Bienvenue sur Cinémart. Ici, vous trouverez des articles consacrés au cinéma et rien qu'au cinéma. Il y en a pour tous les goûts. N'hésitez pas à faire des remarques positives ou non car je cherche sans cesse à améliorer le blog pour votre confort visuel. A bientôt...

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vendredi 30 mars 2012

La Petite Aurore, L'enfant Martyre de Jean-Yves Bigras (1951)



Avant d'être adaptée au cinéma par Jean-Yves Bigras, "La Petite Aurore, L'Enfant Martyre" fut d'abord une pièce de théâtre dont le succès ne se démentit pas durant trente ans, de 1921 à 1951, année durant laquelle fut tourné le film. Mais si la pièce fut si populaire, c'est sans doute parce que l'histoire vécue par l'héroïne principale, Aurore Andois (ici campée par la remarquable Yvonne Laflamme) est basée sur un fait divers réel qui secoua le Québec en 1920. L'histoire tragique d'Aurore Gagnon qui connut les pires sévices sous la houlette de sa marâtre de belle-mère...

Théodore et Delphine Andois avaient tout pour être heureux. Une demeure accueillante ainsi qu'une jeune fille prénommée Aurore tout à fait charmante. Le couple s'aime mais la présence de Marie-Louise fait basculer cette vie tranquille en véritable cauchemar. En effet, Delphine tombe subitement malade. Alitée, elle devient incapable de s'occuper de sa fille Aurore. Marie-Louise, qui dans un premier temps paraît particulièrement attentive à la santé de la jeune femme cache en réalité une ambition qui coûtera cher à Delphine. Lorsque le médecin, impuissant, confie le traitement de la malade aux soins de Marie-Louise, cette dernière, se garde bien d'administrer l'antidote à Delphine et l'empoisonne à petit feu jusqu'au jour où sa victime meurt. 


Deux années passent durant lesquelles quelques changements ont lieu. Tout d'abord, Aurore à un petit frère prénommé Maurice. Ensuite, Marie-Louise devient sa belle-mère. Entre la jeune fillette et sa "mère de substitution", les rapports son houleux. La première sait quel terrible secret lie la mort de Delphine et Marie-Louise. Cette dernière voulant s'assurer qu'Aurore gardera le silence lui fait subir un nombre édifiant d'atrocités devant lesquelles Théodore reste sourd bien que sa fille dépérisse à vue d'œil. Enceinte, Marie-Louise parvient à manipuler son mari en lui mentant. D'après elle, Aurore est une menteuse qui n'en fait qu'à sa tête. Il est temps de punir cette enfant qui en fait voir de toutes les couleurs à sa belle-mère et Théodore, dont le principal objectif est de mener à bien son travail, délègue à Marie-Louise la responsabilité d'éduquer Aurore. Et celle-ci va s'en charger à sa manière.

Aurore va se voir attribuer les taches les plus rudes, toujours sous la menace permanente de Marie-Louise. Mais même les remarques les plus odieuses ne semblant pas avoir à chaque fois l'effet escompté, la marâtre va devenir violente et va faire montre d'une perversité totale, et ce, devant Maurice qui ne pourra évidemment jamais agir pour a défense de sa sœur. Elle fait boire à la fillette de la lessive. Puis lui fait manger du savon. De sa belle chevelure brune, il ne restera que quelques mèches disgracieuses sur le sommet du crane de la jeune fille lorsque sa belle-mère lui "taillera une coiffure" déshonorante, avec sur le visage le sourire obscène d'une femme qui jouit du mal qu'elle est en train de commettre. Aurore prend des gifles plus souvent qu'à son tour. Marie-Louise la menace même de la tuer si jamais la gamine répète à quelqu'un ce qu'elle lui fait subir. Toujours plus imaginative, un jour, alors que Théodore rentre du travail, Marie-Louise fait croire à ce dernier qu'Aurore a eut à l'encontre de Maurice des gestes qui dépassent les simples rapports entre une sœur et son frère. Théodore entre alors dans une rage folle et frappe à coups de manche de hache sa fille qui échappe alors à la mort de justesse.
Regrettant déjà son geste, il ordonne que désormais Aurore ne soit plus maltraité. Mais lorsqu'il se rend au travail, la fillette est seule avec sa belle-mère et cette dernière en profite pour continuer à la torturer.

Si bien qu'un jour...


Si le film possède une assez grande notoriété au Québec, il faut reconnaître qu'en France, il en est autrement. Sur le difficile sujet de l'enfance maltraitée, le film de Jean-Yves Bigras n'est pas un cas isolé. "The Girl Next Door" devait, cinquante-six ans plus tard, renouveler le genre avec beaucoup plus de bonheur. Basé sur une histoire véridique elle aussi et adapté d'un roman de Jack Ketchum, le film de Gregory M. Wilson est une œuvre excessivement éprouvante, voire même totalement insupportable. Ce qui fait défaut dans l'œuvre de Bigras, c'est l'interprétation et surtout une somme de situations dont la crédibilité est absente.


Si certains témoins de scènes étonnantes (le futur marié qui assiste à la scène durant laquelle Marie-Louise enfonce la tête d'Aurore dans un buisson d'épineux) ne relèvent pas de la lâcheté, on s'étonne qu'ils n'agissent pas en conséquence et ne préviennent pas les autorités. Voisins, curé et médecin de famille voient bien qu'Aurore dépérit... Mais non, on préfère se taire sans même évoquer le fait que cela ne nous regarde pas mais simplement parce que l'on agira au moment venu. Sauf que lorsque le moment vient, il est déjà trop tard. Le rôle du père est aussi angoissant que celui que tient la marâtre. En effet, son absolu manque de jugeote donne envie de crever l'écran et de lui donner une correction devant son inaptitude à voir le monstre qui se cache derrière le visage de sa nouvelle épouse et devant la détresse d'Aurore, sa propre fille. Les situations s'enchainent parfois de manière beaucoup trop identiques. La belle-mère punit la belle-fille, puis, endort son mari qui croit bien évidemment, et systématiquement aux bonne paroles de sa femme plutôt qu'à l'étrange silence d'une Aurore qui décidément, est bien différente de la fillette qu'elle était lorsque vivait encore Delphine. Le plus grotesque étant ce médecin qui d'un simple regard et sans même l'ausculter condamne Aurore à une mort certaine. Tellement ridicule que cela nuit à l'aspect dramatique d'une telle nouvelle. Et que dire de ces preuves grosses comme une verrue au milieu d'un front et qui étayent les soupçons de violence faites à l'encontre d'Aurore. C'est ainsi avec une certaine fainéantise que le film se clôt. Comme si e tournage se finissait bien tard et que toute l'équipe de tournage s'empressait à aller au lit...


mardi 27 mars 2012

Zulawski en 2 films: Possession (1981), Chamanka (1996)



Lorsque Mark rentre de son voyage professionnel, il est loin de se douter de l'incroyable aventure qu'il va vivre en compagnie de sa femme Anna. Il apprend tout d'abord que cette dernière le trompe depuis un an avec un certain Heinrich, gourou mystique à la "zen-attitude", et qui a tendance à énerver Mark lorsqu'ils font connaissance. Une première rencontre qui va s'avérer brutale pour un Mark déboussolé qui vient de vivre, après le départ de sa femme, de longues semaines de dépression.

En réalité Anna n'a pas vraiment quitté Mark. Elle vit en même temps chez eux afin de s'occuper de leur enfant Bob mais aussi chez son amant Heinrich. Les rapports du couple se dégradent à mesure que Mark cherche à savoir pourquoi sa femme se détache ainsi de lui et de ses responsabilités pour retrouver son amant alors qu'elle-même semble être de plus en plus sous l'emprise de ce dernier. Un amant qui va se révéler être bien diffèrent de celui que l'on pense car Mark découvre qu'Heinrich n'a plus de nouvelles d'Anna depuis des semaines.


Mark engage un détective privé pour savoir où elle se rend lorsqu'elle quitte le cocon familial dans lequel règne désormais un désordre indescriptible. Un lieu de vie qui se désagrège à l'image du profond traumatisme qui engendre haine et violence au sein du couple.

Mark fait ensuite la connaissance de l'institutrice de son fils Bob, Helen, et qui ressemble étrangement à Anna, sorte de pendant angélique et lumineux d'une femme qui ne cesse de s'enlaidir. Car Anna, autrefois mère de famille tout à fait singulière n'est désormais plus que l'ombre d'elle-même, allant jusqu'à s'infliger des mutilations, imitée d'ailleurs très vite par un Mark loin de se douter que le responsable du désastre émotionnel qu'ils sont en train de vivre est dû à un être qui n'a finalement rien d'humain...

Andrzej Zulawski réalise "Possession" en 1981 soit six ans après ce que l'on peut considérer comme son plus grand film "L'important c'est d'aimer". Tout comme dans ce dernier ainsi que dans beaucoup d'autres qui suivront, il analyse à sa façon les travers de personnages qui s'aiment puis se déchirent dans une valse toujours morbide et codée parfois difficile à déchiffrer. On estime souvent que les personnages en font trop, qu'ils sont caricaturaux et c'est peut-être vrai. Mais cette approche particulière du cinéaste renforce finalement le sentiment de malaise face à ceux qui se détruisent et devant lesquels nous restons de simples téléspectateurs allant même jusqu'à agir comme de véritables voyeurs sans jamais pouvoir interagir avec le triste quotidien des héros.


Du drame Zulawski nous transporte peu à peu dans un univers morbide au climat effroyable. L'horreur est omniprésente dans l'existence des personnages et dès lors que l'on découvre le vrai visage de celui qui est à l'origine du traumatisme engendré par la séparation et surtout lorsque l'on pénètre pour la toute première fois dans son repère, on s'attend à chaque plan à ce que le cauchemar prenne le dessus de manière définitive et c'est ce qui arrive très souvent.
Le cinéaste saupoudre son film de scènes hallucinantes telle celle du métro dans laquelle Isabelle Adjani qui incarne les personnages Anna et Helen semble en transe, se tord de douleur comme possédée par on ne sait quelle entité et se voue entièrement à la cause d'un Andrzej Zulawski qui n'en n'a jamais autant demandé à une actrice. On comprends alors pourquoi elle a été couverte de récompenses pour ce rôle.

Si Andrzej Zulawski, à travers une quinzaine de longs métrages livre sa vision toute personnelle de l'Amour, chez lui il est bien souvent destructeur et mène ses personnage dans un tourbillon de folie duquel jamais ils ne parviennent à s'extraire. En 1975 il réalise "l'important c'est d'aimer" que l'on peut considérer comme son meilleur film. Interprété par Romy Schneider, il dégage une force émotionnelle incomparable avec ses autres œuvres. L'actrice y est pour beaucoup et se livre sans concession dans un rôle que très peu d'actrices auraient été capables d'assumer. D'autres "subiront" l'interprétation offerte par ce cinéaste particulier (et très peu considéré par la critique) dans des rôles difficiles, jouant de leur corps mais aussi de leur âme. La très rare Valerie Kaprisky formidable dans "La femme Publique" mais aussi et surtout Sophie Marceau qui tourna plusieurs fois avec Zulawski notamment dans le déjanté "L'amour braque", le troublant "Mes nuits sont plus belles que vos jours" ainsi que dans l'adaptation libre de la vie de Chopin, "La note bleue" dans lequel elle interprète le rôle de Solange, la fille de Georges Sand. 


Le point commun entre tout ces films est la folie permanente qui se dégage de chaque situation donnée, de chacun des personnages à la diction épileptique et parfois schizophrénique face à la gestion de leurs sentiments. On doit parfois tendre l'oreille pour saisir le sens de certaines répliques (L'amour braque) ou encore remplir le vide de celles laissées à l'abandon par la maladie.(Mes nuits sont plus belles que vos jours).Le rythme est un paramètre important dans la mise en image d'histoires qui, si dans un premier temps paraissent quelconques, glissent inexorablement dans un abîme sans fond. Les héros de Zulawski s'aiment puis se repoussent pour enfin se retrouver et se détruire..

Et c'est d'autant plus flagrant dans "Chamanka", film jusqu'au-boutiste, qui plonge littéralement le spectateur dans l'univers torturé de deux êtres qui vont vivre une histoire d'Amour tout aussi bouleversante qu'effroyable. L'actrice Iwona Petry qui interprète le rôle de Wloszka est totalement habitée par son personnage à tel point que l'on se demande très souvent si elle joue ou si elle est naturelle. Le malaise permanent ressentit à la vision de ce jeu de l'amour et de la mort est dû en partie à la froide partition d'Andrzej Korzynski notamment dans la scène finale, très impressionnante. 


Chamanka est l'histoire simple d'un homme et d'une femme qui se cherchent et se repoussent dans une sorte de tourbillon psychologique éprouvant qui va les mener à leur perte. Rien ne nous est épargné dans leurs douloureux rapports. L'amour y est parfois théâtral, souvent bestial mais toujours emprunt d'un mysticisme pas toujours justifié.

Chamanka fait partie de ces films monstres qu'on n'oublie pas et qui marquent les rétines pour longtemps.

vendredi 23 mars 2012

Les tueurs qui inspirent le 7ème art: Ted Bundy "Ted Bundy" de Matthew Bright (2003)



De la fiction...

Ted Bundy est reconnu comme étant l'un des meurtriers les plus connus. C'est en tout cas à partir de son parcours criminel que fut inventé le terme de "tueur en série". Reste à savoir ce qu'en a fait le réalisateur Matthew Bright ("Freeway"). Son tueur (sous les traits duquel se cache l'acteur Michael Reilly Burke), loin d'avoir le charisme du véritable criminel, parvient somme toute à camper un Ted Bundy convainquant. Un prédateur exclusivement attiré par la gente féminine et qui pratique sur ses victimes une certaine forme d'humiliation. Incapable de se soumettre à des rapports sexuels dits "normaux", ça n'est sans doute pas sa compagne qui parvient à tempérer son engouement pour des pratiques qu'elle-même juge dégradantes. Excusant ses méfaits auprès de certaines de ses proies en invoquant son profil d'homme issu d'un milieu moyen et se vengeant donc sur des femmes qu'il considère inaccessibles, Bundy ne fait en réalité jamais le tri parmi ses victimes, qu'elles soient issues d'un niveau social aisé ou pas. 


Ce qui le pousse à tuer reste évidemment l'humiliation dont il fait l'objet lorsqu'il est ignoré par celle qu'il tente de prendre dans ses filets. Sans compter ni prendre jamais de précautions, il kidnappe, enferme, viole, torture et assassine de nombreuses femmes. Il lui arrive de vouloir imposer à sa compagne Lee (Bliss Boti Ann) le genre de pratique qu'il opère avec ses victimes mais sans jamais aller jusqu'à la tuer. Celle-ci, follement éprise de Ted, finit par accepter d'outrepasser son dégout personnel afin de garder son fiancé auprès d'elle. Le Ted Bundy de Matthew Bright est, comme le fut le vrai tueur, un être égocentrique, qui prend un immense plaisir à humilier ses victimes. Immature et impulsif, il lui arrive d'user de stratagèmes inventif afin de les attirer dans un piège. Portant au bras un plâtre, il lui arrive souvent de faire appel au sens civique de jeunes femmes qui ne se doutent pas du tueur qui se cache derrière son visage d'enfant. Elles acceptent à chaque fois de l'aider à porter ses affaires jusque dans sa voiture, outil qu'il privilégie lors de kidnappings orchestrés parfois en plein jour. 


Malgré son apparente bonhomie, il est difficile de s'attacher à Ted Bundy. Simplement parce que les raisons qui le poussent à tuer restent trop souvent obscures. On aurait aimé que nous soient détaillés sont enfance et son parcours. Il aurait fallut dresser le portrait d'un homme attaché à celle qui l'aime et la jeune fille de cette dernière, la seule à trouver grâce à ses yeux. Affabulateur, l'homme invente sans cesse des portes de sortie afin de s'extraire du cambouis dans lequel il s'enlise. La mise en scène donne au film l'aspect d'un téléfilm. Au même titre que l'excellent "Deliberate Stranger" campé par Mark Harmon. Si ce n'étaient quelques scènes particulièrement gratinées (comme le kidnapping nocturne d'une jeune femme, son humiliation et son meurtre par strangulation), le film tomberait dans une mise en scène particulièrement plate. Ce qui différencie "Ted Bundy" de la majeure partie des films de serial killer est l'absence d'enquête au profit d'un portrait qui manque cruellement d'aspect psychologique. D'autres ont pourtant tenté la chose d'une manière identique mais avec beaucoup plus de bonheur ("Henry, Portrait Of A Serial Killer"). L'image elle-même manque de ce grain qui donne à l'aspect de certaines pellicules un climat profondément malsain. 


Matthew Bright jongle entre sobriété et détails sordides. En effet, l'un des aspects les moins ragoutants de la personnalité du tueur est mis en avant à plusieurs reprises: son goût pour la nécrophilie est abordé chaque fois que l'ennui s'impose. Comme si le réalisateur lui-même choisissait d'injecter le malaise là où commence à s'interposer une certaine lassitude. Sans vouloir être médisant, peut-être pouvons-nous supposer qu'elles ont été mises là sans véritable volonté de choquer mais comme unique moyen de fidéliser les spectateurs qui voudraient fuir la projection. Le pire est que cela fonctionne. Il suffit d'assister aux "relations" qu'entretient le tueur avec les têtes coupées qu'il entrepose chez lui ou les fréquents retours qu'il effectue sur les lieux de certains crimes pour s'en convaincre. Michael Reylli Burke fait ce qu'on lui dit et s'en sort relativement bien.

En bref, ce qui manque cruellement au film et qui aurait pu le rendre beaucoup plus intéressant, c'est notre indéniable besoin d'en savoir plus sur l'enfance du tueur. S'attachant à dresser le destin d'un meurtrier sur une courte période qui ne s'étale que sur quelques années, il devient impossible de s'émouvoir devant sa détresse, qu'elle soit sincère ou simulée lorsque vient le moment de son exécution. On ne peut excuser ses actes, ni même un tant soit peu les comprendre.



...à la réalité

Theodore Robert Bundy est né le 24 novembre 1946 dans le Vermont. Condamné à la peine de mort à l'âge de 43 ans, il aura marqué les annales du crime non seulement en raison de l'horreur de ses crimes mais aussi pour l'indéniable charme qu'il dégageait. Il kidnappait ses victimes exclusivement féminines en usant de stratagèmes ingénieux. Il lui arrivait de s'introduire dans des chambres d'étudiantes afin de les assommer avant de les violer. Il décapita certaines de ses victimes, emportant chez lui leur tête comme de vulgaires trophées. Il retournait sur le lieux de ses méfaits, s'allongeait auprès des cadavres en putréfactions et pratiquait sur eux des relations sexuelles. Bundy jugea bon de se défendre seul durant son procès, ce qu'il ne l'empêcha pas d'être condamné à mort en 1989. Il fut exécuté sur la chaise électrique le 24 janvier.

mardi 20 mars 2012

Le Retour De Martin Guerre de Daniel Vigne (1981)



Artigat, dans le comté de Foix en l'année 1542. Le jeune Martin Guerre épouse Bertrande de Rols. Une fois les festivités terminées, le curé du village bénit les jeunes mariés ainsi que leur couche afin qu'il aient des enfants. Pourtant, après plusieurs tentatives, Martin semble montrer les signes d'une malédiction qui l’empêche de procréer. C'est pourquoi certains villageois vont s'employer à exorciser le mal, et d'autres à moquer son incapacité à donner un enfant à sa bien aimée. Les rapports entre Bertrande et Martin se dégradent. A tel point qu'un jour ce dernier décide de quitter le village. 


Huit années plus tard, et alors que la vie a doucement repris son cours, un homme se présente à l'entrée du village. Il s'agit de Martin. Le jeune garçon est devenu un vigoureux jeune homme, transformé par la guerre. Il est reconnu par tous ceux qui l'ont connu, à commencer par son oncle Pierre, Augustin et même sa fidèle épouse Bertrande. Accueilli comme un roi, Martin offre aux membres de sa famille les cadeaux qu'il a achetés. Il a appris à lire. Et à écrire aussi. Il raconte qu'il a fait la guerre durant son absence. Alors qu'il a visité l'Espagne et est monté jusqu'à Paris, c'est l'envie de tous les revoir

Il reprend son travail. Le village tout entier reconnaît que depuis qu'il est revenu, les terres n'ont jamais autant rapporté. Entre Bertrande et lui, tout va pour le mieux. Il se montre beaucoup plus entreprenant que par le passé. Son oncle est content du travail qu'il abat et sa nouvelle intégration se déroule sous les meilleurs hospices. Du moins jusqu'au jour où des vagabonds passent la nuit dans la grange du village. Alors que le curé et Martin leur apportent de quoi boire et manger, ce dernier se dérobe à leur compagnie comme s'il s'était retrouvé face au diable. L'un des vagabonds demande alors au curé l'identité de l'homme qui vient de les quitter. Celui-ci lui affirme qu'il s'agit de Martin Guerre. Le voyageur contredit le curé en affirmant avoir croisé le vrai Martin à la guerre de Saint Quentin. L'homme qui se fait passer pour le fils des Guerre s’appellerait, lui, Arnaud De Tihl.


Martin hypnotise les villageois, leur racontant les aventures qu'il a vécu durant sa longue absence. Mais le soir même, alors qu'il attire Bertrande dans une région du village qu'elle craint, son mari est pris à parti par deux hommes masqués, les deux vagabonds, qui le reconnaissent comme étant Arnaud De Tihl. Pendant ce temps là, Antoine, le cousin de Martin, fait part des événements du matin à Pierre, l'oncle de Martin. Ce dernier choisit de ne pas tenir compte des faits mais le jour où Martin lui demande de le payer pour ce qu'ont rapporté ses terres durant ses huit ans d'absence, ce dernier se met en colère. Les deux hommes ne s'entendent pas, Martin menaçant de faire appel à la justice si jamais son oncle refuse de le payer. Ils finissent par se battre.

Les hommes du village doutent de plus en plus. Pierre propose alors un marché à Martin qui tombe dans le piège. Persuadé de trouver son dû dans le coffre à grain de la grange, Martin est attaqué par deux hommes du village, mais c'est Bertrande qui s'interpose entre Martin et la serpe que Pierre s'apprete à lui enfoncer dans le torse.

Le juge Rieux arrive au village afin d'éclaircir toute cette affaire. Martin est emmené, pieds et poings liés. Le juge demande aux villageois de se scinder en deux groupes. D'un côté, ceux qui croient en l'identité de Martin, et de l'autre, ceux qui doutent. Il y a aussi ceux du village qui restent indécis et comme de chaque camp le nombre d'opposants et de partisans est égal, le juge Rieux déclare qu'il n'y a aucune raison de penser que Martin n'est pas celui qu'il affirme être et ordonne le non lieu. Il condamne même Pierre à payer une forte somme à Martin en dédommagement.
Le lendemain matin, Pierre et quelques villageois débarquent dans la chambre de Martin muni d'un document dans lequel Bertrande affirme que l'homme qui vit à ses côtés n'est pas celui qu'il prétend être. Martin est cette fois-ci arrêté.


Débute alors un procès durant lequel le juge Rieux passe en revue les éléments à charge et à décharge. Les témoins se succèdent, ceux qui témoignent en faveur de Martin tout comme ceux qui affirment qu'il n'est pas celui qu'il prétend être...

L'intérêt principal de ce film mis en scène par Daniel Vigne ("Une Femme Ou Deux") est l'identité du personnage campé par Gérard Depardieu ("Danton", "Jean De Florette", "Buffet Froid"). Si lors de son retour au village le spectateur ne doute pas de ce que trame ce homme mystérieux, certains indices ainsi que son comportement laissent présager que les doutes qui s'installent dans l'esprit de certains habitants sont fondés. Seulement voilà, lorsque Martin réapparait au début du film, il est capable de reconnaître chacun des villageois et de le nommer par son prénom. Son charisme lui donne la possibilité de tous les hypnotiser, même sa femme Bertrande (Nathalie Baye), qui de toute manière semble capable de faire l'impasse quelle que soit l'identité de l'homme qui partage sa vie tant celui-ci paraît lui apporter davantage que le jeune garçon qui a quitté le village huit années plus tôt. Sur la fidélité de cette dernière, on peut en revanche émettre quelques doutes, surtout lorsque Martin jette un regard soupçonneux envers l'un des habitants qui ressemble étrangement à son fils.

C'est finalement l'arrivée du juge Rieux (Maurice Jacquemont ("J'ai Épousé Une Ombre") qui va permettre d'élever les débats et surtout d'en savoir un peu plus sur le mystère qui entoure toute cette affaire. Malgré tout, le procès s'enlise et l'on se demande si finalement la vérité sur cette histoire va être mise à jour. C'est alors que le procès arrive à son terme qu'entre en scène Bernard-Pierre Donnadieu ("L'Homme Qui Voulait Savoir"). La ressemblance entre ce dernier et Gérard Depardieu se révèle troublante. Surtout lorsque l'homme se prétend être le véritable Martin Guerre. Froid et estropié, on comprend assez vite que pour certains, dont Bertrande elle-même, l'intérêt principal de voir le second en la personne de Martin est sa profonde empathie, et qui semble faire défaut au premier.


L'interprétation des principaux acteurs est juste. La grande austérité des décors ainsi que la partition musicale signée Michel Portal participent à l'envoutement que dégage cette œuvre adaptée du roman de Natalie Zemon Davis, lui-même inspiré d'une histoire vraie. Il est à noté également qu'un remake américain fut tourné en 1993 par Jon Amiel avec Richard Gere et Jodie Foster dans les rôles principaux.

vendredi 16 mars 2012

La Maison Assassinée de Georges Lautner (1988)



A la veille de la Saint Michel de l'année 1996, trois individus masqués et armés de couteaux pénètrent dans la Burlière, vieille demeure où vivent les membres de la famille Monje. Du père, de la mère, du grand-père et des trois enfants, seul séraphin, alors âgé de quatre mois survit au massacre qui s'ensuit. Pour la justice, aucun doute : les coupables sont les trois étrangers qu'un compagnon originaire du Juras a formellement reconnu. Hébergé un peu plus tôt dans la soirée par les Monje, et accompagné ensuite par l'un des fils jusque dans l'écurie, ce dernier a vu trois hommes suspects tourner autour de la demeure familiale. Tentant vainement de clamer leur innocence dans une langue étrangère, les accusés finissent tous les trois guillotinés.

La première guerre mondiale éclate. Séraphin Monje, jusqu'alors élevé par les sœurs de la charité, est mobilisé jusqu'en 1920, année de son retour dans le petit village près duquel sa famille à été massacrée vingt-quatre ans plus tôt. L'arrivée du jeune homme est perçue comme une malédiction et la plupart des villageois évite de s'y frotter. Tout juste Rose Pujol et Marie Dormeur parviennent-elles à s'en approcher avant d'en être éloignées par leurs pères respectifs. En dehors de Brigue et des deux jeunes femmes, Zorme est l'un des rares à également oser le côtoyer.
Pourvu d'une chambre et d'un emploi de cantonnier, c'est de la bouche de son collègue Brigue que Séraphin apprend que sa famille à été massacrée. Alors que Brigue meurt d'un mal étrange, le jeune homme choisit de brûler les meubles de la Burlière et de détruire les murs de la maison devant un parterre de villageois qui finissent tous par le croire devenu fou. Seul Patrice Dupin prend sa défense lorsque Séraphin est pris à parti par quatre hommes décidés à le faire tourner en ridicule. Ce jeune homme a la gueule cassée prend sous son aile Séraphin et l'invite dans la demeure familiale dans laquelle il vit en compagnie de sa mère, de sa sœur, ainsi que de son père. 


Alors que Séraphin s'acharne à vouloir détruire la cheminée de la Burlière, il découvre cachée derrière la hotte une cassette renfermant trois reconnaissances de dettes signées Dormeur, Pujol et Dupin, les pères respectifs de Marie, Rose et Patrice. Trois hommes. Comme autant que ceux qui tuèrent sa famille vingt ans plus tôt et dont la justice ainsi que le village firent des coupables faciles.

Avant de mourir Brigue avait fait part de ses doutes quand à la culpabilité des trois étrangers. Séraphin comprend alors que les véritables responsables du massacre de sa famille sont le boulanger Celestat Dormeur, le meunier Didon Pujol ainsi que Gaspard Dupin, le père de Patrice. Ne subsiste alors dans l'esprit de Séraphin qu'une idée : Venger sa famille en tuant les trois hommes.
Un soir, alors qu'il s'apprête à tuer l'un des assassins en la personne de Gaspard Dupin, il est surpris au milieu de la propriété par la troublante Charmaine, sœur de Patrice, qui l'invite à le suivre jusque dans sa chambre. Tous les deux allongés sur le lit de la jeune femme, ils entendent tirer des coups de feu. Affolée, Charmaine se précipite dehors, suivie de Séraphin, persuadée que son frère Patrice s'est donné la mort. Ce dernier est penché au dessus du corps sans vie de son père, tout juste mort noyé et allongé non loin des cadavres de deux de ses chiens qu'il avait l'habitude de sortir la nuit venue. D'abord soupçonné de meurtre, Patrice est ensuite relâché grâce au témoignage de Rose Pujol qui confirme qu'ils étaient ensemble au moment du crime.

Lorsque le boulanger et le meunier apprennent que leur ami Gaspard Dupin a été assassiné, ils sont inquiets. Surtout Celestat Dormeur puisque Didon Pujol perd la vie à son tour, écrasé par son propre moulin à huile. C'est devant Séraphin que l'homme meurt alors qu'il allait tout révéler au jeune homme sur ce qui s'était passé la nuit du massacre. Malheureusement pour ce dernier, quelqu'un semble en avoir décidé autrement et exécute les projets de Séraphin à sa place.


D'abord connu pour être le réalisateur de quelques-uns des très bons policiers et comédies françaises des années 60-70 ("Les Tontons Flingueurs", "Ne Nous Fâchons Pas", "Laisse Aller... C'Est Une Valse", "Il Était Une Fois Un Flic", "La Valise"ou bien encore "Mort D'Un Pourri"), Georges Lautner s'est ensuite lancé dans une série de films au contenu beaucoup plus "léger". Jusqu'en 1988, année où il tourna cette "Maison Assassinée", deux ans après le très moyen "La Vie De Gérard Floque" avec Roland Giraud. Interprétant le rôle de Séraphin Monje Patrick Bruel campe un personnage torturé par un passé trouble qu'il n'a pourtant pas vraiment connu étant trop jeune. Seul moyen pour ce jeune homme d'exorciser ses démons : détruire la demeure familiale et venger la mort de sa famille en tuant les coupables. Le milieu austère dans lequel il est plongé et la bizarrerie de certains événements auxquels n'est pas étranger le vieux Zorme confèrent au film une aura toute particulière. Peut-être même davantage à l'ouverture du récit avec ce brouillard dense, ces éclairages fantomatiques et le curieux silence qui baigne la Burlière dans un climat oppressant. Quand à l'impression d'une présence maléfique, elle ne fait que s'accentuer à mesure que l'histoire progresse et ce, à travers la curieuse implication d'une tierce personne dans les meurtres que projette de commettre Séraphin. On aime ou pas l'aspect rustique des dialogues qui collent pourtant magnifiquement au cadre choisit par le cinéaste. Un petit village de France, avec ses rumeurs, ses secrets et ses rancœurs... 


Patrick Bruel n'est pas l'unique responsable de la réussite du film. On retrouve avec plaisir l'excellent Yann Colette ("L'Amour Braque", "Bunker Palace Hotel") en jeune homme passablement détruit par la guerre et qui tombe sous le charme d'une Rose qu'il ne se croit d'abord pas le droit de pouvoir aimer et qui trouve en Séraphin un ami, un alter ego. Roger Jendly ("Espion, Lève-Toi", "Ripoux Contre Ripoux") quand à lui est ce personnage énigmatique que tout le monde craint dans le village. Un peu fou mais capable d'invoquer le Diable et de pratiquer la magie noire, il suit Séraphin comme un ange protecteur. Anne Brochet, Jean-Pierre Sentier, Ingrid Held et quelques-autres finissent de dresser la liste de personnages hauts en couleurs... Des teintes qui pourtant rappellent plus souvent la mort et la solitude...

lundi 12 mars 2012

Alejandro Jodorowsky en 2 films: "El Topo" (1970) et "Santa Sangre" (1989)




El Topo d'Alejandro Jodorowski est le premier, et sans doute le seul, western ésotérique de l'histoire du cinéma. Une sorte de grand fourre-tout aux concepts divers et variés concentrés en deux heures et qui pourraient fournir l'essence d'une bonne dizaine de scénarios. Du western, le film retient surtout les grands espaces désertiques du Mexique et les costumes, les villages, très souvent abandonnés. Sans parler évidemment des indigènes qui les habitent ainsi que les montures sur lesquelles le héros mets le pied à l'étrier. Le film de "Jodo" passerait presque pour de la propagande pro-chrétienté tant l'image du Christ y est présente en toile de fond. On y retrouve la violence et la grandiloquence du "Caligula" de Tinto Brass mais sans les scabreuses scènes d'orgies culinaires et sexuelles ainsi que les provocantes mises en scène de certains Fellini tel son "Fellini Roma".

El Topo (Alessandro Jodorowski) est un pistolero que sa maîtresse à défié de tuer les quatre grands maîtres du désert. Il part alors pour une quête initiatique et hasardeuse qui l'amène à faire différentes rencontres mais qui surtout l'emmènera au delà du défi lancé dans une sorte de quête métaphysique qui l'emportera jusqu'au sommet d'une montagne. Peut-être celle, sacrée, du film suivant que réalisera Alessandro Jodorowski quelques années plus tard?

Ce qui saute aux yeux, c'est tout d'abord la piètre qualité de l'image. Comme si la pellicule avait été soigneusement passée entre les dents acérées d'un broyeur. En effet, elle est d'une crasse qui confère à son contenu une aura miraculeuse (la bobine faillit disparaître à jamais). L'image est hachée et parasitée par de très nombreuses poussières. Mais l'essentiel n'est pas là car si l'on accepte les nombreux défauts visuels inhérent aux maltraitances qu'à subit la bobine, on est face à un objet étrange, inclassable, difficile à comprendre et l'on se sent souvent perdus dans le cerveau labyrinthique mais génial du cinéaste. Le film fourmille fourmille donc d'idées tantôt géniales, tantôt absurdes mais qui toujours homogénéisent le récit. Alessandro Jodorowski, en dehors d'être un savant fou du septième art est aussi et surtout un artiste entier qui porte plusieurs casquettes: mime, romancier, poète et scénariste de bande dessinée, tous ses talents sont retranscrits dans ce film telle la scène d'ouverture dans laquelle le héros pénètre une cité mise à feu et à sang, sang qui confère à la scène la vision d'une toile peinte de manière grossière et rugissante. Ou encore celle, ou en plein désert, la taupe (L'el Topo du titre) accompagnée d'une jeune femme à l'agonie, trouve l'eau salvatrice dans une roche perdue sur une dune donnant à cet instant, la grâce et la beauté d'un poème. On se prends parfois au jeu et on attends après chaque victoire remportée par le héros face aux maîtres du désert mais aussi face à lui-même, de voir à quoi ressemblera le prochain défi. Mais ici, il n'est pas question de duels au pistolet. Tous les sens de la taupe sont mis en éveil afin de lui assurer la victoire sur ses concurrents. Le film nous apprends ainsi qu'il ne faut surtout pas se fier aux apparences et qu'il faut se méfier de l'eau qui dort...

Accompagné de ses amis Roland Topor et Fernando Arrabal, Jodorowski créa différentes performances dont Panique qui à travers sa divinité, "Pan", semble pousser le spectateur à une reconversion idéologique et religieuse tendant à l'écoute de soit et des autres.

Malgré des montagnes de défauts, "El Topo" porte en lui tellement de qualités mais aussi de sagesse qu'il efface les imperfections et comme à la suite d'une course folle après le temps, on se sent après deux heures passées devant l'écran, comme le cœur léger et l'esprit vidé, enfin prêts à affronter le monde qui nous entoure...


L'œuvre toute entière d' Alessandro Jodorowsky est empreinte d' un profond mysticisme. Ses héros ont souvent l'apparence du Christ, portant sur le dos une croix dont ils ont du mal à se défaire. Le cinéaste règle ses comptes avec ceux qui bafouent la morale par la voie de la castration. "El topo" voit les hommes de dieu, humiliés et souillés, vengés par un Christ de pacotille punissant leur bourreau par l'entremise de cette jeune esclave rappelant de manière assez troublante Marie, la mère de Jésus, et qui castre le chef d'une bande de cow-boys minables et grand ordonnateur d'un massacre qui voit les habitants d' un village être décimés avant que la main vengeresse du héros pistolero ne vienne mettre un terme au bain de sang. Dans "Santa Sangre", c' est l' adultère qui est punit. Alors que dans "El Topo" elle est pratiquée par la voie de l'émasculation au couteau, dans "Santa Sangre", le mari adultère pêchant avec son assistante voit ses attributs brûlés à l'acide par sa femme avant que la main vengeresse ne soit à son tour malmenée à travers l'ablation de ses deux bras. Le Christ est ici encore un enfant prénommé Fenix et simple spectateur de l'horreur qui éclate au sein même du cocon familial. Dans les deux cas, c'est toujours la femme qui s'offre la possibilité de mettre un terme à la barbarie et à l'adultère dont elle est victime.



Fenix est un jeune homme perturbé au lourd passé. Aujourd'hui il va sortir de l'institut psychiatrique dans lequel il est enfermé depuis de nombreuses années. Depuis qu'il a été témoin d'un drame atroce dont les acteurs principaux furent son père, un lanceur de couteau violent et adultère et sa mère, prêtresse d'une église vénérant une sainte sans bras et qui défendait de manière acharnée l'église du village que le propriétaire du terrain sur lequel elle était construite tentait de faire raser. Le père de Fenix, après avoir été castré par sa femme à l'aide d'un acide lors d'un adultère se vengea d'elle en l'amputant des deux bras.
Pour la toute première fois depuis longtemps Fenix va enfin pouvoir sortir de l'univers psychiatrique dans lequel il vit, accompagné d'un groupe de handicapés mentaux. Ils croisent sur leur route, voyous et prostituées parmi lesquelles Fenix reconnaît celle qui fut il y a très longtemps la maîtresse de son père et qui fut en partie responsable du drame qui toucha ses parents. Après le retour du groupe à l'asile, Fenix prends la décision de fuir sa cellule afin de retrouver celle qui aujourd'hui vend ses charme dans la rue. Les ruelles sordides vont être le témoin du meurtre horrible de la jeune femme, assassinée par la main d'une autre femme.

Au petit matin, alors que la fête qui la veille battait son plein à laissé la place à un décor jonché de détritus, Fenix retrouve sa mère et participe dès lors avec elle à des spectacles en lui prêtant ses bras...

On retrouve dans "Santa Sangre" ce qui fait l'originalité du cinéma de Jodorowsky. Une boulimie qui transpire à chaque plan. Tellement inspiré que si le cerveau humain était capable de le suivre dans la totalité de ses délires, il lui faudrait morceler l'écran en différentes cases, de le splitter afin d'y inclure dans chacune l'histoire unique de personnages hauts en couleurs et fantasmés par l'esprit de ce génie du septième art. Tel le Fellini de "Roma", la caméra se ballade en longs travelling horizontaux dans un univers sordide, décadent et dans lequel seule la présence de Fenix semble faire tache. Dans ce monde de cauchemar il entretient avec sa mère retrouvée une relation ambiguë qui semble aller bien au delà des rapports "mère-fils". Plus le temps passe et plus les images du passé mêlées à d'effrayantes visions de mort nous font comprendre que l'esprit de Fenix est accaparé par les perpétuelles obsessions qui ont emmuré un jour son esprit jusqu'à l'enfermer dans un asile.
Santa Sangre est une formidable histoire d'amour. Celui d'un fils pour sa mère. Une mère qui l'honore de sa présence par la pensée car malgré les apparences, celle-ci est morte depuis le jour où elle a été "sacrifiée" par son mari. Elle vit cependant à travers l'esprit schizophrène de son fils Fenix, l'employant à se venger de ceux qui l'ont brisée. Elle qui est devenue l'image même de la sainte, celle qu'elle vénérait par le passé, est aujourd'hui pour moitié l'esprit de son fils qui finira par combattre ses mauvais démons afin de vivre par et pour lui-même.

C'est dans une débauche de sang et de sexe, dans un décor aux couleurs tantôt délavées mais majoritairement criardes que l'on suit ce conte pour adultes magistralement mis en scène par Alessandro Jodorowsky. Un chef-d'œuvre.

jeudi 8 mars 2012

Les tueurs qui inspirent le 7ème art: Peter Kürten "M Le Maudit" de Fritz Lang (1931) et "Le Vampire De Düsseldorf" de Robert Hossein (1965)



De la réalité...

Deux films consacrés à Peter Kürten célèbre tueur en série surnommé "le vampire de Düsseldorf" en raison de son goût pour le sang de ses victimes qu'il buvait en leur entaillant la gorge avant de s'en délecter. Voleur, violeur, pyromane et assassin, il tua de nombreuses personnes avec une nette prédisposition pour les jeunes enfants. Cela ne l'empêcha pas de s'en prendre à des hommes et des femmes ainsi qu'à des personnes âgées. Il étranglait, assommait à coups de marteaux, poignardait ses nombreuses victimes et la diversité des armes employées poussa la police de Düsseldorf à croire que plusieurs assassins étaient en activité...

 







...à la fiction

Le film de Fritz Lang "M Le Maudit" s'attache avec brio à reconstituer la vie des habitants d'une époque révolue. Il tourna son film peu de temps après l'exécution de Peter Kürten. Son tueur (ici nommé Hans Beckert et interprété par l'excellent Peter Lorre) rôde le soir à la recherche de jeunes victimes (Lang faisant l'impasse sur les adultes et les vieillards) alors que la police qui espère toujours le prendre dans ses filets patauge continuellement, suspectant toujours des innocents. La population s'énerve, les esprits s'échauffent et le comportement suspect d'un homme croisé dans la rue en compagnie d'une jeune fille pousse la foule à le lyncher sur la place public, certaine de mettre enfin la main sur le véritable assassin. La police s'épuise à rester éveillée jour et nuit dans l'espoir de mettre un terme aux agissements de Beckert mais sans succès. Elle s'acharne tant et si bien que la pègre devient victime des contrôles incessants orchestrés par la police afin de trouver l'assassin et se retrouve par la même dans l'impossibilité de "travailler" correctement. Au point que celle-ci décide elle-même de poursuivre ses propres investigations pour trouver le tueur d'enfants allant jusqu'à faire appel au réseau de mendiants de la ville afin d'avoir un maximum de renseignements sur les mouvements suspects ayant lieu en ville. Finalement c'est grâce à l'un de ces derniers que Beckert sera reconnu. Il sera alors arrêté, non pas par la police mais par la pègre qui l'emmènera dans un entrepôt à l'intérieur duquel le tueur devra répondre de ses actes. Alors que l'on pense son sort scellé, c'est l'arrivée inopinée de la police au moment propice qui va le sauver... 


Le film de Robert Hossein quand à lui se déroule dans un contexte historique réel dans lequel Hitler qui est alors à la tête des partis nationalistes, cherche le chemin du pouvoir. Le peuple au chômage erre dans le seul but de trouver un peu de nourriture et de travail. Robert Hossein nous présente un Peter Kürten beaucoup moins discret que celui de Lang. Beaucoup plus séduisant surtout. La ville où il sévit et les meurtres barbares qu'il perpétue lui offrent le surnom de "vampire de Düsseldorf". Interprété par Robert Hossein lui-même, Kürten est présenté comme un petit homme frêle et peu sûr de lui. Il est le jour un homme insignifiant, ouvrier se ventant d'être au chômage alors qu'il n' en est rien. Pendant que les hommes manifestent dehors, lui traîne dans les rues et passe son temps à regarder les femmes. Étriqué dans un costume qu'il ne quitte jamais, il est la nuit un homme tout à fait différent. Amoureux fou d'une jeune femme travaillant dans un cabaret et prénommée Anna, il se rend chaque soir au spectacle qu'elle donne, s'asseyant toujours à la même table. Il essaie tant bien que mal de l'inviter à boire un verre mais la jeune femme est coriace et comme elle sait pouvoir manipuler les hommes grâce à ses charmes, elle n'hésite pas à le faire à sa guise. Alors qu'un jour Kürten est refoulé par la jeune femme qui semblait au premier abord accepter son invitation, cette dernière semble séduite par la manière de réagir de l'homme et va peu à peu et volontairement le laisser gagner du terrain.
Mais Kürten est avant tout un prédateur. Un tueur sans pitié qui ne parvient pas à refouler ses pulsions meurtrières. Autant peut-on le voir sourire, usant ainsi de son charme pour prendre dans ses filets de jeunes femmes naïves qu'il rencontre dans les bars le soir, autant le moment venu de tuer, il porte le masque de la mort. Un masque qui fait froid dans le dos et qui montre la détermination du personnage. A l'aise il peut ainsi se montrer d'une parfaite élégance alors que dans d'autres occasions il est maladroit, longe les murs et marche d' une manière presque grotesque mais mais aussi, touchante...
Tout parait se passer merveilleusement bien entre Anna et lui. La jeune femme semble elle aussi amoureuse et l'on suppose un moment les pulsions du jeune homme ont pris fin. Mais hélas, Anna tombe un matin sur une lettre écrite par Peter. Une missive qu'il a adressé à la police. Une lettre signée du vampire...


Alors que le film de Fritz Lang est très noir et nous plonge dans un univers expressionniste, celui de Robert Hossein est poétique. Son personnage est lui aussi plus attachant. Il faut dire qu'il est beaucoup plus présent à l'image alors que le tueur de Lang lui n'apparaît vraiment que dans la seconde partie du film. Son visage rond aux yeux globuleux beaucoup moins avenant ne joue pas non plus en sa faveur. Les deux assassins pourtant laissent un sentiment étrange. Plus que leurs meurtres odieux c' est leur personnalité qui marque les conscience. Le tueur de Fritz Lang, alors que son grotesque procès est en train de se jouer, devient misérable, inoffensif, enfantin. Celui de Robert Hossein n'est qu'un pantin qui ne fait aucune différence entre le bien et le mal. Et c'est peut-être cette ignorance, sa façon de déambuler dans les rues et ses gestes timides et imprécis qui le rendent si touchant. La musique joue un rôle très important et participe grandement à l'atmosphère envoûtante du film. Dans "M Le Maudit", on retiendra surtout le petit air sifflé qui suit le tueur dans sa quête mortelle et qui le fera tomber entre les mains de la justice.


Marie-France Pisier est superbe et méconnaissable dans le rôle d' Anna, Robert Hossein assure un rôle qui lui colle à la peau quand à Peter Lorre dans "M Le Maudit", il est d'avance condamné en raison d'un physique peu avenant.


"Le vampire de Düsseldorf" et "M Le Maudit" sont donc deux excellents films qui abordent un même sujet mais sous un angle totalement différent...

dimanche 4 mars 2012

Singapore Sling de Nikkos Nikolaidis (1990)

 
Lorsque l'on murit et que nos gouts changent, on se rend compte que certains souvenirs cinématographiques que l'on croyait impérissables finissent dans l'oubli. Combien parviennent-ils vraiment à demeurer ancrés dans notre esprit bien des années après que nous les ayons découverts? Si les gouts et les couleurs ne se mélangent pas, il existe parfois au cinéma des impressions qui se dégagent et qui nous unissent tous dans un même sentiment de joie, de peine, de souffrance, de dégout, de peur ou de bien-être. Et même s'il se révèle à des degrés différents, on ne peut jamais nier l'efficacité de certaines mises en scènes, à moins d'être totalement hermétique au septième art..

"Singapore Sling" fait partie de ces œuvres qui ne peuvent laisser insensibles. On peut l'aimer, l'adorer, l'idolâtrer. Comme l'on peut tout aussi bien le détester, nier le concept ou même fuir du regard certaines scènes. Pourtant le cinéma d'aujourd'hui devrait habituer les plus fragiles d'entre nous puisque plus aucune retenue n'est de mise et que l'on montre autant de sang qu'il y a de sexe au cinéma. Toutes notions mises à part et chaque scène décortiquée et mise à l'écart des autres, le film peut paraître d'un faible intérêt mais c'est bien l'imprégnation qui commence dès les premiers plans et qui ne se termine qu'à la toute fin du film qui opère sur la conscience du spectateur.

Déjà, en lieu et place de l'Homme, deux femmes, une mère et sa fille, creusent un trou dans le sol gorgé d'eau de leur jardin. Quelle espèce de mise en scène a-t-elle pu pousser ces deux là à finir la soirée agenouillées dans la gadoue et sous une pluie battante? Peut-être un jeu qui aurait mal tourné et dont le principal acteur, pas encore mort mais toutes tripes dehors, attend que ces dames daignent le pousser jusque dans le trou. Les deux femmes se désaltèrent lorsque Singapore Sling s'évanouit au volant de sa voiture garée non loin de là. Lancé à la recherche de celle qu'il aime, il est cependant persuadé qu'elle est morte.
Lorsque la mère aidée de sa fille tente de jeter le corps de l'homme dans le trou qu'elles viennent de creuser, ce dernier tente d''un dernier geste de sauver sa peau. Il finit assommé à coups de pelle et termine son existence allongé dans sa tombe.
La fille retourne dans la demeure familiale et se lance dans une curieuse litanie, révélant ainsi la perversité dont elle et sa mère font preuve depuis un certain temps. Assumant son rôle de meurtrière, elle avoue être, en compagnie de sa mère, responsable de l'assassinat de Laura, la femme que recherche Singapore. Cette dernière ayant choisit d'échapper à son existence s'est retrouvée entre les serres d'un duo de femmes perverses dont l'imagination débordante n'a d'égal que la violence des jeux auxquels elles se livrent.
Lorsque celles-ci pleurent la mort de l'homme qu'elles viennent de tuer et d'enterrer, on sonne à la porte. La conversation entre les deux femmes s'interrompt et la fille, armée d'un pistolet, s'approche, ouvre, et tombe nez à nez avec Singapore qui finit assommé d'un coup de crosse.


Filmé dans un noir et blanc somptueux, "Singapore Sling" est un film à part dans le paysage cinématographique. D'abord parce qu'il n'est pas courant de se retrouver face à une œuvre nous venant de Grèce. Ensuite parce qu'elle est régulièrement traversée de séquences d'une fulgurante beauté. Une œuvre poétique pervertie par de nombreuses outrances. Catalogue subversif des déviances engendrées par l'esprit tourmenté et l'ambiguïté des rapports entre une mère et sa fille, le premier mot qui vient à l'esprit est "scabreux".

Nécrophilie, scatologie, sadomasochisme sont dilués dans leur accumulation et leur impact s'efface à mesure qu'ils nous sont assénés. On espère donc que la poésie prendra une place assez importante pour nous faire oublier les monstruosités qui nous sont imposées. Et c'est effectivement le cas puisque ce débit volontiers horrifique qui dépasse de loin des œuvres telles que "La Grande Bouffe" de Marco Ferreri et "Sweet Movie" de Dusan Makavejev finit par se tarir après le premier tiers du film pour laisser enfin s'exprimer les personnages.

Meredyth Herold et Michèle Valley sont les deux interprètes féminines du film et campent respectivement les rôles de fille et de mère. Ensemble, leurs deux troublants personnages vivent dans une demeure fouettée par le vent et la pluie, jouant ensemble à d'inquiétants et très violents jeux teintés d'érotisme. Elles mettent en scène les forfaits dont elles se sont rendues coupables (le meurtre de Laura trois années plus tôt) avant que ne surgisse et ne vienne troubler leur ambiguë relation, Singapore, qui va très vite se retrouver désarçonné par le comportement étrange du duo féminin. Panos Thanassoulis est cet homme à la recherche d'une illusion qui va se retrouver dans un monde qui lui est étranger. Un univers concret, sinistre, puis douloureux et fantasmatique. Les rapports qu'il entretiennent tous les trois sont tendus et morbides. Si la complicité féminine est ici représentée de manière évidente, les premiers agissements de Singapore ne font que confirmer notre impression: résister ne fera qu'accentuer la blessure et le maintien de ses liens. C'est pourquoi il choisit de feindre la soumission, et même intellectuellement désarçonné, il tentera dans le flou le plus total de convenir à ses prédatrices afin de mieux leur échapper. Silencieux jusqu'à la mort, il n'ose entrouvrir les lèvres qu'au moment où son esprit s'ouvre enfin à nouveau. Pourtant, pas un son, pas un souffle d'air ne s'en échappe. Juste une voix-off dont l'extinction est programmée mais à laquelle fut déjà offert au début du film le privilège d'asséner d'intelligentes répliques.


On peut se demander à quoi est dû cet acharnement envers le sexe fort (le mort du début et les souffrances subies par Singapore) et pourquoi cette jeune femme ne parvient-elle toujours pas à quitter le monde de l'enfance pour entrer dans celui des adultes. Sans doute à cause du père qui la viola alors qu'elle n'était qu'une enfant. Probablement que le temps s'est figé à une date indéterminée, le jour peut-être où mère et fille se sont chargées de faire payer au père le prix fort pour les outrages subit. Un père dont le souvenir se reflète dans le visage des hommes de passage qui ont le malheur de se présenter à leur porte. Le père disparu, c'est la mère qui élève seule sa fille. Tenant alors les deux rôles, elle ne mesure plus le degré de sévérité dont elle fait preuve et devient dure et dominatrice. Singapore n'a pas d'autre alternative que d'accepter son sort, espérant ainsi y trouver son salut. Et pourquoi pas même en la personne de la fille dont le comportement laisse parfois penser qu'elle pourrait être de son côté. Les enjeux personnels de chacun les obligent à jouer de manière pondérée, calculée et insoupçonnée, et ce dans leur unique intérêt. C'est finalement Singapore qui gagnera... le droit de creuser sa propre tombe. Une semi-victoire qui le plongera dans les ténèbres éternelles mais qui indéniablement lui permettra d'échapper à ses bourreaux.  

La bande-son apporte beaucoup à l'harmonie de certaines scènes qui sans elle sans doute manqueraient d'une certaine émotion. "Singapore Sling"ne plaira pas à tout le monde. Certains y verront un petit film camouflant ses faiblesses derrière une accumulation de plans et d'idées sordides mais en réalité il s'agit ici d'un grand film. De ceux qui marquent par leur originalité et leur poésie. Qui font mal et réjouissent par leur absence de pudeur. Qui parlent aux vrais amoureux du septième art, de ceux qui ne rechignent pas devant la réflexion sans y omettre de se divertir. 

 

jeudi 1 mars 2012

Le Survival 1.5


Si les plus grands classique du survival accusent la quarantaine, depuis quelques années ils ont le vent en poupe grâce à la bonne volonté de certains cinéaste de faire revivre un genre qui finalement n'a pas été jusque là trop souvent exploité. La mode depuis quelques temps est aux remakes. Le genre à désormais, lui aussi, droit aux siens. S'il arrive très fréquemment que ces derniers soient de piètre qualité, ceux consacrés au survival se révèlent en revanche particulièrement réussis. A l'image des excellents "Massacre A La Tronçonneuse", "La Colline A Des Yeux" et "La Dernière Maison Sur La Gauche". Si le premier ne parvient pas à égaler celui dont il est inspiré, il reste étonnamment bien fichu d'un point de vue graphique. C'est d'ailleurs ce qui semble rapprocher les films d'horreur de dernière génération. Les cinéastes s'emploient désormais à retranscrire systématiquement une atmosphère morbide, évacuant à force toute sensation de malaise à force de nous confronter à des situations vues maintes et maintes fois. "La Colline A Des Yeux" d'Alexandre Aja est quand à lui un quasi copier-coller du film de Wes Craven. Si les origines du retour à l'état sauvage étaient des plus ambiguës à l'époque, aujourd'hui on préfère jouer la carte de l'écologie et excuser l'horrible mutation génétique dont est affublée la famille de dégénérés en expliquant qu'elle est victime des retombées radioactives liées aux expériences que pratiquait l'armée à l'époque des tests effectués sur la bombe atomique. Le film est très réussi et dépasse même son ancêtre qui pour le coup a pris un sacré coup de vieux.

 

Mais le meilleur des trois remakes semble devoir être "La Dernière Maison Sur La Gauche" de Dennis Iliadis. Considéré à l'époque comme l'un des films les pus glauques de tous les temps, ce film lui aussi signé par Wes Craven était effectivement assez dur et bien que depuis on ait vu beaucoup plus hard, le film conserve une bonne part du malaise qu'il engendrait à l'époque. La version de Iliadis est en tout points remarquable. D'abord parce qu'elle évite de servir aux bourreaux et aux spectateurs une bande d'adolescents sans cervelles et réussi à créer une complicité entre les personnages de Mari, ses parents et le spectateur, ce qui rend alors les scènes d'horreur beaucoup plus difficiles à regarder. Le rôle de Krug, le chez des malfrats, est des plus ambigus. On le croit capable de s'émouvoir alors qu'il reste un être particulièrement insensible. On le comprends assez vite, les relations qu'il entretient avec son fils sont déjà tellement violentes qu'on ne peut se faire d'illusion quand au sort qui est réservé à Mari et Paige. Ce qui différencie ce film des autres survivals se situe dans sa seconde partie. Le scénario inverse la vapeur et c'est au tour des parents de Mari de se venger des bourreaux devenant ainsi encore plus sanguinaires que ces derniers. Les scènes d'horreur sont d'ailleurs à ce titre particulièrement gratinées. Si la quantité de sang versé par Krug, Morton et Sadie est visuellement atténuée par les armes employées, les outils dont vont user John et Emma, les parents de Mari, se révèlent dévastateurs et vont baigner les personnages dans un véritable bain de sang. Le développement de certains personnages comme ceux de la famille Collingwood ou bien celui de Justin enrichissent une histoire au départ tout à fait classique. Par contre, la dernière scène, totalement gratuite et inutile aurait pu être évitée.

Depuis quelques années le survival est en pleine recrudescence avec notamment l'arrivée de la tétralogie "Wrong Turn". Espérons que la série s'achève enfin car les deux derniers volets signés Declan O'Brien sont d'une médiocrité stupéfiante. Alors que les "Détour Mortel" 1&2 parvenaient sans mal à apporter leur lot de frissons, les deux films qui ont suivi ont laissé un goût étrangement amer. Le troisième volet bénéficie d'effets-spéciaux numériques totalement ratés et le quatrième d'une histoire absolument ridicule, la véritable horreur étant d'avoir offert les rennes à ce pseudo cinéaste de O'Brien. 

 
C'est du coté de la Norvège que nous vient le cinéaste qui s'est certainement le plus imprégné de l'ambiance d'une époque et des codes du genre pour nous offrir un "Manhunt" plutôt réjouissant même s'il ne parvient jamais à égaler les classiques du genre. Sans doute Patrik Syversen a-t-il voulu rendre hommage au "Massacre A La Tronçonneuse" de Tobe Hooper en situant l'action pendant l'été de l'année 1974, période durant laquelle Leatherface et sa petite famille de bouchers-psychopathe se sont rendus coupable d'une véritable boucherie.Le film n'est pas exempt de défauts (situations peu crédibles et plans longuets) mais parvient à maintenir l'attention jusqu'au bout.

"Wilderness" quand à lui explore aussi bien le genre survival que le slasher, jetant sur une ile (et envoyant par la même occasion au massacre) une bande de jeunes voyous associables. On assiste avec un certain délice à l'exécution d'une sentence ordonnée par le père d'un adolescent, souffre-douleur de ses compagnons de chambre, et qui choisit de se faire lui-même justice. Cet ancien militaire, presque aussi "testostéronné" que Rambo utilise des moyens classiques (arc, couteaux, camouflage) ainsi que des chiens fort bien entrainés et avides de mordre de la chair tendre. Les adolescents sont tellement cons qu'on ne parvient jamais à s'émouvoir lorsque survient la mort, pas même pour le poltron de la bande qu'on espère finalement, et avec autant d'appétit, voir se faire dévorer vivant par les chiens.
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