Bienvenue sur Cinémart. Ici, vous trouverez des articles consacrés au cinéma et rien qu'au cinéma. Il y en a pour tous les goûts. N'hésitez pas à faire des remarques positives ou non car je cherche sans cesse à améliorer le blog pour votre confort visuel. A bientôt...

Labels


vendredi 31 mai 2019

Possum de Matthew Holness (2018) - ★★★★★★★★☆☆




Quand la culpabilité ronge un homme jusqu'à l'os, il arrive parfois qu'il bâtisse un mur autour de sa conscience pour tenter d'oublier, ou du moins de nier, la réalité. C'est très certainement ce qui arrive au personnage central de Possum qui traîne derrière lui un lourd passé. Un individu hanté par un drame, et même plusieurs si l'on y ajoute les quelques éléments qui laissent supposer qu'il ne fut pas étranger à la tragique disparition de ses parents lors d'un incendie. Vivant dans une maison sordide en compagnie de son oncle Maurice, Philip est dérangé. Du bulbe, s'entend. Parcourant les terres désolées de son enfance alors qu'il est de retour dans la région, cet ancien marionnettiste affublé d'une créature qu'il conserve précieusement enfermée dans un curieux bagage éprouve toutes les difficultés du monde à exprimer ses sentiments. Alors que les médias retransmettent en continu des informations relatant la disparition d'un gamin de l'ancienne école où Philip était élève, les soupçons se portent très rapidement sur lui, d'autant plus qu'il y rode très régulièrement...

Pour son premier long-métrage, on ne peut pas dire que l'acteur, scénariste et réalisateur britannique Matthew Holness ait facilité la tâche des spectateurs qui se retrouvent donc plongés dans un univers particulièrement sombre, pessimiste et autiste. C'est de patience et de courage qu'il faudra que ce dernier s'arme pour dénouer une intrigue parfois complexe, parsemant des éléments nonsensiques, troubles, et aux confins d'une horreur psychologique dénuée de toute séquence baignant dans une quelconque mare de sang. Ici, le réalisateur s'intéresse de très près à la psyché de son principal personnage, divinement interprété par un Sean Harris déjà coutumier du cinéma d'horreur puisqu'on le découvrit notamment au début des années 2000 dans les dérangeants Creep de Christopher Smith et Isolation de Billy O'Brien. Dans Possum (qui signifie chez nous opossum, un mammifère marsupial d'Amérique), le cinéaste tente avec une certaine réussite de montrer quelle forme peut prendre l'existence d'un homme qui confronté dès son plus jeune âge à l'horreur absolue, en a gardé des séquelles extrêmement profondes. Le sujet tournant autour de l'opossum et servant de litanie, tout comme cette marionnette en forme d'araignée à tête humaine vraiment inquiétante forment une symbolique que Matthew Holness cultive jusqu'aux derniers instants de ce conte cruel et macabre tiré de sa propre nouvelle éponyme à l'origine écrite pour l'anthologie The New Uncanny : Tales of Unease.

A l'origine, la nouvelle et le film qu'a donc réalisé lui-même Matthew Holness reposent sur les théories de l'étranglement de Sigmund Freud. Le spectateur pourra quant à lui y déceler un certain nombre de signes rattachés à ses propres angoisses. Comme cette araignée qui d'une certaine façon représente la mère que le héros a perdu dans un incendie, ou bien cette idée préconçue assez rapidement qui voudrait que la valise que porte en permanence Philip ne contienne pas une marionnette mais bien le corps du jeune disparu...
Matthew Holness développe une intrigue sournoise, jouant avec les certitudes du spectateur. En cela, son œuvre rejoint celle toute aussi dérangeante et réaliste du réalisateur américain Lodge Kerrigan qui signait en 1995 un Clean, Shaven redoutablement étouffant. Mise en scène sobre, mais alambiquée, visuels régulièrement proches de l'Œuvre Picturale, bande-son remarquable composée par différents membres du Radiophonic Workshop de la BBC (créée en 1958 par Daphne Oram e Desmond Briscoe), et surtout, oui, surtout, incroyable performance de Sean Harris, totalement ''habité'' dans le rôle de Philip, et de Alun Armstrong dans celui de Maurice. A ranger aux côtés de Clean, Shaven, de Crazy Murder de Doug Gerber et Caleb Pennypacker., et de toute autre plongée dans la psyché d'individus intellectuellement perturbés...

jeudi 23 mai 2019

The Deadly Spawn de Douglas McKeown (1983)- ★★★★★★☆☆☆☆



The Deadly Spawn ou Return of the Aliens: The Deadly Spawn , ou encore chez nous La Chose, est une minuscule production américaine réalisée par le cinéaste Douglas McKeown dont il s'agit de la seule et unique fiction. Surfant sur le succès de films de science-fiction et d'horreur, nul doute qu'il s'est inspiré pour tourner cette série B fauchée de quelques grands classiques du genre. Tel Alien, le Huitième Passager de Ridley Scott pour sa créature, The Thing de John Carpenter pour le côté exigu des décors (bien qu'à certains moments, c'est plutôt l’œuvre originale signée par le cinéaste américain Christian Nyby en 1958, La Chose d'un autre monde, qui soit évoquée dans le film), ou encore le Danger Planétaire de Irvin S. Yeaworth Junior pour la propension qu'à la créature à croître à mesure qu'elle se nourrit de ses proies. Pourtant, ici, le faible budget alloué à The Deadly Spawn force son auteur à revoir à la baisses ses ambitions. Pas d'immense vaisseau de transport minier ni de station polaire, mais une maison familiale habitée par deux couples ainsi que leurs enfants, l'un de ces derniers étant bientôt rejoint par deux camarades de classe.
La cave, humide, sert de refuge à une créature extraterrestre qui après s'être écrasée sur la surface de la planète vient s'y réfugier, et surtout pondre des œufs. Et pour cela, elle a besoin de prendre des forces. Et donc de se nourrir. Tour à tour, les membres de la famille ainsi que les camarades de classe de Pete tombent entre les impressionnantes mâchoire du monstre. Une créature toute de caoutchouc vêtue et armée de centaines de dents et d'appendices eux-mêmes pourvu de mâchoires acérées. Étonnant de constater à quel point la bestiole est ratée au regard de certains effets gore, eux, plutôt réussis. Comme cette tête que les rejetons de la créatures vont prendre soin de netooyer jusqu'à l'os.

En fait, le monstre de The Deadly Spawn nous renvoie à l'âge d'or du cinéma fantastique. Bien qu'en couleur, le film rappelle les vieux films d'épouvante des années cinquante, en bien plus sanglants. Car le sang gicle dans The Deadly Spawn. Il pisse à de nombreuses reprises, maculant ainsi les murs et le plafond de la cave avant que ne soit investie la demeure toute entière. De l'immense créature originelle, de toutes petites versions tout aussi carnassières vont prendre la relève. Quelques scènes mémorables comme celle durant laquelle une réunion tupperware entre vieilles dames tourne au carnage donne au film de Douglas McKeown un cachet bien particulier qui rappelle sans cesse les productions Troma. Considéré comme un nanar, il faut malgré tout reconnaître objectivement certaines qualités qui font que l'on ne s'ennuie jamais. Et même si la bande-son demeure d'une incroyablement médiocrité (d'où un sentiment de peur inexistant), The Deadly Spawn demeure sympathique à suivre, d'autant plus que la quasi-absence de scénario le condamnait à l'origine à tomber dans l'oubli. Mais c'est avec une certaine générosité que les actrices et acteurs nous offrent, sinon des rôles de composition, du moins une interprétation suffisamment convaincante pour que l'on ait envie d'aller jusqu'au bout. Jusqu'à un final d'ailleurs qui aurait pu laisser présager une suite... Une séquelle que l'on attend d'ailleurs toujours...

mercredi 22 mai 2019

L'Ordinateur des Pompes Funèbres de Gérard Pirès (1976) - ★★★★★☆☆☆☆☆



Curieux film que cet Ordinateur des Pompes Funèbres avec un Jean-Louis Trintignant étonnant, atypique, passant d'une femme à l'autre. D'une épouse qu'il est bien décidé à éliminer, à une secrétaire-maîtresse un peu cruche, en passant par la femme dont un collègue aimerait bien se débarrasser. La vie d'un petit informaticien sans envergure qui à l'aide de son petit ordinateur portable de marque Hewlett-Packard modèle HP65 va entrer les coordonnées personnelles de sa femme (l'actrice italienne, Lea Massari qui l'année précédente fut la première victime du tueur fou de Peur sur la Ville de Henri Verneuil, avec Jean-Paul Belmondo), afin de trouver le moyen idéal de la tuer. Non seulement Gloria est insupportable, mais sa mort permettra à Fred de passer beaucoup plus de temps avec Charlotte, sa secrétaire (la sublime Mireille Darc). Invité par l'un de ses collègues (Bernard Fresson, dans le rôle de Delouette) à venir faire la connaissance de son épouse, Fred tombe sous le charme de Louise. Mais alors qu'il avait fait la promesse à Delouette de l'en débarrasser, c'est ce dernier qui va finalement faire les frais de l'invention de Fred. Décédé d'une crise cardiaque alors que l'informaticien l'avait confié aux bons soins de Charlotte, maintenant que Delouette n'est plus, Fred peut enfin retrouver Louise. Mais alors, que faire de Charlotte ? Les deux femmes connaissant la relation qu'elles entretiennent mutuellement avec Fred, elles s'accordent pour se le partager. Mais la routine s'installe...

Vous êtes perdus? Rassurez-vous, c'est pourtant simple à comprendre. Le casting de ce long-métrage signé Gérard Pirès auquel on doit notamment Fantasia chez les Ploucs en 1971, L'Entourloupe en 1980, Taxi en 1998 ou encore Double Zéro en 2004 (le lecteur constatera d'ailleurs la lente dégradation d'une filmographie glissant vers une pente dangereusement glissante..) est lui-même très étonnant. Outre Jean-Louis Trintignant, Lea Massari, Mireille Darc et Bernadette Lafont, on retrouve parmi les interprètes plus ou moins impliqués, Claude Piéplu (qui incarne le supérieur de Fred), Bernard Fresson (dans le rôle de Delouette), mais aussi quelques figurants, telle la regrettée Anémone qui nous a quitté récemment, ou encore Michel Blanc ainsi que Coluche.

Même si l'outil que met le réalisateur entre les mains de son héros (la calculatrice programmable à cartes magnétiques HP65, un modèle authentique) se révèle un détail pratiquement insignifiant de nos jours, à l'époque, il permet au long-métrage de revêtir un aspect visionnaire puisque de nos jours, les ordinateurs ont pris une place conséquentes dans la vie de tous les jours. Sauf qu'en la matière, et derrière ses allures de comédie pas toujours drôle malheureusement, L'Ordinateur des Pompes Funèbres prend des allures de dystopie vaguement cynique qui accuse son âge. Pas vraiment réputé pour son art de la mise en scène, Gérard Pirès adaptait là le roman Probability Factor de l'écrivain américain Walter Kempley qui sortit chez nous dans la collection Série noire de l'éditeur Gallimard en 1973 sous le même titre que le long-métrage du cinéaste français. Au final, le spectateur se retrouve devant un drôle d'objet filmique pourtant parfaitement identifiable. A ranger aux côtés d'un autre O.F.N.I sorti la même année en France: Le Graphique de Boscop de Sotha et Georges Dumoulin...

mardi 21 mai 2019

Gräns de Ali Abbasi (2018) - ★★★★★★★☆☆☆



Issu de la mythologie nordique, le troll est une créature légendaire dont le cinéaste iranien Ali Abbasi ne s'est pas contenté de s'inspirer afin d'en adapter la forme la plus couramment usitée en littérature ou sur grand écran mais en prélevant quelques-une de ses caractéristiques afin d'en faire le héros de son deuxième long-métrage après Shelley en 2016. Présenté à Cannes où il a reçu le prix ''Un Certain Regard'' lors du festival en 2018, Gräns est une œuvre troublante. D'origine suédoise, il s'agit de l'adaptation de la nouvelle éponyme de l'écrivain suédois John Ajvide Lindqvist dont on connaissait déjà le brillant Låt den rätte komma in adapté par deux fois au cinéma, d'abord sous le titre Morse en 2008 par le cinéaste Tomas Alfredson et Laisse-Moi Entrer deux ans plus tard par le réalisateur américain Matt Reeves. Il n'est donc pas étonnant de retrouver une thématique similaire à travers l'histoire de Tina, une douanière travaillant dans la zone de débarquement d'un aéroport, et au flair infaillible. Capable de sentir les substances illicites tout comme la peur, la jeune femme se révèle d'une efficacité redoutable. Un jour, elle croise sur son lieu de travail le voyageur Vore. Un individu aussi curieux que Tina peut l'être et qu'elle reverra très prochainement. Vivant auprès de Roland, véritable parasite, Tina propose à Vore de lui louer une cabane dans les bois. Ces deux là deviennent très rapidement proches mais Tina sent bien que Vore lui cache quelque chose. C'est à l'aide de son intuition qu'elle va tenter de découvrir quoi...

Pour son second long-métrage, le cinéaste Ali Abbasi peut se vanter d'avoir réalisé une œuvre qui ne ressemble à aucune autre si ce n'est le Morse de Tomas Alfredson dont la thématique se rapproche le plus. Entre laideur physique des personnages et beauté du cadre forestier, le cinéaste iranien signe un long-métrage âpre, fascinant, et même parfois, inconfortable. Le genre de film difficile à cataloguer et qui mérite forcément une deuxième vision avant que le spectateur ne pose un avis définitif qui pourrait s'avérer dans certains cas, rédhibitoire. Car il faut dire que Gräns sort très largement du cadre des genres qu'il exploite. Ici, le thriller le mêle au fantastique. La fantasy au drame, et l'horreur psychologique au fait divers le plus sordide.

Qui donc est le vrai monstre de cette histoire ? Celui que l'on accuse d'avoir commis des pratiques pédophiles après qu'aient été découvertes des vidéos qu'il a lui-même filmées ? Ou bien s'agit-il de cet énigmatique locataire qui non content d'arborer un visage hautement disgracieux trouve logique d'enlever des bébés humains puisque ceux de sa propre ''espèce'' furent eux-mêmes les victimes d'actes abominables perpétrés par l'homme ?
Gräns trompe la perception du spectateur, le réalisateur prenant sans cesse un malin plaisir à redistribuer les cartes. Qui est bon, et qui est mauvais ? Quelle part de vérité doit-on accorder à Vore. Où se situe la part d'humanité, et celle de la monstruosité ? D'ailleurs, de troll est-il au fond réellement question ou bien s'agit-il d'une question de génétique mal accordée ? Ali Abbasi n'est apparemment pas là pour répondre à toutes les questions que le spectateur pourrait éventuellement se poser. En attendant, Eva Melander et Eero Milonoff incarnent un duo de monstres fascinants, entre humains, trolls, loups... garous... que sais-je... une œuvre atypique en tout cas, sauvage également, qui ne laissera personne indifférent, qu'on rejette en bloc la forme ou que le fond captive son auditoire... Intriguant !

lundi 20 mai 2019

La Personne aux deux Personnes de Nicolas Charlet et Bruno Lavaine (2008) - ★★★★★★★☆☆☆



Voilà bien une œuvre totalement déconcertante. Chef-d’œuvre absolu de l'absurde ou nanar intersidéral, le public n'a plus qu'à faire son choix... difficile... à assumer si on lui prête des qualités mais un peu trop facile si on l'enterre sans même y avoir réfléchi un seul instant. Réalisé par le duo Nicolas et Bruno (Nicolas Charlet et Bruno Lavaine). Deux cinéastes aux visions atypiques qui n'ont pas choisi de donner dans la comédie classique. Résultat : rejet d'une partie du public et de la presse. Sorti l'année suivant un autre OFNI, Steak de Quentin Dupieux, La Personne aux deux Personnes est un hommage à l'excellente émission culte Message à caractère informatif diffusée sur Canal+ en 1998 et dont le principe était de détourner de vieux films d'entreprise sur un ton humoristique. Et devinez quoi : les auteurs en étaient déjà le duo formé par Nicolas Charlet et Bruno Lavaine. C'est donc dans ce même esprit que les deux hommes revenaient en 2008, soit dix ans tout rond après leur passage à la télévision, avec cette comédie on ne peut plus étonnante puisque ses deux principaux interprètes n'en forment en réalité qu'un seul...

Daniel Auteuil et Alain Chabat se retrouvent effectivement dans le même corps, celui du premier, après que le second, en chanteur démodé, l'ait percuté de plein fouet avec sa voiture. Gilles Gabriel, dont tout le monde a oublié sa fugitive carrière de chanteur bien qu'il produise un album tous les six ans décède des suites de cet accident mais son esprit est projeté dans le corps de Jean-Claude Ranu, insignifiant comptable de la COGIP, entreprise fictive créée à l'origine à l'attention de l'émission Message à caractère informatif à une différence près : les deux réalisateurs n'usent désormais quasiment plus de documents d'archives (en dehors de quelques rares séquences) mais plongent leurs deux héros dans une reconstitution assez fidèle de leur univers morne, individualiste et démodé. Le pauvre Daniel Auteuil qui dans la peau de Jean-Claude Ranu incarne l'un des employés de la COGIP en fait directement les frais : coiffé et vêtu de la manière la plus ringarde qui soit, son personnage évolue dans un univers trop grand pour lui. Comparé à ceux qui travaillent à ses côtés, il paraît effacé, remisé qu'il est dans un local transformé à l'occasion en bureau. L'arrivée de Gilles Gabriel/Alain Chabat est pour lui l'occasion de changer la donne, se rendre indispensable pour l'entreprise au risque d'être ridicule...

Pourtant, on ne sait pour quelle raison, la méthode fonctionne. Et c'est là, en partie, que l’œuvre de Nicolas Charlet et Bruno Lavaine se permet un écart avec la plupart des comédies. Faire bénéficier à leurs personnages d'une aura absolument peu crédible dans un contexte professionnel moribond. La Personne aux deux Personnes est amusant, et même parfois très drôle, mais peut se révéler aussi de temps en temps déprimant. Voire dérangeant, Daniel Auteuil incarnant un individu absolument ringard, Alain Chabat demeurant en outre un chanteur lui aussi obsolète. C'est pourtant ce duo d'une autre époque, totalement largué qui va se battre pour conquérir le cœur d'une Marina Foïs dans la peau d'une supérieure hiérarchique revêche que l'actrice tient d'une manière très particulière. Je le répète, La Personne aux deux Personnes est une œuvre atypique. Bizarre, surprenante, drôle et cafardeuse, tout à fait dans l'esprit des travaux passés de ses auteurs. A voir !

dimanche 19 mai 2019

Jeu de Massacre d'Alain Jessua (1967) - ★★★★★★★☆☆☆



Curieux que ce second long-métrage d'Alain Jessua qui ne déroge finalement pas ici à l'habituel spectacle hors du commun auquel il nous habituera le long de sa carrière constituée de neuf longs-métrages seulement. La rencontre entre un mythomane immature et un couple formé d'un écrivain et de son épouse dessinatrice. Deux époux qui ont bien du mal à boucler les fins de mois et qui acceptent contre mauvaise fortune bon cœur de venir s'installer dans la luxueuse demeure suisse de ce menteur patenté qui s'est inventé une histoire personnelle intégralement liée aux ouvrages publiés par l'auteur de bandes-dessinées dont il est un adorateur.
D'où cette exploration psychédélique et un brin foutraque. Cette déviance psychologique qui réunit des êtres qui chacun à leur manière explorent la fiction pour s'en faire une réalité propre. Car si la mythomanie est pour le personnage de Bob Neuman, incarné par l'acteur français Michel Duchaussoy, une profession de foi, idéalisant ainsi sa propre (et morne) existence de pseudo-châtelain, le personnage que crée Pierre Meyrand (Jean-Pierre Cassel) est-lui même issu d'un imaginaire. Bref, d'un mensonge colporté par l'esprit d'un artiste qui pour vivre s'invente des personnages, des récits fictifs.

Le mensonge, chez les Meyrand, est une nécessité. Celle de pouvoir manger, payer son loyer, ses impôts, bref, vivre dignement. Chez Bob, la raison en est tout autre. Gosse de riche, le canular que représente son existence est la représentation intellectuelle d'un naufrage affectif. Pas d'amis et pour seules amantes les prostituées d'un bordel, le mythomane va se référer à l'artiste pour se construire une vie à venir qui lui échappera ainsi qu'à ses nouveaux amis, Bob et Jacqueline. La réalité prend peu à peu ses jambes à son cou, laissant place nette à un univers virtuel que le fragile Bob va tenter de faire prendre forme dans le monde réel. En réalisant son œuvre de manière psychédélique (tant dans la bande originale que dans sa manière de filmer) le cinéaste Alain Jessua l'enrobe, s'il était utile d'en arriver là, d'une chape de plomb surréaliste qui appuie davantage encore l'aspect improbable du récit. Pour ce faire, il va jusqu'à créer ce personnage de papier et de crayons de couleur, Le tueur de Neuchâtel. Substantielle moelle et représentation concrète des dérives allégoriques dont sont responsables chacun des personnages et qui, tous ensemble, l'alimentent au point de lui faire prendre forme dans la vie réelle sous la forme d'un Bob ne sachant plus vraiment distinguer le vrai du faux.
Comédie noire sur fond de solitude et de manipulation (la mère de Bob étant elle-même prête à financer très chèrement les ambitions de son fils chéri), Jeu de Massacre est une œuvre réjouissante qui derrière son message, souffle un vent pop décalé. Les planches psychédéliques sont l'oeuvre du dessinateur bruxellois Guy Peellaert. Le jury du festival de Cannes en 1967 ayant reconnu les qualités du film d'Alin Jessua, Jeu de Massacre y reçu le prix du meilleur scénario original cette année là...

samedi 18 mai 2019

Prête-Moi ta Main d'Eric Lartigau (2006) - ★★★★★★★☆☆☆



Acteur, puis réalisateur, le cinéaste français Eric Lartigau a véritablement débuté sa carrière sur grand écran en 2003 avec le film Mais qui a tué Pamela Rose ?, adaptation de la série humoristique éponyme créée par le duo de comiques Kad et Olivier (Kad Merad et Olivier Baroux). Il a ensuite enchaîné avec Un Ticket pour l'Espace, toujours écrit et interprété par le duo avant de connaître huit ans plus tard le succès avec La Famille Bélier. Mais avant cela, il a dirigé en 2006 Charlotte Gainsbourg (fille de l'immense Serge) et Alain Chabat (ancien membre des Nuls) dans la comédie romantique Prête-Moi ta Main, qui obtient le très intéressant score de plus de trois millions six-cent milles entrées sur grand écran, ce qui en fait un beau succès cette année là. Il faut dire que le duo, entouré d'un casting en or est absolument délicieux.
Alain Chabat incarne Luis Costa, profession : ''Nez''. Un concepteur de parfum donc que la famille exclusivement constituée de femmes aimerait bien voir enfin se marier. Car à quarante-trois ans, cet éternel célibataire se complaît dans sa situation tandis que ses sœurs se chargent de laver son linge et de lui passer tous ses caprices. Mais alors qu'un vent de révolte gronde et que ses sœurs décident de le prendre en charge afin de lui trouver sa future femme, c'est auprès d'Emma, sœur de son ami et collègue Pierre-Yves que Luis va trouver une solution pour se débarrasser des contraintes que lui imposent ses sœurs et sa mère Geneviève (excellente Bernadette Lafont).

Emma, c'est Charlotte Gainsbourg. Célibataire elle aussi. Séparée de son ancien compagnon et logée chez son radin de frère Pierre-Yves (Grégoire Oestermann), elle attend d'obtenir le droit d'adopter le petit Sandro, un tout jeune enfant originaire du Brésil. Elle signe un contrat en compagnie de Luis qui stipule qu'elle accepte de se faire passer pour sa compagne. Le stratagème est simple : Luis la présente à sa famille, doit l'épouser deux mois plus tard, et une fois à la marie, il devra faire sans Emma qui refusera au dernier moment de l'épouser. L'objectif est simple. Contraindre ensuite sa mère et ses sœurs de laisser tomber l'idée de lui trouver sa future épouse. Mais bien entendu, rien ou presque ne va se dérouler comme prévu...

Prête-Moi ta Main est vraiment une très bonne surprise. Au milieu d'un casting irréprochable, Alain Chabat s'amuse comme au temps des Nuls. Affublé d'une perruque, le voilà en parfait sosie de Robert Smith (le chanteur de The Cure) du temps de sa jeunesse, ou bien en adepte du fétichisme et du sadomasochisme en compagnie d'une Charlotte Gainsbourg troublante, douce, mais au caractère également bien trempé. Ces deux là forment un couple à l'écran plein de charme, drôle, mais pas seulement. En effet, le film d' Eric Lartigau sait se faire émouvant comme il faut. Tendre et touchant à certains endroits. Comme lorsqu'Emma éprouve des difficultés à convaincre une certaine Francine Lebrun (Tatiana Goussef) en charge de son dossier d'adoption de signer les papiers l'autorisant à partir récupérer le petit Sandro au Brésil pour le ramener chez elle, en France. Touchants également les rapports entre nos deux héros qui après nous avoir fait subir d'authentiques instants de drôlerie partagent ensuite quelque moments d'intimité révélant leur véritables sentiments. Un bel objet filmique que ce Prête-Moi ta Main...

vendredi 17 mai 2019

Toutes les Couleurs du Bis Numéro 11 Spécial Herschell Gordon Lewis - ''L'Inventeur du Gore''



Si le fan est anglophone, tout va bien pour lui puisque les ouvrages consacrés au ''Pape du Gore'' sont légion. Par contre, il faudra être en mesure de supporter un prix à l'achat souvent rédhibitoire à moins de scrupuleusement fouiller la toile ou les bouquinistes spécialisés pour y dénicher la perle rare moyennant une poignée d'euros (en espérant que l'ouvrage n'aie pas servi à rassembler des épluchures de pommes de terre. Pour les plus frileux donc, il faudra revoir le prix à la hausse au format ''neuf'', certains ouvrages se négociant jusqu'à plusieurs centaines d'euros ! En France, les spécialistes semblent frileux, et pourtant, le mois dernier, en avril 2019, est sorti ce que l'on peut désormais considérer comme la Bible consacrée à Herschell Gordon Lewis sorti dans l'hexagone. Toutes les Couleurs du Bis Numéro 11 Spécial Herschell Gordon Lewis - ''L'Inventeur du Gore'' est mon premier exemplaire de ce fanzine écrit et mis en page par un seul homme : Stéphane Erbisti. Un travail de titan et une connaissance exemplaire qui permettent de découvrir l'auteur des cultissimes Blood Feast (1963) et Two Thousand Maniacs (1964), mais pas seulement...

Les connaissances concernant le cinéaste américain Herschell Gordon Lewis peuvent revêtir plusieurs aspects. Soit l'on connaît uniquement ces deux exemples qui durant de nombreuses années furent les seuls disponibles chez nous, soit l'on est donc anglophone ET passionné par le Gore et cet aspect de la filmographie de l'auteur du tout aussi culte Color Me Blood Red n'est plus un secret, Herschell Gordon Lewis ne s'étant pas contenté de ces quelques exemples. Ce numéro de Toutes les Couleurs du Bis est l'occasion d'en découvrir davantage sur un cinéaste qui ne s'est pas contenté d’œuvrer dans le gore mais également, comme l'exprime très clairement Stéphane, dans des genres tels que le ''Nudies'' (genre qu'il partage avec un autre grand monsieur du cinéma d'exploitation de l'époque, un certain... Russ Meyer), le ''Roughies'' (merci Stéphane de m'avoir appris l'existence de ce sous-genre que je ne connaissais pas), et même la comédie pour enfants !

Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur Herschell Gordon Lewis sans jamais oser le demander se trouve désormais dans ce numéro 11. A dire vrai, un très bel ouvrage. Au format poche, ce qui rendra vos déplacements beaucoup plus aisés (perso, j'adore lire dans les trains). Couverture satinée au design très ''sixties'' qui plaira aux amateurs. Cent-huit pages entièrement consacrées au créateur, à l'inventeur, au papa, et même au Pape du Gore. Le sommaire est vertigineux. On commence par une biographie de l'artiste, pour un temps collaborateur du producteur et ami David F. Friedman. S'ensuit une interview du réalisateur effectuée en 2012 pour le site ''Horreur.com''. Une série de questions dont l'auteur n'est autre que... Stéphane lui-même. La classe, quoi ! Mais le gros morceau de ce numéro 11 se situe bien entendu à travers ce qui suit : La chronique complète des œuvres du cinéaste, excepté The Prime Time, mais Stéphane nous en donne une raison toute logique. L'un des principaux intérêts, outre le texte accompagnant chaque film, se situe dans la reproduction des affiches de chacun d'entre eux. Ce qui donne à cet exemplaire de Toutes les Couleurs du Bis consacré à Herschell Gordon Lewis un cachet esthétique très particulier. On a parfois le réel sentiment de tenir entre nos mains un ouvrage écrit il y a un demi-siècle mais avec ce qu'il faut de pertinences actuelles...

Edité par l'excellent site ''Sin'Art'', Toutes les Couleurs du Bis Numéro 11 est un très bel ouvrage comme je le disais plus haut. Un fanzine dont le statut n'a absolument pas à rougir face aux grandes enseignes largement plus faciles à trouver en librairie. Stéphane Erbisti a accompli là, un travail d'orfèvre qui, pour les retardataires est heureusement encore disponible sur ''Sin'Art''. Un bon conseil, dépêchez-vous de l'acquérir car les ouvrages consacrés au Pape du Gore sont suffisamment rares pour pouvoir se permettre de passer à côté... Perso, je m'y replonge à nouveau...

The Food of the Gods de Bert I. Gordon (1976) - ★★★★★☆☆☆☆☆



On aurait pu croire le cinéaste Bert I. Gordon définitivement perdu dans les affres du navet depuis la sortie de son infâme Village of the Giants, et pourtant, l'auteur du réussi Earth vs. The Spider en 1958 semblait encore capable de soubresauts. Pour ne rien changer à l'affaire et aborder une énième fois le thème de l'animal géant, l'américain s'inspirait une seconde fois de l'ouvrage de l'écrivain H. G. Wells, La Nourriture des dieux après s'en être très librement inspiré pour Village of the Giants, détail que j'avais oublié de préciser dans l'article qui lui était consacré. En même temps, on s'en fiche un peu, non ? Vu que le film était vraiment merdique ! The Food of the Gods (moins poétiquement traduit chez nous sous le titre Soudain... les monstres) demeure probablement le film le plus connu de son auteur. Du moins, l'un de ceux qui se laissent encore regarder sans une totale indifférence (ce qui n'est pas le cas du putride, je vous laisse deviner... Village of the Giants).

Pour fêter dignement cette nouvelle adaptation du roman de l'écrivain britannique, Bert I. Gordon convie quelques visages bien connus du cinéma américain et britannique à participer à ce projet pas tout à fait définitif ni testamentaire puisque l'année suivante, il en remettra une couche supplémentaire avec Empire of the Ants. Ne vous attendez pas à y voir circuler des méga-stars, plutôt des petites vedettes de la télévision et du cinéma. Ida Lupino qui à deux occasions fut l'un des personnages secondaires de deux épisodes de la fameuse série policière Columbo (Accident en 1972 et Le Chant du Cygne deux ans plus tard). La britannique Pamela Franklin qui interpréta notamment la voyante hystérique de The Legend of Hell House de John Hough (elle joua également dans Necromancy, déjà réalisé par Bert I. Gordon en 1972). Et puis, dans le rôle principal, l'acteur américain Marjoe Gortner dont le visage ne nous est pas inconnu puisqu'il incarna un sinistre individu dans Earthquake de Mark Robson en 1974 et tint le rôle de Akton dans Scontri Stellari oltre la Terza Dimensione du cinéaste italien Luigi Cozzi.

Fauché comme les blés, The Food of the Gods n'est cependant pas le gros navet qu'il aurait pu devenir, surtout à la suite de l'immonde Village of the Giants. Preuve que le cinéaste jouait au yoyo d'un point de vue qualitatif et qu'après un très mauvais film, il était capable de se ressaisir et signer une honorable série B. Contrairement à Village of the Giants dont l'intrigue faisait suite à l'invention d''un petit génie de la chimie, ici, la substance ingérée, au hasard par des guêpes, des poulets et plus encore, des rats, semble provenir d'une origine inconnue et semble même pourquoi pas être directement offert par Dame Nature. Maquettes, incrustations de créatures terrestres dont la taille est revue à la hausse, The Food of the Gods ne lésine pas sur les effets-spéciaux même si dans l'ensemble, on sent bien qu'aucune amélioration n'a été apportée depuis le Earth vs. The Spider de 1958. Assez pesant durant la première moitié (comprendre, chiant), Bert I. Gordon s'en donne à cœur joie lors de la seconde au centre de laquelle les rats géants envahissent littéralement l'écran. Si l'incrustation des rats n'est pas la plus ridicule, celle des guêpes en revanche, est pitoyable. La couleur n'apporte absolument rien au genre, et même, bien au contraire, elle exhibe très clairement les problèmes de raccord entre les décors, les personnages et les créatures qu'ils sont censés combattre. Si The Food of the Gods est le film le plus connu de son auteur, il n'en est pas pour autant le meilleur. Dans l'ensemble, un film relativement décevant...

jeudi 16 mai 2019

Earth vs. The Spider de Bert I. Gordon (1958) - ★★★★★★★☆☆☆



Après deux articles consacrés à deux œuvres plutôt médiocres du cinéaste américain Bert I. Gordon, nous pouvions craindre que la suite soit du même tonneau mais curieusement, alors que Earth vs. The Spider sortait un an après l'inintéressant The Amazing Colossal Man de ce même Bert I. Gordon, et deux ans après l'excellent Tarantula ! de Jack Arnold, le cinéaste semble avoir mis toutes ses cartouches dans ce long-métrage qui une fois encore met en scène une créature aux stupéfiantes dimensions. Tout comme dans le film de Jack Arnold, Bert I. Gordon nous conte le récit d'une gigantesque araignée s'attaquant aux habitants d'une petite localité des États-Unis. Passionné de science-fiction et d'épouvante, particulièrement attiré par le gigantisme, le cinéaste nous offrait en cette année 1957 parmi ses plus brillantes réussites. Il faut dire qu'à côté de certaines de ses productions passées et à venir, Earth vs. The Spider avait des chances de faire mieux en matière de scénario, de mise en scène, d'interprétation et d'effets-spéciaux...
Tant de long-métrages furent produits à l'époque que pour attirer le public, certains s'en donnaient à cœur joie en matière de surenchère. Si les différentes affiches du film n'abusèrent pas vraiment du talent des dessinateurs employés à retranscrire le contenu de l’œuvre en une seule image, le choix abusif du titre remet en question l'honnêteté du réalisateur. Écrit par László Görög et George Worthing Yates le scénario de Earth vs. The Spider est relativement éloigné de l'intitulé (à savoir que le film est également sorti sous le titre beaucoup plus sobre de The Spider) puisque le titre laisse très nettement entendre un affrontement au niveau mondial alors que le film se contente de nous relater des événements ne dépassant pas les frontières d'une petite ville américaine...

Deux lieux servent de cadre à l'intrigue. Une grotte, dans laquelle se tapit une immense araignée et à l’intérieur de laquelle vont être découverts les ossements de plusieurs corps humains, ainsi qu'une université où sera entreposé le cadavre de la bête supposée avoir été tuée par les autorités lors d'un affrontement situé à l'intérieur même de son repère. Earth vs. The Spider ne distingue pas de véritable héros à proprement parler. Plutôt divers personnages se succédant.D'un couple d'étudiants retournés à l'intérieur de la grotte afin de mettre la main sur un bijou laissé tombé par l'un d'eux lors de son précédent passage, en passant par un certain Kingman, le professeur que les deux étudiants vont tenter de convaincre de l'existence de l'araignée, jusqu'au ventripotent shérif Cagle, lequel ne prend pas leur histoire très au sérieux...

D'une durée relativement courte (soixante-treize minutes, pas une de plus), Earth vs. The Spider étonne pas l'engagement de son auteur qui après le mauvais The Amazing Colossal Man et bien avant le TRES mauvais Village of the Giants, laissait craindre le pire. Déjà, le cinéaste ose aller là où Jack Arnold avait choisi de mettre un terme aux aventures de l'immense Tarantula ! Alors que chez ce dernier, la monstrueuse créature s'arrêtait aux portes de la ville, Bert I. Gordon s'intéresse au contraire aux conséquences d'une attaque au beau milieu d'une cité investie par des habitants terrorisés. Le résultat à l'écran ne se fait pas attendre. La séquences reste pour l'époque, particulièrement bluffante. Contrairement aux pitoyables effets-spéciaux de The Amazing Colossal Man, ceux de Earth vs. The Spider paraissent remarquables avec une intégration de l'araignée parfaitement crédible (je rappelle que nous sommes en 1958). Passionnante de bout en bout, nous y découvrons une énorme tarentule passer d'une rue à l'autre parmi des artères envahies de voitures et d'habitants affolés. Sans doute LA scène-clé du film. Ce qui n'empêche pas au reste du long-métrage d'être également d'une excellente tenue, à l'image du dernier tiers lors duquel les autorités tentent de venir en aide aux deux adolescents piégés à l'intérieur de la grotte avec l'araignée. Belle mise en scène, interprétation plus que convenable et effets-spéciaux convaincants, Earth vs. The Spider est une excellente surprise. Peut-être légèrement en deçà du Tarantula ! de Jack Arnold, mais tout de même très réussi... A noter qu'un remake fut réalisé en 2001 aux États-Unis sous la forme d'un téléfilm...

mercredi 15 mai 2019

The Amazing Colossal Man de Bert I. Gordon (1957) - ★★★★★☆☆☆☆☆



Deuxième long-métrage abordé dans ce cycle consacré au cinéaste américain Bert I. Gordon (mais quatrième si l'on compte les deux que j'avais déjà évoqué il y a un certain temps), The Amazing Colossal Man date de 1957. Filmé en noir et blanc, il invoque la peur du nucléaire à travers l'utilisation par l'armée américaine d'une bombe au plutonium. Dans la science-fiction américaine des années cinquante et soixante, trois thèmes étaient au centre des préoccupations : la course à l'armement, la menace communiste et comme dans le cas présent, le nucléaire. Bert I. Gordon aborde pour la troisième fois le thème des créatures disproportionnées après Beginning of the End et ses sauterelles géantes et The Cyclops et sa faune tout aussi démesurée. Plus proche du premier que du second dans lequel une nouvelle planète abritant des créatures monstrueusement grandes apparaissait dans notre système solaire, The Amazing Colossal Man débute comme bon nombre de long-métrages de science-fiction de l'époque. L'armée américaine ayant mis au point un armement à base de plutonium, ses dirigeants s'empressent de tester une nouvelle bombe. Mais alors qu'elle tarde à exploser, un avion de tourisme passe au dessus du terrain et s'écrase au sol. C'est là qu'intervient le lieutenant-colonel Glenn Manning (l'acteur Glenn Langan). Persuadé de pouvoir sauver la vie du pilote avant que la bombe n'explose, il fonce tout droit sur le lieu du crash. Malheureusement pour lui, cette dernière finit par éclater, le brûlant au troisième degré sur quatre-vingt quinze pour cent de son corps. Vivant mais en piteux état, les médecins estiment que Glenn Manning a peu de chance de survivre à ses blessures. Pourtant, miraculeusement, ses brûlures finissent par guérir. Et non seulement le lieutenant-colonel se réveille du coma dans lequel il était plongé, mais par un incroyable processus, le voilà qui grandit jusqu'à atteindre dix fois sa taille initiale...

La création de The Amazing Colossal Man fut un peu compliquée. A l'origine, et désirant surfer sur le succès du chef-d’œuvre de Jack Arnold sortit quelques mois auparavant (The Incredible Shrinking Man), Jim Nicholson voulait adapter le roman The Nth Man de l'écrivain Homer Eon Flint dont il possédait les droits. Nicholson pense tout de suite au cinéaste Roger Corman pour réaliser l'adaptation de ce récit au centre duquel se trouve un personnage haut de dix mètres. Charles B. Griffith est quant à lui embauché afin de s'occuper de la réécriture du scénario. Mais alors que le résultat est plus proche de la comédie que du récit à l'origine de cette adaptation, Roger Corman abandonne le projet et c'est finalement Bert I. Gordon qui en hérite. Reprennant avec Charles B. Griffith le scénario, ce dernier quitte finalement le projet dès le lendemain et c'est Mark Hanna qui est alors chargé d'apporter des modifications...

Plutôt bien reçu lors de sa sortie, The Amazing Colossal Man a, depuis, malheureusement très mal vieilli. Si toute la première partie précédent la fuite du lieutenant-colonel de l’hôpital demeure intéressante, certains aspects de l'intrigue pêchent par leur manque de tenue. Une fois encore, on a droit à l'habituelle intervention de l'armée, puis de la science. Mais là où le bât blesse, c'est au niveau des effets-spéciaux. L'incrustation de ce ''fantastique homme colosse'' est totalement ratée. Quand on sait les possibilités offertes en la matière à l'époque (il suffit de se faire une piqûre de rappel des quelques long-métrages de Jack Arnold abordant le même type d'intrigue pour s'en convaincre), voir le militaire de dix mètres de haut déambuler en ville ou dans le désert de Mojave (aux abords de Las Vegas) fait peine à voir et décrédibilise cette tentative de réactualisation d'un sujet qui a déjà vu le fruit de travaux remarquables (une fois de plus, Jack Arnold) sortir en salle bien avant lui. Si l'intérêt demeure quelque peu, l'ensemble est terriblement laid. Une œuvre mineure...

mardi 14 mai 2019

Village of the Giants de Bert I. Gordon (1965) - ★★★☆☆☆☆☆☆☆



A la suite du cycle consacré au cinéaste américain Jack Arnold, j'ai choisi d'aborder la carrière d'une autre pointure des années 50/60 en la personne de Bert I. Gordon, lui même originaire des États-Unis. C'est à travers cinq de ses long-métrages que je vous propose de découvrir ce très prolifique réalisateur qui du milieu des années cinquante et jusque dans les années soixante-dix a tourné quelques emblématiques productions horrifiques. A travers les cinq articles qui vont suivre, je vous propose de faire la connaissance d'un homme à la force et aux dimensions... colossales, de sauterelles géantes, d'une tarentule gigantesque (tiens, tiens, ça me rappelle quelque chose...), et de rats aux proportions inquiétantes. Mais pour commencer, direction Hainesville, cité fictive des États-Unis où vont se produire de bien curieux événements.C'est là que huit adolescents vont semer la panique après avoir ingéré une potion inventée par un petit génie et dont les propriétés permettent à ceux qui l'absorbent de croître de manière inquiétante.
Réalisé en 1965, Village of the Giants fait partie de ces long-métrages au centre desquels le réalisateur Bert I. Gordon place des individus ou des créatures dotés de stupéfiantes dimensions. Dans le cas présent, une bande de jeunes voyous qui voient là l'opportunité de défier l'autorité de par leur taille, impressionnante, et de par leur forcé également.

Village of the Giants est, dans la grande histoire de la science-fiction sur grand écran une œuvre mineure. Un film à l'attention des adolescents d'alors, sevrés aux drive-in. D'un budget qui s'élève à sept-cent cinquante mille dollars, le film de Bert I. Gordon a sans doute pour prétention de marcher sur les traces d’œuvres telles que Tarantula ! de Jack Arnold ou de toute autre production mettant en scène de grosses bestioles (fond de commerce de Bert L. Gordon depuis de nombreuses années). Mais dans cette grande tradition, Village of the Giants, lui, demeure tout petit, ridicule, insignifiant. Du pseudo Russ Meyer sans les grosses poitrines, aussi fauché que mal fichu. Une interprétation au raz des pâquerettes dont les couleurs, dégueulasses, ''agressives'', saturées font regretter la glorieuse époque du noir et blanc dans lequel le cinéaste aurait dû persévérer. Village of the Giants est ponctué de nombreuses chansons, entre pop psychédélique et chansons d'amour à la sauce guimauve. Les adultes y sont pour une bonne part bannis des images, Bert I. Gordon se contentant de placer ses insupportables adolescents au centre d'intrigues dignes de notre télé-réalité des temps modernes : bagarres entre bandes, passages en discothèque, danses endiablées sur des airs interprétés par le groupe de pop-rock californien The Beau Brummels...

Après un avant goût nous permettant de retrouver l'acteur-réalisateur Ron Howard (le Richie Cunningham de la série Happy Days et le réalisateur, entre autres, de Cocoon, de Apollo 13 ou de Solo : A Star Wars Story en 2018) dans le rôle du petit génie ayant inventé une formule permettant d’accélérer la croissance de n'importe quel être vivant l'ayant ingérée, il faudra patienter jusqu'en milieu de métrage pour espérer voir avancer l'intrigue. D'ici là, Village of the Giant est d'une inutilité crasse. On s'ennuie à mourir et les quelques chansons qui tentent de maintenir un semblant d'intérêt n'ont pour but que de remplir les cases vides d'un scénario confondant d'ineptie. A vrai dire, le cinéaste parvient à une seule chose : agacer son public dès lors que ses petites frappes atteintes d'immunité (pour cause de croissance anormale) s'affirment comme les maître du coin, forçant les autorités et les habitants de Hainesville qui n'ont pas bénéficié des avantages de la potion d'assouvir tous leurs désirs. A part ça, l'intrigue de Village of the Giants a autant d'intérêt qu'une émission axant son sujet sur l'étude du plancton !
Je ne reviendrai même pas sur les effets-spéciaux, indignes de ce qui pouvait être envisagé à l'époque. Au final, le film de Bert I. Gordon est un navet dont le seul intérêt et d'y retrouver, outre Ron Howard, l'acteur Beau Bridges au début de sa carrière... enfin, pas tout à fait, mais presque...
Related Posts Plugin for WordPress, Blogger...