Bienvenue sur Cinémart. Ici, vous trouverez des articles consacrés au cinéma et rien qu'au cinéma. Il y en a pour tous les goûts. N'hésitez pas à faire des remarques positives ou non car je cherche sans cesse à améliorer le blog pour votre confort visuel. A bientôt...

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mercredi 31 janvier 2018

The Ones Below de David Farr (2015) - ★★★★★★★☆☆☆



Roman Polanski, à travers sa trilogie de l'appartement, avait compris bien avant d'autres que l'horreur, la vraie ne s'inscrivait pas dans un quelconque imaginaire mais bien dans un contexte social réaliste. C'est ainsi que par trois fois, en 1965 avec Répulsion, en 1968 avec Rosemary's baby puis en 1976 avec Le Locataire, il s'appliqua à mettre en place ce principe et réalisa pas moins de trois des plus terrifiants longs-métrages de l'histoire du cinéma. Quarante ans après que le polonais ait clôt sa terrifiante trilogie, voilà que débarque sans prévenir The Ones Below (ou, London House) qui sur un principe presque semblable à celui de Rosemary's baby risque de marquer durablement les esprits. Le contexte social décrit par le cinéaste britannique David Farr est pourtant aussi désuet et naïf que les mélodrames familiaux diffusés le week-end à heure de grande écoute. Un sentiment que renforce le cadre presque idyllique d'un minuscule immeuble planté au beau milieu d'un quartier tranquille de Londres.

C'est là que vivent Kate et Justin. Un jeune couple qui attend un heureux événement : la naissance de leur premier enfant. Peu de temps après, un second couple vient s'installer dans l'immeuble au rez de chaussée, juste en dessous de l'appartement de kate et Justin. Theresa et Jon attendent eux aussi un heureux événement puisque la jeune épouse attend-elle même un bébé. Invités par Kate à dîner contre l'avis de Justin, la fin du repas se termine par un accident. Une chute dans les escaliers qui cause la perte du bébé de Theresa. Après avoir tenu des propos malheureux envers Kate et Justin qu'ils accusent d'être responsables de la mort du bébé, Jon et Theresa quittent un temps le pays pour se ressourcer en Allemagne.
Lorsqu'ils reviennent plusieurs mois après, Kate a donné naissance à un petit Billy. Renouant avec leurs voisins, ils acceptent de confier de temps en temps leur enfant à Jon et Theresa. Mais alors que cette dernière semble avoir bien récupérer de la perte de son bébé, Kate dépérit. Elle semble avoir l'esprit ailleurs et oublie un jour d'éteindre le gaz. Une autre fois, elle oublie d'arrêter l'eau de la baignoire. Pire : Billy semble allergique au lait maternel. Peu à peu la jeune femme commence à douter de la sincérité des voisins et commence à épier Theresa. C'est là qu'elle découvre qu'en cachette, la jeune femme prend des photos d'elle et du bébé et va même jusqu'à lui donner le sein...

La bande musicale composée par Aderm Llhan, le cadre immaculé, et le rythme lent et cotonneux de la mise en scène procurent le sentiment que l'on est face à un drame exclusivement centré sur la perte d'un enfant et ses conséquences psychologiques sur son entourage. Et d'une certaine manière, c'est en partie le sujet de The Ones Below. Mais en se référant au film de Roman Polanski cité plus haut, allant même jusqu'à en reprendre certain éléments en les transformant (le spectateur finira invariablement par penser que le soda préparé avec « amour » par Theresa à l'attention de Kate est responsable des allergies de Billy), le britannique effectue un virage à trois-cent soixante degrés plongeant ainsi ses protagonistes au cœur d'un thriller émotionnellement très efficace.
Un peu toujours à la manière de Roman Polanski, David Farr développe différentes grilles de lecture allant du complot organisé par le couple formé par les excellents interprètes que sont Laura Birn et David Morrissey (l'inoubliable Gouverneur de la série The Walking Dead) jusqu'à la crise de paranoïa qui semble se développer chez le personnage de Kate admirablement incarné par l'actrice française Clémence Poésy.

Dans le genre film d'horreur psychologique, The Ones Below déroule une intrigue implacable, glaçant parfois les sangs devant un époux (l'acteur Stephen Campbell Moore) pas toujours confiant envers une épouse apparemment fort déboussolée. Visuellement, le film de David Farr n'affiche aucune espèce d'ambition. Il réserve cette dernière à travers une mise en scène épurée, efficace, sublimée par des interprètes jouant très justement leur rôle sans jamais dépasser les limites de la cohérence. Au même titre que A l'Intérieur de Julien Maury et Alexandre Bustillo mais dans un registre radicalement différent, on conseillera aux futures mamans d'aller voir ailleurs...

mardi 30 janvier 2018

Bølgen de Roar Uthaug (2015) - ★★★★★★★★☆☆



Un film catastrophe scandinave, c'est suffisamment rare pour être évoqué. D'autant plus que dès l'introduction des personnages et de leur situation professionnelle, le cinéaste norvégien Roar Uthaug (lequel devrait, Ô mon Dieu, réaliser la prochaine adaptation cinématographique du jeu vidéo Tomb Raider) nous en met plein la vue avec les paysages de Geiranger, petite ville touristique norvégienne encaissée entre deux flancs de montagnes dans la région de Sunnmøre. C'est dans les hauteurs de cette merveilleuse destination prisée des touristes du monde entier qu'intervient le personnage incarné par l'acteur Kristoffer Joner, grande star norvégienne que l'on a pu notamment découvrir dans Naboer et Babycall, tous deux signés par le cinéaste Pål Sletaune en 2005 et 2011. Kristian Eikjord est géologue et travaille pour la Norges Vassdrags- og Energidirektorat qui n'est autre que la Direction des Ressources en Eau et de l'Energie norvégienne, une entité existant réellement depuis 1921. D'ailleurs, si le cinéaste norvégien a choisi de prendre pour cadre un tel décor en invoquant la NVE, c'est parce que Bølgen s'inspire d'un événement qui eut lieu dans le fjord norvégien Norddalsfjord dans la nuit du 7 avril 1973: Un immense glissement de terrain emportant deux millions de mètres cube de rocher provoqua un très important tsunami qui tua quarante personnes.

L'intrigue est donc sensiblement similaire et nous décrit le combat d'un homme face à l'irrémédiable catastrophe à venir. Bølgen est en quelque sorte l'alter ego norvégien du San Andreas du cinéaste canadien Brad Peyton. Mais la comparaison s'arrêtant là, le norvégien montre avec infiniment plus de finesse la bataille menée par un géologue contraint de sauver une population toute entière face à une catastrophe d'une ampleur incroyable. Contrairement au film américain cité ci-dessus, le long-métrage de Roar Uthaug tente avec succès de conserver dans une certaine mesure l'aspect réaliste d'un tel événement alors que le canadien, lui, réalisait la même année, un blockbuster enchaînant des dizaines de scènes improbables. Le ridicule ne tuant pas encore les spectateurs enfermés dans des salles obscures, Brad Peyton se permettait une vision aussi impressionnante que ridicule des ravages commis d'abord par un séisme de magnitude 9.6, suivi d'un énorme tsunami emportant tout sur son passage. Le fils spirituel du médiocre cinéaste allemand Roland Emmerich, en somme.

Dans le genre catastrophe, Bølgen est une belle leçon de cinéma qui prouve qu'il n'est jamais nul besoin d'en faire des caisses pour qu'un film soit réussi. En misant sur la finesse d'un script n'en rajoutant jamais en terme d'événementiel, Roar Uthaug q semble-t-il réalisé l'un des meilleurs films catastrophe de tous les temps, rien que ça. L'un des principaux atouts de Bølgen repose sur une interprétation sans faille et sur le visage d'une population décrite comme une communauté vivant dans la joie et la bonne humeur. Ici, pas de grand méchant. Et même les tensions qui pourraient naître d'un désaccord entre le héros et son supérieur hiérarchique n'ont pas cours dans cette petite station balnéaire. Si le tsunami tant désiré se fait attendre, c'est aussi parce que le cinéaste respecte ses personnages, et donc ses interprètes, et même les spectateurs. C'est ainsi donc qu'il prend le temps de les caractériser. Un bon moyen de les rendre attachant auprès du public. A la suite de cette première découverte du cadre paradisiaque qu'offre Geiranger et de ses habitants, on assiste avec une économie de moyens mais lors d'une scène de tension extrême, à l'effondrement d'une partie de la montagne générant par la suite un très impressionnant tsunami filmé de manière si ingénieuse qu'il semble foncer tout droit sur le spectateur. On a droit ensuite à la recherche des survivants comme dans tout bon film catastrophe. Là encore, le cinéaste joue à merveille avec le cadre (celui de l'hôtel où sont réfugiés l'épouse et le fils de Kristian) et l'élément liquide qui de manière inexorable, se faufile partout.

Bølgen est au final un spectacle d'une grande humanité ne cherchant pas systématiquement à nous en mettre plein la vue. L'efficacité de la mise en scène, la bande-son du compositeur Magnus Beite, les décors fantastiques de Geiranger et la formidable interprétation de tous les interprètes (avec en tête, une fois encore, le norvégien Kristoffer Joner) font du film de Roar Uthaug, l'un des tout meilleurs de sa catégorie, toutes origines et toutes époques confondues. Un must !

lundi 29 janvier 2018

Naboer de Pål Sletaune (2005) - ★★★★★★☆☆☆☆



Il est très intéressant de voir comment la presse et une partie du public sont prêts à réduire certaines œuvres au simple titre de films d'horreur. Ce principe pouvant avoir de lourdes conséquences, on ne s'étonnera donc pas de tomber sur des critiques acerbes relevant de l'ignorance. Comme en fut la victime ce Naboer du cinéaste, scénariste et producteur norvégien Pål Sletaune qui signait là, son troisième et avant-dernier long-métrage à ce jour. Car non, ce long-métrage scandinave (la Norvège, la Suède et le Danemark y ayant contribué) datant de 2005 n'est pas simplement qu'un film d'horreur s'inscrivant dans le quotidien somme toute banal d'un individu abandonné par sa petite amie mais bien un thriller psychologique plutôt effrayant incarnant une vision moderne du Locataire de Roman Polanski sans pour autant en atteindre les mêmes qualités.
Car quoi que l'on en dise, quoi qu'on en pense, il demeure dans Naboer, des similitudes avec l’œuvre du polonais. Comme il en demeure dans bien d'autres par ailleurs (pour exemple, le Musarañas de des espagnols Juanfer Andrés et Esteban Roel), son héros incarné par l'acteur norvégien Kristoffer Joner vit seul dans son appartement depuis que sa compagne Ingrid (l'actrice Anna Bache-Wiig) est partie filer le grand amour auprès de Ake (l'acteur suédois Michael Nyqvist que l'on a pu notamment voir dans la trilogie Millenium).

Pål Sletaune développe donc son intrigue autour du mal-être de son personnage principal tout en lui opposant deux voisines particulièrement collantes et dont le comportement ne laisse rien présager de bon. L'un des défauts majeurs de Naboer demeure dans la caractérisation outrancière des personnages interprétés par les actrices Cecilie A. Mosli et Julia Schacht. Les traits forcés de ces deux spécimens de la gente féminine particulièrement barrées avaient-il besoin d'être si caricaturaux pour que les spectateurs puissent les identifier comme nocives pour le personnage de John? Non, certainement pas. Leur attitude exagérée aura tendance à énerver le spectateur à force de le prendre par la main, et ainsi donc, pour un idiot. Fort heureusement, de Naboer, il reste encore de sympathiques choses à retenir. Comme le personnage incarné par Kristoffer Joner tout d'abord. Plutôt convaincant dans le rôle d'un John fragilisé par sa rupture d'avec Ingrid. Là encore, le trait est forcé. Non pas celui de John, plutôt finement interprété, mais plutôt celui d'une Ingrid au comportement irritant. Au point que l'on n'ait aucune forme d'attachement pour ce personnage qui semble parfois tendre la main pour se faire battre.

Le climat de Naboer est parfois pesant. Peut-être pas aussi lourd que dans Répulsion ou dans Rosemary's Baby (tous deux de Roman Polanski) qui convoquent à leur façon une même prison dorée, mais accentué par une géométrie des lieux assez curieuse et parfois étouffante. Un cadre se modifiant au gré de l'intrigue, certains passages disparaissant purement et simplement jusqu'à un climax final qui se révèle finalement moins surprenant que ce à quoi le spectateur aurait pu ou dû prétendre ( Musarañas oblige).
Les effusions de sang sont rares et n'interviennent que lors des quelques moment de tension opposant John aux femmes qui constituent presque exclusivement son entourage. Le soucis avec Naboer, c'est que son auteur manque véritablement de culot pour se distinguer de la majorité des films proposant ce genre d'intrigue. Pål Sletaune ne fait qu'empiéter sur des plate-bandes déjà foulées bien avant lui. On retiendra tout de même la scène opposant Kristoffer Joner et Julia Schacht durant laquelle l'érotisme un peu morbide aura pour effet d'agir sur les hormones de ces messieurs. Une scène relativement excitante réchauffant à sa manière pourtant peu engageante, une atmosphère toute scandinave. Naboer est au final un long-métrage qui se regarder avec un certain plaisir mais si on aura tôt fait de l'oublier...

dimanche 28 janvier 2018

Dressed to Kill de Brian de Palma (1980) - ★★★★★★★☆☆☆



C'est sans doute l’apanage de beaucoup d’œuvres, et Dressed to Kill (connu chez nous sous le titre Pulsions) ne déroge pas à la règle, mais ce long-métrage de Brian de Palma daté de 1980 a bien faillit arborer un autre visage que ceux de Michael Cain et d'Angie Dickinson puisqu'à leur place étaient respectivement prévus l'américain Sean Connery dans la peau du psychiatre Robert Elliot et la norvégienne Liv Ullmann dans celle de Kate Miller. Mais le premier ayant d'autres engagements (au hasard Meteor de Ronald Neame et Outland : Loin de la Terre de Peter Hyams) et la seconde considérant le scénario de Brian de Palma par trop violent, c'est donc Michael Cain et Angie Dickinson qui prirent leur place. Une situation qui bénéficiera finalement aux spectateurs car le britannique et l'américaine ont su parfaitement intégrer leur personnage dans une œuvre qui une fois de plus chez Brian de Palma, rend hommage à l'illustre Alfred Hitchcock. Ici, les sources d'inspiration du cinéaste américain dont la période la plus intéressante, selon les goûts de tel ou tel spectateur, pourra s'échelonner de 1973 avec Sisters, que beaucoup considèrent avoir bien mal vieilli, jusqu'à Raising Cain datant de 1992 (d'autres argumenteront surtout au bénéfice de l'adaptation cinématographique de la série Mission Impossible qu'il réalisera quatre ans plus tard) lorgne du côté de Sueurs Froides et de Psychose, ce dernier auquel le cinéaste rend hommage par deux fois à travers une scène d'ouverture et une conclusion en forme d'épanadiplose. La fameuse scène de la douche de l’œuvre d'Hitchcock prenant ici une forme éthérée à travers des travellings toujours plus lents.

 
Brian de Palma, encore une fois, use de techniques dont il a très vite appris à se servir. Le split screen étant l'un des principes dont il s'est fait une spécialité afin de mettre en scène des actions située dans un espace-temps concordant. C'est la seconde fois en cette année 1980 que Brian de Palma tourne au cinéma et la seconde fois également qu'il offre un rôle à l'actrice new-yorkaise Nancy Allen, que l'on verra une fois encore chez Brian de Palma dès l'année suivante dans le remake du Blow-Up de Michelangelo Antonioni intitulé Blow Out, laquelle interprétera le rôle de Sally aux côtés de John Travolta. Plus tard, on retrouvera l'actrice dans deux longs-métrages qui compteront comme parmi les plus importants de sa carrière : Philadelphia Experiment de Stewart Raffill en 1984 et Robocop de Paul Verhoeven en 1987. Michael Cain sort du tournage de l'assez navrante suite de L'Aventure du Poséidon qu'avait réalisé en 1972 le cinéaste Ronald Neame (Le Dernier Secret du Poseidon d'Irwin Allen, 1979) et de L'Île sanglante de Michael Ritchie, quant à l'actrice Angie Dickinson, on la vit précédemment dans L'Homme en Colère de Claude Pinoteau aux côtés de Lino Ventura et Klondike Fever de Peter Carter.

Avec Pulsions, Brian de Palma prolonge son goût du suspens en offrant des scènes dont la longueur frise l'hypnotisme, à l'image de celle durant laquelle il explore le personnage incarné par Angie Dickinson jouant au chat et à la souris avec un inconnu avec lequel elle aura ensuite une relation adultère. Une étrange sensation parcourt l'échine. Entre le jeu de séduction, l'acte assez peu avouable où l'on découvre une Kate un brin nymphomane et cette dérangeante rupture de ton qui fait passer ce moment d'intimité romanesque pour un acte sale appuyé par la révélation d'un courrier adressé à l'inconnu et lui signifiant qu'il a contracté une maladie sexuellement transmissible. Un fait que se révélera finalement insignifiant au regard du tragique événement qui viendra mettre un terme à la collaboration d'Angie Dickinson au long-métrage de Brian de Palma. Le cinéaste joue avec un malin plaisir sur le ressenti du spectateur en battant le froid et le chaud avec une régularité bien à lui. La bande originale composée par le fidèle Pino Donnagio a beau planer au dessus de l'oeuvre du cinéaste, cela n'empêche pas à Pulsions d'aborder des sujets aussi délicats que certains troubles de l'identité sexuelle. Transsexualité ! Le mot est lâché. Une maladie traitée sous l'angle de la folie par un Brian de Palma qui aime ses interprètes et se complaît parfois à les filmer durant de longues minutes. Parmi la petite trentaine de longs-métrages du cinéaste, Pulsions est souvent considéré comme l'un de ses tout meilleurs. Et il est vrai que celui-ci est excellent. De par l'interprétation (n'oublions pas les présences de Dennis Franz dans le rôle de l'inspecteur Marino et de Keith Gordon, qui fut le très marquant Arnie Cinningham de Christine, dans celui de Peter Miller, le fils de Kate) et la minutie avec laquelle Brian de Palma a exploité sa mise en scène. A noter que cette œuvre fut inspirée par la jeunesse du cinéaste lui-même. Un classique...

samedi 27 janvier 2018

Babycall de Pål Sletaune (2011) - ★★★★★★★☆☆☆




A ce jour, Babycall est le dernier long-métrage du réalisateur, scénariste et producteur norvégien Pål Sletaune. Un fait navrant, d'autant plus que l'auteur de Next Door en 2005 signe sans doute ici son meilleur film. Sept ans donc que le cinéaste n'a plus donné signe de vie sur grand écran. Au cœur de ce long-métrage emprunt d'une profonde noirceur, une Noomi Rapace convaincante, mère d'un gamin de huit, et fuyant un ex-époux violent. C'est pour demeurer à l'abri de ce dernier qu'Anders et sa mère emménagent dans un appartement dont l'adresse est tenue secrète et n'est connue que des services sociaux. Alors que son enfant a toujours dormi avec elle de peur qu'il ne lui arrive du mal, sa mère, Anna, achète un babyphone à Anders afin qu'elle s'assure qu'il ne lui arrive rien maintenant qu'il va pouvoir intégrer sa propre chambre. La jeune femme qui vit dans la terreur de voir débarquer son ex-mari vit pratiquement recluse dans l'appartement que lui ont confié les services sociaux. Le seul écart de conduite qu'Anna s'accorde, c'est lorsqu'elle emmène Anders à l'école. C'est en allant acheter un babyphone dans un magasin d'électronique qu'elle fait la connaissance de Helge, un employé qui la conseille sur l'appareil à acheter. Dès lors, ils sympathisent. Pourtant, malgré cette fragile lumière éclairant l'existence de deux adultes tristement seuls, de curieux événements vont se produire : en effet, dès la première utilisation du babyphone, Anna y entend très clairement un homme s'en prendre à un enfant. Mais alors qu'elle court vers la chambre d'Anders, craignant que son ex-époux ait découvert l'appartement où ils vivent elle et Anders, elle constate cependant que son fils dort calmement...

Voici donc de quelle manière fort conventionnelle débute Babycall. Un long-métrage qui, s'il a bien du mal à démarrer, finit par réserver une multitude d'excellentes surprises. Au delà des thématiques ultra-rebattues de la violence conjugale, de l'isolement, de la solitude et de la ghost-story actuellement très à la mode, Pål Sletaune dirige en réalité une œuvre bien plus profonde qu'il n'y paraît. Un acte dépressif d'un peu plus d'une heure trente. Dépressif car terriblement sombre. A croire qu'autour de son héroïne, rien ne peut aller dans le sens d'une éclaircie. Même ce nouvel ami qu'incarne une fois encore Kristofer Joner (qui interprétait déjà le rôle principal dans Next Door) n'a pas les allures du héros ordinaire qui égayera l'existence d'une Noomi Rapace incroyablement convaincante.

Pål Sletaune signe une œuvre remarquable en ce sens où l'on ne sait jamais vraiment si ce à quoi l'on assiste revêt la réalité ou si certains événements ne sont que le fruit de l'imagination d'une mère terriblement attachée à son enfant. Babycall est le combat permanent d'une mère à laquelle la garde de son enfant ne semble pas avoir été définitivement confiée. A trop vouloir le protéger, Anna finit par faire parler d'elle. Tout ce qu'elle veut éviter en somme. Pire, on retrouve dans l'intrigue à l'origine du scénario écrit par Pål Sletaune lui-même, le même type d'individu ignoble que le Nils Bjurman
(Peter Andersson) de la trilogie suédoise Millénium. Et puis, il y a le personnage qu'interprète l'excellent Kristoffer Joner, et auquel le cinéaste aurait pu consacrer un peu plus de son temps. Quitte à rallonger l'expérience de quelques dizaines de minutes. Le cinéaste trouve pourtant le temps, dans ces quatre-vingt douze minutes que dure le film, de lui consacrer quelques menus passages. Comme cette terrible scène le voyant accompagner sa mère, hospitalisée, alors qu'elle est en train de rendre son dernier souffle...
Babycall se révèle au final plutôt touchant. Dans le portrait de cette mère surprotégeant son enfant, et de cet homme sacrifiant sa vie pour sa mère. Jamais larmoyant, le film de Pål Sletaune réserve de plus d'authentiques instants de tension et quelques passages dans le domaine du fantastique plutôt bien menés. On notera la très belle partition musicale du compositeur espagnol Fernando Velázquez. Pour toutes ces raisons, on comprendra que le film ait reçu le grand prix au Festival de Gérarmer en 2012 et que Noomi Rapace ait reçu celui de la meilleure actrice au Festival International du film de Rome en 2011... Presque un huit étoiles...

Le Retour des Morts-Vivants 2 de Ken Wiederhorn (1987) - ★★★★★☆☆☆☆☆



Voici donc pour clore le sujet, l'objet du délit. Comprendre, la première séquelle du petit classique de Dan O'Bannon, Le Retour des Morts-Vivants. Sobrement intitulé puisque portant le même titre orné d'un 2 avouant sa paternité avec l'original. Une suite qui, forcément, en a appelé une autre, puis une autre, puis une autre. Cinq longs-métrages en tout et pour tout pour une saga qui n'a fait que s'enliser dans la médiocrité. Pourtant, Le Retour des Morts-Vivants 2 n'est pas le plus mauvais d'entre eux. Mieux, ou moins pire, que les quatrième et cinquième volets, il pèche surtout par un excès d'humour franchement lourdingue et donc, fortement indigeste. Ken Wiederhorn, qui auparavant signa un triste (mais quant même célèbre parmi les amateurs de nanars) Commando des Morts-Vivants en 1977 s'est amélioré en l'espace de onze années même si ses divers passages par le petit écran (dont plusieurs épisodes de 21 Jump Street n'augurant pas forcément que du bon) ne l'auront finalement vu réaliser qu'une poignée de longs-métrages. Dont fait donc partie cette suite presque directe, ou du moins, la plus proche de l'original sorti en 1985 soit trois ans auparavant.
Les fans du Retour des Morts-Vivants premier du nom reconnaîtront au générique deux des interprètes ayant participer à l'aventure proposée trois ans auparavant par Dan O' Bannon, James Karen (qui jouait le rôle de Frank et interprète désormais celui de Ed) et Thom Matthews (qui abandonne celui de Freddy pour incarné Joey).

Alors que le premier volet tournait autour de trois employés d'une entreprise de fournitures médicales (dont le propriétaire), d'une bande de punks et d'un embaumeur, Le Retour des Morts-Vivants 2 met en scène un gamin, sa sœur, un employé du câble, et deux détrousseurs de cadavres dans un quartier « presque » tranquille (deux adolescents s'amusent à emmerder Jesse Wilson, le gamin en question) où vont s'échouer plusieurs barils de trioxine 245, le fameux gaz réveillant les morts. Très vite, les cadavres commencent à sortir de leur tombe. Le coin est très vite envahi et tous les héros de l'histoire finissent par se retrouver et rejoindre un certain docteur Mandel, lequel possède un véhicule qui leur permettra de prendre la fuite. Si Le Retour des Morts-Vivants 2 n'est pas aussi mauvais que les séquelles suivantes, les pitreries de ses différents interprètes (la palme d'or revenant à l'acteur James Karen) cassent l'ambiance. Si Dan O' Bannon avait su mâtiner son œuvre d'une touche d'humour bienvenue, Ken Wiederhorn fait de ses personnages des bouffons à peine amusants ou du moins, en total décalage avec le récit. Tout l'aspect épouvante du film est désamorcé et l'on assiste plus qu'à une succession de pitreries qui ne feront rire que les spectateurs « bon public » !

Si durant trois bons quart-d'heures, le film propose un récit qui se démarque de l’œuvre originale (le cinéaste ayant lui-même écrit le scénario), le long-métrage se rapproche ensuite de son ancêtre. Les personnages vont effectivement être concentrés dans les locaux du docteur Mandel où, le spécialiste lui-même constatera que deux d'entre eux développent des symptômes de mort. On atteint ensuite le summum du ridicule lorsque le cinéaste tente de rendre hommage au clip Thriller de Michael Jackson. A vrai dire, il n'y aura guère que les plus courageux pour aller jusqu'au bout. Les autres passeront leur temps à regarder l'heure, voire le plafond, en espérant que le supplice arrive à terme. Chacun choisira son camp entre cette suite indigeste et ridicule (rien que le jeu de mots foireux de l'affiche laisse augurer du pire) et toutes celles qui auront suivi sans jamais parvenir à faire oublier l’œuvre de Dan O'Bannon. A vrai dire, le seul l'unique qu'il faut avoir obligatoirement vu.

Et comme je ne sais absolument pas comment mettre un terme à ce pauvre article écrit sans la moindre motivation (ce qui se ressentira d'ailleurs très certainement à la lecture), petite anecdote qui ne concerne absolument pas ce film mais davantage son auteur, Ken Wiederhorn, car, qui l'aurait cru, le bonhomme faillit réaliser Body Double en lieu et place de Brian de Palma. Heureusement, la sociétés de production cinématographique américaine Columbia Pictures eut la judicieuse idée de refuser le projet à Ken Wiederhorn pour le confier à Brian de Palma. Imaginez-donc à quoi aurait ressemblé ce très grand film s'il avait été réalisé par l'auteur du Retour des Morts-Vivants 2. Personnellement, j'en frémis d'avance. Brrrrrr !!!

jeudi 25 janvier 2018

Les tueurs qui inspirent le 7ème art: Dennis Rader - B.T.K de Michael Feifer (2008)



De la fiction...

La petite ville de Wichita vit dans la terreur depuis qu'un tueur en série y sème la mort en tuant de jeune femme. Leur corps est retrouvé attaché et montre des traces de sévices corporels et de strangulation. Dennis Rader est un agent municipal qui veille à ce que les lois soient appliquées à Wichita. C'est un homme zélé qui semble prendre beaucoup de plaisir à réprimander les femmes. Marié et père de deux charmantes jeunes femmes, il est surtout celui que redoute la population.
L'individu qui signe les lettres qu'il envoie à la police du surnom de BTK, c'est lui. Tueur impitoyable, il s'en prend non seulement aux prostituées mais également aux mères de famille irréprochables. Il a pour habitude de s'enfermer dans un local indépendant de la demeure familiale et à l'intérieur de laquelle sont enfermés les preuves de sa culpabilité. Prenant en photo ses victimes juste avant qu'elles ne meurent, il les étrangle ensuite, prenant soin qu'elles ne décèdent pas tout de suite en relâchant la pression de ses mains autour de leur cou.
Bientôt, Joe, le pasteur de la paroisse, lui confie la rude tâche de faire un discours lors du prochain office, annonçant ainsi son nouveau rôle de président...

Le tueur en Série Dennis Rader a déjà fait l'objet d'un article dans Cinémart à travers le téléfilm The Hunt for the BTK Killer réalisé par Stephen T. Kay trois ans plus tôt. Plutôt fidèle au fait-divers, l’œuvre s'attardait à reprendre les faits alors même que le récit débutait par l'arrestation du célèbre assassin. B.T.K quand à lui réalisé par Michael Feifer et dont il s'agit du quatrième film, s'était fait au début de sa carrière une spécialité dans l'adaptation de faits-divers réels (Chicago Massacre, L’Étrangleur de Boston, Bundy). Des quatre, B.T.K demeure sans doute le moins bon.

L’œuvre dénote un manque flagrant de moyens financiers et a des allures de téléfilm alors même que The Hunt for the BTK Killer en était un, lui, et lui demeurait pourtant supérieur à bien des égards. Principalement interprété par Kane Hodder, le personnage central est plutôt bien campé. Ayant bien cerné la personnalité du tueur en série qui défraya la chronique entre 1974 et 1991. l'acteur est tout de même assez juste dans son interprétation. Si le film est en deçà de ce que à quoi l'on pouvait s'attendre, les meurtres sont quant à eux assez violents et montrent tout ce que les actes du tueur pouvait avoir de sordide. A part cela, il n'y a rien de vraiment notable et l'on se penchera plus aisément sur le téléfilm de Stephen T. Kay que sur ce B.T.K vraiment médiocre. A savoir qu'une autre adaptation a été produite en 2014, A Good Marriage, réalisée elle par Peter Askin. Il n'est pas impossible alors que l'on revienne dans ces pages sur cet effroyable personnage...


… à la réalité

Dennis Rader a été militaire, responsable de la sécurité, à travaillé pour le bureau du recensement de son état et pour la mairie de Park City avant d'être renvoyé après avoir été arrêté par la police. Il a même obtenu un diplôme de droit. Mais si Dennis rader est célèbre, c'est pour avoir tué dix personnes entre 1974 et 1991. Sa carrière de tueur, il l'exécuta sous le surnom de B.T.K dont les lettres signifient Bind, Torture and Kill (Ligoter, torturer et tuer). Il fut arrêté en 2005 après avoir envoyé à la police une disquette produite à partir de l'ordinateur de l'église même où il officiait, un an auparavant. Dennis Rader a été condamné dix fois à la réclusion à perpétuité...

mercredi 24 janvier 2018

Ôtez-moi d'un doute de Carine Tardieu (2017) - ★★★★★★★☆☆☆



Erwan Gourmelon, veuf, père de Juliette, fils de Bastien, est un démineur breton très consciencieux envers son métier et ses employés. Lors d'un banal test ADN, il apprend que Bastien n'est pas son vrai père. Dès lors, Erwan fait appel à une détective afin de retrouver son véritable géniteur. Lorsque celle-ci lui communique l'identité de l'individu, Erwan enquête en toute discrétion afin de ne pas éveiller les soupçons autour de lui. C'est ainsi qu'il fait la connaissance de Joseph Levkine, un vieil homme attachant avec lequel il va finir par le lier d'amitié, lui révélant qu'il est sans doute son enfant. Par le plus grand des hasards, et dès son retour au bercail, Erwan croise lors d'un accident de la route qui a causé la mort d'un sanglier, Anna, jeune et jolie médecin. L'un et l'autre tomberont sous le charme mais ce qu'ils ne savent pas encore, c'est que la jeune femme est la fille de Joseph et donc, sans doute la demi-sœur d'Erwan...

La magie du cinéma opère à travers le dernier long-métrage de Carine Tardieu (Du Vent dans mes Mollets). Une sensibilité toute féminine qui se ressent à travers ces scènes intimistes remplies de tendresse, d'amour et d'amitié. Une œuvre profonde qui ne souffre d'aucune véritable rupture de ton puisque les différents passages de l'humour à l'émotion se font avec beaucoup de douceur. François Damiens est un peu à l'image de son alter ego Benoît Poelvoorde : il est en effet capable au même titre que son concitoyen belge de s'investir dans de pures comédies ou comme ici, dans un genre parfois plus amer et sensiblement dramatique. L'une des principales qualité du film de Carine Tardieu et de parvenir à éviter l'écueil du misérabilisme. Chacun de ses personnages est admirablement mis en valeur par son interprétation et la manière qu'a la cinéaste de le cadrer et de le mettre en scène. Rarement on aura vu l’intégralité d'un casting être placé au même rang. Aucun des interprètes n'est laissé en retrait, et ce, pour le bonheur du spectateur qui pourra y découvrir tout un panel d'expressions et d'émotions.

Car derrière l'apparente simplicité du récit se cache une vraie profondeur. En effet, Ôtez-moi d'un doute aborde divers sujets tels que la solitude, la vieillesse, l'abandon, les liens familiaux, avec cette petite touche de folie qui parfois vous empêche de fondre littéralement en larmes. Sur un script de la cinéaste elle-même mais de Michel Leclerc et Raphaële Moussafir également, François Damiens y incarne Erwin, ce breton un peu bougon, renfermé, très proche de sa fille et de son père. Alice de Lencquesaing incarne Juliette, enceinte jusqu'aux dents, ignorant l'identité du père de son enfant à venir. On retrouve avec un immense plaisir le toujours épatant Guy Marchand. Quelques rides en plus, mais tellement plus émouvant également. Dans le rôle de Joseph, l'excellent André Wilms, qui au même titre que Guy Marchand incarne un homme vieillissant. Le père génétique d'Erwin. Un homme effrayé à l'idée de se retrouver seul depuis le départ de son épouse. Un aspect de son caractère qui d'ailleurs jouera beaucoup dans sa relation avec Erwan. Anna, c'est Cécile de France. Au départ, jeune femme méfiante. Mais à l'arrivée, femme amoureuse. Mais connaîtra-t-elle de telles implications dans sa relation nouvelle avec Erwan ? Une autre très belle surprise est la découverte du chanteur et acteur français David Boring, interprète d'une dizaine de long-métrages, qui ici joue le rôle de Didier, jeune stagiaire d'Erwan « imposé » par Juliette. Contrairement aux premières apparences, son personnage n'est pas le moins fin de tous. Car de l'idiot qu'il paraît être (aspect de sa personnalité qui ne fait d'ailleurs que s'accentuer), il demeure l'un des personnages les plus attachants. On devine son douloureux passé. Du rire un peu bête et primaire, le spectateur finira par s'y attacher au même titre que les autres héros.




Ôtez-moi d'un doute fait partie de ces quelques films qui avec Le Tout Nouveau Testament ou Un Profil pour Deux ont relancé la comédie en France ces dernières en lui injectant une dose d'émotion et une écriture plus profonde qu'il n'y paraît. Autant dire que les amateurs d'humour strictement attirés par l'humour un peu léger des Dany Boon et Christian Clavier (surtout celui de ce dernier) risquent quelque peu de déchanter. Ce qui serait hautement dommageable lorsque l'on voit la qualité d'une œuvre telle que le dernier film de Carine Tardieu...

David Boring (Naive New Beaters), le Street Style

lundi 22 janvier 2018

From Beyond de Stuart Gordon (1986) - ★★★★★★☆☆☆☆



Pour bon nombre d'individus, le nom de Ken Foree aura sans doute autant d'impact qu'une salade manquant d'assaisonnement. Pour d'autres, par contre, certainement plus rares, sa force d'évocation les renverra à l'époque où les zombies étaient traités avec infiniment moins de mépris que dans les innombrables navets qui sortent depuis quelques années, et surtout, depuis que le thème est devenu une manne financière. En 1978, entouré de David Emge, Scott H. Reiniger, de Gaylen Ross, et dirigé par l'immense George A. Romero, Ken Foree interprétait le rôle de Peter dans le cultissime Dawn of the Dead. Sans doute possible, l'un des deux ou trois plus grands films de zombies de l'histoire du genre. Durant des décennies, ce grand « black » au regard quelque peu globuleux n'était demeuré rien d'autre que ce personnage charismatique combattant dans l'enceinte d'un centre commercial, une horde de morts-vivants à peine décharnés. Qui s'était soucié, alors, de savoir dans quel autre long-métrage il avait bien pu tourner par la suite ? Pourtant, Ken Foree n'a jamais vraiment cessé de jouer, et en quarante ans de carrière, a interprété plus de trente rôles au cinéma. Dont le personnage de Buford 'Bubba' Brownlee dans ce From Beyond qui nous intéresse ici. Il s'agit du deuxième long-métrage de Stuart Gordon pour le grand écran, toujours produit par Brian Yuzna. Certains liens demeurant apparemment indissociables, on notera également le fait que le rapport entre le nom du docteur interprété par l'actrice Carolyn Purdy-Gordon (épouse du réalisateur depuis maintenant cinquante ans) et l'écrivain Robert Bloch n'est pas le fruit du hasard puisque ce dernier et l'auteur de la nouvelle ayant inspiré From Beyond, une fois encore, H.P. Lovecraft, étaient amis. Ce dernier ayant donc volontairement donné le nom de l'écrivain à ce personnage féminin lors de l'écriture de la nouvelle. D'autres corrélations ?

Robert Bloch, encore lui, fut l'auteur du roman Psychose ayant inspiré le chef-d’œuvre d'Alfred Hitchcock. Dont le thème principal fut adapté par le compositeur Richard Band l'année précédente pour le premier long-métrage de Stuart Gordon, lequel participe également à la composition de la partition musicale de From Beyond. Une fois encore, l'acteur Jeffrey Combs est au centre d'un récit qui mêle à nouveau expériences scientifiques et manipulations génétiques. Barbara Crampton reprend du service, cette fois-ci dans le rôle du docteur Katherine McMichaels. Un fois encore, le film propose un portrait de méchant bien gratiné. David Gale est désormais remplacé par un Ted Sorel dont le personnage n'est pas moins obsédé par le sexe que le docteur Carl Hill de Re-Animator. Tous ces menus détails apportent une certaine cohésion dans cet ensemble de films inspirés des ouvrages de H.P. Lovecraft mis en scène par le duo Gordon-Yuzna.

Ceci dit, passons maintenant à l'objet de cet article : From Beyond. intitulé pas moins intelligemment chez nous Aux portes de l'au-delà, le film de Stuart Gordon souffle un véritable vent de perversion qui n'avait pas vraiment lieu auparavant, sauf peut-être lorsque le docteur Carl Hill enfonçait sa tête coupée entre les cuisses de Barbara Crampton lors du final délirant de Re-Animator. Peut-être plus lubrique encore que Hill, quoique la chose soit moins visible dans son regard, le docteur Edward Pretorius apparaît très vite comme un individu pervers que son statut de chercheur ne rend pas moins dérangeant. Amateur de fessées, il se mue en une créature multiforme que n'aurait peut-être pas renié David Cronenberg à un certain moment de sa carrière.

Barbara Crampton, quant à elle, qu'elle porte lunettes et tailleur ou qu'elle se réveille les cheveux entremêlés, elle demeure toujours aussi... désirable. A la seule condition de pouvoir faire abstraction de l'horrible doublage français qui lui donnerait presque les allures d'une maîtresse S.M si sa blondeur ne lui permettait pas de conserver son angélique beauté... Le regard toujours aussi frondeur, Jeffrey Combs interprète un personnage cette fois-ci beaucoup plus fragile. Les effets-spéciaux conçus par un quatuor de spécialistes permettent à Stuart Gordon de laisser libre court à sa délirante inspiration. Quoiqu'ils aient quelque peu vieilli, ils demeurent pourtant assez originaux dans leur conception et leur aspect. Les éclairages parfois outranciers se reflétant sur l'organisme torturé du personnage incarné par Ted Sorel lui confèrent le même aspect érotico-gore que les scènes d'ébats du Society que réalisera trois ans plus tard Brian Yuzna.
Mais au final, From Beyond ne se révèle être qu'une cruelle déception. Pas vraiment en odeur de sainteté avec votre serviteur à l'époque de sa sortie, le long-métrage de Stuart Gordon l'est malheureusement encore moins plus de trente ans après. Si les rares scènes gore et une barbara Crampton sexy retiennent l'attention du spectateur, le récit se révèle assez sommaire. Bien moins sympathique que Re-Animator, cette seconde incartade du cinéaste dans l'univers de H.P.Lovecraft est donc décevante...

samedi 20 janvier 2018

Body Double de Brian de Palma (1984) - ★★★★★★★★★★



Coïncidence ? Lorsque sort sur les écrans américains le 26 Octobre 1984, le dernier né de Brian de Palma Body Double, la présence de deux des interprètes du soap opera Santa Barbara coïncide étrangement avec leur participation au nouveau film de l'auteur de Phantom of the Paradise et Carrie. Lane Davies qui interprétait Mason Capwell du clan familial du même nom et David Haskell qui incarnait Nick Hartley apparaissent donc de manière succincte dans Body Double. De manière à rentabiliser l'affaire en attirant les amateurs de ce qui allait devenir comme l'un des plus populaires soap opera américain, qu'il s'agisse sur sa terre natale ou bien même chez nous, en France, où il connaîtra un bel engouement de la part du public français ? Si l'étroitesse existant entre la diffusion du téléfilm sur NBC et la sortie en salle de Body Double laisse envisager qu'il ne s'agit que d'une coïncidence, cette dernière demeure troublante. Surtout à la vision du long-métrage de Brian de Palma, un hommage évident au cinéma du britannique Alfred Hitchcock (Vertigo), et dont le visuel naïf et l'interprétation quasi télévisuelle de ses interprètes laissent planer un doute. Une peu à la manière de David Lynch et de son Blue Velvet et Brian Yuzna et Society, le cinéaste originaire de Newark dans le New Jersey s'approprie les codes esthétiques du soap opera afin d'y insuffler une aura exhalant le souffre. 
 
Sur un air des plus troublant composé par Pino Donaggio (Telescope), il se dégage de Body Double une extraordinaire sensualité, parfaitement retranscrite à travers l'interprétation de la sublime Deborah Shelton (qui remporta le titre de Miss USA en 1970, on comprend pourquoi), actrice ayant participé à une vingtaine de longs-métrages ainsi qu'à un grand nombre de séries télévisées. Regard vert, intense, corps de rêve. Dont la silhouette bouleverse Craig Wasson, ou plutôt son personnage, Jake Scully. Acteur de seconde zone, trompé par son épouse (Barbara Crampton, pour une apparition de quelques secondes seulement) viré du plateau de tournage où il interprétait le rôle d'un vampire. Mais pour un acteur claustrophobe, demeurer dans un cercueil étant quasiment impossible, il est remplacé par un autre. Sans argent, ni toit, ni travail, il fait tout à fait par hasard la connaissance de Sam Bouchard, un acteur qui comme lui traîne de casting en cours de théâtre. Habitant dans une luxueuse demeure prêtée par un ami, Sam propose à Jake d'y loger durant les cinq prochaines semaines. C'est là que ce dernier fera la connaissance de Gloria (Deborah Sheldon, donc), par l'entremise d'un téléobjectif pointé sur son appartement. La jeune femme, tous les soirs, se donne légèrement vêtue en spectacle. Alors que Sam abandonne l'appartement à son nouvel ami pour les cinq semaines à venir, Jake profite du spectacle donné par Gloria à dix-huit pétantes, tous les soirs. C'est ainsi qu'il découvre qu'il n'est pas seul à la regarder danser à moitié nue devant la baie vitrée de son salon. Un homme que Jake identifie comme étant un indien semble malintentionné...

Dans le rôle de Jake Scully donc, Craig Wasson, acteur qui débuta sa carrière au cinéma avec Le Toboggan de la Mort et y mit un terme en 2006 après sa participation au tournage de Akeelah and the Bee de Doug Atchison. On le vit notamment dans le rôle du Docteur Neil Gordon dans Les Griffes du Cauchemar (troisième opus de la saga Freddy Krueger) ou dans Velocity Trap, œuvre de science-fiction signée Philip J. Roth en 1997, mais c'est bien avec son interprétation dans Body Double qu'il tient son meilleur rôle. Incarnant à la perfection ce personnage effacé, peu confiant en lui, trompé, naïf et timide, ce dernier se « révèle » au moment même où tout semble perdu. C'est au contact d'une autre magnifique interprète que le personnage de Jake se libère véritablement. Car si Deborah Shelton incarnait la sensualité, Melanie Griffith, elle, incarne désormais la sexualité. D'un côté, la brune sensuelle, de l'autre, la blonde sexuelle.

Brian de Palma qui jusqu'ici filmait des personnage dans un visuel de téléfilm stéréotypé qui dans sa globalité relevait de la naïveté, à l'arrivée de Holly Body (Melanie Griffith), le cinéaste chamboule les repères auxquels il nous avait habitué et plonge ses personnages (et nous avec), dans le stupre du milieu de la pornographie. A la danse langoureuse de Gloria, à la petite culotte de dentelle blanche, Brian de Palma préfère désormais le cuir, le latex, et le décor sordide d'un porno-soft servant de cadre au groupe bien réel qu'est Frankie Goes to Hollywood. Ses membres choisiront finalement de tourner leur propre clip pour la chanson entendue dans le film, Relax. D'ailleurs, la réalité rejoignant la fiction, le clip se révélera finalement bien plus glauque que les quelques images que l'on entrevoie dans Body Double. L’œuvre de Brian de palma est également un témoignage de son amour pour le cinéma. Du tournage du film d'horreur, aux décors, en passant par les scènes de casting et les cours de théâtre. Il y convoque également le thème des fausses apparences, aspect que nous n'évoquerons pas ici afin de ne rien révéler du contenu. Toujours est-il que Body Double se révèle être une œuvre troublante, comme dit plus haut, sensuelle et sexuelle, naïve par certains aspects de son approche et finalement assez inattendue dans son approche esthétique. L'un des meilleurs de son auteur. Shelton et Griffith y sont superbes et Wasson excellent... 

  
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