? Sa remplaçante, la jolie Lysia Verhareine, mérite-t-elle le sort qui bientôt va s'abattre sur celui qu'elle aime et qui par conséquent offrira une bien triste fin à leur amour ? Qui donc a tué cette petite fille et l'a laissée là, au sol, dans le froid et l'humidité ? Qui donc est le procureur Pierre-Ange Destinat, énigmatique, avare en parole et apparemment dénué d'émotion ? Ou le juge Mierck qui cache peut-être sous sa petitesse et ses rondeurs le mal absolu... ? Comme les hurlements de celui que l'on va exécuter pour un meurtre qu'il n'a pas commis, les pleurs d'une jeune femme qui vient de perdre son amant au champ de bataille ou la souffrance silencieuse d'un notable craint par son entourage, Les Âmes Grises est une œuvre douloureuse qui n'exploite que dans d'infimes proportions la joie et le bonheur de certains de ses personnages. Des lettres d'amour rassurantes, emplies des promesses d'une retrouvaille prochaine. Ou plus simplement, le partage d'un dîner lorsque la solitude se fait trop pesante. Et pourtant, malgré ces trop rares instants de joie contenue, le long-métrage d'Yves Angelo adapté du roman éponyme de Philippe Claudel paru un an auparavant en 2003 semble se complaire dans la noirceur. Comme si toute bonne action devait y être systématiquement salie.

Le pouvoir de la Justice (injustice?) est ici, sans réserve. À travers le portrait de ce juge formidablement interprété par le regretté Jacques Villeret qui trouvait là, le moyen de laisser s'exprimer tout son talent. Face à un Jean-Pierre Marielle de marbre. Imposant, muet, mais non dénué d'émotion. Et d'ailleurs, de cet improbable monceau de pessimisme auquel le réalisateur imprime un tel degré de noirceur qu'il lui confère une aura presque fantastique, surnagent quelques moments remarquablement touchants. Une émotion à fleur de peau qui ne peut que s'effacer, si misérable soit-elle face à la montagne d'horreurs qui s'empare du village et de ses habitants. Une émotion qui ne fera pas le poids face à des actes dénués de morale lorsque celle-ci tentera de percer la croûte d'un village assiégé par un mal étrange. Celui de la corruption. Denis Podalydès parcourt de sa fragile silhouette mais de son immense talent Les Âmes Grises dans le rôle du policier Aimé Lafaille. Michel Vuillermoz et Serge Riaboukine y sont respectivement un maire et un aubergiste trop rares à l'écran. Au son des cannons, sur un ton linéaire et un rythme ankylosé, l’œuvre d'Yves Angelo tente d'imposer quelques stupéfiants visuels. Comme cette institutrice face à un horizon lointain d'où se font entendre les bombardements. Le spectacle est remuant, âpre et éclairé de rarissime moments de joie. Une jolie mais déprimante expérience cinématographique...

lundi 21 octobre 2019

L'apocalypse selon St George (6): Survival of the Dead de George Romero (2009) - ★★★★☆☆☆☆☆☆



Survival of the Dead sonne comme le testament du maître incontesté et incontestable du film de zombies qui en pratiquement cinquante ans de carrière (puisque mort le seize juillet 2017) a donné ses lettres de noblesse au genre avant de tomber peu à peu en disgrâce la décennie précédente avec ses deux derniers longs-métrages consacrés à son hexalogie zombiesque. On parle évidemment de George A. Romero. L'immense auteur de La Nuit des Morts-Vivants (1968), de Zombie (1978), et du Jour des Morts-Vivants (1986). Mais également, et cela, tout le monde ne le sait peut-être pas, des cultissimes Martin en 1977, et Creepshow en 1982. Après avoir exploré d'autres territoires durant les deux décennies suivant le troisième volet de sa saga des morts-vivants, ces derniers sont réapparus en 2005 à travers Le Territoire des Morts qui reste à ce jour, le dernier volet digne de cette saga avant la chute consécutive au désastreux Chronique des Morts-Vivants sorti en 2008, et qui malgré les avis partagés mais généralement approuvés, est bien le pire d'entre tous. Car non, le dernier long-métrage de George A. Romero Survival of the Dead n'est pas le plus mauvais d'entre eux. Et même si cette dernière exploration dans le domaine est loin d'atteindre les qualités de ses prédécesseurs, il faut tout de même reconnaître qu'à une échelle minuscule, il demeure davantage ''visible'' que le précédent.

Il demeure assez difficile d'ailleurs d'expliquer pourquoi ce dernier effort est très légèrement au dessus de l’infâme Chronique des Morts-Vivants. Peut-être parce que le cinéaste américain originaire de Pittsburgh a eu la ''brillante'' idée d'abandonner le principe du Found Footage. Peut-être aussi parce que le film est sensiblement plus gore... mais ça n'est par contre sans doute pas grâce à des dialogues qui volent une fois encore très bas et s'avèrent parfois très vulgaires (''J'te laisserai bien m'lécher mais les mec savent pas y faire […] c'est dommage qu'il n'y ait pas une autre salope dans l'coin''!!!). Sans doute pas non plus grâce aux effets-spéciaux de François Dagenais et aux effets visuel de Colin Davis qui usent et abusent des CGI et donnent des résultats dignes des pires productions du genre.

Pourtant, dans ce domaine, George A. Romero fait parfois preuve d'inventivité. Ici, un zombie s'enflammant après avoir reçu une fusée de détresse dans le thorax. Là, d'autres flottant dans un lac et tentant de s'emparer d'un soldat. On pourra même imaginer que les scénaristes de la série télé The Walking Dead se sont inspirés du film lors de la traumatisante séquence durant laquelle, la tête d'une quinzaine de personnages est suspendues à des pics et laissés ''vivants''. Lors d'un final assez gore rappelant dans une moindre mesure les festins sanglants des seconds et troisième longs-métrages du cinéaste, on aurait pu louer l'ambition d'un George A. Romero se lâchant comme au bon vieux temps. Mais trop tard, le mal étant fait. Avec son histoire opposant deux familles rivales, ses militaires bas du front, et son absence de morale, Survival of the Dead clôt de la pire des manières, une saga qui débuta puis se poursuivi brillamment jusqu'au début du siècle présent. À noter que plusieurs projets sont en court, inspirés de l’œuvre de George A. Romero. Les auteurs de La Nuit des Morts-Vivants semblent en effet sur le point de produire la suite de cet authentique chef-d’œuvre tandis que le propre fils du réalisateur, George Cameron Romero semble avoir prévu de tourner rien moins que la préquelle du dit film. Mais les nouvelles à ce sujet se faisant plutôt rares depuis un certain temps, on peut se demander s'il est encore sur les rails...

dimanche 20 octobre 2019

Gemini Man d'Ang Lee (2019) - ★★★★★★☆☆☆☆



Un peu comme la bande-annonce du prochain Terminator : Dark Fate de Tim Miller dont la sortie est prévue pour mercredi prochain, celle de Gemini Man, le dernier long-métrage du cinéaste taïwanais Ang Lee qui depuis un quatre de siècle ne tourne pratiquement plus qu'aux États-Unis promettait un film au parfum de rance pas du tout assumé. Surtout que le film, sous couvert d'employer une technique 3D inédite (ici, il s'agit en fait de 3D+ qui consiste à filmer l’œuvre à partir du procédé High Frame Rate (HFR), soit une cadence d'images beaucoup plus importante permettant de fluidifier le rendu) ne nous raconte finalement rien d'autre que la rencontre entre un tueur à gages/sniper redoutable (soixante-douze meurtres au compteur) et son clone. Et les clones au cinéma, s'ils ne sont pas aussi courants que n'importe quelle autre ''créature'' du bestiaire fantastique, n'en sont pas moins une approche inédite dans Gemini Man. À seul titre d'exemple, nous pourrions citer A l'Aube du 6ème Jour du réalisateur Roger Spottiswoode, sorti dix-neuf ans plus tôt avec un Arnold Schwarzenegger croisant la route de son double. Un clone parfait impossible à différencier de l'original.

La différence entre cet exemple et le film d'Ang Lee repose davantage sur ce détail. Un point crucial sur lequel repose l'essentiel d'une partie du long-métrage, donc. Car en effet, le héros de Gemini Man incarné par un Will Smith vieillissant (celui d'aujourd'hui, âgé de cinquante et un ans) est confronté à son double, un clone plus jeune d'une vingtaine d'année. Mais plutôt que d'opposer l'acteur à un double entièrement créé en images de synthèse, l'auteur de Tigre et Dragon et du Secret de Brokeback Mountain a offert à Will Smith l'opportunité d'interpréter les deux rôles, dont celui du clone ayant été rajeuni à l'aide du procédé ''deepfake '', une technique permettant d'appliquer sur le visage d'un acteur l'image d'un second, ici, un Will Smith plus jeune de vingt ans. Si l'effet est saisissant et réaliste, tourner le film en 120 images par seconde ne sautera forcément pas aux yeux du spectateur.

Concernant le scénario, on ne peut pas dire que le cinéaste taïwanais et les scénaristes David Benioff, Billy Ray et Darren Lemke aient fait preuve d'une grande originalité. Car au delà de ses effets-spéciaux foncièrement remarquables puisque se fondant parfaitement au récit, Gemini Man n'est rien d'autre qu'un thriller mêlant science-fiction et action qui fera certes le bonheur des amateurs du genre mais pourra décevoir ceux qui attendaient autre chose qu'une vitrine permettant de profiter de technologies sinon nouvelles, du moins, rarement employées sur grand écran. Reste que l'on ne s'ennuie jamais devant certaines séquences qui de l'aveu même du réalisateur furent conçues presque entièrement sans l'apport d'effets-spéciaux autres que ceux employés et cité plus haut. À titre d'exemple, on reste abasourdis par la longue course-poursuite en motos entre le personnage de Henry Brogen et son clone Junior. Une scène d'anthologie lors de laquelle les deux antagonistes terminent leur course par un combat entre un clone usant de sa moto comme d'une arme de kung-fu, Ang Lee affirmant à qui veut l'entendre que la scène fut entièrement filmée telle quelle sans quasiment le moindre emploi d'effets-spéciaux. Aux côtés d'un Will Smith quinquagénaire et de sa troublante version trentenaire, l'actrice américaine Mary Elizabeth Winstead et l'acteur britannique Benedict Wong sont les deux courageux compagnon d'un personnage principal opposé à un Clive Owen s'érigeant en Dieu. Tourné entre la Géorgie, la Colombie et la Hongrie, Gemini Man est donc au final un film d'action plutôt convainquant, et une œuvre de science-fiction tout public...
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