Bienvenue sur Cinémart. Ici, vous trouverez des articles consacrés au cinéma et rien qu'au cinéma. Il y en a pour tous les goûts. N'hésitez pas à faire des remarques positives ou non car je cherche sans cesse à améliorer le blog pour votre confort visuel. A bientôt...

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vendredi 30 septembre 2016

Y a-t-il un Pilote dans l'Avion ? de Jim Abrahams, David Zucker et Jerry Zucker (1980)



Ted Striker (Robert Hays), un ancien pilote de guerre dont l'un des raids militaires avait causé la mort des hommes de son escadrille a gardé des séquelles du drame. Sa fiancée, l'hôtesse de l'air Elaine Dickinson (Julie Hagerty) l'a quitté, mais Ted ne se laissant pas abattre, il décide de la suivre dans un avion pour tenter de la convaincre de revenir vers lui. Mais alors que le vol se passe bien, une intoxication alimentaire causée par un repas à base de poisson fait plusieurs victimes, dont le pilote, le Capitaine Clarence Oveur et le co-pilote Roger Murdock. Il n'y a donc plus personne pour assurer le pilotage de l'avion. Alors qu'Elaine enclenche le pilote automatique, le docteur Rumack s'occupe des malades. Le plus urgent est de trouver un passager capable de piloter l'avion. Le seul à pouvoir prendre les commandes est justement Ted. Aidé d'Elaine, il va tout faire pour que l'engin se pose sans faire de victimes...

Y a-t-il un Pilote dans l'Avion ? marque une date dans l'histoire de la comédie américaine. Il s'agit en effet du tout premier long-métrage des ZAZ, un collectif de scénariste, producteurs et réalisateurs qui se sont spécialisés dans des parodies de films ayant connu un certain succès dans les salle. Pour cette première réalisation, les cinéastes Jim Abrahams, David Zucker et Jerry Zucker se sont inspirés du film Zero Hour! Réalisé par Hall Bartlett en 1957 et dans lequel un équipage était lui-même confronté à une intoxication alimentaire. Mais alors que l’œuvre de Bartlett était traitée d'une manière beaucoup plus dramatique, Y a-t-il un Pilote dans l'Avion ? tourne le sujet en dérision. La spécificité du film, et de tous ceux que les ZAZ tourneront par la suite, est l'enchaînement de gags ininterrompus, dont certains sont visibles au second plan.


Les énumérer tous serait une perte de temps puisque le principal atout de ces derniers est surtout visuel. Le rôle du Dr Rumack est confié ici à l'excellent acteur Leslie Nielsen qui campera le rôle principal de plusieurs des longs-métrages des ZAZ, qui porteront presque tous la marque « Y a-t-il... ? » alors même qu'ils n'auront pas forcément de point commun en matière de scénario (celui-ci et sa suite demeurant indépendantes de la série des Naked Gun). En septembre 2011, le Time Out London situe Y a-t-il un Pilote dans l'Avion ? À la deuxième place de son top cent des comédies. Zero Hour! n'est pas le seul film à avoir été parodié. Dès le début on entend la musique du célèbre long-métrage de Steven Spielberg Les Dents de la Mer alors même que l'on distingue la dérive d'un avion transpercer les nuages. Plusieurs autres références sont également à noter : au hasard, La Fièvre du Samedi Soir, Midnight Express ou encore Pinocchio.


A revoir aujourd'hui, le film tient encore la route et à plutôt bien vieilli. On se surprend même à sourire lors de gags assez osés pour l'époque : la vieille dame s'offusquant de l'homme qui lui propose un verre d'alcool alors même qu'elle s'apprête à sniffer un rail de coke. Les questions tendancieuse du commandant de bord posées au gamin venu visiter le cockpit. Ou la scène explicite durant laquelle Elaine regonfle le pilote automatique (en fait, un ballon de baudruche) dont le bouchon est situé juste en dessous de la ceinture.
Mais l'idée de génie des ZAZ, sans doute, fut d'avoir choisi des interprètes que l'on n'avait pas l'habitude de voir à l'époque dans ce genre de long-métrage : Leslie Nielsen donc, mais également Peter Graves, Lloyd Bridges ou Robert Stack. On reconnaîtra des visages sans pour autant leur mettre un nom. Notamment, l'actrice Barbara Billingsley qui lors d'une scène irrésistiblement drôle traduit les paroles d'un duo d'acteurs noirs incompréhensibles. On retrouve dans le rôle du co-pilote le célèbre basketteur Kareem Abdul-Jabbar qui avait déjà joué dans Le Jeu de la Mort aux côtés de Bruce Lee et dans un épisode de la série L'Homme de l'Atlantide aux côtés de Patrick Duffy. Deux ans plus tard, une suite fut réalisée, cette fois-ci réalisée et scénarisée par Ken Finkleman : Y a-t-il Enfin un Pilote dans l'Avion ? malgré le titre et les interprètes communs au premier, le film n'a donc rien à voir avec la série mise en scène et scénarisée par les ZAZ...

mercredi 28 septembre 2016

Cycle improbable: Themroc de Claude Faraldo (1973)



Themroc, peintre en bâtiment, est le témoin un jour d'un flirt entre son patron et sa secrétaire. Découvert par son supérieur, il se prend une fenêtre au visage et se retrouve maculé de sang. Viré du chantier manu militari par des gardiens de sécurité, l'ouvrier se réfugie dans l'appartement qu'il partage avec sa mère et sa sœur et s'y cloître. Là, il commence à tout détruire, à commencer par le mur donnant directement sur la cour intérieure de l'immeuble. Tout en se donnant en spectacle devant les regards curieux de ses voisins, il attire également la police qui malgré les moyens qu'elle emploie n'arrive toujours pas à se saisir de Themroc.
Sa voisine d'en face, séduite par la tournure que prennent les événements décide d'en faire autant. Armée d'une masse, elle détruit à son tour le mur de la façade et se débarrasse tout comme Themroc de tout ce qu'elle possède en le jetant par le trou béant. Bientôt, c'est tout le voisinage qui semble mué d'une même volonté de toute détruire et d'abandonner tous ses biens...

L'ancien livreur Claude Faraldo, après avoir abandonné son métier, décide d'être réalisateur de films. Il fera d'ailleurs à plusieurs reprises, de ses héros, des livreurs. Cette fois-ci, il s'agit d'un peintre en bâtiment, témoin d'un début d'adultère qui va se révolter contre la société. A commencer par le refus de s'exprimer normalement. Il va en effet se mettre à rugir, crier, gémir, tandis que ses concitoyens, eux, s'exprimeront dans un langage totalement improvisé qui ressemble en réalité davantage à toute une série d'onomatopées et de phrases incompréhensibles.
Themroc, qui dans sa grande liberté d'expression et sa manière d'aborder la société d'alors, est une œuvre profondément anarchique et révolutionnaire. Claude Faraldo adapte sa propre pièce de théâtre «Doux Mais Troglodytes» et engage entre autre pour l'occasion les membres du café de la gare, Romain Bouteille, Coluche, Patrick Dewaere, Miou-Miou et Henri Guybet. A leurs côtés, c'est Michel Piccoli qui endosse le rôle de Themroc.

Bien que le film soit ancré dans une réalité sociale, il a emporté le prix spécial du jury au Festival international du film fantastique d'Avoriaz en 1973. Michel Piccoli remporta quant à lui le prix d'interprétation masculine à ce même festival.

On y retrouve la symbolique des événements de Mai 68, les murs formés de briques et tout ce que contient l'appartement de Themroc et les siens constituant, une fois jetés par le large trou pratiqué à l'aide d'une masse, les fameuses barricades les séparant des autorités chargées de les maîtriser. Le cinéaste nous révèle un monde ou tout semble automatisé. Des transports en commun (dont un métro voyant passer d'immenses vagues d'hommes et de femmes tendant vers un seul et même but), jusqu'au pointage en règle à l'usine. Themroc, le personnage, va jusqu'à même refuser toute forme de matérialisme en se débarrassant du moindre meuble, jusqu'au plus petit objet qu'il possède. Allant même jusqu'à se dénuder et pousser son prochain à faire de même (Patricke Dewaere tentant (sur ordre) de reboucher le trou dans le mur.

Plus fou encore dans sa vision de l'anarchie, Claude Faraldo n'impose plus aucune sorte de règle de bienséance. Et parce que reclus chez lui, Themroc ne peux plus compter que sur lui, les limites imposées par la lois explosent. Inceste et cannibalisme deviennent les normes, l'image de ce flic cuit, puis embroché avant d'être dévoré signifiant sans doute l'abolition de toute forme d'autorité... Dire que Themroc est une œuvre à part serait un euphémisme. Il s'agit d'une œuvre totalement libérée de toutes formes de contingences intellectuelles. Une œuvre folle, outrancière, sauvage et mythique...

dimanche 25 septembre 2016

Ma Loute de Bruno Dumont (2016)



« Jubilatoire », « A hurler de rire », « Luchini Désopilant », « Binoche Géniale », « Formidablement drôle »... voici donc quelques informations distillées par les médias et repris sur l'affiche du film Ma Loute, le dernier long-métrage du cinéaste français Bruno Dumont. Presse et public n'ayant pas l'air d'avoir apprécié le film de la même façon, j'ai voulu découvrir par moi-même à quoi pouvait ressembler le film du cinéaste qui signa deux ans plus tôt la première saison d'une série particulièrement barrée : P'tit Quinquin. De toute évidence, ceux qui ont apprécié celle-ci doivent avoir forcément aimé le film. Comme ceux qui ont détesté Ma Loute n'ont sans doute pas été jusqu'au bout de P'tit Quinquin. Ce qui d'une certaines façon est plutôt logique puisque les deux univers décrit y sont pratiquement identiques. J'imagine encore certains grincer des dents devant des personnages qu'ils auront tôt fait de trouver caricaturaux, ou pire encore, maltraités par un cinéaste qui se moque de ses interprètes amateurs. Sauf que Bruno Dumont n'est certainement pas de ces hommes qui se servent de la naïveté de certains pour en faire son beurre et se moquer d'eux devant sa caméra.

Le cinéaste ne fait que projeter une réalité. Cette des habitants du nord de la France. Et notamment ceux vivant à la campagne. Avec leur accent à couper au couteau et leur façon d'aborder la vie différemment des citadins. Pourtant, contrairement à P'tit Quinquin on note une différence de taille. L'arrivée dans ces beaux paysages de la Côte d'Opale, région côtière française située entre la baie de Somme et la côte belge, d'une famille bourgeoise dont la caractérisation est poussée ici à son paroxysme. On pourrait avoir le sentiment d'un Bruno Dumont frileux depuis les remarques infondées de certains critiques à l'époque de la diffusion de P'tit Quinquin. Pourtant, il n'en est rien. Et la meilleure preuve se situe au cœur même de cette famille paysanne qu'il rend encore plus primaire que celles de sa série puisque ses personnages ne sont plus seulement des individus incultes, incivilisés, bas du front et à la limite de la débilité. Ils sont désormais tout ceci mais bien pire encore : la famille du jeune garçon auquel donne son nom le film est sevrée à la viande humaine. Car si le scénario ne cesse de prendre des chemins de traverses, il s'agit bien de l'histoire d'une famille de cannibale se rendant responsable d'une série de disparitions débouchant sur une enquête menée par deux flics improbables. Un couple de Laurel et Hardy à peine capable de former une phrases complète, surtout lorsqu'il s'agit du personnage campé par Didier Despres dont les talents d'acteurs ne valent certainement pas davantage que ceux de l'interprète principal de P'tit Quinquin, Bernard Pruvost (auquel on soufflait les répliques dans une oreillette).

Au milieu d'un groupe d'amateurs, trois grands noms du cinéma français : Juliette Binoche, Valéria Bruni Tedeschi et surtout Fabrice Luchini. De ce dernier on retiendra son incroyable interprétation du personnage d'André Van Peteghem. Alors qu'il a toujours été choisi pour ses talents d'orateur, voici que Bruno Dumont en fait un individu replié PHYSIQUEMENT sur lui-même. Il est aussi l'ultime reflet caricatural du bourgeois : sur maniéré, détenteur d'un accent aristocratique dans lequel transpirent le lucre, la suffisance et le mépris pour les gens de condition plus modeste, il prouve cependant à plusieurs reprises un certaine sens de la modestie face à ce mari qu'il estime représenter la « quintessence de la beauté ». On a pourtant parfois l'impression d'un homme face à la cage d'un singe enfermé derrière des barreaux et pour lequel il ressent une sorte d'exaltation devant cette bête qu'il découvre pour la première fois.

Juliette Binoche quant à elle pousse encore davantage le trait. Plus proche de la caricature péjorative de la bourgeoise arrogante, elle en fait des tonnes, jusqu'à théâtraliser le drame qui la touche lors d'une scène remarquablement interprétée face à un Luchini/Van Peteghem abasourdi. Outre les présences à l'écran de Valéria Bruni Tedeschi, Jean-Luc Vincent et Brandon Lavieville, c'est la jeune et androgyne actrice Raph qui dans le rôle de Billie Van Peteghem ne cesse de nous intriguer. Sans jamais véritablement dévoiler son identité sexuelle, elle campe un personnage touchant et véritablement troublant. Quant à l'histoire en elle-même, c'est du Dumont. Rien ne s'y déroule comme l'on pourrait s'y attendre. Mais le véritable propos n'étant pas là, il faut simplement se laisser guider par la folle inspiration du cinéaste. Seul petit reproche que l'on pourrait faire au film : sa durée. Il aurait mérité d'être un poil plus court car certaines scènes redondantes traînent le film en longueur...

Médecin de Campagne de Thomas Lilti (2016)



En attendant de produire un article digne d'intérêt consacré à High-Rise de Ben Weathley, j'ai décidé de réserver celui-ci à Médecin de Campagne. « Un pas en avant, deux pas en arrière ». C'est un peu dans cet état d'esprit que je me suis lancé dans le visionnage de ce long-métrage signé Thomas Lilti qui pour moi demeurait jusqu'à maintenant un parfait inconnu. En découvrant la bande-annonce, j'avais le sentiment que le film ne serait qu'une comédie comme il en existe tant d'autres. De celles qui confrontent deux univers. Deux chocs culturels. Deux manières d'aborder la vie. J'en ressors avec le sentiment d'avoir échappé à tout ce que je redoutais. Car s'il y a bien un film qui mérite notre attention et qui, sans totalement fuir ses responsabilités d’œuvre partiellement humoristique, parvient à nous rendre attachants ses personnages et leur cadre de vie sans pour autant nous noyer dans un flot ininterrompu de clichés, c'est bien celui-ci. Médecin de Campagne n'est peut-être pas le film du siècle ni celui de la décennie, il est sans conteste l'un des plus réussis de cette année 2016.

Que l'on adhère ou pas à cette perspective, rien ni personne ne peut nier que la présence des excellents François Cluzet et Marianne Denicourt en soit la principale cause. Lui, est ce médecin de campagne, considéré comme l'un des plus importants acteurs dans la vie de ce petit village paysan français. Elle, est celle que lui a envoyé un proche collègue qui a décelé chez lui une tumeur du cerveau. Bien sûr, les stéréotypes d'usage vont bon train. Surtout au commencement. Entre Jean-Pierre Werner qui voit d'un œil modérément positif l'arrivée du docteur Nathalie Delezia, et elle qui tente de se fondre dans un paysage qu'il a mis tant de temps à façonner, le contact est rude. Mais finalement, pas aussi dur qu'on aurait pu le craindre. Car le propos de Médecin de Campagne ne se situe en réalité pas à ce niveau. Nous ne sommes pas vraiment en face d'une œuvre qui voudrait absolument jouer avec les codes du genre pour n'en extraire qu'un sujet maintes fois évoqué par le passé.

Médecin de Campagne est avant un long-métrage d'une grande humanité, VECU par des personnage eux-mêmes, très humains. Thomas Lilti ne cherche absolument pas à créer une œuvre divertissante. Et cela, François Cluzet et Marianne Denicourt semblent l'avoir compris. L'une des grandes forces du film est d'accompagner du début jusqu'à la fin des personnages secondaires devenant finalement au fil du récit d'une importance considérable dans le développement de ses principaux interprètes. Entre l'accompagnement de Monsieur Sorlat, vieil homme dont les jours sont comptés (le formidable Guy Faucher) et Alexis (le très attachant Yohann Goetzmann), jeune homme affligé d'un retard mental, ce sont les rapports entre ces patients et leurs médecins qui cimentent la personnalité de ces derniers.

La mise en scène est irréprochable. A aucun moment nous n'avons l'impression que la campagne et ses habitants soient traités de manière absurde ou irrespectueuse. François Cluzet a ce grand talent d'interpréter un personnage malade sans que cela ne passe par un comportement outré qui le décrédibiliserait. Marianne Denicourt campe quant à elle un tout nouveau médecin de la ville s'intégrant avec une très grande finesse dans un univers où les codes en matière de pratiques médicales sont sensiblement différents des nôtres. Médecin de Campagne est donc une totale réussite...

Lights Out de David F. Sanberg (2016)



Si Lights Out ne vous évoque rien en particulier, c'est sans doute parce que les réseaux sociaux demeurent encore un grand mystère pour vous ou que dormir dans le noir vous fait si peur que vous n'osez même pas regarder une émission consacrée au sujet. Lights Out, avant de devenir un long-métrage, c'est aussi et surtout un court d'un peu moins de trois minutes qui a fait beaucoup de bruit en raison de son efficacité en terme d'effroi. C'est peut-être d'ailleurs son tout petit format qui le rend si efficiente l'angoisse qui en découle. Deux minutes et quarante secondes ont suffit pour convaincre le public, les sociétés de production New Line Cinema, Atomic Monster et Grey Matter Productions, ainsi que la société de distribution Warner Bros. Pictures de signer pour une adaptation au cinéma.

La première question que l'on se pose alors est de se demander dans quelle mesure une œuvre de quatre-vingt une minutes pourrait apporter de plus quand tout est déjà contenu dans le court-métrage. Et même si le cinéaste David F. Sanberg, auteur de l'original, remet le couvert, rien ne nous assure que l'impact sera identique. On le sait tous, Lights Out sur grand écran n'est qu'une histoire de fric. Surtout pour les sociétés de production et de distribution, car pour David F. Sanberg, le véritable enjeu est de confirmer une bonne fois pour toute ses capacités en tant que réalisateur pour le cinéma. Alors, qu'en est-il ? La version cinématographique vaut-elle que l'on quitte le confort de son canapé pour celui plus étroit d'un siège de cinéma ?

La réponse demeurera en suspens, ne pouvant refléter l'avis général puisque les amateurs de films d'horreur ont tous un bagage en matière de connaissance de film d'épouvante qui diffère de celui des autres. L'impact lui-même est différent selon que l'on est hermétique ou pas à certains procédés. Ici, le jump scare. Cette fâcheuse habitude qu'ont les cinéastes d'intégrer des interventions brutales appuyées dans la majeure partie des cas par un bruit sonore lourd et très puissant. La réelle véritable idée du film, ce sont les apparitions intermittentes de l'entité, que l'espace dans lequel elle évolue soit éclairé ou pas. A part ça, c'est presque du déjà vu. Les fantômes asiatiques ont déjà fait beaucoup mieux depuis quelques années déjà et David F. Sanberg ne peut plus alors compter que sur sa mise en scène et sur le jeu des actrices et acteurs.

L'histoire est toute simple : Rebecca a toujours eu peur du noir ; Tout comme son demi-frère Martin d'ailleurs. Alors que son père est parti alors qu'elle était toute gamine, celui de Martin est mort récemment dans d'atroces circonstances (égorgé par la créature du film dont la silhouette n'est malheureusement pas gardée secrète bien longtemps). Le jeune enfant vit avec sa mère qui depuis des années suit un traitement médical assez lourd après avoir passé quelques temps dans un institut psychiatrique. Persuadée que son demi-frère court un danger en restant vivre avec leur mère, Rebecca décide de passer à l'action et de l'emmener chez elle. Malheureusement, la jeune femme ne fait que déplacer le problème. C'est en découvrant des documents chez sa mère qu'elle découvre que celle-ci et l'entité qui se fait appeler Diana ne sont pas tout à fait étrangères l'une pour l'autre...

Beaucoup moins angoissant que le court-métrage du fait de sa longueur et donc des quelques passages où il ne s'y passe rien de véritablement réjouissant, Lights Out n'est pas si mal non plus. Il demeure dans la grande tradition des films d'épouvante à la mode depuis quelques années et se situe dans le milieu du classement parmi les plus effrayants. Mais pas de quoi faire peur à un véritable habitué du genre...

samedi 24 septembre 2016

Welcome to New-York de Abel Ferrara (2014)



J'avoue, lorsqu'a été annoncé le tournage de Welcome to New-York d'Abel Ferrara, et connaissant le bonhomme, j'ai ressenti comme une forte douleur à la poitrine. Merde, ce grand homme, des traumatiques Bad Lieutenant et MS 45 allait donc vendre son âme au Diable. Et puis l'affaire DSK s'est dissipée, et avec elle, le souvenir de cette annonce tapageuse d'un tournage s'en inspirant. Frileuse, la France éclipse sa sortie en cinéma, et n'étant pas un adepte du VOD, j'oublie même jusqu'à l'existence du dernier né d'Abel Ferrara. Et puis, il y a quelques jours, l'irrépressible envie d'écrire sur The Addiction (ça y est, le titre est lâché), l'un des meilleurs films de son auteur, m'a donné une autre envie : celle de découvrir quelques-unes des œuvres que j'avais volontairement évité de regarder jusqu'à maintenant. GO GO Tales, 4H44, et maintenant Welcome to New-York. Et si dans le titre New-York n'apportera pas autant de bonheur et de gloire à Abel Ferrara que lors de la sortie de son excellent King of New-York, on peut se demander dans quelles mesures les critiques négatives à l'encontre de Welcome to New-York ne seraient pas exagérées.

Car en fin de compte, et malgré tous ceux qui ont tenté d'empêcher le tournage ou de nuire à sa réputation, même bien avant sa sortie en VOD ou en DVD, l’œuvre de Ferrara n'est pas aussi mauvaise que tant de personnes l'affirment. Évidemment mal reçu dans notre pays, le film passe à Cannes en marge du festival. Gilles Jacob affirmant sur RTL que les producteurs du film ont pris en otage le prestige et l'image de marque de Cannes en parasitant, comme « des coucous dans un nid », les œuvres présentées en compétition (Wikipedia). Grotesque.

Welcome to New-York n'est certes pas le meilleur film d'Abel Ferrara. Mais il n'est pas non plus le moins réussi de sa carrière. En abandonnant logiquement Willem Dafoe pour un Gérard Depardieu dont la silhouette colle mieux à celle de celui dont le scénario s'inspire, le cinéaste offre à notre Gégé national un rôle à la mesure de son talent. Prêt à tout sacrifier, jusqu'à même sa nudité pour l’œil voyeur de la caméra, Gérard Depardieu se fout à poil. Isabelle Adjani, quant à elle prend la fuite sans même être montée sur le plateau de tournage. Aurait-elle réellement été déçue par le scénario ou aurait-elle eu peur de nuire à sa carrière d'actrice ? Peut-être nous délivrera-t-elle la clé du mystère sur son lit de mort, toujours est-il que c'est l'actrice américaine Jacqueline Bisset qui prend sa place et incarne l'alter ego fictionnel d'Anne Sinclair.

Si Welcome to New-York a déçu une part du public (je ne parle même pas de ceux qui l'on assassiné sans même l'avoir vu), c'est peut-être aussi parce qu'Abel Ferrara aborde le sujet sous un angle inattendu. Le cinéaste n'a pas eu l'intention d'en faire un show spectaculaire mais plutôt une œuvre intimiste suivant la trace d'un individu sur lequel beaucoup d'espoirs en matière de politique sont fondés (son épouse le rêve président de la république française). La caméra de Ferrara suit scrupuleusement Depardieu et son personnage d'homme public accro au sexe qui a eu la malencontreuse idée d'agresser sexuellement une femme de ménage qui elle, n'a pas hésité à porter plainte. S'ensuivent donc l'arrestation et l'emprisonnement (qui donnent quand même lieu à de très intéressants moments de cinéma), et de très timides passages consacrés au harcèlement médiatique et au procès. Deux éléments fondamentaux qui ici, demeurent très largement éludés. En tant que Biopic, Welcome to New-York se révèle assez décevant, mais en tant qu'oeuvre personnelle, le film demeure plutôt agréable à suivre. Comme écrit plus haut, le film n'est pas le pire qu'ait tourné son auteur. Et retrouver l'immense Depardieu est toujours un plaisir. Un Gérard qui pourtant à affirmé plus tard avoir regretté de tourner auprès d'Abel Ferrara...

vendredi 23 septembre 2016

4H44 d'Abel Ferrara (2011)



Lui, c'est Cisco, elle, Skye. Deux amants, deux artistes qui pour cette dernière journée sur Terre ont décidé de rester unis, seuls dans leur appartement, afin d'affronter ce qui va sceller le sort de l'humanité et de toute vie sur terre : la fin du monde. Parce que l'homme n'a jamais su véritablement prendre conscience du danger, demain matin, à 4h44 très précise, la couche d'ozone aura totalement disparue et avec elle, l'absorption des rayons solaires ultraviolets ne sera plus possible.

« Pourquoi tu t'rases ? » Skye
« Pour toi. Je l'fais pour toi, je sais qu't'aime pas quand ça pique. » Cisco

Tout ou presque est contenu dans ces deux phrases récitées par les deux principaux acteur de 4H44, un drame de science-fiction sorti en 2011 et réalisé par Abel Ferrara. Willem Dafoe et Shanyn Leigh. Lui veut encore y croire, et pour cela, il n'a pas changé ses habitudes. Même s'il va connaître des hauts et des bas, mettant à rude épreuve les espoirs qu'il a fondé sur l'hypothétique idée que tout pourrait finalement se dérouler autrement le moment venu. Elle, a déjà abandonné. Et pour passer ces quelques heures qui les séparent de la mort, elle peint. Encore et toujours. Ressenti et vision apocalyptiques s'entremêlent dans son œuvre.
Dix ans après les événements du 11 septembre 2001, le fantôme des victimes des attentats qui ont causé la mort de milliers de personnes et la chute du World trade Center hante le film d'Abel Ferrara. C'est du moins ce que semblent ressentir Cisco et Skye. Trois ans plus tôt, le cinéaste Roland Emmerich sortait le prophétique 2012 qui n'était en fait que l'un des nombreux augures de tout un pan du cinéma américain basant son œuvre sur une épouvantable surenchère en matière d'effets-spéciaux.

En 2011, curieusement, deux projets coïncident. Comme coïncidèrent en 2009 deux œuvre portées par deux univers post-apocalyptiques saisissants (La Route de John Hillcoat et Le Livre d'Eli de Albert et Allen Hughes). Deux œuvres qui s'éloignent du style ravageur et ravagé imposé par le tout Hollywood. D'un côté, le Melancholia de Lars von Trier. Une œuvre riche, mais tellement ennuyeuse qu'elle laissait craindre le pire concernant le versant underground imposé par la présence d'Abel Ferrara sur le projet 4H44. Tout comme Lars von Trier, lui non plus n'abuse d'aucun effet de surenchère. Tout s'y déroule comme n'importe quel quotidien de n'importe quel individu sur Terre. L'environnement est au cœur du sujet. La famille également. La religion n'est peut-être pas la principale préoccupation du cinéaste cette fois-ci mais elle a elle aussi droit à sa part du gâteau.

Abel Ferrara signe curieusement l'un des plus beaux films sur le sujet de la fin du monde. Comme l'un des derniers soubresauts d'un ancien génie du septième art qui se serait un peu trop dilué avec le temps. Encore une fois, c'est pratiquement son acteur fétiche Willem Dafoe qui fait tout le travail. Car d'une manière générale, et c'est peut-être aussi ce qui fait son charme, Abel Ferrara n'a pas l'air très à l'aise avec sa caméra et la laisse fouiner à peu près partout dans le décor, semblant n'avoir pas vraiment d'emprise sur elle. Le cinéaste continue d'explorer l'âme humaine mais cette fois-ci avec davantage de retenue. Comme s'il fallait respecter ceux qui bientôt ne seraient plus. Le film aurait pu être ennuyeux, pourtant, Ô miracle, le charme agit sur le long terme. On regretterait presque qu'il ne dure pas davantage car en moins d'une heure trente, Abel a décidé que le tour de la question était fait. Et pourtant, il y en aurait eu des choses à raconter. Des destins promis au meilleur, comme d'autres au pire et dont la caméra a choisi de laisser la vie en suspens.
D'où l'on reconnaît le cinéma de Ferrara, qui avec cette fin sans chichi laisse la place à l'imaginaire et fait preuve d'un immense respect pour ses interprètes et leur personnage. Un vrai grand et beau film...

jeudi 22 septembre 2016

GO GO Tales d'Abel Ferrara (2007)



Avant d'aborder une œuvre d'Abel Ferrara à laquelle je tiens tout particulièrement, j'ai décidé de m'amuser un peu en parcourant quelques longs-métrages qu'il a réalisé depuis que j'ai décidé de lui être infidèle et d'aller voir ailleurs. En fait, depuis qu'il a tourné cet affreux remake de l'excellent L'Invasion des profanateurs de sépultures de Don Siegel qui connut sa meilleure relecture auprès du cinéaste Philip Kaufman en 1978 avec L'Invasion des profanateurs. Et pourtant, si l'on regarde dans la chronologie du cinéaste, on découvrira que le film dont je parlerai bientôt (et dont je préfère pour le moment garder le secret) lui est postérieur. Mais tout s'explique, hors cela, nous le verrons beaucoup plus tard. J'ai donc pioché au hasard. Sans lire le moindre synopsis et sans me référer à aucune sorte de classement ou de notation. Pour une fois, j'ai aussi décidé de respecter la chronologie des sorties. C'est ainsi que le premier long-métrage dont je vais parler est GO GO Tales qu'Abel Ferrara a tourné durant l'année 2007.

GO GO Tales, c'est l'histoire d'un cabaret chic dont l’affluence s'amenuise de jour en jour. Les danseuses qui s'y produisent n'ont pas touché d'argent depuis deux jours et pour cause, celui qui dirige le Paradise, Ray Ruby, dilapide les recettes en s'adonnant à son vice : le loto. Mais tout va s'arranger car enfin, il a gagné. Dix-huit millions de dollars. De quoi relancer la machine, surtout qu'il a plein de projets en tête. Il lui suffit juste de retrouver le billet gagnant qu'il a malencontreusement égaré. Et sans celui-ci, aucun chance d'empocher l'argent. Les danseuses veulent leur pognon, et sans lui, plus de représentation. En plus, la propriétaire vient de débarquer et menace de virer tout ce petit monde. Si jusqu'à maintenant le Paradise a maintenu ses portes ouvertes, c'est surtout grâce à l'apport financier de Johnie, le frère de Ray. Mais celui-ci a décidé de fermer les vannes et d'envoyer son frère bronzer sur une plage. Mais Ray n'est pas de cet avis...

Tout GO GO Tales semble tenir dans pas grand chose. C'est du moins l'impression que donne le film d'Abel Ferrara qui nous noie dans un trop plein de filles qui se trémoussent inutilement sur scènes. Les danses sont un peu vaines, pas du tout sexy, d'un amateurisme qui rendrait l'ensemble un peu glauque si l'on n'avait pas l'impression parfois de regarder un téléfilm réalisé pour une chaîne du câble de petite envergure. La caméra se déchaîne au beau milieu des clients, d'un cuisinier qui tente de se débarrasser de ses Hot-dogs Bio, du service d'ordre, des collaborateurs des frères Ruby, et de danseuses de plus en plus nerveuses à l'idée de ne pas toucher leur comptant de billets verts. Tout le monde passe devant la caméra mais Ferrara semble n'en avoir rien à faire. Une Asia Argento exagérément vue comme une icône de la provoc' qui n'offre qu'une performance très moyenne, de jolies filles mal cadrées, et surtout, oui surtout, un show mal écrit. Des danses ennuyeuses qui manquent de piment, de sexe, de sueur et de gros plans.

Mais le Paradise de Ferrara, en demeurant un endroit chic où les clients n'ont pas droit de toucher, seulement de regarder, condamne le spectateur à l'ennui. Ce qui sauve en réalité le film du naufrage, c'est bien la présence de l'acteur fétiche du cinéaste, Willem Dafoe. Willem Dafoe le conteur, le chanteur, le régisseur, l'animateur, le joueur. Ferrara y bâcle sa mise en scène et pourtant, Dafoe y demeure royal, impérial, salvateur. Les quelques sursauts d'intérêt que génère GO GO Taless sont le fruit de sa présence sur la scène. La sienne, mais celle aussi de l'acteur Matthew Modine qui semble ici échappé d'un quelconque long-métrage de David Lynch. Si le cinéaste s'était donné les moyens de suivre scrupuleusement son œuvre au lieu d'aller, sans doute, écluser des bières au fond de la salle, GO GO Tales aurait pu être un vrai bon film. Il n'en demeure seulement qu'un curieux petit film qui manque d'ambition. Et c'est bien dommage...

mercredi 21 septembre 2016

Pialat/Depardieu : Police de Maurice Pialat (1985)



Alors qu'un réseau de drogue sévit entre Paris et Marseille, l'inspecteur Mangin est sur les nerfs. En questionnant un certain Claude Laouki, il apprend que les frères Slimane en sont les principaux responsables. Avec l'un de ses collègues, il se rend chez l'un d'entre eux, le jeune Simon, qui vit avec une certaine Noria. C'est à ce moment là qu'arrivent Lambert et Marie Vedret. Le premier est avocat et a l'habitude de travailler pour les frères Slimane. Mais il a beau tenter de faire libérer Simon, il n'y parvient pas. Quant à Marie, il s'agit d'une jeune commissaire en fin de stage avec laquelle Mangin va se comporter en véritable macho. Le flic va se comporter très violente envers Noria, mais également envers un individu suspecté d'être l'auteur de meurtres visant des personnes du troisième âge...

Police est la seconde collaboration entre le cinéaste Maurice Pialat et l'acteur Gérard Depardieu. Cinq ans après Loulou et deux avant Sous le Soleil de Satan, le réalisateur lui jette dans les bras pour l'occasion la jeune actrice Sophie Marceau qui jusqu'à maintenant n'a joué que dans les deux volets de La Boum de Claude Pinoteau, Fort Saganne d'Alain Corneau, et son premier Zulawski, L'Amour Braque. Depardieu y incarne un flic robuste, déterminé, un brin macho (voire misogyne), usant de violence quand il cela lui semble nécessaire, face à une Sophie Marceau complice d'un trafiquant de drogue, uniquement intéressée par l'argent. Une menteuse et une voleuse qui n'hésitera pas à voler son compagnon en dérobant le fruit du trafique de ses frères et lui. Contrairement à Loulou, Police semble avoir été interprété de manière beaucoup moins improvisée. Le climat fut orageux sur le tournage et les larmes de l'actrice lors de son interrogatoire face à un Mangin agressif furent réelles. Maurice Pialat exigeant d'elle une interprétation à l'opposé de ce qu'elle avait l'habitude de donner face à la caméra, le trouble de Sophie Marceau n'en fut qu'amplifié.

Aux côtés de Marceau et Depardieu, on retrouve le « duo » formé par Richard Anconina et Sandrine Bonnaire. L'un est l'avocat des voyous, l'autre une jeune prostituée qui a bien du mal à se débarrasser de son ancien maquereau. Maurice Pialat forme ainsi des couples pour le moins étonnant puisque Sophie Marceau et Gérard Depardieu eux-même s'acoquinent l'un et l'autre. Beaucoup plus « ludique » que la première collaboration entre le cinéaste et l'acteur, Police conserve malgré tout les éléments qui donnent au cinéma de Pialat un parfum de vérité. Et cela se voit durant les passionnants interrogatoires dont font l'objet les différents suspects. Avec Loulou, il s'agissait pour Pialat de faire interagir deux milieux sociaux bien différents, ceux d'une jeune femme aisée et d'un voyou. Une fois encore, le cinéaste crée une relation unique entre un flic et une jeune délinquante. Comme entre un avocat et une prostituée. Des mondes qui s'entrechoquent mais qui ne laissent jamais sur le bord de la route une certaine émotion.

Chacun livre à sa manière une très belle interprétation, au point que l'on est loin d'imaginer l'esprit dans lequel a été tourné le film, Anconina et Pialat s'étant régulièrement disputé durant le tournage, ce dernier mettant également à rude épreuve la participation de Sophie Marceau. Émouvante puisque déversant de réelles larmes lors de son interrogatoire, elle a cependant bien du mal à nous faire oublier le personnage de Nelly campé par Isabelle Huppert dans Loulou. Et si la comparaison s'arrête là, les deux œuvres n'ayant aucun rapport, le film aurait sans doute gagné en intensité si Maurice Pialat avait fait le choix d'y faire interpréter le rôle de Noria par Isabelle Huppert. Toujours est-il que Police est un excellent film...

mardi 20 septembre 2016

Equals de Drake Doremus (2015)



Le monde de Equals proscrit toute forme de sentiments. Contrairement à The Lobster du grec Yorgos Lanthimos dans lequel être célibataire est synonyme de sentence, l'amour entre deux êtres y est formellement interdit. Éprouver des sentiments envers un autre individu ou toute autre forme d'affection est considéré comme une maladie. Le S.O.S ou, Syndrome d'Ouverture Sensitive. Chaque individu vit selon des règles strict. Les contacts physiques sont interdits et chacun cherche à découvrir des vérités dont les origines leur semblent provenir d'un lointain espace. Mais alors qu'un jour Silas perçoit dans le comportement de la jeune Nia les signes avant coureurs du S.O.S, il commence lui-même à ressentir des troubles étranges. Peu à peu, elle et lui vont se rapprocher l'un de l'autre. Cachés dans les toilettes de l'organisation à laquelle ils collaborent, il commencent d'abord par s'effleurer. Puis ils s'embrassent. Et parce qu'ils tombent follement amoureux l'un de l'autre, ils finissent par s'aimer physiquement.
Il existe cependant un médicament permettant d'annihiler toute forme de sentiments. Mais ses effets sont temporaires. La recherche médicale est cependant en train de mettre tout en œuvre pour créer un remède qui effacera définitivement ceux-ci. Nia et Silas n'ont pourtant pas l'intention de rejeter les liens affectifs qui les unissent et décident de rejoindre un groupe de clandestins dont les membres sont eux-mêmes atteints du S.O.S...

Le récit de Equals du cinéaste Drake Doremus est une dystopie. Soit une contre-utopie dans un monde effaçant toute forme de sentiments. Cette absence de ressenti est également représentée par un design général en monochromes. Des décors minimalistes magnifiques qui projettent l'état d'esprit et la volonté de ceux qui y vivent vers cet extérieur verdoyant et si peu accessible qui entoure la cité. L'idée n'est pourtant pas toute neuve, car des récits d'anticipation dans lesquels sont plongés des individus auxquels ont tente de faire croire que la vie rêvée est celle qu'on leur impose n'est pas récente. De L’Age de Cristal où l'existence est réglée de telle manière que chaque personne meurt lors d'une cérémonie lorsque sonne sa trentième année, jusqu'à The Lobster, sorti l'année dernière, où l'on est un hors la loi condamné à vivre dans la clandestinité lorsque l'on a choisi de demeurer célibataire, le sujet est relativement encombré.

Le rythme impulsé par le cinéaste est du même ordre que le récit et l'environnement. Tout s'y déroule en apesanteur, et pourtant, le spectateur ne peut y montrer le moindre signe d'ennui tant cette histoire d'amour que vont vivre Nia et Silas est touchante. Eux dont on a formaté dès cinq ans le cerveau, comme l'ensemble de la population, afin qu'ils ne puissent ressentir aucune forme d'émotion, vont connaître leurs premiers émois amoureux. Touchants comme deux individus qui découvrent « l'autre » par le toucher pour la première fois de leur existence. Ce que l'on pourra reprocher à Equals, c'est le manque d'explication concernant les fondamentaux ayant un jour poussé l'humanité à avoir recours à de telles pratiques que l'annihilation des émotions. L'ambiance du film est soutenue par de magnifiques éclairages et la très belle partition musicale du compositeur Sascha Ring. Equals est une très belle surprise, magnifiquement interprétée par ses deux principaux protagonistes...


lundi 19 septembre 2016

Antéchronologie en noir et blanc - Le Couteau dans l'Eau (1962)







Après avoir tourné une dizaine de courts-métrages dans son pays natal, le cinéaste franco-polonais Roman Polanski s'essaie au long-métrage en 1962 avec Le Couteau dans L'Eau. Comme il en sera question dans son troisième film Cul-De-Sac en 1966, le cinéaste aborde le sujet de la dualité. Et comme cela sera aussi le cas dans celui-ci, l'univers des personnages est déjà restreint par la présence d'une immense étendue d'eau. A bord d'un petit voilier, trois individus. Un couple marié, aisé, et un jeune étudiant qu'ils ont pris en stop.

Andrzej...
... est un homme d'à peu près quarante ans, peut-être même un peu plus. Il est le propriétaire d'un petit voilier et d'un compte en banque bien fourni. C'est l’intellectuel du trio, bien qu'il lui arrive de suivre les matchs sur sa petite radio de voyage. L'idée de situer l'intrigue sur un bateau, Roman Polanski la développe d'abord parce que la voile le passionne depuis une huitaine d'années. C'est sa compagne d'alors, une certaine Kika Lelinska, ancienne championne de ski avec laquelle ils forment un couple libre, qui lui apprend les rudiments de la voile. Ses codes également, dont le mépris pour les terriens se lit ici sur le visage d'Andrzej, le propriétaire du voilier. Afin d'augmenter l'enjeu social, le cinéaste ne cesse de réécrire les dialogues et engage l'acteur Leon Niemczyk. Un brin maniéré dans sa façon d'aborder son personnage, il interprète de manière idéale un Andrzej arrogant et sûr de lui. Il a d'ailleurs bien raison puisque lors des quelques duels qui l'opposent au jeune étudiant il conserve à chaque le dessus.

Krystyna...
… est l'épouse d'Andrzej. Elle ne doit pas avoir davantage qu'une trentaine d'année. On lui en donnerait presque un peu moins si elle n'avait pas l'habitude de traiter leur « invité » qu'il lui ne doit pas avoir plus de vingt ou vingt-cinq ans comme un adolescent. Si dans un premier temps elle s'efface durant le jeu viril opposant les deux hommes, Roman Polanski nous livre peu à peu ses charmes et sa personnalité qui jusqu'ici étaient bien enfouis derrière une robe, une paire de lunettes et un chignon parfaitement exécuté. Krystyna, c'est l'actrice Jolanta Umecka. Elle est jeune, belle, désirable. Elle est le point central du duel qui va opposer son mari et le jeune auto-stoppeur. Dès les premières minutes, on sent bien qu'entre elle et son époux, le torchon brûle. Peut-être cette différence d'âge a-t-elle son importance. A moins qu'il ne s'agisse tout simplement de son comportement à lui lors du voyage en voiture, et même plus tard sur le bateau. Il y a l'usure du couple, inexorable. Lui doit bien l'avoir senti, et pour racheter un peu de cet amour frais qui peu à peu semble s'être consumé, il trouve la proie idéale.

L'étudiant...
… il est un peu paumé, pas sûr de savoir où il se rend. Alors, lorsque l'occasion de « mettre les voiles » le temps d'une journée se profile, il saute sur l'occasion. Bien plus jeune qu'Andrzej, c'est l'adversaire idéal. Pour le quadragénaire, c'est l'occasion de montrer l'étendue de ses facultés. D'abord, à travers ses connaissances en matière de navigation. Puis viennent les épreuves de force. Et même une partie de Mikado dont les enjeux prennent la forme de gages. Pour l'étudiant (l'acteur Zygmunt Malanowicz), c'est l'humiliation. Il a beau posséder un couteau dans sa poche, il ne lui sera d'aucune aide. Mais sa meilleure arme, le sait-il déjà, ce sera Krystyna, que le comportement d'Andrzej commence à rendre malade. Allant jusqu'à tromper son mari parti chercher l'étudiant dont il croit avoir causé la mort par noyade après l'avoir fait passer par dessus bord.

C'est peut-être curieux, ou peut-être même un sentiment personnel qui n'est partagé par personne d'autre, mais les événements de ce Couteau dans L'Eau n'ont pu être digérés que deux ou trois jours après son visionnage. En revenant me hanter alors qu'il m'avait pratiquement laissé indifférent au moment de le découvrir, j'ai pu y déceler une critique féroce de la société. De ces deux mondes qui se télescopent dans le meilleur des cas et s'ignorent royalement dans le pire (à moins qu'il ne s'agisse du contraire). Pour son premier long-métrage, Roman Polanski y exploite une partie des préoccupations qui ne cesseront de revenir sur le devant de la scène durant toute sa carrière. Et pour un coup d'essai, c'est un coup de maître. Tout Polanski ou presque y est déjà. Le Couteau dans L'Eau remporta le prix de la critique à Venise en 1962...
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