Bienvenue sur Cinémart. Ici, vous trouverez des articles consacrés au cinéma et rien qu'au cinéma. Il y en a pour tous les goûts. N'hésitez pas à faire des remarques positives ou non car je cherche sans cesse à améliorer le blog pour votre confort visuel. A bientôt...

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jeudi 28 février 2019

Gaspard va au Mariage d'Antony Cordier (2017) - ★★★★★★★★☆☆





A l'origine, le synopsis de Gaspard va au Mariage a tout du long-métrage qui risque de nous emmener vers un même chemin que, au hasard, Un Air de Famille de Cédric Klapisch, Cuisine et Dépendances de Philippe muyl, Le Sens de la Fête d'Eric Toledano et Olivier Nakache ou encore Une Petite Zone de Turbulences d'Alfred Lot pour ne citer que les premiers qui m'inspirent. Pourtant, pas grand-chose à voir entre ces quelques exemples et le troisième long-métrage d'Antony Cordier qui après Douches Froides en 2005 et Happy Few en 2010 signe donc en 2017 ce Gaspard va au Mariage au titre, pas franchement séduisant. Si certains considèrent sans doute davantage à tort qu'à raison le film d'Antony Cordier comme une 'inspiration trop évidente du cinéma indépendant américain', il faudra sans doute plutôt considérer Gaspard va au Mariage comme étant une œuvre plus proche de certains longs-métrages d'Outre-Manche que d'Outre-Atlantique.

Mais qui est donc ce Gaspard qui porte de son seul prénom, le titre du film à lui seul ? Un jeune homme de vingt-cinq ans qui n'a pas revu les siens depuis un certain nombre d'années, mais qui après sa rencontre avec Laura, une jeune femme croisée dans des circonstances particulières, va se rendre accompagnée de l'inconnue au futur mariage de son père. Alors qu'elle avait prévu de monter jusqu'à Biarritz en train, Laura accepte finalement le curieux marché que lui propose Gaspard : contre cinquante euros journaliers, elle accepte de se faire passer pour la petite amie du jeune homme. Allez savoir pourquoi d'ailleurs, puisque l'une des particularités du long-métrage d'Antony Cordier est de ne jamais aller là où on s'attend à le voir diriger ses personnages.

Gaspard va au Mariage, c'est la rencontre d'une famille pour le moins fantasque. Un père divorcé, propriétaire d'un zoo condamné à la fermeture, un frère qui déteste Gaspard pour avoir quitté les siens mais aussi pour lui avoir abandonné la responsabilité d'un poste au zoo pour lequel il n'estime pas être à sa place. Et puis, il y a Coline, la cadette, dont l'étrange attitude désarçonne de bout en bout. Au milieu de cette famille un brin déjantée, il y a Laura, donc, qui aura du mal à se faire accepter par la sœur de Gaspard (amoureuse de son propre frère), Peggy, future élue de Max, le père des trois enfants, et puis ce zoo aux diverses espèces d'animaux, et dont certains sont victimes d'attaques de la part de trois chiens rendus à la vie sauvage.

Gaspard va au Mariage est vraiment une excellente surprise. Et comme je le disais plus haut, qui sort des sentiers battus. Autour du talentueux Félix Moati, on retrouve l'impeccable casting formé autour de Lætitia Dosch, Christa Théret et Marina Foïs pour les interprètes féminines et Johan Heldenbergh, Guillaume Gouix ou encore Vincent Deniard pour les acteurs masculins. Entre drame et comédie, le film d'Antony Cordier réserve quelques séquences dont l'érotisme torride ne verse jamais dans l'étalage gratuit de corps entremêlés. Ici, tout passe par l'odorat. De l'intimité de Laura, jusqu'au désagréable parfum que dégage la fourrure que porte en permanence sur ses épaule la jeune Coline. Tourné en partie au parc zoologique du Reynou, le film d'Antony Cordier bénéficie en outre de décors superbes (la demeure familiale), ainsi que d'une photographie magnifique signée Nicolas Gaurin. On ne rit jamais à gorge déployée et l'on ne verse aucune larme. Pourtant, on sort de Gaspard va au Mariage avec le sentiment d'avoir assisté à un vrai bon spectacle. Déjanté, mais pas trop. Des personnages inattendus mais attachants. Un cadre inhabituel. De quoi nous changer des dizaines de clones qui sortent chaque année...

mardi 26 février 2019

Ils ne verront jamais le jour : The Texans de Sam Peckinpah



Le producteur canadien Albert S. Ruddy, connu pour avoir produit Le Parrain, la série Walker, Texas Ranger ou encore Million Dollar baby a exhumé il y a quelques années un scénario écrit de la main du cinéaste américain Sam Peckinpah, lequel a laissé derrière lui une filmographie peu importante (seize longs-métrages en vingt-quatre ans). La Horde Sauvage, Les Chiens de Paille, Guet-Apens ou encore Apportez-moi la Tête d'Alfredo Garcia, Croix de Fer, c'est lui. Des œuvres violentes, sans concessions. Le bonhomme touche à tout. Thriller, guerre, Western. C'est dans ce dernier registre que s'inscrit l'intrigue de The Texans.
Un scénario écrit par le maître en 1980. Un coup d'essai qui ne se transformera pas puisque le caractère autoritaire de Sam Peckinpah, sa passion pour la cocaïne et l'alcool ainsi que ses déboires avec les producteurs ne lui permettront pas de mener à bien son sujet.

A vrai dire, le scénario était à l'origine l’œuvre du cinéaste John Milius (Conan le Barbare) mais c'est grâce à l'impulsion du producteur Albert S. Ruddy que Sam Peckinpah accepte de le reprendre. Il écrit un pavé formé de deux-cent cinquante pages, mettant sa carrière en stand-by jusqu'en 1983, année de sortie de dernier film, le thriller, Osterman week-end. Si Sam Peckinpah prend autant de temps pour le réaliser, ça n'est pas simplement parce qu'il travail sur ce nouveau projet intitulé The Texans, mais bien parce que Le Convoi fut un four critique retentissant. Pourtant, à la revoir aujourd'hui, l’œuvre demeure de qualité, le public américain ne s'y étant pas trompé à l'époque puisque le film connut un beau succès malgré les critiques presse négatives.

Alors, pourquoi The Texans ne connut-il pas une adaptation au cinéma ? Pour la simple raison que le producteur Albert S. Ruddy estima que le genre Western était à l'époque (nous sommes en 1981) passé de mode. Sam Pekinpah n'aurait de toute manière pas pu le réaliser lui-même puisque après avoir tourné Osterman week-end en 1983, il mourrut l'année suivante des suites de ses excès d'alcool et de drogues...

dimanche 24 février 2019

Le Grand Bain de Gilles Lellouche (2018) - ★★★★★★★★☆☆




Un prix, un seul pour Le Grand Bain de Gilles Lellouche aux Césars. Alors, bien entendu, je n'ai pas vu le Shéhérazade de Jean-Bernard Marlin, le Jusqu'à la Garde de Xavier Legrand ou Les Frères Sisters de Jacques Audiard, mais à part ce dernier, la cérémonie des Césars semble s'être définitivement tournée vers une forme d’œuvre caritative mettant en avant les critiques sociales avant le divertissement. Entre un divorce qui se déroule dans des conditions délicates et la rencontre entre une jeune fille des quartiers populaires de Marseille et un ex-taulard de 17 ans, on aurait peut-être aimé que la divine comédie dramatique de Gilles Lelouche reparte avec davantage de statuettes que la seule offerte au savoureux Philippe Katerine (meilleur acteur dans un second rôle).
Les petits maux de chacun semblent avoir en effet beaucoup moins touché le jury. Des affres humaines qui touchent pourtant des millions d'âmes dans l'hexagone et plus encore de part le monde et à laquelle le réalisateur parfois sous-évalué (Narco est bien meilleur que certains l'affirment) Gilles Lellouche apporte une solution originale.

C'est dans le grand bain d'une piscine municipale que Bertrand, Laurent, Marcus, Simon, Thierry, Basile, Avanish, et plus tard John, vont retrouver le goût de vivre. Tous plus ou moins dépressifs ou en passe de le devenir, ils vont tous ensemble, sous l'impulsion de l'ancienne nageuse Delphine, former la première équipe de natation synchronisée masculine de France. Raillés par leurs collègues de travail respectifs, par certains de leurs amis, et même par l'équipe de water-polo masculine, les sept membres de l'équipe vont découvrir bientôt que cette discipline habituellement réservée aux femmes possède son propre championnat du monde situé en Norvège. C'est d'abord avec l'aide de Delphine, puis plus tard de l’entraîneuse paraplégique de l'équipe de water-polo, Amanda, que les sept hommes vont s'entraîner d'arrache-pied afin de monter jusqu'en Norvège et ainsi participer au championnat du monde de natation synchronisée masculine...

Je l'évoquais déjà l'année dernière : parmi les innombrables déceptions que le cinéma comique français produit chaque années, quelques long-métrages parvinrent à s'extraire du lot. En 2018, nous avions notamment eu droit aux excellents Le Retour du Héros de Laurent Tirard, à Tout le Monde Debout de Frank Dubosc, ou encore au Brillantissime de Michèle Laroque (pour ce dernier, évidemment, JE PLAI-SAN-TE... quoique, certains semblent avoir MIRACULEUSEMENT aimé cette abominable engeance). Et puis donc, ce Grand Bain, bébé presque exclusif d'un Gilles Lellouche qui n'y participera pas en tant qu'acteur mais qui sera non seulement derrière la caméra, mais également derrière l'écriture du scénario (assisté de Ahmed Hamidi et Julien Lambroschini) et des dialogues.

Le Grand Bain, c'est le genre de film qui vous met la banane, vous donne la pêche. On s'y fend la poire, sans se prendre le melon et sans avoir honte de rougir comme une tomate devant l'émotion que le réalisateur a ajouté à cette merveilleuse comédie qui tort le coup à toutes ces mauvaises pensées qui trahissent parfois notre bien-être. L’œuvre de Gilles Lellouche est un régime alimentaire à destination de l'âme. Après avoir vu Matthieu Amalric (le chômeur dépressif puis vendeur de meubles), Guillaume Canet (le directeur d'une aciérie et fils d'une mère sénile), Philippe Katerine (employé à la piscine municipale), Benoît Poelvoorde (le pisciniste), Jean-Hugues Anglade (le musicien raté) et les autres s'engueuler, partager leurs angoisses, un pétard, leurs espoirs et enfin la victoire, l'espoir renaît. Mieux qu'un anti-dépresseur, qu'une batterie de calmants, que l'alcool ou la drogue, le film est un bain de jouvence dans lequel des acteurs venus de bords différents forment un groupe soudé et convaincant.

Parmi lesquels on n'oubliera pas de noter la présence féminine de Virginie Efira, dans le rôle de Delphine, et de Leïla Bekhti dans celui d'Amanda. Le Grand Bain est drôle, original, ponctué de quelques savoureux échanges verbaux (Claire/Marina Foïs réglant ses comptes avec sa sœur Clem/Mélanie Doutey entre les rayons d'un supermarché), mais aussi, parfois, très émouvant (Delphine témoignant de son expérience douloureuse). On n'oubliera pas non plus la présence de l'increvable Claire Nadeau dans le rôle (plus amusant que dramatique) de la mère sénile de Laurent/Guillaume Canet.  Deux heures (ou presque) de Cinéma...

samedi 23 février 2019

Dark Country de Thomas Jane (2009) - ★★★★★★☆☆☆☆




Lorsque l'on n'a pas d'idée précise, que l'on ne sait quel film choisir, et que l'on pioche au hasard parmi l'immense filmothèque numérique mise à disposition sur la toile, il arrive que l'on tombe sur d'authentiques curiosités. De celles qui, à l'issue de la projection, laissent le spectateurs avec une foule de questions. Pourtant, ici, pas de récit bridé par l'esprit un brin tordu d'un David Lynch inspiré par on ne sait quelles sombres pensées. Non, ici l'histoire est quasiment anecdotique, le « quasiment » ne faisant pas uniquement office de décorum. D'entrée de jeu, on est saisit par les choix artistiques du directeur de la photographie Geoff Boyle. L'éclairage est superbe, les ombres et lumières zébrant la peau des deux rares protagonistes de ce Dark Country qui dénote franchement avec la plupart des thrillers.
Embarqué à bord de sa voiture en compagnie de Gina qu'il vient d'épouser à Las Vegas pour la modique somme de cinquante euros, Dick roule à vive allure sur une route désertique lorsque le couple tombe nez à nez avec le corps d'un homme victime d'un très grave accident. Défiguré mais encore en vie, Dick prend la décision de placer l'homme inconscient à l'arrière du véhicule. En chemin, l'homme reprend conscience mais se révèle agressif. Tenant des propos incohérents, il tente d'étrangler Dick qui se défend et tue l'homme à l'aide d'une pierre. Un fois mort, le couple l'enterre dans le désert et reprennent la route. Parvenus jusqu'à une aire de repos, Dick constate que dans sa précipitation, il a perdu sa montre...

Le spectateur peut d'ors et déjà imaginer les nombreuses possibilités offertes par un tel synopsis. Un cadavre récalcitrant, un couple qui s'engueule, une route désertique, une aire de repos jonchée d'épaves de voitures, un flic bizarre (l'acteur Ron Perlman). Mais si Dark Country dénote par rapport à la production habituelle, c'est de par son approche visuelle. Difficile de dire si l'on est face à une œuvre volontairement esthétisante ou devant un long-métrage artistiquement ringard. En fait, le film de l'acteur/réalisateur (aux deux postes sur Dark Country) Thomas Jane est clairement un « hommage » au film noir et aux bandes dessinées EC Comics (maison d'édition américaine de bande dessinée accordant une place privilégiée à l'horreur, l'aventure, l'humour et la science-fiction). D'où un résultat à l'écran assez déconcertant. Comme les cases d'une BD prenant vie. Le film oscille entre plans superbes, cadrages bancals, couleurs post-années quatre-vingt... quand certains visuels semblent issus de vieille pellicules victimes des outrages du temps (effets-spéciaux numériques totalement surfaits)

Résultat : difficile de prendre position. De nier la valeur artistique de Dark Country tout en prenant radicalement fait et cause pour l’œuvre de Thomas Jane. Thriller, humour, mais aussi fantastique forment un mélange (d')étonnant qui ne conviendra malheureusement pas à tout le monde. D'autant plus que le réalisateur ne s'embarrasse d'aucune explication quant à cette boucle temporelle (aïe ! J'ai vendu la mèche!) tombant comme un cheveu sur la soupe dans ce néo-noir sorti presque pile-poil dix ans après le Dark City d'Alex Proyas et un peu plus que le Lost Highway de David Lynch. Ni un nanar, ni un chef-d’œuvre, Dark Country est bourré d'idées, visuellement délirant, (in)volontairement drôle, bizarrement interprété (on a quand même du mal à croire au jeu du couple formé par Thomas Jane et l'envoûtante Lauren German) et parfois mis en scène avec les pieds (l'aventure est bien moins cauchemardesque que le voudrait le scénario)... pourtant, l'approche, une fois encore, du réalisateur est telle que l'on est littéralement happé. Encore faut-il être en mesure d'excuser les faiblesses qui émaillent ce long-métrage atypique...

vendredi 22 février 2019

Les Côtelettes de Bertrand Blier (2002) - ★★★★★★☆☆☆☆



Alors que le réalisateur, scénariste et écrivain français Bertrand Blier revient bientôt sur nos écrans avec son dernier bébé Convoi Exceptionnel, interprété par Gérard Depardieu et Christian Clavier (alors que l'on s'attendait à voir débarquer depuis trois ans Existe en Blanc avec Maïwenn et Benoît Poelvoorde), petit retour sur son antépénultième long-métrage sorti jusqu'ici au cinéma. Les Côtelettes, cela ne fait pas exception, est une fois de plus écrit par le maître lui-même, fils spirituel du Grand Michel Audiard, qui avec un peu moins d'une vingtaine de long-métrages s'est construit une solide réputation de dialoguiste : ceux de Calmos, Buffet Froid, Tenue de Soirée ou encore Le Bruit des Glaçons sont tous de Bertrand Blier, le cynique, le misogyne, l'acerbe... mais aussi, parfois, le poète... et d'une manière générale, le magicien des mots... des maux ?
Avec Les Côtelettes, son quinzième long-métrage, le fils de l'immense acteur Bernard Blier met en scène une rencontre aussi absurde que celle que fera Jean Dujardin sept ans plus tard dans Le Bruit des Glaçons : son cancer, divinement incarné par Albert Dupontel. Mais pour le moment, ce sont Philippe Noiret et Michel Bouquet qui ensemble, et malgré leur inimitié vont rencontrer la Mort, incarnée cette fois-ci par la comédienne Catherine Hiegel, plus connue pour être montée de très nombreuses fois sur les planches mais dont les apparitions sur grand écran ne laissent jamais indifférent.

La Mort, mais pas seulement, car ce film étrange, que certains estimeront sans doute avant-gardiste, sera aussi et surtout l'occasion pour l'actrice et compagne du cinéaste, Farida Rahouadj, d’interpréter son premier vrai grand rôle. Malgré le poids qui pèse sur les épaules de cette « débutante » confrontée à deux monuments du cinéma français, Farida s'en sort à merveille, aidée en cela par sa beauté toute orientale et cette magie qui opère toujours chez son mari de réalisateur qui parvient à chaque fois, et quoi qu'il arrive, à rendre belle la tristesse chez ses personnages.

Fidèle à lui-même, Bertrand Blier propose un postulat de départ intriguant, fou, comme du Dali sur pellicule : Un vieil homme (Michel Bouquet) sonne à la porte de Léonce (Philippe Noiret), soixante-quatre ans. Le premier se dit de gauche, le second, de droite. Ce qui fait toute la différence lorsqu'ils quittent les toilettes après y avoir rendu le contenu de leur intestin. Le premier y laisse les traces de son passages tandis que le second nettoie scrupuleusement la cuvette. Si le vieil homme est venu sonner à la porte de Léonce, c'est pour une raison bien précise : pour le faire chier. Mais surtout parce qu'ils ont en commun, la même femme de ménage. Qui le matin se rend chez le vieil homme, et l'après-midi chez Léonce. Tombés sous le charme de la jeune femme, les deux hommes vont partager leur ressenti sur les femmes, et Nacifa ( Farida Rahouadj) en particulier, ainsi que sur la vie, et la mort...

Si Bertrand Blier n'a pas perdu son sens du verbe et de l'accroche, son talent de dialoguiste s'est quel que peu émoussé depuis quelques années. Son œuvre apparaît de plus en plus hermétique, faisant passer en priorité les dialogues et délaissant peu à peu la mise en scène. Théâtral, Les Côtelettes ne se soucie d'aucune logique en terme de situation. Une phrase récitée par l'un des personnages peut tout à fait débuter dans l'appartement de l'un ou l'autre pour se conclure au beau milieu d'un chemin bordé de champs de blé. Si les choses s'améliorent au fil du récit, la gratuité du dialogue qui confronte Michel Bouquet et Philippe Noiret concernant le sort accordé par leur personnage respectif à leurs propres excréments a tendance à s'éterniser. Farida Rahouadj apporte par contre quant à elle, une jolie touche d'exotisme dans ce duo de vieilles légendes qui n'ont pas dit leur dernier mot. Une œuvre mineure dans la carrière de Bertrand Blier, mais non dénuée d'intérêt...

jeudi 21 février 2019

Nothing but the Night de Peter Sasdy (1973) - ★★★★★★★☆☆☆



Trois des principaux donateurs de la Fondation Van Traylen ont trouvé la mort durant les derniers mois. Le premier s'est écrasé en bas d'une falaise à bord de son véhicule, le second est tombé du haut d'une fenêtre, quant au dernier, on l'a retrouvé dans son salon, une balle logée dans la tête. Pour la police, l'affaire a été classée comme suicide. Mais alors qu'un bus chargé de trente orphelins de la Fondation Van Traylen et de trois autres donateurs est victime d'un curieux accident, le Colonel Bingham décide de mener une enquête. Pour cela, il va s'adjoindre les services du chercheur Sir Mark Ashley, lequel a accepté de venir également en aide au psychiatre Haynes qui tente d'aider la jeune Mary Valley qui demeure traumatisée par l'accident qui a coûté la vie au chauffeur de bus.

Christopher Lee et Peter Cushing, deux des plus grands acteurs britanniques de l'époque de la Hammer (célèbre société de production britannique fondée par William Hinds et Enrique Carreras en 1934 et spécialisée dans le fantastique et l'épouvante, surtout connue pour avoir produit une légions de longs-métrages dans les années 50 et 60) se retrouvent devant la caméra du cinéaste Peter Sasdy qui avait, avant cela, réalisé entre autres longs-métrages, Une Messe Pour Dracula et La Fille de Jack l’Éventreur. Nothing but the Night, simple œuvre policière ? Pas vraiment, puisque le cinéaste y déroule une intrigue savamment orchestrée par un duo qu'il faut, au départ, suivre dans la langue de Shakespeare. Élément essentiel si l'on veut véritablement s'imprégner de l'ambiance si particulière d'une œuvre que l'on rapprochera aisément de ce qui fut (Le Village des Damnés, Les Innocents) et sera par la suite (The Other, La Malédiction) au cœur d'une intrigue mettant en scène des enfants diaboliques.

Tiens, Christopher Lee justement. Celui qui retrouva la même année le cinéaste Robin Hardy qui réalisa le film culte The Wicker Man dont certains éléments le rapprochent aisément de Nothing but the Night. Presque rien ne laisse présager d'une conclusion fantastique alors que l'intrigue dissémine des éléments permettant de troubler notre perception et ainsi nous aiguiller sur de mauvaises voies (les meurtres assimilés à l’appât de gain, ou bien la mère de Mary Valley, suspecte idéale et un peu trop facile pour que l'on y croit vraiment).

Nothing but the Night développe une idée pas toute neuve en l'employant de manière, par contre, tout à fait originale. Le thème de l'immortalité demeurant effectivement le but à atteindre pour des individus en fin de course (comprendre engoncés dans des carcasses vieillissantes) et se servant de jeunes orphelins pour conserver la part la plus importante de leur personne. Et ce de manière donc fort singulière puisque il s'agit surtout ici, de perpétrer la mémoire ancestrale des donateurs de la Fondation Van Traylen. Nothing but the Night n'use pratiquement d'aucun artifice visuel, l'oeuvre s'articulant surtout autour de l'enquête de l'excellent Christopher Lee. Le film de Peter Sasdy est une belle réussite. Une œuvre étonnante développée de manière peu courante, et dans un cadre qui demeure toujours aussi prégnant et vertigineux.
Nothing but the Night ne connaîtra malheureusement pas de sortie française à l'époque. Un film qui d'ailleurs, ne rencontra pas aux États-Unis le succès qu'il méritait...

mercredi 20 février 2019

Das weiße Band, Eine deutsche Kindergeschichte (Le Ruban Blanc) de Michael Haneke (2009) - ★★★★★★★★★☆



Abordé trois fois en 2016 (Benny's Video, La Pianiste, Caché) et une seule fois l'année dernière (Wolfzeit), l'autrichien Michael Haneke mériterait pourtant bien plus de rigueur de ma part. De rigueur et de régularité dans la critique d'une œuvre dont l'auteur n'a jamais cessé de manipuler l'image, et ainsi donc le spectateur. Comment oublier l'une des plus incroyables séquences de son traumatisant Funny Games lors duquel le cinéaste prenait parti pour ses agresseurs au détriment de leurs victimes et des spectateurs ? Ou comment soulager ces derniers, en apnée depuis de trop longues minutes, pour ensuite leur enfoncer une fois encore, la tête sous l'eau. C'est avec hésitation que j'ai choisi aujourd'hui d'évoquer Le Ruban Blanc alors que bien d'autres avant lui dans la filmographie de Michael Haneke méritaient de passer en priorité. Mais comme aucune chronologie ne prévaut en ces pages, j'ai décidé de sauter plusieurs lignes pour me rendre directement jusqu'à l 'antépénultième long-métrage de l'un des auteurs les plus essentiels et les plus addictifs du septième art. Il y a, Outre-Atlantique, des cinéastes de la trempe de David Lynch. Chez nous, il s'agirait plutôt de citer Gaspar Noé. Mais un peu plus vers l'est, au nord de la Croatie et à l'ouest de la Hongrie, un pays, l'Autriche, et une ville, Wiener Neustadt, ont vu grandir l'un de ces génies du septième art dont l’œuvre génère spontanément des passions.
Le cinéma de Michael Haneke vous surprend, vous saisit comme les premières gelées matinales de l'hiver. Inattendues. Glaciales. Si d'une manière générale, l’œuvre de l'autrichien peut être souvent considérée comme l'anti-thèse du cinéma romantique, l'émotion n'y est pourtant pas tout à fait absente. On pourrait même affirmer que derrière l'extrême noirceur des univers qu'il développe de manière rigoureuse, Michael Haneke est en perpétuelle recherche d'émotion. Une quête qui débouche généralement sur des réactions controversées.

On pourrait donc supposer qu'avec le primé Le Ruban Blanc, Michael Haneke a choisit de se racheter une conduite... Et pourtant, en réalité, l'autrichien ne fait que perpétuer l’œuvre qu'il a entamé des décennies en arrière. Filmé dans un superbe noir et blanc, si Michael Haneke nie toute ressemblance avec le fascisme qui allait éclore avec la première guerre mondiale à venir (le film se déroule à son approche), Le Ruban Blanc ressemblerait-il davantage volontiers à une métaphore tournant autour de l'Eglise et des abus dont certains de ses membres se rendent ponctuellement responsables ? Dans un petit village du nord de l'Allemagne vivent en harmonie, nombre de paysans, un baron, son épouse et leurs trois enfants, un médecin et son amante, une sage-femme, ainsi qu'un régisseur, un pasteur et sa famille, et pour conclure, un instituteur. Celui-là même qui revient sur de curieux événements survenus alors que la première guerre mondiale est en approche.

Lorsque le médecin est la première victime d'une série d'accidents étranges, l'équilibre du village s'en trouve bouleversé. Les humeurs changent. La corrosion des sentiments se fait de plus en plus ressentir au cœur même des familles. Mais qui donc s'est amusé à mettre en scène l'accident de cheval du Docteur ? Qui va, plus tard, mettre le feu à la grange ? Et enfin, qui va oser s'en prendre au fils handicapé mental de la sage-femme ? Consciencieusement, Michael Haneke développe une intrigue au dénouement dévastateur. Avec Le Ruban Blanc (symbole d'innocence et de pureté), le cinéaste autrichien évoque SA version d'un Village des Damnés débarrassé de tout élément fantastique mais baigné d'une ferveur chrétienne embarrassante. A ce titre, l'acteur allemand Burghart Klaubner incarne à merveille ce pasteur-gourou effrayant. Sermonnant. Punissant ses propres enfants rendus à l'état de martyrs. Toutes les couches de la société sont ainsi touchées par ce mal silencieux qui détruit la cohésion entre les membres d'une même famille ainsi qu'entre les habitants du village. L’œuvre de Wolf Rilla ne semble pas être l'unique source de ressemblance avec le film de Michael Haneke puisque semblent imprégner le long-métrage de l'autrichien, des œuvres aussi diverses que Le Village de M. Night Shyamalan, à travers ce cloisonnement et le mystère qui entoure les événements étranges qui dérangent la quiétude de ce petit village allemand vivant reclus et en marge de toute civilisation.

Si Le Ruban Blanc est visuellement superbe, on retiendra surtout le choc d'une mise en scène et d'un scénario écrit par le cinéaste lui-même ainsi que par Jean-Claude Carrière. La découverte effroyable débouchant sur la conservation d'un secret inavouable fait bien évidemment écho à nombre de problèmes rencontrés par l’Église et que ses Haut-dignitaires choisissent en général d'étouffer. Magistralement interprété, Le Ruban Blanc mérite amplement sa palme d'Or au festival de Cannes 2009, l'une des nombreuses que le film a remporté de part le monde...Glaçant !

Everly de Joe Lynch (2015) - ★★★★★☆☆☆☆☆



Everly est enfermée depuis quatre ans dans un appartement lorsque le vent de la révolte souffle. Prostituée et esclave sexuelle pour le compte du très violent ponte de la mafia japonaise Taiko, la jeune femme a tout prévu. Alors qu'elle est une fois de plus la victime d'abus sexuels, elle profite d'un passage dans la salle de bain pour se saisir de l'arme à feu qu'elle a planqué dans les toilettes et pour éliminer tous les hommes présents dans la pièce à coté. Tous sauf un qui pisse le sang, affalé sur le canapé. Everly n'en n'est pourtant pas sortie d'affaire. Dehors, les hommes de main de Taiko veillent, et dans les couloirs de l'immeuble, d'autres montent la garde. De plus, d'autres prostituées sont prêtes à venir leur filer un coup de main en cas de nécessité.

Et comme si cela ne suffisait pas, la police est corrompue et à la solde de Taiko. Everly a depuis quelques temps caché de l'argent sous le plancher. Son objectif est de récupérer sa jeune fille Maisey qui vit avec sa grand-mère et avec lesquelles elle a l'intention de quitter le pays...

Quatrième long-métrage du cinéaste Joe Lynch (qui n'a de commun avec l'immense David Lynch que le nom), Everly est un tout petit film qui lorgne du coté des films de yakuza sans parvenir le moins du monde à faire oublier les classiques du genre. Malgré la violence, le sang, et le nombre invraisemblables d'événements qui émaillent le film durant les 92 minutes qu'il dure, Everly est une semi déception. Sans doute le cinéaste s'est-il pris un instant pour Robert Rodriguez ou Takeshi Miike, toujours est-il que son film sent bon (ou mauvais) le nanar intégral.

Intégral, oui, parce qu'on a beau chercher le petit détail qui sauvera le film du naufrage (la superbe silhouette de Salma Hayek ? Les hectolitres de sang ? Les personnages barrés?) on constate avec effroi que la réalisation est plus que discutable. Tout ceci transpire l'amateurisme à plein nez. L'invraisemblance de beaucoup de scènes ne joue pas en la faveur du film. Le cinéma d'action américain a peut-être un peu trop l'habitude de faire de ses personnages des machines de guerre indestructibles.

Salma Hayek a beau faire ce qu'elle peut, l'actrice a bien du mal à convaincre dans ce rôle de femme vengeresse bafouée par l'homme et qui devient aussi dure et violente que ses ennemis. Pourtant, le film commence plutôt bien. Mais dès que les prostituées s'en mêlent ça sent le roussi à plein nez. Les voilà qui débarquent à la queue leu-leu, armées jusqu'aux dents sans jamais parvenir à mettre en péril l'existence d'une Everly presque insensible à la douleur. Ouais, d'accord, pourquoi pas. Mais point trop n'en faut tout de même. Everly se regardera donc comme une péloche pas tout à fait Z mais presque...

mardi 19 février 2019

L'Exorcisme de Hannah Grace de Diederik Van Rooijen (2018) - ★★★★★★☆☆☆☆



J'avais prévu de vous parler du Flic de Belleville de Rachid Bouchareb, avec Omar Sy. Mais encore aurait-il fallut que j'aille jusqu'au bout. Malheureusement, je n'en ai pas eu la force ni le courage. M'est avis que l'ancien pote de Fred Testot aurait peut-être dû continuer à faire de la télévision... Oui mais voilà : Éric Toledano et Olivier Nakache et le succès de leur Intouchables étant passé par là, voilà qu'ont sans doute poussé dans le dos d'Omar Sy, des ailes bien trop grandes pour lui. Amusant lorsqu'on lui offre des seconds rôles, mais beaucoup moins lorsqu'il doit endosser le costume du personnage principal. Une filmographie trop longue à énumérer de mémoire depuis 2011. Et puis, l'année dernière, la surprise... de celles, mauvaises, qui sentent aussi fort qu'un étron qui vient d'être souillé du pied droit. Omar Sy dans la peau d'un ersatz du Flic de Beverly Hills. Déjà qu'aux États-Unis, ils nous avaient fait le coup des suites, le mythe s'étiolant quelque peu. En France, pas cons, les distributeurs allèrent jusqu'à oser traduire le Metro de Randy Fledman sortit en 1997 par Le Flic de San Francisco histoire de surfer sur le succès du Flic de Beverly Hills. Une infamie ! Comme Le Flic de Belleville, d'ailleurs. Omar Sy a beau posséder un capital sympathie qui ferait passer n'importe quelle vanne post-CANAL+, il n'arrive pas à la cheville de son homologue américain. Même pas à la plante des pieds, c'est vous dire si le film est un désastre. Quitte à jouer dans la langue de Shakespear (le film de Bouchareb se passe en partie à Miami), il aurait été amusant d'entendre la voix de Abib Mohamed Medoun Hondo, le doubleur officiel d'Eddie Murphy doubler la voix d'Omar Sy. Enfin, c'est juste une idée quoi... Parce que le film, même sans évoquer le fait qu'il s'agit d'un hommage aux films d'action des années quatre-vingt, est carrément ennuyeux. Pas drôle, et pathétiquement interprété par un Omar Sy ne convaincant jamais.

Enfin bref, tout ça pour dire, qu'à la place, j'ai choisi d'aborder un autre long-métrage dont la réputation ne vaut guère mieux. Pourtant, allez savoir pourquoi, j'ai bien aimé. Et puis, hein, on s'en fout un peu de l'avis des autres. Sinon on ne regarderait plus rien, les salles de cinémas se videraient comme les rayons des supermarchés en temps de guerre, et on resterait enfermés dans nos chambres le nez collé sur nos smartphones ! Faut dire que j'ai de la chance. Parce qu'entre L'Exorciste de William Friedkin et L'Exorcisme de Hanna Grace, j'ai échappé à la horde de longs-métrages qui ont pollué les étagères des rayons fantastiques ces dix ou quinze dernières années. Pas vu, donc, L'Exorcisme d'Emily Rose, Le Dernier Rite, L’Étrange Cas de Deborah Logan, Le Dernier Exorcisme 1 & 2, Délivrez-Nous du Mal, L'Exorcisme de Molly Hartley, Anneliese : The Exorcist Tapes, et j'en passe des pires et des meilleurs...

L'Exorcisme de Hanna Grace, lui, se déroule dans une morgue. De là à dire que le film du cinéaste néerlandais Diederik Van Rooijen (à vos souhaits!) ressemble à l'excellent The Jane Doe Identity du norvégien André Øvredal, il n'y a qu'un pas. Qu'il s'approprie l'univers de Nattevagten du danois Ole Bornedal, là aussi, il n'y a qu'un pas. Ou bien qu'il reprend le principe du film de William Friedkin, et bien... heu... en fait, pas du tout. D'où ce titre complément con. Je veux bien qu'au début l'on nous exhibe une gamine possédée maltraitant quelques personnalités du clergé, mais ensuite, le film prend un virage qui le rapproche en fait davantage des fantômes « Made in Japan ». A vrai dire, que le titre respecte ou non le contenu du film, on s'en fiche. Le principal étant que Diederik Van Rooijen ait réussi à créer un véritable climat d'angoisse, sans doute lié au contexte (osez donc passer une nuit seul(e) dans une morgue).

Le film nous conte les mésaventures d'une ancienne flic qui accepte un poste de nuit dans la morgue où elle est elle-même soignée pour ses problèmes d'addiction. Une nuit, on lui apporte le corps partiellement brûlé d'une adolescente dont l'arrivée coïncide alors avec d'étranges événements. Bonne ambiance, effets-spéciaux efficaces, rythme lent mais pas désagréable, L'Exorcisme de Hanna Grace fait son travail. Sans doute pas le chef-d’œuvre de l'année, mais se regarde avec plaisir...

lundi 18 février 2019

Bailout the Age of Greed de Uwe Boll (2013) - ★★★★★★☆☆☆☆



Faut-il une fois de plus sauver l'un des nombreux long-métrages de l'écrasante filmographie du cinéaste Allemand Uwe Boll sur laquelle la presse bien pensante s'acharne depuis des années ? Après quelques essais plutôt convaincants dans le domaine du récit historique (Auschwitz) et du milieu carcéral (Stoic), c'est par le plus grand des hasard que je suis une fois encore tombé sur une œuvre, qui si elle ne se désigne jamais comme le fleuron du genre, est un film d'action d'honnête facture. Encore faut-il comprendre dans ce sens, la capacité du réalisateur à se sortir de projets casse-gueule s'effondrant sous le poids de leur médiocrité.
Dans le genre « pétage de plombs », Bailout the Age of Greed se situe en assez bonne position et risque de plaire aux amateurs de redresseurs de torts. Celui du long-métrage traduit sous nos latitudes sous le titre Assaut sur Wall Street (curieusement sorti la même année que Le Loup de Wall Street de Martin Scorsese !!!) se nomme Jim Bradford, est incarné par l'acteur anglo-australien Dominic Purcell (Prison Break) et surtout, est très mécontent de ce qui lui arrive depuis quelques jours maintenant. Il faut dire qu'il a de quoi être énervé au point de vouloir s'acheter une panoplie d'armes à feu et de vouloir faire payer à ceux qu'il estime être responsables de la mort de sa femme Rosie (Erin Karpluk), atteinte d'une tumeur cancéreuse au cerveau. Décédée avant que la maladie ait terminé son œuvre, Rosie s'est suicidée, ne supportant plus de voir les banques et les assurances leur tomber dessus.

Avant cela, pourtant, Jim a essayé de tout arranger. Malgré ses dettes, malgré des placements en bourse imprudents qui lui ont fait perdre toutes ses économies et malgré son licenciement. Malgré, même, la perte de Rosie. Surnageant, seul et envers tous ceux qu'il estime être responsables du drame qu'il vit actuellement, il tente de survivre. Mais lorsque la maison qu'il a partagé avec Rosie est saisie, Jim étant enjoint de la quitter sous quarante-huit heures, c'est la goutte qui fait déborder le vase. L'ancien convoyeur de fonds s'achète plusieurs armes à feu ainsi que des grenades et se lance dans un périple meurtrier visant les grands pontes de Wall Street. Après un premier meurtre commis dans un parking souterrain, Jim passe à la vitesse supérieure en réalisant un véritable carnage dans le quartier de Wall Street et notamment dans l'immeuble qui l'employait il y a encore quelques jours...

Bailout the Age of Greed dure cent minutes environs, et il faudra patienter une bonne heure avant que le héros ne se décide à faire le ménage autour de lui. Uwe Boll s'attache effectivement un peu trop longuement à décrire la lente déchéance d'un homme contraint de vivre avec le poids de la maladie de son épouse. Premier pas vers la folie pour un individu au départ tout à fait banal, déjeunant régulièrement avec ses collègues de travail (parmi lesquels on retrouve le Edward Furlong de Stoic, mais cette fois-ci du bon côté de la barrière, ou l'acteur noir Keith David qui débuta pratiquement sa carrière dans le chef-d’œuvre de John Carpenter, The Thing en 1982, enchaînant ensuite un grand nombre de rôles dans des films parfois notables), marié à une femme malade mais en rémission. Encore faut-il que son époux soit en mesure de payer la facture d'un traitement relativement couteux. Si Bailout the Age of Greed est relativement plaisant à regarder et ne souffre pas trop d'un budget qui se situe très probablement en deçà des quotas habituels pour ce genre de films, il se traîne malheureusement en longueur, Uwe Boll attachant sans doute une très grande importance à la caractérisation de son principal personnage, malheureusement incarné de façon sensiblement balourde. La pression se relâchant enfin lorsque le héros dessoude les quelques types qu'il rend « responsables » de son état, le massacre se révèle plaisant, sans plus. Du moins, jamais à la hauteur de la trop longue attente précédant l'acte meurtrier. Le spectateur se satisfera surtout de la mort d'un John Heard antipathique que les amateurs de cinéma d'horreur purent découvrir à leur tour dans le classique de Douglas Cheek, C.H.U.D en 1984. A noter la présence de l'acteur Eric Roberts dans le rôle de l'avocat Patterson. A noter également la conclusion passablement stupide voyant le héros s'en sortir par une pirouette invraisemblable. Moyen !

dimanche 17 février 2019

Detour de Christopher Smith (2016) - ★★★★★★★☆☆☆



Dernier long-métrage du cinéaste britannique Christopher Smith à ce jour, l'auteur des excellents Creep, Triangle et Black Death revenait en 2016 avec un Detour étonnant. Scénarisé par le réalisateur lui-même, le film est un mélange entre thriller et road-movie. Mais plutôt que de suivre la même voie que les autres, ce cinéaste qui décidément aborde son œuvre d'une toute autre manière a choisit de tracer sa propre route et propose un récit dont les conventions en terme de mise en scène sont éclatées. Arborant les atours d'une œuvre schizophrène, Detour fait avant tout preuve d'une astucieuse et redoutable construction. Fuyant l'habituelle linéarité de ce genre de productions, Christopher Smith se réapproprie les codes du flash-back pour y imprimer sa patte toute personnelle.

Le récit démarre sur les bases d'un drame. Celui qui touche le jeune Harper, un étudiant dont la mère est dans le coma à la suite d'un accident de voiture duquel son compagnon, le beau-père d'Harper, est demeuré indemne. Persuadé que Vincent a volontairement causé la mort de son épouse afin de se débarrasser d'elle et de s'approprier ses biens, Harper se confie à un inconnu du nom de Johnny Ray un soir où il a un peu trop bu. Une petite frappe qui contre la somme de vingt-mille dollars accepte de débarrasser l'adolescent de son encombrant beau-père. Le lendemain matin, Harper a récupéré ses esprits mais il est déjà trop tard : Johnny et sa petite amie Cherry l'attendent sur le bas de la porte de la propriété familiale. Contraint d'accepter de les suivre jusqu'à Las Vegas où a prévu de se rendre Vincent, Harper suit d'abord les conseils prodigués par Johnny la veille : laisser sur place une partie de son esprit. Embarqués à bord de la voiture de son beau-père laissée au garage, Harper, Johnny et Cherry prennent ainsi la route vers la capitale du jeu...

Detour, c'est tout d'abord la rencontre entre un adolescent fragilisé par le coma dans lequel est plongé sa mère, un voyou contraint de rembourser une grosse somme d'argent à un véritable psychopathe (excellent John Lynch, dans la peau de Franck), et une jeune danseuses que Johnny emploie à l'occasion comme prostituée afin de se faire de l'argent facilement. Trois personnages au centre d'une virée meurtrière dont on ne soupçonne pas le cheminement que prendront les événements. On sait désormais que Christopher Smith a dans la tête des idées bien précises en terme d'écriture. Qu'il ne se contente pas de répéter bêtement ce que d'autres ont entrepris avant lui. Detour ne déroge pas à la règle et propose un spectacle remettant régulièrement en question les idées reçues d'un public habituellement formaté. Tye Sheridan (Harper), Emory Cohen (Johnny Ray) et Bel Powley (Cherry) campent un épatant trio roulant vers Las Vegas. Mais le britannique trompe son monde. Car en exposant un Harper dédoublé lors de séquences se déroulant dans la demeure familiale, Christopher Smith bâtit un stratagème intelligent et diablement efficace.

Après un quart-d'heure passé à nous faire croire que le film se déroulera de manière classique (Johnny et Harper passant un contrat. Route vers Las Vegas. Assassinat du beau-père), le cinéaste bouleverse les conventions et contrôle seul la suite des événements. Si le scénario peut apparaître comme sensiblement tordu, il suit cependant une logique infaillible et parfaitement maîtrisée par son auteur. Christopher Smith fait montre une fois encore de son talent de scénariste et de réalisateur dans un film riche et parfaitement incarné par l'ensemble du casting. On appréciera la photographie lumineuse de Christopher Ross qui tranche radicalement avec celles, beaucoup plus ténébreuses, des précédents long-métrages de Christopher Smith. Une belle réussite !
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