Bienvenue sur Cinémart. Ici, vous trouverez des articles consacrés au cinéma et rien qu'au cinéma. Il y en a pour tous les goûts. N'hésitez pas à faire des remarques positives ou non car je cherche sans cesse à améliorer le blog pour votre confort visuel. A bientôt...

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vendredi 30 novembre 2012

De Bon Matin de Jean-Pierre Moutout (2010)


 
Paul Wertret est chargé d'affaire dans une banque et marié à Françoise. Un matin, alors qu'il se rend comme tous les jours au travail, Paul arrive à la banque armé d'un revolver dont il se sert pour tuer deux employés. Une fois le double meurtre commis, il part s'enfermer dans son bureau et repense aux événement qui l'ont poussé à commettre cet acte.

La banque vient de connaître un déficit de plus de deux milliards d'euros et le supérieur direct de Paul, Alain Fisher, tente de découvrir les responsables de cet échec. Paul est chargé de former le jeune Fabrice Van Listeich, un nouveau venu. Alcoolique, le chargé d'affaire a bien du mal à communiquer avec son fils Benoit. La direction de la banque, bien décidée à la dégraisser de ses employés les moins productifs, s'en prend tout d'abord à Lancelin, l'un des plus proches collègues de Paul, accusé d'escroquerie. Puis c'est au tour de Clarisse, une autre collègue, d'être renvoyée par Alain Fisher, prétextant que c'est un rapport écrit par Paul sur Clarisse qui a influencé son licenciement. Paul est ensuite forcé par la direction à consulter un psychologue. Rien ne va plus pour cet employé qui va peu à peu sombrer dans une certaine forme de psychose. On lui retire certains dossiers sur lesquels il planche mais on le félicite dès lors qu'un concurrent lui propose un poste.

 Jean-Pierre Darroussin est cet homme poussé à bout par ses supérieurs. Ce n'est pas la première fois que l'on retrouve l'acteur aux prises avec une société inhumaine prête à sacrifier certains de ses employés afin d'assurer son avenir (Rien De Personnel). Dans De Bon Matin, on découvre la direction d'une banque qui n'assume pas ses choix et préfère faire endosser la responsabilité de ses actes à certains de ses employés. Ces mêmes victimes que l'on pousse vers la porte de sortie (et pourquoi pas au suicide) de manière détournée, histoire de se dire que l'on n'a rien à se reprocher. On assiste à la lente descente aux enfers d'un homme qui a tout sacrifié pour son métier. Un individu pour qui le bonheur reste une conception à laquelle il demeure étranger.
Le film se veut une succession de flash-back mais reste dans la forme assez désordonné. Car dans le fond, si la simplicité du scénario a peut-être convaincu le réalisateur Jean-Marc Moutout de nous conter l'histoire de manière originale, on aurait sans doute préféré davantage de chronologie dans les événements. De très loin, et sous certains aspects, le film semble s'inspirer de certaines idées véhiculées par La Moustache d'Emmanuel Carrère. Comme cette irrépressible envie, sous la pression, de s'évader vers la Chine pour Lindon ou l'Afrique pour Darroussin.

Mais l’œuvre qui sans doute sert de référence au film de Jean-Pierre Moutout est Une Étrange Affairede Pierre Granier-Deferre. L'employé Gérard Lanvin y croise un nouveau directeur en la personne de Michel Piccoli. Un homme d'affaires ambigu qui va se servir des craintes de son employé (la peur de se retrouver au chômage) pour en faire son jouet. Qualitativement parlant, et si le film de Moutout est de bonne facture, son ancêtre lui est bien supérieur. Car le malaise inhérent au réalisme des situations vécues par Darroussin est inférieur à celui ressenti devant le film de Granier-Deferre. Ce qui n'enlève évidemment rien à la performance de Jean-Pierre Darroussin qui, comme à son habitude, est impeccable et qui nous prouve une fois de plus qu'il est aussi à l'aise dans la comédie que dans le drame.

 

mardi 27 novembre 2012

Ju-On de Takashi Shimizu (2000)



Une jeune assistante sociale prénommée Rika se rend dans la demeure d'une vielle femme sénile afin de s'en occuper. Alors qu'elle est en train de passer l'aspirateur, Rika tombe sur une photo représentant un homme, un enfant, ainsi qu'une troisième personne à laquelle on a découpé le visage. La jeune femme entend de curieux bruits de grattements. Intriguée, elle monte les escaliers et se retrouve nez à nez avec un enfant enfermé dans un placard. Cet enfant, c'est celui que Rika vient de voir sur la photo trouvé à l'étage du dessous. Effrayée, elle descend les escaliers en courant et file demander à Sashie, la vieille femme alitée, qui est le petit garçon qui se trouve à l'étage. La vieille femme reste muette et c'est alors qu'apparait une monstrueuse silhouette qui enveloppe Sashie. Devant cette vision cauchemardesque, Rika s'évanouit.


Quelques jours plus tôt, Hitomi, le fils de Sashie et sa compagne Kazumi sont eux-mêmes témoins d'évènements étranges. La femme du jeune homme semble être attaquée par un chat alors qu'elle se rend dans sa chambre. Plus tard, et alors qu'il rentre du travail, Hitomi trouve Kazumi allongée sur son lit et dans un état catatonique. Il sent une présence mais ne trouve personne. Un instant plus tard, il découvre le petit garçon caché derrière le lit de sa femme qui meurt devant ses yeux. Une ombre plane au dessus de la tête de Hitomi qui semble alors possédé par une entité.

Lorsque sa sœur arrive beaucoup plus tard, elle trouve son frère dans les escaliers, déboussolé, et tenant de curieux propos au sujet de sa femme Kazumi. Il affirme en effet que celle-ci le trompe et, "qu'il n'est pas son enfant". Chassée de la maison, la soeur de Hitomi part se réfugier chez elle où elle est à son tour agressée par une entité monstrueuse.

L'inspecteur Toyama apparaît alors. Ce policier fut chargé d'enquêter quelques années auparavant sur une sombre histoire de meurtres ayant eu lieu dans la demeure de Sashie et dans laquelle un homme tua sa femme et leur enfant...


A l'origine réservé au marché vidéo, le film de Takashi Shimizu connu un tel succès qu'il sortit en 2003 au cinéma poussé par Kiyoshi Kurosawa et le scénariste de "Ringu" ("Ring") Hiroshi Takahashi. Le film marche comme prévu et connait un véritable engouement aux États-Unis, à tel point que les américains rachètent les droits du film et proposent à Takashi Shimizu de réaliser lui-même un remake de son propre film. Le succès est tel que quatre autres films seront mis en chantier entre 2006 et 2009.

Le film est construit comme une succession de sketches liés entre eux par différents personnages. Contrairement à la majorité des films basés sur le sujet des maisons hantées, le piège qui se referme sur les victimes ne se concentre pas uniquement sur la demeure même, lieu du drame initial, mais va jusqu'à les poursuivre bien au delà, jusque dans l'habituel réconfort de leur propre maison. Le fantôme japonais diffère d'un ectoplasme mais possède toutes les caractéristiques d'un esprit éprit de vengeance. Il apparaît et disparaît à volonté. Il ne porte pas de drap blanc sur lui mais sa peau est d'une blancheur maladive. Il provoque des évènements spontanés: lustre qui bouge, portes qui s'ouvrent et se ferment, bruits provenant du grenier, etc...


Les fantômes de "Ju-On" possèdent une stature effrayante. Comme plusieurs de leurs comparses découverts dans d'autres œuvres ("Janghwa, Hongryeon"), il déambulent de façon grotesque, comme désarticulés, et jouent de leur chevelure pour n'arborer qu'un œil glauque et inquiétant. Si parfois l'histoire semble confuse, on s'attache surtout à l'intervention de ces fantômes qui nous sont présentés chaque fois de manière originale. A travers une caméra de vidéo-surveillance, planqués sous un lit, derrière une vitre opaque ou bien même démultipliés derrière une porte d'ascenseur.

Ici (et ailleurs), le cinéma asiatique nous prouve à travers toute une série de films ("Ringu", "Honogurai Mizu No Soko Kara", "Gin Gwai") qu'il n'a rien à envier aux cinémas américain et espagnol en matière d'effroi.


samedi 24 novembre 2012

Le Festival International Du Film Fantastique D'Avoriaz Par Année: 1975





Pour cette troisième édition du Festival d'Avoriaz, c'est le cinéaste franco-polonais Roman Polanski ("Répulsion", "Rosemary's Baby") qui préside aux cotés d'illustres représentants du septième art. On trouve parmi le jury d'aussi célèbres cinéastes que Claude Chabrol ("Que La Bête Meurt", "Landru"), Costa-Gavras ("Compartiment Tueurs", "L'Aveu"), Édouard Molinaro ("Quand Passent Les Faisans", "Oscar") ainsi que Roger Vadim ("Le Vice Et La Vertu", "Château En Suède"). 
 
L'illustre écrivain René Barjavel ("La Nuit Des Temps", "Le Grand Secret"), Jean-Louis Bory ("L'Odeur De L'Herbe", "Le Pied"), Pau Guimard ("Rue Du Havre", "Les Choses De La Vie", adapté au cinéma par Claude Sautet en 1970) et Françoise Sagan ("Bonjour Tristesse", adapté au cinéma par Otto Preminger, "Des Bleus A L'Âme") font eux aussi partie de l'aventure. On y croise également l'actrice Bernadette Lafont ("Le Beau Serge", "L'Eau A La Bouche"), L'auteur-compositeur-interprète Serge Gainsbourg ainsi que le Sculpteur César, bien connu pour ses compressions.



Cette année, dix films sont en compétition. "A cause D'Un Assassinat", thriller de Alan J. Pakula, nous conduit jusqu'à la Parallax Corporation, une société qui engage des tueurs et à laquelle un journaliste va devoir faire face. "La Beladone De La Tristesse" de Eiichi Yamamoto est un film d'animation pour adultes qui appartient à la trilogie "Animerama". Le film est une adaptation de "La Sorcière" de Jules Michelet. "Du Sang Pour Dracula" de Paul Morrissey est interprété par Udo Kier et Joe Dallesandro. A la différence des autres films sur le thème du vampire, celui-ci nous est présenté comme malade. Le film est indéniablement emprunt d'une atmosphère malsaine. Autre film policier, "Enquête Dans L'impossible" de Frank Perry nous conte l'histoire d'un homme se prétendant extra-lucide et prédisant un meurtre dont la victime sera effectivement retrouvée morte. "Flesh Gordon" de Michael Benveniste et Howerd Ziehm est une parodie d'un superhéros bien connu qui mêle l'humour, l'érotisme et le fantastique. Flesh Gordon est ici employé afin de mettre fin à un rayon qui provoque un raz de marée de pulsions sexuelles. Philippe Noiret et Jean-Louis Trintignant sont les personnages principaux du film de Alain Robbe-Grillet "Le Jeu Avec Le Feu" dans lequel une soit-disant maison de repos cache en réalité une maison de plaisir où sévissent des maniaques sexuels. 
 

Outre la propension du festival à proposer cette année là des films à connotation érotique, certaines bandes proposent une véritable plongée dans l'épouvante comme "Le Monstre Est Vivant" du très particulier Larry Cohen. Sujet délicat qui voit un horrible bébé tuer dès sa naissance tous ceux dont il croise la route. Le chef-d'œuvre de Brian De Palma "Phantom Of The Paradise" fait partie de la sélection. On se trouve là devant une œuvre qui ne souffre d'aucune comparaison et qui vole à mille lieues au dessus de ses concurrents. Le film nous conte la légende de Faust qui au travers d'un musicien victime d'une producteur véreux et ayant vendu son âme au diable, décide de se venger de lui et de se réapproprier l'œuvre que ce dernier lui a volé. "Phase IV" de Saul Bass et "Les Sept Vampires D'Or" de Roy Ward Baker font eux aussi partie de la sélection.

Quatre films sont hors compétition cette année-là. "La Bête" de Walerian Borowczyk qui, malgré le nom de son réalisateur est un film bien français. "Ghost Story" de Stephen Weeks. Trois amis penetrent dans une vieille demeure. L'un d'eux est la victime d'un événement particulièrement troublant. Il assiste à une scène montrant les anciens propriétaires mort depuis un siècle. C'est alors qu'une poupée démoniaque surgit. Érotisme encore avec "La Messe Dorée" de Béni Montrésor qui nous conte un diner qui se transforme en orgie. Et enfin "Le Silence du Dr. Evans" du cinéaste polonais Boudimir Metalnikov.



Le palmarès:

Le grand prix de ce troisième festival est en toute logique remis à Brian De Palma et à son extraordinaire "Phantom Of The Paradise" qui mérite tous les éloges. Le film démontre tout le savoir-faire du cinéaste en matière de mise en scène. Les split-screen (procédé inventé par De Palma lui-même et permettant de montrer sous différents angles et en temps réel une même scène) sont ici sublimés. L'interprétation est superbe, la bande-son est magnifique, et le rythme est enlevé. Quand à la scène finale, elle est tout simplement explosive et renversante.

Le prix spécial du Jury et remis à Larry Cohen et son très étrange "Le Monstre Est Vivant". Quand au "deuxième prix", il disparaît au profit d'un prix de la critique remporté en 1975 par Alan J. Pakula avec son "A Cause D'Un Assassinat"...

mercredi 21 novembre 2012

Mes Nuit Sont Plus Belles Que Vos Jours de Andrzej Zulawski (1989)



Lucas est ingénieur. Il a inventé un nouveau langage informatique qui lui ouvre les portes de la célébrité mais il apprend en même temps lors d'un examen cérébral que ses jours sont comptés. Il est atteint d'un mal étrange qui lui fait perdre la notion des mots. Alors il ressasse sans cesse, de peur que ces derniers ne lui échappent. Attablé à la terrasse d'un café, il fait la connaissance de Blanche. Cette jeune femme fait la couverture des magazines. Elle, est déjà célèbre. En effet, Blanche à la troublante particularité de lire dans l'esprit des gens. Elle doit prochainement se rendre à Biarritz pour une représentation qui doit la consacrer. Elle est accompagnée pour cela de François, un hypnotiseur. C'est grâce à lui qu'elle parvient à un état de transe lui permettant d'explorer l'âme de son prochain. Mais pour l'instant, Blanche et Lucas en sont encore à faire connaissance. C'est devant une dispute violente dont sont les acteurs un homme et une femme qu'ils démarrent une bien curieuse conversation. Lucas montre les premiers signes de la maladie. Blanche, elle, a l'air d'une jeune femme bien malheureuse. Chacun a vécu un drame durant son enfance, et c'est peut-être pour cela qu'il se sentent déjà si proches. Lucas invite la jeune femme à dîner mais ses propos incohérents contrarient Blanche qui fuit l'ingénieur et part retrouver François dans la chambre d’hôtel qu'il partage avec un amant. 

Le lendemain matin, Michel l'associé de Lucas trouve l'ingénieur assis au beau milieu d''une rue jouxtant le bar où Blanche et lui se sont rencontrés. Puis c'est au tour de celle-ci de retrouver Lucas, toujours assis sur le pavé. Elle lui annonce qu'elle s'en va pour Biarritz. Un fois de retour chez lui, et contre l'avis de Michel qui lui conseille d'aller voir son médecin, Lucas prend la décision de partir rejoindre Blanche...

Quatre ans après L'Amour Braque, Andrzej Zulawski nous conte une nouvelle fois la rencontre entre deux être fragiles que tout sépare. A part peut-être le drame qu'ils ont vécu chacun de leur côté durant leur plus tendre enfance et qui semble être le point de départ du mal qui les ronge. Le cinéaste complexifie ici le langage de ses personnages. Épileptiques dans L'Amour Braque, il s'auréolent d'une étrange poésie dans Mes Nuits Sont Plus Belles Que Vos Jours. Il est parfois, et même très souvent, difficile de saisir le sens des phrases et leur réelle signification. De fait, on se retrouve dans le même brouillard que Lucas (interprété par Jacques Dutronc), à tenter de mettre de l'ordre dans les labyrinthiques dialogues de Andrzej Zulawski qui adapte ici le roman éponyme de Raphaëlle Billetdoux.

Sophie Marceau accepte ici d’interpréter le rôle de Blanche. C'est la seconde fois qu'elle joue pour Andrzej Zulawski, alors son compagnon dans la vie. Légèrement en deçà de son éblouissante interprétation de Marie dans L'Amour Braque, elle est cette jeune femme flouée par le souvenir douloureux d'un père qui maltraitait sa mère devant ses yeux de gamine effrayée. C'est d'ailleurs ces terribles images qui nous ne nous sont pas épargnées qui servent d'amorce à l'incroyable talent dont elle est pourvue. Zulawski, qui a l'habitude de prendre le taureau par les cornes, aménage à ce propos des séances d'hypnose en public particulièrement humiliantes pour ceux qui se prêtent au jeu. S'il tente toujours avec plus ou moins de bonheur d'extraire ce qu'il y a de meilleur dans le vécu de ses personnages, il aime aussi à les triturer dans tous les sens, insistant sur ce que leur existence à de plus sombre.

Mes Nuits Sont Plus Belles Que Vos Jours arbore les atours d'un film sur l'amour suprême. Peut-être le plus beau puisque spontané, invincible quoique éphémère. Il est vécu dans l'urgence. Lucas n'a pas le temps, de prendre son temps. Marie non plus, même si son cas demeure beaucoup moins passionnant pour le spectateur. Il y a aussi, au delà de l'aspect charnel et philosophique de leur relation, des entractes dignes de ce qu'étaient capables de nous servir fut un temps certains cinéastes américains (Terry Gilliam en tête). Des personnages pittoresques comme ce nain et ce lapin, sortis tout droit d'un film de David Lynch. Ou bien encore ce réceptionniste (François Chaumette) qui échange à loisirs de bon mots avec Lucas.
Mes Nuits Sont Plus Belles Que Vos Jours n'est peut-être pas la plus belle ni la plus réussie des œuvres d'Andrzej Zulawski, mais elle a le mérite d'exister et prouve s'il était besoin que ce cinéaste décidément anticonformiste reste fidèle à la vision toute personnelle qu'il a de l'amour. On notera la performance de Jacques Dutronc qui n'aura jamais plus qu'ici semblé aussi fragile.

samedi 17 novembre 2012

L'Important C'Est D'Aimer de Andrzej Zulawski (1975)


Nadine Chevalier, une actrice ratée, est obligée d'accepter des rôles dans des œuvres érotiques particulièrement malsaines afin de subvenir à ses besoins. Alors qu'elle tourne une scène difficile dans un énième film, elle croise l'objectif du photographe Servais Mont qui la mitraille en cachette. Découvert par l'équipe de tournage, celui-ci est poursuivi et sommé de donner la pellicule de son appareil-photos. Troublé par la beauté de Nadine, Servais décide de se rendre jusqu'à son domicile afin de lui proposer de poser pour la couverture d'un magazine. La jeune femme vit avec Jacques, un excentrique qui fuit les réalités du quotidien en se plongeant dans son unique passion, le cinéma. C'est grâce à lui si Nadine est encore en vie. Lessivée, la jeune femme a trente ans mais en paraît vingt de plus. Le cinéma ne lui offre plus aucun rôle important en dehors du porno.

Jacques et Nadine s'aiment et Servais le sait. Mais ce dernier n'accepte pas facilement de baisser les bras et revoit la jeune femme chaque fois qu'il en a l'occasion. Nadine n'est pas non plus indifférente au charme du photographe mais par respect pour Jacques, elle repousse Servais. Alors, en secret, le photographe demande à un ami de bien vouloir accepter Nadine dans sa nouvelle pièce de théâtre. Il espère ainsi voir la jeune femme rebondir vers une nouvelle carrière de comédienne. Dans l'ombre, il suit les répétitions, se faisant tout petit, cachant à Nadine qu'il en est l'instigateur. Mais pour pouvoir faire engager celle-ci, il lui a fallut accepter de photographier des scènes d'orgie pour le compte d'un certain Mazelli. Mais Servais en a assez de travailler pour cet homme et décide de lui faire savoir. Jacques quand à lui prend une décision radicale qui va bouleverser l'existence de Nadine et Servais...

Andrzej Zulawski ne tourne pas de films d'amour commode. Elles n'ont rien de simple et ses héroïnes ont toutes été marquées par la vie. Entre prostituée (L'Amour Braque), mannequin de charme (La Femme Publique) ou comme ici actrice de films pornographiques, les personnages féminins du cinéastes ont une image de l'amour plutôt contradictoire avec ce qui leur tombe dessus. Mais L'Important C'est D'Aimer n'est pas qu'un simple film d'amour entre un homme et une femme. Il témoigne aussi de celui pour le théâtre et le cinéma (comme ce fut déjà le cas pour La Femme Publique). L'oeuvre du cinéaste fait mal car ce qu'il y a de beau dans cette histoire est systématiquement mis à mal. On rêve de voir Nadine (la sublime Romy Schneider) tomber dans les bras de Servais (Fabio Testi), seul capable de la sortir de sa condition. Tout comme l'intrusion de ce photographe devient gênante dès lors que l'attachant Jacques (Jacques Dutronc) entre en scène. Romy Schneider est mise à nue, démaquillée, elle ne fait pas l'âge qu'on lui donne dans le film mais on lui découvre un visage sincère et sans fard. Et lorsqu'elle maquille ses yeux, le rimmel coule plus tard en rigoles sombres sur ses joues. 
 
Fabio Testi joue le rôle de ce photographe qui d'abord par intérêt pour l'argent va accepter de violer l'intimité d'un tournage de film pornographique, avant de tomber amoureux de Nadine. Tout en retenue, il partage (ainsi que Nadine) des regards d'une intensité folle, bercés par l'inoubliable partition de Georges Delerue. Jacques Dutronc (que l'on retrouvera quatorze ans plus tard aux côtés de Sophie Marceau dans le très troublant Mes Nuits Sont lus Belles Que Vos Jours) campe un très curieux personnage qui fredonne à tue-tête de petits airs, sautille sur place et collectionne les photographies de ses stars de cinéma préférées. Curieusement, l'acteur-chanteur parvient avec difficulté à convaincre dès sa première apparition. C'est au fil de l'histoire que son personnage devient concret et que Jacques Dutronc révèle un vrai talent d'acteur.

Si L'Important C'est D'Aimer n'est pas aussi démesuré que certaines œuvres de Zulawski, il montre déjà les obsessions du cinéaste qui ne peut s'empêcher de mêler l'amour à la mort. Comme s'ils étaient indivisibles. Si ici aussi, l'histoire est menée par un trio d'acteurs principaux, il ne faut pas oublier la prestation du fameux acteur allemand Klaus Kinski qui explose encore une fois par sa seule présence. Son charisme et son interprétation parfois outrancière trouvent ici matière à s'exprimer. L'Important C'est D'Aimer est peut-être le meilleur film d'Andrzej Zulawski. Du moins, le plus émouvant et l'un des plus classiques dans sa manière d'aborder un sujet dont s'est fait le chantre le cinéaste d'origine polonaise.

mercredi 14 novembre 2012

La Femme Publique de Andrzej Zulawski (1984)

 
Vingt-quatre heure, c'est ce qu'il aura fallut pour digérer cette Femme Publique. En l’occurrence, Valérie Kapriski. Jeune actrice qui ne jouera en trente ans qu'une vingtaine de rôle (L'année Des Méduses, La Gitane). Le film d'Andrzej Zulawski ressemble beaucoup au suivant, L'Amour Braque, mais lui est légèrement inférieur. La Femme Publique est pourtant lui-même un film coup de poing. Il refroidit l’œsophage et brûle la langue, donne des aigreurs d'estomac et la migraine. Il en assomme beaucoup et en subjugue quelques-uns. L'histoire, simple, est agrémentée de tellement d'épreuves visuelles et sonores qu'il nous arrive de nous perdre dans les méandres d'un scénario pas si léger que cela finalement. Le personnage de Lucas Kesling (interprété par le fameux Francis Huster) pourrait bien être le pendant fictionnel d'Andrzej Zulawski. Une façon pour le cinéaste d'exprimer par procuration des frustrations et autres obsessions personnelles récurrentes.

Une œuvre adaptée du roman de Dominique Garnier mais aussi très librement inspirée des Possédés de Dostoïevski.

Lucas Kesling est cinéaste et prépare son projet le plus important et le plus ambitieux. Adapter Les Possédés de Dostoïevski à l'écran. Et pour cela, il lui faut trouver une jeune femme belle et talentueuse. Il jette son dévolu sur Ethel, actrice inexpérimentée qui gagne sa vie en posant nue pour des photographes libidineux. Valérie Kapriski, considérée comme une actrice sans talent apparaît pourtant ici aussi naturelle qu'aurait pu l'être Sophie Marceau si son compagnon d'alors lui avait confié le rôle d'Ethel. Et puis, connaissant la rigueur de Zulawski, on peut supposer que ce que l'actrice transmet à l'écran est la réplique exacte de ce qu'à voulu le cinéaste. Si plusieurs scènes paraissent aux yeux de certains comme interprétées avec médiocrité par Kapriski, il ne faut pas oublier que son personnage est au départ celui d'une actrice sans talent, avec son lot de souffrances. Perdue entre une mère dépressive et alcoolique et un père violent qui a quitté le cocon familial.

Alors évidemment, si on s'amuse à la comparer aux deux hommes qui l'entourent (et même à la majorité des seconds rôles, ce qui pourrait nuire à son image de vedette), Valérie Kapriski a bien du mal à se hisser à leur hauteur. Francis Huster est magistral et Lambert Wilson extraordinaire. Ces deux hommes là se livrent un duel permanent issu d'une profonde et ancienne blessure que l'on nomme adultère. Lucas kesling est un monstre froid, sans véritable émotion, qui dirige son équipe d'une main d'acier et utilise Ethel comme bon lui semble, l’appâtant avec ce rôle tant convoité pour lequel elle s'est présentée à un casting. Après avoir fait montre d'un talent pourtant plus que mitigé, Kesling décide de l'engager. Certainement plus pour son corps que pour ses capacités d'actrices. Il tient Ethel sous son joug puisque cette dernière, ayant besoin de gagner beaucoup d'argent et rêvant de devenir actrice (même si elle réalise à un moment qu'elle n'est pas faite pour ce métier) s'accroche à son rôle. Milan Mliska (Lambert Wilson) lui, est plus nuancé, même si son comportement révèle un homme aussi fragile que violent. Atteint de troubles psychiques graves, il rencontre la jeune Ethel qui va alors interpréter son meilleur rôle. Celui du double d'Elena, la compagne de Milan que Kesling et lui vont bizarrement affirmer avoir renvoyée dans son pays d'origine, la Tchécoslovaquie. Cette femme là, c'est aussi celle est à l'origine de trouble qui lie les deux hommes. Une situation qui ne se dégage pas avec l'arrivée d'Ethel puisqu'à cause d'elle, ils vont à nouveau se battre dans un duel féroce.

Francis Huster et Lambert Wilson composent deux personnages saisissants. Ils s'avilissent pour les biens d'une œuvre étouffante, malsaine, épileptique mais aussi parfois très belle et émouvante. Zulawski à une façon bien à lui de raconter des histoires. Elles se veulent toutes d'amour mais finissent toujours mal. Il résout une fois de plus le caractère difficile de ces relations non par une séparation mais par la mort. C'est peut-être la plus radicale des manières,mais c'est aussi très certainement la seule que le cinéaste accepte de faire vivre à ses personnages. 
On notera, avec humour, que cette solution radicale proposée par Andrzej Zulaski n'a pas crevé l'écran puisque Sophie Marceau, qui fut longtemps sa compagne, est toujours en vie.

Mention spéciale pour le toujours barré mais excellent Jean-Paul Farré.

dimanche 11 novembre 2012

L'Amour Braque de Andreï Zulawski (1985)

Mickey et sa troupe de gangsters déjantés braquent une banque avant de filer tout droit vers une gare où les attend un train pour Paris. Là, le jeune homme hystérique fait la connaissance d'un jeune immigré perdu et prénommé Léon. Les deux hommes sympathisent et partent ensemble retrouver Marie, une jolie prostituée que Mickey rêve de prendre pour femme. Entourée d'une bande de vieux bourgeois, Marie est libérée de son entrave par Mickey qui lui offre le fruit du hold-up. Pour Léon, c'est le choc. Le jeune homme tombe immédiatement sous le charme de Marie qui ne reste pas, elle-même indifférente au jeune homme.
Les trois nouveaux amis s'échappent et filent tout droit retrouver la bande et le père de Mickey dans une boite de nuit afin de fêter les fiançailles de ce dernier et de Marie. Mais alors que la fête bat son plein, des hommes armés débarquent et font feu sur la bande. Le père de Mickey est touché et meurt.

Par la suite, Marie, Léon et Mickey se perdent de vue. La jeune femme est vite rattrapée par ceux dont elle avait été libérée, Mickey part à sa recherche, et Léon quand à lui, part s'installer dans l'appartement de sa cousine Aglaë.

Andrzej Zulawski offre avec L'Amour Braque, l'un de ses plus beaux rôle à Sophie Marceau. L'un de ses plus complexe également car interpréter une prostituée anéantie par la mort de sa mère, et qui calque désormais son existence à celle de sa chère maman brûlée vive par un quatuor de frangins dérangés n'est pas des plus évident. Pas des plus reposant non plus car sous la houlette de Zulawski, l'actrice mène son personnage sur un train d'enfer. L'Amour Braque est un défouloir où romantisme et guerre des gangs se mêlent dans un vertigineux tourbillon de violence agencé de manière chaotique. Un aspect qui s'exprime dans le geste et la parole. Il faut souvent tendre l'oreille pour saisir le sens de chaque phrase prononcée.

L'hystérie collective semble s'être abattue sur des interprètes recouverts d'une chape de plomb, les mettant ainsi à l'abri de la moindre émotion. Les rires succèdent aux pleurs, les personnages se voilant la face derrière un masque de clown triste. Andrzej Zulawski aime comme toujours filmer la Citée vidée de ses habitants, abandonnée aux mains de ses plus violents représentants. A vive allure, il présente des rues silencieuses où sont plantées des structures modernes, froides et impersonnelles. Il n'y a guère que dans les quartiers chauds de la capitale que l'on peut encore espérer voir fleurir un semblant d'humanité mais c'est encore là que le danger est le plus présent.
Il y a aussi cette campagne, refuge de Marie et Léon, et qui représente le seul endroit où il peuvent espérer échapper à leur destin mais ce dernier les rattrape très vite.

Librement inspiré par L'Idiot de Dostoïevski

Comme dans une grande majorité de ses œuvres, le film de Zulawski est emprunt d'un pessimisme extrême qui baigne ses personnages dans un melting-pot de souffrance, d'espoir, de résurrection, d'amour, de vie et de mort. Il règne ici une impression de mal-être ponctué de notes d'humour et d'érotisme maladif. Sophie Marceau (que certains s'amusent à conspuer, revenant sans cesse sur son jeu irritant) fait des merveilles et fait le grand pas vers un cinéma beaucoup plus mature que par le passé. Tchéky Karyo est magistral dans le rôle de Mickey, ce gangster au cœur tendre qui cherche l'amour auprès d'une Marie qui tombe sous le charme du jeune immigré Léon. Un Léon interprété par Francis Huster qui fait l'impasse sur son physique de jeune premier et qui n'hésite pas un seul instant à se mettre à nu pour interpréter son personnage. L'Amour Braque demeure, dans la filmographie de Andrzej Zulawski, l'un de ses trois ou quatre meilleures œuvres...


jeudi 8 novembre 2012

Du Mou Dans La Gâchette de Louis Grospierre (1967)


Nicolas Pappas et Léon Dubois sont deux truands de petite envergure qui vivent tout deux dans une caravane rose. A la recherche d'un emploi, ils montent sur Paris et font la connaissance de Jo Laguerre qui leur offre l'occasion de se faire un peu d'argent en escortant ses hommes durant un hold-up visant un fourgon rempli d'argent. Une fois celui-ci tombé aux mains des hommes de Jo, Nicolas et Léon suivent le véhicule mais finissent par perdre sa trace. Malgré eux, ils retrouvent le véhicule, mais cette fois-ci entre les mains de la police. Décidés à prendre la fuite à bord de leur caravane rose, les deux piètres bandits sont "invités" par l'homme de main de Jo à retourner voir celui-ci. Ils apprennent que les hommes, auxquels ils ont été forcés de donner un coup de main pour récupérer l'argent n'étaient pas de vrais policiers mais bien les hommes d'un gang concurrent de celui de Jo. Ce dernier est furieux car d'après la description que fait Nicolas de celui qui s'avère être celui qui commandait la patrouille de faux policiers, il s'agirait de Raoul Bertrand, le bras droit de "Magnum", son pire ennemi.

 Afin de se venger de l'affront qui lui a été fait, Jo confie à Nicolas et Léon la périlleuse mission de tuer Raoul Bertrand. Armés chacun d'un silencieux, les deux hommes se rendent dans le quartier où vit leur future victime. Celle-ci ayant l'habitude d'y promener son chien, ils mettent au point un stratagème censé être infaillible. Mais comme Nicolas et Léon sont aussi mauvais tireurs que gardes du corps, le coup rate. Et c'est sur une coïncidence extraordinaire que l'homme qu'il étaient chargés de tuer meurt. En effet, le chien de Raoul Bertrand parvient à se défaire de sa laisse grâce à un tir malheureux de Nicolas. C'est en tentant de rattraper son animal que la proie de Nicolas et Léon meurt sous les roues d'une voiture.
Jo est aux anges. Persuadé que l'accident de Raoul Bertrand a été manigancé par Nicolas et Léon, il les paie grassement et leur offre même un nouveau contrat visant à déterminer les projets de "Magnum"...

Réalisé par Louis Grospierre en 1967, Du Mou Dans La Gâchette est une comédie essentiellement interprétée par Bernard Blier et Jean Lefebvre. Les deux homme travaillèrent déjà ensemble sur le classique Les Tontons Flingueurs de Georges Lautner. Les deux acteurs y croisent Francis Blanche, Michel Serrault ainsi que Gastone Moschin dans le rôle de Jo Laguerre. Si Bernard Blier et Jean Lefebvre portent le film sur leurs épaules, ils ne faut surtout pas s'attendre à un film de la trempe du chef-d'œuvre de Lautner. Le scénario est des plus léger et confronte les acteurs à une série de péripéties toutes similaires. Des contrats qui, à défaut d'être menés à bien, profitent de la chance miraculeuse des deux hommes. Deux poltrons qui véhiculent une image forte auprès de leur ami "La Prudence" mais pas forcément auprès de la jeune mauvaise graine, déjà aguérrie à des techniques modernes et qui se gausse des leçons prodiguées par les spécialistes.

Le film, déjà, paraissait d'un autre âge. Alors, qu'en penser aujourd'hui? Louis Grospierre pensait sans doute qu'en employant les plus belles gueules du banditisme cinématographique d'alors, cela suffirait à faire de son film une comédie aussi honorable que celle dont il semble s'inspirer. Sauf que l'absence de scénario, le fainéant et mollasson jeu des acteurs, l'insipide musique et la réalisation cheap ruinent tout espoir; Reste que Du Mou Dans La Gâchette reste une honnête comédie qui se regarde sans véritable déplaisir, ne serait-ce que pour la présence de ces acteurs pour lesquels nous vouons toujours autant d'attachement.

dimanche 4 novembre 2012

Cloclo de Florent Emilio Siri (2012)


Coluche, L'Histoire D'Un Mec et La Môme en 2007, Gainsbourg (Vie Héroïque) en 2010, et maintenant, Cloclo. Le biopic a depuis quelques années les faveurs des producteurs et des cinéastes. Entre curieux hommage à l'un des humoristes les plus apprécié de France, conte surréaliste consacré à l'un de nos plus grand auteurs-compositeurs-interprétés et œuvre multi-primée un peu partout dans le monde, Le film de Florent Emilio Siri s'insère dans la mouvance du premier, mais avec beaucoup plus de bonheur que dans la réalisation insipide et ennuyeuse d'Antoine De Caunes. Derrière ce titre en forme de pseudo, tout le monde aura reconnu le surnom du mythique artiste Claude François. Un homme qui n'aura pas atteint la quarantaine mais qui trente ans après sa mort continue de passionner une partie des français. Tout le monde connaît ses chansons même sans parvenir à fredonner plus de deux ou trois phrases. Ses refrains sont célèbres et son perfectionnisme légendaire. Adoré par beaucoup dès les années soixante, le portrait dressé par Siri sur Claude François est pourtant peu flatteur. Et c'est peut-être essentiellement sous cet aspect que son film gagne en intérêt. 

  On y découvre un gamin élevé par une mère aimante et par un père souvent absent mais dont les méthodes rigides expliquent en partie l'homme que deviendra le petit Claude. La vie des François est des plus enviable puisque la petite famille vit dans une villa à Ismaïlia en Egypte. Mais alors que la famille est expulsée d'Egypte durant la nationalisation du Canal de Suez, elle se retrouve désœuvrée, à Paris dans une chambre d'Hôtel, puis à Monaco chez la sœur de claude. Alors que son père lui a fait apprendre le violon, Claude parvient à obtenir un travail dans un groupe de musiciens dans lequel il joue des congas. Son rêve de devenir chanteur ne va pas se faire sans heurts. Après quelques désillusions, il connaît enfin le succès en 1962 avec sa célèbre chanson Belles ! Belles ! Belles ! adaptée d'une chanson des Everly Brothers. La carrière de Claude François est alors lancée, et rien ne semble pouvoir désormais stopper sa fulgurante ascension... 

Le moins que l'on puisse dire, c'est que le film de Siri n'y va pas avec le dos de la cuillère. Le cinéaste n'a visiblement pas l'intention de ménager son public et c'est sans doute ce détail qui donne tout son intérêt à Cloclo. Il aurait été si facile de dresser un portrait flatteur, lisse et sans aspérités. La vision de Siri prouve que ce chanteur d'opérette était avant tout un homme fragile même s'il apparaît ici comme un être parfaitement imbuvable, infect avec son entourage, qu'il s'agisse des amis ou de la famille, et souvent odieux et autoritaire envers ceux qui travaillent avec (et pour) lui. Le contraste entre l'image que Claude François renvoyait aux médias et l'homme qu'il était dans le privé est saisissant et pose une question essentielle : Méritait-il vraiment cet amour inconditionnel que lui offraient toutes ces jeunes filles prêtes à se donner à lui par dévotion ? Le personnage paraît ici tellement négatif que l'on a du mal à s'attacher à lui et conforte l'opinion de ceux qui ne l'appréciaient déjà pas beaucoup. Claude François semblait donc vouer à sa carrière une ferveur incomparable, au point de mettre au second plan tout ce qui pouvait la compromettre et faire de l'ombre à l'artiste.  

Siri choisit Jérémy Renier pour le rôle de Claude François car il sait l'acteur capable d'entrer dans la peau du personnage. D'ailleurs, la ressemblance entre les deux hommes est frappante. Non seulement Renier a appris à danser comme la star, mais il a aussi appris à danser et à jouer de la batterie. Son entraînement a duré six mois et a permis de façonner un clone presque parfait du chanteur. Jérémy Renier a ensuite demandé à ce que Benoit Magimel soit embauché sur le film pour le rôle de Paul Lederman. Lui aussi a du faire quelques sacrifices afin d'entrer dans la peau du personnage. Magimel possède autant de mérite que Renier tant son interprétation colle au personnage. On a d'ailleurs presque du mal à reconnaître l'acteur affublé d'une perruque, d'un faux ventre et d'un nez factice. Comme le fit Robert De Niro pour Raging Bull, Benoit Magimel a pris un certain nombre de kilos pour mieux coller au personnage de Lederman. Il a dû ensuite apprendre à s'exprimer avec l'accent et les gestes du juif marocain. 

La musique du film a été confiée à Alexandre Desplat qui participe pour la cinquième fois à une œuvre de Siri. Outre les plus grands succès de Claude François, on y entend des titres célèbres signés Otis redding, Frank Sinatra (qui reprit lui-même l'un des plus grands succès de Claude François, Comme D'Habitude), James Brown ou encore France Gall. Ce qui permet d'ailleurs de découvrir les doublures cinématographiques de certains. Si la critique est plutôt enthousiaste, certains hebdomadaires s'acharnent (bien évidemment) sur le film de Siri. Pourtant, et même si l'on est réfractaire au personnage de Claude François, il faut avouer que le film se regarde avec plaisir et sans lassitude. L'interprétation et la réalisation sont remarquables et permettent de passer un agréable moment devant un film que certains fans du chanteur considèreront peut-être comme une trahison, mais qui dénote une réelle intention de faire connaître aux autres l'Artiste emblématique des années 60-70, sans fard et sans chichis.

jeudi 1 novembre 2012

Alien, Le Huitième Passager de Ridley Scott (1979)



Le véhicule commercial Nostromo, transporte vingt millions de tonnes de minerai. Il est sur le chemin du retour vers la Terre lorsque son équipage, constitué de sept passagers en hibernation, est soudainement réveillé. Tous les membres sont persuadés d'être arrivés à destination mais "maman", l'ordinateur central du Nostromo, indique au capitaine Dallas qu'elle vient d'intercepter une émission d'origine inconnue. Selon une close contenue dans le contrat de chacun, tout signe d'une présence intelligente doit faire l'objet d'une recherche. Certain passagers sont contrariés à cette idée sauf le médecin de bord qui n'oublie pas de rappeler à ces derniers que le moindre manquement à la règle signifie une suppression de la prime de fin de voyage. C'est donc dépité que l'équipage prends place à bord d'une navette et s'apprête à se poser sur le sol de la planète d'où provient le message.


Après un atterrissage difficile, le capitaine Dallas accompagné de Lambert et Kane se met en route vers l'endroit d'où semble avoir été émis, selon Ripley, ce qui ressemble désormais à un S.O.S. Sur une planète inhospitalière où les vents rugissent en permanence et où la lumière est rare, les trois membres de l'expédition trouvent un immense vaisseau extraterrestre à l'intérieur duquel aucune trace de vie n'est détectée. Les murs semblent tapis d'une matière organique, quand, plus loin, Kane trouve un puits dans lequel il se laisse glisser avant de tomber nez à nez avec ce qui semble être une immense chambre d'incubation dans laquelle des milliers d'œufs reposent sous une fine pellicule de lumière bleue. L'un d'entre eux, à l'approche de Kane, ouvre son extrémité. Pris de curiosité, Kane s'en approche avant d'être attaqué par ce qui ressemble à un énorme parasite (un facehugger). De retour aux abords de la navette, Dallas et Lambert exigent de Ripley qu'elle leur ouvre l'accès au vaisseau mais celle-ci, respectant les règles de sécurité, refuse et c'est le médecin de bord qui prends la décision de les laisser entrer. Kane, inconscient, est emporté vers l'infirmerie et après que le médecin lui ai ôté son scaphandre, l'équipage découvre horrifié que son visage est entièrement recouvert par la créature sortie plus tôt de son œuf. Après une tentative d'extraction de la part du médecin, conclue par un échec, le capitaine Dallas prends la décision de mettre Kane en quarantaine.
Quelques temps après, le docteur demande à Dallas de venir à l'infirmerie. L'équipage tout entier se rends alors sur les lieux et est heureux de découvrir un Kane libéré du parasite et enfin réveillé. Affamé, Kane réclame à manger et l'équipage alors en profite pour aller se nourrir. Durant le repas, Kane est pris de convulsions et, alors qu'il est allongé sur la table, ses amis contemplent avec effroi l'horrible petite créature qui s'extrait violemment de son torse avant de prendre la fuite...


Un chef-d'œuvre qui consacre deux genres: La science-fiction et l'épouvante


"Alien, le huitième passager" de Ridley Scott ("Duellistes", "Legend") est sans conteste l'un des meilleurs films de science-fiction de tous les temps. Tourné en 1979 soit trois années avant son autre chef-d'œuvre du genre, "Blade Runner", il allie avec merveille ce genre souvent représenté au cinéma avec une une épouvante parfaitement maitrisée. Deux courants que l'on aurait pu croire incompatibles mais qui dans cette œuvre très sombre font des merveilles. On est loin, très loin de la science-fiction bon enfant de Georges Lucas ("La guerre des étoiles" et ses suites). On retrouvera plus tard cette noirceur désespérée et pessimiste dans "Blade Runner". Dès les premières images et ce long travelling sur le cargo spatial menant sa route vers la Terre, l'oppression, constante se fait ressentir et elle ne nous lâchera pas jusqu'à la fin. Le gigantisme du vaisseau est en totale contradiction avec les longs couloirs exigus qui verront Ripley, l'héroïne de ce film campée par la superbe Sigourney Weaver, batailler avec une force de conviction peu commune, une créature extraterrestre cauchemardesque. L'angoisse atteint son point culminant lorsqu'elle se retrouve seule face au monstre alors que l' équipage tout entier a été décimé. Les couloirs du cargo se transforment alors en dédales sombres et inquiétant et la camera, nerveuse, qui suit Ripley à quelques centimètres dans une course contre la montre et contre la mort est étourdissante.


Les personnages sont tous parfaitement campés (notamment Veronica Cartwright, Yaphet Kotto, Harry Dean Stanton ainsi que Ian Holm) par des acteurs impliqués dans l'histoire. On pense que tout est dit dès lors que la traque commence mais l'ambiguïté dégagée par le personnage de l'officier Ash éclate vers les derniers instants du film et l'on comprends alors le sens réel de l'expédition. Quand à la créature, le huitième passager du titre, elle est d'une incroyable sensualité, ce qui ne l'empêche pas d'être authentiquement terrifiante. La bande son est, quand à elle, presque un personnage à part entière puisqu'elle est d'une efficacité à toutes épreuve notamment dans la scène où Brett (le génial Harry Dean Stanton) part à la recherche du chat de l'équipage. C'est dans l'écho d'une pulsation cardiaque particulièrement angoissante que l'on suit le personnage jusqu'à sa tragique destinée.


Une succession de suites et d'avatars qui prouvent que l'œuvre de Ridley Scott est indétrônable


Le film ayant obtenu un énorme succès, il connut plusieurs suites dont le troisième épisode, réalisé par l'excellent David Fincher ("Seven") et le quatrième par le français Jean-Pierre Jeunet ("Le bunker de la dernière rafale", "Le fabuleux destin d'Amélie Poulain"). Les italiens s'emparèrent du scénario pour pondre une série de plagiats tous aussi mauvais les uns que les autres ("Contaminations", "La Galaxie De La Terreur", "Alien 2, On Earth"). Le film de Ridley Scott fut scénarisé par Dan O Bannon (réalisateur du petit mais drôlissime "Retour des morts-vivants"). La créature fut quand à elle créée par le peintre Giger. Dernière anecdote, l'idée du film n'est pas tout à fait une invention purement originale puisqu'elle semble avoir été inspirée par le "planète des vampires" du grand cinéaste italien Mario Bava...
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